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<head><title>La compagnie d’aventuriers des Pieds Jaloux</title>
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<div class="maketitle">
<h2 class="titleHead">La compagnie d’aventuriers des Pieds Jaloux</h2>
<div class="author" ></div><br />
<div class="date" ></div>
</div>... Ou une histoire qui n’a ni queue, ni t�te, mais parce que.
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<img
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" class="par-math-display" ></center>
<!--l. 1--><p class="nopar" >
<!--l. 3--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">S</span><span
class="ecti-1095">�l</span><span
class="ecti-1095">�ne</span>
<!--l. 5--><p class="indent" > Tenant � la main un bougeoir, elle s’avan�a dans l’immense pi�ce,
�clair�e uniquement par quelques fentes de lumi�re sur les murs et la lueur
de sa bougie. Elle portait une longue robe de couleur cr�me, aux longues
manches et lac�e sur le devant, avec des liser�s dor�s. Ses cheveux
longs �taient soigneusement attach�s en deux nattes, entrelac�es de
rubans.
<!--l. 7--><p class="indent" > Elle sourit. Sa gouvernante ne supportait ni la poussi�re, ni les
araign�es, ni m�me les rats qu’on y trouvait parfois<span class="frenchb-thinspace"> </span>; et S�l�ne �tait ravie
de s’en d�barrasser pour quelques heures. Les greniers du ch�teau n’avaient
pas �t� rang�s ou nettoy�s depuis des g�n�rations, et on y trouvait de tout,
vieilles armes, tableaux, ustensiles divers, ... tout ce qui n’avait pas �t�
consid�r� comme ayant suffisamment de valeur pour �tre stock� dans la
salle du tr�sor.
<!--l. 9--><p class="indent" > Et il y avait des livres. Des tas de livres, oubli�s et d�laiss�s.
Comment pouvaient-ils ignorer ainsi leur valeur<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Son p�re �tait
assez occup� avec les affaires du fief dont il �tait le seigneur. Ses
deux parents avaient fait en sorte qu’elle soit �duqu�e comme une
future noble, d�licate, douce, attentionn�e, soumise. Ils n’avaient pas
retenu sa passion pour la lecture, se disant qu’au fond, en lisant, elle
n’ab�merait pas ses mains d�licates au travail, et ne noircirait pas son teint
p�le au soleil. Et puis, elle aurait de la conversation avec son futur
�poux.
<!--l. 11--><p class="indent" > Elle soupira. Elle savait que ses parents esp�raient la marier, plus tard, �
un riche seigneur voisin, pour gagner leur soutien et protection, et cette id�e
ne l’enchantait gu�re. Mais que pouvait-elle faire d’autre<span class="frenchb-thinspace"> </span>? S’�vader dans
ces vieux livres, et r�ver, seule, dans ce grenier poussi�reux. Elle avait
quatorze ans, et cela faisait presque un an qu’elle venait r�guli�rement lire
ici.
<!--l. 13--><p class="indent" > Elle �tait arriv�e devant l’une des vieilles armoires � moiti� rong�es par
les termites. Le dernier livre qu’elle avait lu parlait de plantes m�dicinales
–qu’elle ne connaissait que de nom et de description, le livre �tant d�pourvu
d’images–, celui d’avant �tait un journal de bord d’un grand tacticien
militaire, celui d’encore avant racontait une histoire de chevalerie, et le
pr�c�dent �tait un r�cit historique d’une grande bataille entre les elfes... Il y
avait de tout, dans le d�sordre.
<!--l. 15--><p class="indent" > Alors qu’elle faisait un inventaire des livres d�j� lus, l’�tag�re de
l’armoire qui les maintenait s’effondra brusquement. Elle sursauta et la
flamme de la bougie vacilla. Si l’armoire s’�tait �cras�e sur elle... Mais �
part un tas de livres par terre, rien de grave ne s’�tait pass�. C’est
alors qu’elle aper�ut, sur le fond de l’armoire, l� o� se trouvaient les
livres quelques secondes plus t�t, un panneau de bois, comme si
l’armoire avait �t� r�par�e. Elle posa la bougie par terre, et tendit la
main. En fait, ce panneau avait �t� rajout�... pour cacher quelque
chose<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 17--><p class="indent" > Le cœur battant, elle chercha � soulever le panneau de bois, et apr�s
quelques minutes d’effort, y parvint. Derri�re, il y avait un autre livre. Plus
grand, avec une reliure en cuir tr�s �pais, et aux feuilles encore plus jaunies
que les autres. Tremblante, elle le saisit, et s’assit � c�t� de la bougie pour
l’ouvrir. L’�criture, tr�s ancienne, �tait difficile � d�chiffrer, mais elle
parvint � lire les quelques premi�res pages. La peur la saisit. C’�tait un livre
de magie<span class="frenchb-thinspace"> </span>!
<!--l. 19--><p class="indent" > La magie �tait une chose tr�s dangereuse, disait-on. Les sorciers,
pour la pratiquer, concluaient de terribles pactes en vendant leur
�me � des divinit�s mal�fiques. Pour s’en prot�ger, on les chassait,
les torturait et parfois, on les br�lait vifs. Un frisson la traversa.
Ranger ce livre maudit<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Le br�ler<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Le ramener � ses parents<span class="frenchb-thinspace"> </span>? ... Le
lire<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 21--><p class="indent" > Y avait-il un risque � simplement le lire<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Avait-elle d�j� perdu son
�me en l’ouvrant<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Si c’�tait le cas, peut-�tre �tait-ce d�j� trop
tard...
<!--l. 23--><p class="indent" > Elle regarda autour d’elle, v�rifiant une fois de plus qu’elle �tait seule, et
avec un sentiment d’excitation coupable, se mit � lire.
<!--l. 25--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Silw</span><span
class="ecti-1095">�</span>
<!--l. 27--><p class="indent" > La fl�che venait de rater une fois de plus sa cible. Elle soupira.<br
class="newline" />— Encore rat�...<br
class="newline" />— Un peu moins que la derni�re fois, pourtant. Tu n’es pas si loin<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Elle regarda son fr�re, qui s’entra�nait � c�t�. Il aimait la railler �
chaque fois qu’elle s’entra�nait –avec un succ�s toujours mitig�– �
l’arc.<br
class="newline" />— Ouais, bien s�r. Avec un peu de chance, je pourrai tuer l’ennemi qui se
marre � cinq m�tres, tu veux dire<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Par exemple, proposa-t-il en riant. Ou alors tu attends qu’il te fonce
dessus, et tu l’atteins � bout portant.<br
class="newline" />Elle pivota vers lui, tendant son arc et armant une fl�che imaginaire, avec
un petit air de d�fi.<br
class="newline" />— M�fie-toi, je pourrais le confondre avec toi<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Elle l�cha la fl�che imaginaire, qu’il fit mine d’esquiver de mani�re
spectaculaire. Puis elle prit son arc � une extr�mit�, et lui fit faire un grand
arc de cercle pour emp�cher son fr�re d’avancer vers elle. Sur le retour, il
utilisa le sien pour bloquer son mouvement et tenta de passer sous sa garde.
Elle pivota autour du point de contact, et laissa glisser son arme contre
la sienne, de fa�on � se retrouver au contact de son fr�re. De la
main gauche, elle d�gaina une dague imaginaire qu’elle pla�a sur sa
gorge.<br
class="newline" />— Ah, ah<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />— Les enfants, qu’est-ce que vous faites l�<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />La voix de leur m�re venait de r�sonner. Instantan�ment, ils se s�par�rent,
et r�pondirent en regardant leurs pieds nus.<br
class="newline" />— On s’entra�ne.<br
class="newline" />— Je vois �a. Silw�, tu peux venir avec nous s’il te pla�t<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Surprise, la jeune elfe leva les yeux. Sa m�re �tait accompagn� d’un homme
qu’elle ne connaissait pas. Il portait la longue tunique vert fonc�, le
pantalon blanc et les bottes habituellement r�serv�s aux soldats –c’�tait
�galement le cas de sa m�re– mais les broderies dor�es indiquaient qu’il
s’agissait vraisemblablement de quelqu’un d’important. Elle nota qu’�
sa ceinture pendait une longue �p�e, comme celles qu’utilisent les
humains, enfin c’�tait ce qu’on lui avait dit. Elle n’en avait jamais
vue en vrai jusqu’alors. L’homme sembla noter son regard supris,
et lui adressa un sourire bienveillant. Ses longs cheveux blancs et
son air sage semblaient t�moigner d’un �ge avanc� et d’une grande
sagesse.
<!--l. 43--><p class="indent" > Lui et sa m�re la men�rent, d’�chelle de corde en passerelle, pr�s du
palais du roi, dans un b�timent de taille moyenne, puis dans ce qui
ressemblait � une salle d’entra�nement.<br
class="newline" />— Ta m�re m’a dit que tu voulais devenir soldat, comme elle<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui. Mais je ne suis pas dou�e � l’arc... r�pondit-elle timidement.<br
class="newline" />Il lui sourit, et jeta un œil � sa m�re, � quelques pas de l�.<br
class="newline" />— Il est de toutes fa�ons difficile d’�tre aussi bonne arch�re qu’elle. Mais
peut-�tre serais tu plus � l’aise avec autre chose<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il la regarda intens�ment pendant quelques secondes, comme s’il
l’�valuait.<br
class="newline" />— Quel �ge as-tu<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Douze ans.<br
class="newline" />Il lui tourna le dos, et alla chercher une �p�e en bois.<br
class="newline" />— Essaie �a.<br
class="newline" />Elle prit l’arme, la soupesa, et h�sita.<br
class="newline" />— Essayer, comment<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Comme �a.<br
class="newline" />L’homme avait saisi une seconde �p�e en bois, et s’�tait pr�cipit� sur elle.
Surprise, fit un pas de c�t�, et tenta de d�vier l’�p�e d’un coup de la sienne.
M�me en bois, l’�p�e �tait un peu lourde... L’homme attaqua de nouveau,
elle fl�chit l�g�rement les genoux et pla�a son �p�e pour tenter d’encaisser
un choc qui ne vint pas... L’homme s’�tait arr�t� � quelques centim�tres
d’elle.<br
class="newline" />— Pas mal. Je pense que c’est bon.<br
class="newline" />— Qu’est-ce que vous voulez dire<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il s’assit, et fit signe � la jeune fille et � sa m�re de faire de m�me.<br
class="newline" />— L’arc et la dague sont les armes par excellence des elfes, par tradition.
Mais ce ne sont pas les seules. Nous avons aussi besoin, pour nous prot�ger,
de gens sachant se battre avec d’autres armes, comme l’�p�e, tr�s � la mode
chez les humains, la lance, la hache, le fl�au ou m�me la magie. Je suis le
dirigeant de ces escouades sp�cifiques. Ta m�re m’a parl� de tes difficult�s �
l’arc...<br
class="newline" />Sa m�re continua, alors qu’elle rougissait.<br
class="newline" />— Malgr� cela, tu sais te battre et as l’air d’y prendre de l’int�r�t. C’est
pourquoi j’en ai parl� autour de moi...<br
class="newline" />Elle souriait. Depuis le temps qu’elle �tait dans le groupe d’archers d’�lite
de la garde royale, elle connaissait beaucoup de monde. Le vieil homme
reprit en souriant.<br
class="newline" />— � partir de maintenant, tu viendras t’entra�ner r�guli�rement � l’�p�e,
ici. Cela te convient-t-il<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle leva les yeux vers lui et hocha la t�te.
<!--l. 68--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Uhr</span>
<!--l. 70--><p class="indent" > Les trois adolescents couraient dans la plaine. Ils �taient pieds nus,
v�tus de pagnes grossiers en cuir, et avaient chacun, gliss�e dans une
ceinture, une �p�e plus ou moins rouill�e, qui semblait avoir subi de
nombreux coups. Leurs cheveux boucl�s �taient sales et en bataille,
et bien qu’ils ne soient pas aussi grands et forts que les barbares
adultes de leur clan, leur musculature aurait pu impressioner plus d’un
citadin.
<!--l. 72--><p class="indent" > Uhr, le plus jeune, �tait en t�te. Lorsqu’ils arriv�rent au sommet de la
petite colline, il leur fit signe de s’arr�ter.<br
class="newline" />— L�, regardez<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Devant eux s’�talait un troupeau d’aurochs sauvages, qui broutaient
paisiblement.<br
class="newline" />— Pourquoi tu t’arr�tes<span class="frenchb-thinspace"> </span>? demanda sa sœur en lui donnant un coup de
poing dans les c�tes.<br
class="newline" />— Bah, on peut peut-�tre...<br
class="newline" />— On peut juste attaquer. Tu r�fl�chis trop, Uhr, ajouta son fr�re. On y
va<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Les deux jeunes gens tir�rent leurs �p�es, et commenc�rent � d�valer la
colline en direction des aurochs.
<!--l. 80--><p class="indent" > Uhr haussa les �paules. Il savait qu’il r�fl�chissait un peu trop et ne
tapait pas assez. Pourtant l’autre jour son h�sitation � attaquer un fauve �
dents longues des plaines –pire, une m�re prot�geant ses petits– leur avaient
probablement sauv� la vie. Mais il n’avait pas besoin de se poser autant de
questions. Manger, boire, s’entra�ner au combat, chasser, combattre, son
quotidien �tait pourtant simple, et laissait peu de place � la r�flexion.
Alors pourquoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Quel destin fac�tieux, quel dieu blagueur avait
d�cid� de lui donner ce que sa famille consid�rait comme le pire des
d�faut<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il r�alisa qu’il �tait encore en train de se poser une question
inutile, d�gaina son �p�e, et courut � la suite de son fr�re et de sa
sœur.
<!--l. 86--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Irdann</span>
<!--l. 88--><p class="indent" > Cela faisait quelques heures qu’ils marchaient ensemble en silence. Le
pr�tre qui l’accompagnait semblait de bonne humeur, mais il n’osait pas le
questionner. Il n’avait que onze ans, apr�s tout, et s’il �tait fils de duc, il
savait qu’il ne fallait pas f�cher un pr�tre de la d�esse. On disait que leurs
pouvoirs �taient grands, et qu’ils pouvaient –entre autres– foudroyer
quelqu’un sur place en une parole.
<!--l. 90--><p class="indent" > L’homme en question, qui devait avoir une quarantaine d’ann�es, portait
une robe gris clair, munie d’une capuche qu’il avait laiss�e dans son dos. Un
pendentif d’or ornait sa poitrine, et une �p�e pendait � sa ceinture de cuir.
Il marchait en s’aidant d’un long b�ton de bois et portait sur le dos un large
sac en cuir, visiblement rempli.
<!--l. 92--><p class="noindent" >— Hm... pr�tre Khil<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Le pr�tre consid�ra un instant le jeune gar�on, v�tu d’une tunique rouge,
d’un pantalon brun, et d’une paire de bottes en cuir �pais. Une longue
�p�e, presque aussi grande que lui, �tait attach�e dans son dos. Il lui
sourit.<br
class="newline" />— Tu peux m’appeler simplement Khil. Vas-y, je t’�coute Irdann.<br
class="newline" />— Qu’est-ce que je vais devoir faire, pour devenir paladin<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— H� bien, tu auras une �ducation m�lant celle d’un pr�tre et celle d’un
soldat. Tu deviendras donc un chevalier, non pas au service d’un seigneur ou
d’une dame, mais au service de la d�esse.<br
class="newline" />— �a veut dire que je vais apprendre les enchantements secrets de
Melna<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Cela d�pendra surtout de si la d�esse t’en juge digne, n’oublie pas...
<br
class="newline" />Il resta silencieux quelques instants. Tout ne serait pas simple...<br
class="newline" />— C’est vous qui allez m’apprendre � me battre � l’�p�e<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Probablement. As-tu d�j� appris un peu<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui, avec mes deux fr�res. Comme le veut la tradition, mon fr�re a�n�
est l’h�ritier du duc mon p�re, et le second est un futur grand g�n�ral. Et
moi...<br
class="newline" />— Tu dois venir au service du temple, je connais. Mais donc tu sais d�j� un
peu utiliser une arme... Tiens attrape �a.<br
class="newline" />Il lui lan�a son b�ton de marche, qu’il saisit au vol. Le pr�tre d�gaina
ensuite son �p�e.<br
class="newline" />— Vas-y, attaque-moi.<br
class="newline" />Irdann h�sita un instant. Mais apr�s tout, c’�tait lui qui lui avait demand�,
n’est-ce pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 108--><p class="indent" > Il fl�chit l�g�rement les genoux, et affermissant sa prise � deux mains
sur le b�ton, porta un premier coup, que Khil para habilement. Puis il saisit
son arme de fortune d’un bras, et porta plusieurs coups lat�raux que son
adversaire d�via du plat de sa lame. Il parut surpris.<br
class="newline" />— Mais... tu es gaucher<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Irdann rougit et changea rapidement son arme de main, encha�nant
plusieurs attaques aussi rapidement qu’il put. Apr�s avoir par� avec une
facilit� d�concertante, le pr�tre fit un pas en arri�re et lui fit signe de
s’arr�ter.<br
class="newline" />— Tu t’en sors plut�t bien.<br
class="newline" />Il baissa les yeux, lui rendant son b�ton.<br
class="newline" />— Merci.<br
class="newline" />— Tu sais donc tenir une �p�e des deux mains...<br
class="newline" />Il rougit � nouveau, g�n�.<br
class="newline" />— ... C’est tr�s int�ressant<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />— Ah<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Mes fr�res me disent que se battre de la main gauche, ce n’�tait
pas digne d’un chevalier, alors...<br
class="newline" />Il �clata de rire.<br
class="newline" />— Ne les �coute pas. La d�esse se moque de savoir de quel bras tu te bats,
tant que c’est pour la bonne cause. Et qui sait, changer d’arme rapidement
pourrait �tre un atout en combat, non<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il leva les yeux, et osa sourire timidement.<br
class="newline" />— Vous avez d�j� combattu des vrais adversaires<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il lui fit un clin d’œil.<br
class="newline" />— Oui. Depuis que je suis pr�tre, j’ai beaucoup voyag�, et j’ai v�cu de
nombreuses aventures...
<!--l. 125--><p class="indent" > Irdann regarda � nouveau le pr�tre. La robe qu’il portait dissimulait
assez efficacement une certaine carrure, et son rythme de marche
montrait son endurance. Le b�ton de marche �tait-il l� pour faire
semblant d’�tre inoffensif<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il devait �tre redoutable sur un champ
de bataille, ou ailleurs... L’avoir comme ma�tre d’armes serait un
honneur.<br
class="newline" />— Mais tu sais, je ne suis pas le meilleur �p�iste qui soit, reprit Khil,
comme s’il devinait ses pens�es. D’ailleurs, il me semble que la tradition
veut que les futurs paladins fassent une partie de leur apprentissage en
dehors du temple.<br
class="newline" />— Ah<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Comment<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je ne sais pas. Tu es le premier depuis longtemps, mon gar�on<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Nous
verrons bien.<br
class="newline" />Il lui sourit, et ils se remirent en route. Le chemin �tait long jusqu’� la
capitale.
<!--l. 132--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">S</span><span
class="ecti-1095">�l</span><span
class="ecti-1095">�ne</span>
<!--l. 134--><p class="indent" > Debout devant elle, ils tremblaient de tous leurs membres. Surprise<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
Col�re<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Peur<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Incr�dulit�<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Panique<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Probablement un peu de tout
cela. Le grenier dans lequel elle les avait amen�s �tait dans un sale �tat,
mais c’�tait le seul endroit o� elle pouvait pratiquer la magie sans �tre vue
ou entendue...
<!--l. 136--><p class="indent" > Suivant pas � pas les conseils du livre, elle avait d�couvert qu’elle avait
un certain don pour cela. Avec de la pers�v�rance, elle avait r�ussi �
lancer son premier sort, para�t-il le plus simple, une boule de feu, et
elle avait manqu� de br�ler la biblioth�que. Le livre disait aussi
qu’il �tait tr�s difficile de contr�ler sa propre �nergie magique... De
nombreuses traces noires couvraient d�sormais les murs et le sol
du grenier, et un certain nombre de vieux meubles en bois avaient
br�l�.
<!--l. 139--><p class="indent" > � ses pieds, deux ou trois vieilles planches finissaient de se consumer en
cr�pitant. Ses parents n’avaient pas boug�, toujours sous le choc apr�s sa
d�monstration spectaculaire. <br
class="newline" />— Ce n’est pas possible...<br
class="newline" />— Notre propre fille, une sorci�re...<br
class="newline" />Elle se tenait entre eux et la porte du grenier. Elle ne cherchait pas
particuli�rement � les emp�cher de sortir, mais elle voulait qu’ils l’�coutent
avant.<br
class="newline" />— Arr�tez avec vos histoires. Les sorciers ne sont pas mal�fiques, en tous
cas pas tous. Vous ne croyez quand m�me pas � toutes ces histoires de
d�mons<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Ils avouent tout de m�me...<br
class="newline" />Elle secoua la t�te d’un air rageur.<br
class="newline" />— Avec les tortures qu’on leur inflige<span class="frenchb-thinspace"> </span>? N’importe qui avouerait n’importe
quoi. Ne soyez pas idiots.<br
class="newline" />Elle disait ces mots en essayant de s’en persuader elle-m�me. Il y avait
quand m�me des l�gendes et r�cits parlants de sorciers maudits... Mais
peut-�tre n’�tait-ce pas le cas de tous<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Regardez-moi. Suis-je devenue un monstre en apprenant un peu de
magie<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 151--><p class="indent" > Ils l’observ�rent un moment. Elle n’avait pas vraiment chang� ces
derni�res ann�es, � part un peu grandi, mais ce n’�tait vraisemblablement
pas une histoire de magie. Pourtant... ils avaient la sensation que leur
fille leur �chappait, qu’elle n’�tait pas la jeune fille qu’ils auraient
voulu qu’elle soit, qu’elle ne pensait pas comme ils auraient voulu
qu’elle pense. Peut-�tre �tait-ce juste cela, �tre une sorci�re<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ne
pas �tre celle que les autres attendaient<span class="frenchb-thinspace"> </span>? �tait-ce mal�fique pour
autant<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 153--><p class="indent" > Elle soupira, et interrompant leurs pens�es, fit appara�tre lentement une
seconde boule de feu dans sa main gauche. Ses parents firent un pas en
arri�re, effray�s.<br
class="newline" />— �coutez, si vous comptez me d�noncer, je lance cette boule de feu par la
fen�tre. Toute la ville la verra et vous serez aussi emb�t�s que moi vis � vis
de votre peuple.<br
class="newline" />La boule de feu grandissait, se nourrissant de sa col�re et de sa frustration.
Elle sentait sa chaleur de plus en plus intense, alors que la panique
grandissait dans les yeux de ses parents. Elle tourna la t�te vers la flamme.
Reprendre le contr�le, ne pas la laisser grandir trop, respirer...<br
class="newline" />— Mais si vous me laissez tranquille avec ma magie, alors personne � part
vous ne le saura.<br
class="newline" />La taille de la flamme diminua lentement, � mesure qu’elle se calmait.<br
class="newline" />— Si vous me laissez �tudier la magie comme je le souhaite, je ferai tout
pour garder sauf l’honneur de la famille. Je ferai tout ce que vous voudrez.
J’�pouserai qui vous voudrez. S’il vous pla�t...<br
class="newline" />Un silence passa, durant lequel ils sembl�rent consid�rer cette id�e.<br
class="newline" />— Aaa�e<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />La boule de feu, m�me apr�s avoir consid�rablement d�cru en taille et en
�nergie, avait fini par se poser sur sa main. Elle secoua son bras en se
mordant les l�vres. Son p�re fit un pas en avant, et lui parla d’une voix
–presque– apais�e.<br
class="newline" />— Montre ton bras<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Sa main et son poignets �taient rouges, et des cloques commen�aient � se
former.<br
class="newline" />— Je peux... m’en occuper.<br
class="newline" />Elle se concentra, malgr� la douleur vive. Il y avait cet autre sort qu’elle
avait appris. Un sort pour soigner... Il �tait, d’apr�s le livre, plus complexe
que celui du feu, et elle avait beaucoup moins d’occasions de le pratiquer.
Mais les quelques fois o� elle avait essay�, le r�sultat n’avait pas �t� si
mauvais. Elle prit une grande inspiration et ouvrit les yeux. La douleur avait
consid�rablement diminu�, et les cloques avaient disparu, m�me si
la peau restait un peu rouge et sensible. Elle l�cha un soupir de
soulagement.<br
class="newline" />— Vous voyez, la magie peut �tre b�n�fique, aussi.<br
class="newline" />Son p�re observa tour � tour sa main, son visage, et celui de son �pouse, qui
semblait r�fl�chir, un peu en retrait. Celle-ci finit par s’approcher
�galement.<br
class="newline" />— J’ai peut-�tre une id�e...
<!--l. 171--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Farl</span>
<!--l. 173--><p class="indent" > Farl prit une grande inspiration et commen�a son ascension. Le
b�timent �tait ancien, et tr�s haut, et les interstices entre les pierres
formaient d’excellentes prises pour ses mains et ses pieds. Patiemment,
silencieusement, il gravit les �tages. V�tu de sombre de la t�te aux pieds, il
�tait quasiment invisible dans la nuit. Ce n’�tait pas la premi�re fois qu’il
s’adonnait � ce genre de sport, Ni la derni�re d’ailleurs. � condition de ne
pas tomber. �cartant cette pens�e, il se rem�mora ces derni�res ann�es, si
bien remplies...
<!--l. 182--><p class="indent" > Il �tait n� dans une famille tr�s pauvre de la capitale, et avait �t� laiss�
plus ou moins � l’abandon, sa pauvre m�re n’ayant pas les moyens de
le nourrir. Il vivotait de chapardages et de mendicit�. Il �tait tr�s
dou�, et avec sa petite taille et sa rapidit�, il arrivait toujours �
�chapper aux ennuis. Mais un jour, il avait fini par se faire prendre.
� sa grande surprise, l’homme qui l’avait saisi la main dans le sac
ne l’avait pas d�nonc�. � la place, cet �trange personnage, grand,
mince et aux cheveux blancs s’�tait pr�sent� comme un assassin
professionnel, et lui avait propos� de devenir son apprenti. Il avait alors sept
ans.
<!--l. 192--><p class="indent" > Depuis –il esquissa un sourire � l’�vocation de ce souvenir–, sa vie avait
radicalement chang�. D�j� parce qu’il �tait log�, nourri et habill�
par son ma�tre, mais surtout parce qu’il passait ses journ�es –et
surtout ses nuits– � apprendre les ficelles du m�tier. D�placement
furtif, combat avec une ou deux dagues, utilisation des divers dards et
stylets de contact ou de lancer, poisons et antidotes, et comme ce soir,
escalade. La ville �tait devenue un grand terrain d’entra�nement et de
jeu.
<!--l. 201--><p class="indent" > Arriv� au troisi�me �tage du b�timent, il regarda discr�tement si
quelqu’un se trouvait � la fen�tre, et constatant que non, il s’assit sur le
rebord pour souffler quelques instants. Il aper�ut, en bas, quelques passants
– f�tards, malfaiteurs, gardes<span class="frenchb-thinspace"> </span>? – marcher dans la rue sans le voir. Il n’�tait
qu’une ombre parmi les ombres de la nuit.
<!--l. 208--><p class="indent" > Il prit une grande inspiration et se releva. Ses doigts trouv�rent
naturellement une nouvelle prise sur le mur, et il reprit son ascension.
L’escalade de ce b�timent n’�tait pas particuli�rement difficile, avec toutes
ces pierres moyennement ajust�es, mais restait longue et r�p�titive. Il
commen�ait � sentir la fatigue dans ses avant-bras. Il parvint au cinqui�me
�tage, � partir duquel les briques �taient plus serr�es. Il ne lui en restait
qu’un � grimper, et sur le toit, la goutti�re ferait un point d’attache parfait.
Il sortit de son petit sac � dos en cuir une corde et un grappin, qu’il
lan�a avec habilet� jusqu’au rebord du toit. Apr�s avoir v�rifi� la
solidit� de son attache, il grimpa lestement jusqu’au sommet du
b�timent.
<!--l. 220--><p class="indent" > Assis sur le fa�te du toit, son ma�tre l’attendait en souriant.
�tait-il mont� par l’escalier<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Avait-il escalad�<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Plus rien ne le
suprenait venant de lui de toutes fa�ons. Il regarda une montre �
gousset.<br
class="newline" />— Bravo, tu as mis moins de temps que pr�vu.<br
class="newline" />Un peu essouffl�, Farl sourit en rangeant son grappin et sa corde.<br
class="newline" />— Je t’ai entendu faire un peu de bruit, en revanche, mais �a reste tout �
fait honorable.<br
class="newline" />Il soupira. � Tout � fait honorable �, c’�tait un sacr� compliment venant de
lui. M�me si... ce n’�tait pas parfait. Jamais parfait avec lui. Son ma�tre se
leva et s’�tira calmement.<br
class="newline" />— Il ne te manque pas grand chose pour valider ta formation. Une premi�re
mission.<br
class="newline" />Farl le regarda, les yeux brillants.
<!--l. 231--><p class="noindent" > <span
class="ecti-1095">Zach</span>
<!--l. 233--><p class="noindent" >— Bon, allez, on fait une pause<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />� ces mots b�nis, Zach se releva avec un soupir de soulagement, ruisselant
de sueur. Il avait arr�t� de compter les b�ches qu’il lui restait � fendre et
celles qu’il avait d�j� d�bit�es. Il se tourna vers ses deux fr�res, qui, comme
lui, pos�rent leur hache, et se dirig�rent vers l’ombre fra�che et accueillante
d’un arbre. L’a�n� des gar�ons sortit alors un petit pichet de vin, qu’il
partagea.<br
class="newline" />— On a bien avanc�, encore quelques heures et on aura termin� je
pense.<br
class="newline" />— � part Zach, qui n’avance pas.<br
class="newline" />— H��, je te permets pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />— Je rigole, te f�che pas. T’as pas nos bras, c’est tout.<br
class="newline" />— En fait, t’es juste jaloux de Zach.<br
class="newline" />— Quoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Son fr�re a�n� sourit.<br
class="newline" />— Parce que c’est avec lui que la fille du cordonnier a bien voulu danser
l’autre soir.<br
class="newline" />— C’est avec son petit air d’elfe, �a pla�t aux filles. Mais �a n’aide pas �
couper du bois.
<!--l. 246--><p class="indent" > Zach sourit et haussa les �paules, puis reprit une gorg�e rafra�chissante,
se rem�morant la soir�e de la veille.
<!--l. 248--><p class="indent" > C’est vrai qu’il �tait un peu plus petit et nettement plus fr�le que ses
deux fr�res, et leur ressemblait tr�s peu. Tous deux �taient grands, roux,
aux �paules tr�s larges, travaill�es par toutes ces ann�es � couper des
arbres, comme leur p�re. Et pour cause<span class="frenchb-thinspace"> </span>! On l’avait trouv�, b�b�, sur le pas
d’une porte du village. Un couple de b�cherons du village l’avaient alors
adopt� et �lev� comme leur propre fils, mais ils ignoraient tout de ses
v�ritables origines. Il se demandait parfois ce qu’aurait �t� sa vie s’il n’avait
pas �t� d�pos� l�, mais ne regrettait pas le moins du monde celle qu’il
vivait.
<!--l. 251--><p class="indent" > Alors qu’ils s’appr�taient � se remettre au travail, ils aper�urent un
carosse, richement d�cor�, escort� par trois soldats � cheval. Les soldats
portaient l’enseigne de leur seigneur, sire Assem, et se dirigaient vers la
for�t. Apercevant les trois adolescents, tous trois v�tus d’une simple
tunique, d’un pantalon et de vieilles bottes, ils se dirig�rent vers eux. Ils
�taient impressionnants, avec leurs cottes de mailles, leur casque et leurs
�p�es et boucliers au c�t�.<br
class="newline" />— Bonsoir jeunes gens. Nous cherchons un endroit o� passer la nuit, pour
nous et la damoiselle que nous escortons.<br
class="newline" />Ils firent un geste de la t�te vers le carosse, dont les �pais rideaux de velours
masquaient l’int�rieur.<br
class="newline" />— Vous pouvez vous rendre � la taverne du village, o� vous trouverez de
quoi souper et dormir.<br
class="newline" />— Merci. L’un d’entre vous peut-il nous y conduire<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 258--><p class="indent" > Zach se porta volontaire, et guida le convoi jusque dans le bourg. En
chemin, l’un des soldats l’interrogea<span class="frenchb-nbsp"> </span>:<br
class="newline" />— Dis moi, mon gar�on, nous cherchons quelqu’un pour nous guider �
travers la for�t, demain. Sais-tu si quelqu’un peut le faire<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 261--><p class="indent" > Il r�fl�chit quelques instants.<br
class="newline" />— Il n’y a personne qui fasse ce m�tier en ville. En revanche, beaucoup de
jeunes du village, dont mes fr�res et moi, connaissons tr�s bien cette
for�t.<br
class="newline" />— Vous �tes les enfants du b�cheron, c’est �a<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui.<br
class="newline" />— Quel �ge as-tu<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Seize ans.<br
class="newline" />— Tu me sembles assez grand pour cette t�che. Qu’en dis-tu<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 269--><p class="indent" > Zach se sentit flatt� de cette confiance, et h�sita presque � accepter.
�tait-il � la hauteur<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Puis � la r�flexion, il ne voyait pas d’autre guide
possible. Il �tait, de ses fr�res, celui qui connaissait r�ellement le
mieux la for�t, puisqu’il y passait une bonne partie de son temps
libre.<br
class="newline" />— D’accord.
<!--l. 273--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Aldariel</span>
<!--l. 275--><p class="noindent" >— Oui, Aldariel, tu voulais me voir<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />La jeune elfe fit quelques pas dans la salle du tr�ne. Elle �tait petite et
fr�le, v�tue d’une robe mi-longue blanche, pieds nus, un diad�me
argent� retenant ses longs cheveux noirs emm�l�s. Cet endroit �tait si
impressionnant. Et son p�re avait l’air si imposant quand il �tait assis sur
son tr�ne<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Et elle se sentait toujours si petite face � lui dans ces
conditions... Sentant sa g�ne, et constatant qu’il �tait seul avec elle,
il �clata de rire et vint prendre la petite fille de dix ans dans ses
bras.<br
class="newline" />— Papa, je voudrais apprendre � me battre.<br
class="newline" />Il fron�a les sourcils.<br
class="newline" />— Pourquoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il y a bien plus int�ressant � faire, pourtant<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Quelque chose
te manque-t-il<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle soupira.<br
class="newline" />— Je m’ennuie. J’ai d�j� appris � m’occuper des poneys du clan, � soigner
les animaux et les autres elfes, je connais les secrets du tissage et du pain
elfique, et j’ai aussi appris � jouer de la harpe.<br
class="newline" />— Tu y parviens � merveille d’ailleurs, surtout le soin. Tu surpasserais
presque ton ma�tre<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />— Oui, et... c’est pour �a que j’ai envie de faire autre chose.<br
class="newline" />Il r�fl�chit. Ses grands fr�res et sœurs avaient fini par s’int�resser � la
politique du clan, ce qui en compliquait nettement la gestion, tout en cr�ant
certaines tensions entre eux. Finalement, il valait peut-�tre mieux qu’elle
s’entra�ne au combat. De toutes fa�ons, elle ne verrait probablement aucun
champ de bataille de sa vie –ou alors que de loin–, du moins il l’esp�rait,
alors que risquait-il<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Papa, n’es-tu pas toi m�me un excellent archer<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il soupira.<br
class="newline" />— C’est vrai. Du moins, c’�tait vrai jusqu’� il n’y a pas si longtemps...
J’allais m�me disputer des tournois chez les humains.<br
class="newline" />Chez les humains... On disait tant de choses des humains<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Elle ne savait
m�me pas que son p�re y �tait d�j� all�. Apercevant son air r�veur, son
p�re interrompit ses pens�es. Il valait mieux la concentrer sur le tir � l’arc
plut�t que sur les humains, c’�tait nettement moins dangereux. — Soit. Je
t’enverrai d�s demain un professeur de tir � l’arc<span class="frenchb-nbsp"> </span>: une des meilleures
arch�res de mon escouade d’�lite.<br
class="newline" />Le visage d’Aldariel s’illumina.
<!--l. 293--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Samantha</span>
<!--l. 295--><p class="indent" > La grande salle du temple �tait immense, et tous les habitants du temple
–pr�tres et pr�tresses, novices, et m�me les serviteurs– y �taient pr�sents. Il
y avait m�me un grand nombre de fid�les venus de la ville. Elle ne l’avait
jamais vu aussi pleine. Ils �taient tous l� pour elle... C’�tait excitant, et
presque un peu effrayant.
<!--l. 297--><p class="indent" > Le pr�tre devant elle se mit � r�citer les paroles rituelles d’intronisation.
Dix-sept ans, et elle �tait intronis�e Grande Pr�tresse... D�j�<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Mais cette
ascension n’avait pas �t� sans emb�ches. Lorsqu’elle avait huit ans, ses
parents –de modestes marchands– avaient �t� tu�s lors d’un raid barbare.
Trop petite pour �tre remarqu�e, elle avait �t� �pargn�e. Les quelques
survivants de son village, d�j� trop d�munis pour s’occuper d’une bouche
de plus � nourrir, l’avaient confi�e � un pr�tre itin�rant de Melna,
qui avait emmen� la pauvre orpheline au temple de la ville la plus
proche.
<!--l. 300--><p class="indent" > Une fois la douleur et les difficult�s d’adaptation pass�es, Samantha
avait r�v�l� une forte connexion avec la d�esse, et avait souhait�
devenir pr�tresse, puis grande pr�tresse. Elle avait, petit � petit,
appris les enchantements sacr�s les plus difficiles, ma�tris� les secrets
divins les plus cach�s, et surtout �cart� avec subtilit� toutes les
concurrentes.
<!--l. 302--><p class="indent" > Et elle avait r�ussi. Elle se tenait droite, dans la lumi�re qui tombait de
la large ouverture du toit, au centre de la salle. Elle portait, pour la
premi�re fois, la tenue des grandes pr�tresses. Sa robe �tait longue, d’un
rouge vif, sans manches, aux larges bordures dor�es, et mettait tr�s bien
–peut-�tre un peu trop<span class="frenchb-thinspace"> </span>?– en valeur sa f�minit�. Elle portait un large
collier d’or couvrant jusque ses �paules, ainsi que plusieurs bracelets,
aux poignets, bras et chevilles. Elle �tait fi�re de tout ce chemin
accompli.
<!--l. 305--><p class="indent" > Le pr�tre avait termin� son incantation, et s’�carta en se tournant vers
elle. Les quelques murmures qu’elle avait entendus de la foule se turent.
C’�tait son tour. Elle prit une grande inspiration, et fixa le sol, sous ses
pieds nus. Sous l’ouverture du toit, l� o� elle se trouvait, le marbre du
temple s’arr�tait pour laisser place � un large cercle de terre meuble. Elle
rejeta ses longs cheveux en arri�re, ferma les yeux et entonna une douce
m�lop�e.
<!--l. 307--><p class="indent" > Sous les yeux �merveill�s du public, une pousse sortit de la terre,
puis se mit � grandir, lentement. Samantha leva lentement les bras,
et fit quelques mouvements, les yeux toujours clos, comme si elle
guidait les jeunes branches vers la lumi�re. Lorsque l’arbre l’eut
d�pass�e de plusieurs t�tes, elle s’arr�ta et ouvrit enfin les yeux pour le
regarder.
<!--l. 309--><p class="indent" > Un tonnerre d’applaudissement retentit. Cet enchantement, un des plus
difficiles � ma�triser, devait �tre r�alis� sous les yeux des t�moins pour �tre
intronis�e officiellement en tant que grande pr�tresse... Et elle avait r�ussi,
avec brio. Elle poussa un soupir de soulagement. Le pr�tre s’avan�a, tenant
entre les mains un cercle d’or qu’il d�posa sur sa t�te. Les applaudissements
redoubl�rent.
<!--l. 312--><p class="indent" > Elle �tait d�sormais Samantha, grande pr�tresse de Melna.
<!--l. 314--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Zach</span>
<!--l. 316--><p class="noindent" >— L�-bas, je vois l’or�e<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Les soldats laiss�rent �chapper une exclamation de joie. Apr�s quatre jours
dans la for�t, ils n’�taient pas m�contents de retrouver la civilisation. De
son c�t�, Zach, install� � c�t� du cocher, r�vassait. Il se demandait bien qui
�tait l’occupante du carosse, qu’il n’avait pas le droit de voir, en th�orie. En
pratique, la damoiselle ayant tout de m�me besoin de sortir de temps en
temps, il avait pu entr’apercevoir, � plusieurs reprises, une silhouette de
petite taille, couverte de la t�te aux pieds d’un long manteau bleu marine
richement orn�.
<!--l. 319--><p class="noindent" >— H�, gamin<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Sortant de sa r�verie, il tourna la t�te vers le soldat, qui lui adressa un
grand sourire.<br
class="newline" />— Tu as fait du bon boulot en nous guidant jusque l�. Tu auras bien gagn�
ta paie<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Il rougit l�g�rement.<br
class="newline" />— Merci.<br
class="newline" />— Ton chemin parall�le pour �viter le sentier embourb� �tait le bienvenu...
Nous aurions perdu beaucoup de temps � nous traverser cette partie avec le
carosse<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Il haussa les �paules en souriant.<br
class="newline" />— Nous allons parfois livrer du bois par l�, et ce n’est pas la premi�re fois
que ce chemin est inond�...<br
class="newline" />Le cocher, � c�t� de lui, lui donna un coup de coude.<br
class="newline" />— Tu sais que dans la r�gion, il y a des gens qui en font leur boulot<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui. Dans mon village, il y a le vieux Tom. Enfin, il y avait, il �tait un
peu trop �g� pour �a.<br
class="newline" />Il lui fit un clin d’œil.<br
class="newline" />— Tu devrais aller le voir, et y r�fl�chir. Tu y serais meilleur que b�cheron,
� mon avis.<br
class="newline" />Il allait r�pondre, lorsqu’un des soldat lui adressa la parole.<br
class="newline" />— On approche de midi. Il y a une taverne, dans le village o� on
arrive<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui. Sur la grand’rue, vous ne pouvez pas la rater.<br
class="newline" />— Allez, gamin, viens boire un verre avant de repartir. Je te l’offre. Tu l’as
bien m�rit�<span class="frenchb-thinspace"> </span>!
<center class="par-math-display" >
<img
src="aventuriers1x.png" alt="[
" class="par-math-display" ></center>
<!--l. 1--><p class="nopar" >
<!--l. 3--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Uhr</span>
<!--l. 5--><p class="indent" > Prisonnier<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Il �tait l�g�rement bless�, mais surtout encha�n�, et
humili�. Sa tribu venait de subir une attaque surprise d’un clan ennemi, et
ils n’avaient rien pu faire. Ceux qui n’�taient pas morts au combat avait �t�
fait prisonniers, pour �tre revendus comme esclaves. Lui et ses comparses
enrageaient. C’�tait peut-�tre encore pire que de mourir libre, l’�p�e � la
main...
<!--l. 7--><p class="indent" > Apr�s une journ�e de marche intensive, sa col�re brute s’�tait estomp�e,
contrairement � ses compagnons d’infortune, et il s’�tait mis � r�fl�chir. Il
allait se venger et venger sa famille, c’�tait s�r. Mais pour cela, il lui fallait
d’abord se lib�rer. Alors qu’ils �taient tous enferm�s dans un enclos de
fortune, comme des animaux, Uhr observa ses cha�nes. De simples
anneaux de m�tal peu travaill�s, mais tr�s �pais. Avant de s’endormir,
�puis�, il les examina longuement. L’un des anneaux, le huiti�me qui
partait de ses poignets attach�s et le reliait aux autres, semblait
un peu moins solide. Plus pr�cis�ment, il n’�tait pas parfaitement
ferm�, et permettait de laisser passer un ongle. Mais l’anneau restait
extr�mement dur. Comment pouvait-il esp�rer se lib�rer avec si
peu<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 9--><p class="indent" > Les jours qui suivirent furent tout aussi difficiles. Uhr subissait les coups
sans broncher et ne cherchait pas � se rebeller contre ses ennemis, ce qui lui
permettait d’�viter de recevoir trop de coups de fouets. Peut-�tre
pensaient-ils briser sa volont� rapidement –il �tait plus jeune et moins
costaud que beaucoup de ses compagnons–, et dans ce cas tant pis pour
eux.
<!--l. 11--><p class="indent" > Le cinqui�me jour, l’exp�dition sembla rejoignit camp nettement plus
important. Il avait du mal � compter, mais il semblait y avoir plus
d’ennemis qu’il n’avait de doigts et de doigts de pieds. Peut-�tre autant qu’il
y avait de doigts et de doigts de pieds sur tous les membres de son clan. Il
entr’aper�ut m�me celui que ses ennemis appelaient le � roi Bloupy �, le
chef de ce grand clan barbare.
<!--l. 13--><p class="indent" > Leur petit groupe rejoignit d’autres prisonniers, encha�n�s eux aussi,
dans un grand enclos. Ils �taient encore mieux gard�s que pendant le trajet,
et il se d�couragea un peu. Comment avait-il une chance de s’enfuir �
pr�sent<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Soudain il sentit une vive douleur dans son pied gauche, et se
retint de hurler. D’abord parce qu’un barbare, �a ne crie pas de douleur, et
ensuite parce que ce n’�tait pas la peine d’attirer des coups de fouet ou de
b�ton en plus.
<!--l. 15--><p class="indent" > Une fois seul, il observa l’objet qui �tait rentr� dans son pied nu. Il
s’agissait d’un clou, enfin, d’un morceau de m�tal pointu vaguement muni
d’une t�te, qui avait vraisemblablement servi � assembler les rondins de bois
en barricade autour des prisonniers. Le m�tal �tait tr�s dur... Il avait
peut-�tre une chance de s’en tirer, en fait.
<!--l. 17--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Farl</span>
<!--l. 19--><p class="indent" > Cela faisait deux jours qu’il marchait seul. Il �tait v�tu de gris sombre et
de noir, comme de coutume, avec une l�g�re armure de cuir noir sous sa
tunique pour le prot�ger en cas de combat, et avait v�rifi� plusieurs fois son
�quipement. Dagues, stylets, dards empoisonn�s � diverses substances, tout
�tait bon. Les lames �taient toutes peintes en noir, ne laissant que la pointe
et le tranchant brillants, afin d’�viter tout reflet inutile. Il avait laiss� un
peu en retrait, dans une cachette, son sac � dos, contenant de quoi survivre,
ainsi qu’un assortiment de poisons et antidotes. Il v�rifia encore une fois le
fonctionnement de chaque accessoire, ainsi que des fourreaux de poignet,
qui lui permettaient de d�gainer aussi vite que sa pens�e. Il �tait
pr�t.
<!--l. 21--><p class="indent" > Devant lui, s’�tendait le campement du roi Bloupy. Combien
�taient-ils<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Plusieurs centaines probablement. Certes, comme lui avait
expliqu� son ma�tre, ce n’�tait pas si inqui�tant aux yeux du pays, mais si
le probl�me pouvait �tre r�gl� plus simplement qu’en envoyant une
arm�e...
<!--l. 23--><p class="indent" > Il passa les quelques heures avant la nuit compl�te � observer les all�es
et venues des barbares. Il observa notamment dans un coin, un enclos ou
semblaient se d�battre des prisonniers, visiblement d’une ou deux tribus
rivales. Il nota cette information, cela pourrait faire une diversion efficace au
besoin.
<!--l. 25--><p class="indent" > Il parvint � deviner que les quatre tentes au centre du campement,
visiblement bien gard�es, devaient abriter des chefs ou sous-chefs de clan.
Mais il n’�tait pas tout � fait s�r de l’endroit o� se trouvait leur roi. Il lui
faudrait encore observer la situation, ou les tuer tous, ce qui compliquerait
nettement la t�che.
<!--l. 27--><p class="indent" > Alors que le jour diminuait encore, il distingua, parmi les prisonniers, un
jeune homme plus calme, plus pos�. Au lieu de se d�battre ou de s’effondrer
d’�puisement, il semblait tr�s affair� � observer ses cha�nes. Que faisait-il
donc<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il s’approcha doucement, tout en restant � couvert. Il vit alors que le
jeune barbare s’effor�ait d’ouvrir l’un des maillons de sa cha�ne, en s’aidant
d’un vieux clou comme levier. Il progressait tr�s lentement, mais il
pers�v�rait, et se h�tait de cacher son ouvrage d�s qu’un garde s’approchait
de lui.
<!--l. 29--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Uhr</span>
<!--l. 31--><p class="indent" > Libre, il �tait libre. Enfin, presque. Il lui fallait encore s’�chapper de
l’enclos, esquiver les gardes ou s’en d�barrasser, et gagner le petit
bois � c�t�. L�, il avait de bonnes chances de pouvoir conserver
sa libert�, et peut-�tre, revenir se venger... Mais pas tout de suite.
Quand il en aurait les moyens. De plus, s’il n’�tait plus attach� au sol,
ses mains �taient toujours li�es, et ses mouvements �taient donc
limit�s.
<!--l. 33--><p class="indent" > Cachant le maillon ouvert, il attendit que le garde soit relev� et que le
calme soit revenu. Puis, tenant le reste de la cha�ne dans ses mains pour
�viter de faire du bruit, et profitant d’un instant o� la lune se cachait
derri�re un nuage complice, il escalada doucement la palissade. Le garde
regardait dans une autre direction. Encore une dizaine de m�tres et tout
serait bon... Il marchait avec toutes les pr�cautions possibles. Pourtant, ce
ne fut pas suffisant. �tait-ce son pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ses cha�nes<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Son souffle<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Un
hasard<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Toujours est-il que le garde se retourna � ce moment l�, et
apr�s un quart de seconde de surprise, ouvrit la bouche pour crier
l’alerte.
<!--l. 35--><p class="indent" > C’est alors qu’une fine silhouette, aussi noire que la nuit, bondit
sur le garde, lui trancha la gorge tout en l’emp�chant de crier, et
l’accompagna au sol, le posant doucement en position assise contre la
balustrade. Tout s’�tait pass� en tr�s peu de temps, et pas le moindre
bruit n’avait filtr�. Uhr �tait impressionn�, et effray� aussi. Ami ou
ennemi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 37--><p class="indent" > La silhouette lui fit signe de ne pas faire de bruit, et lui d�signa le petit
bois. S’il restait sur place, il serait rep�r� � un moment o� � un autre. Il
n’avait donc pas grand chose � perdre � suivre le myst�rieux inconnu. Il se
h�ta vers le petit bois, o� l’�tranger le rejoignit rapidement, sans faire le
moindre bruit.<br
class="newline" />— Qui es-tu<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Lui demanda-t-il.<br
class="newline" />— Je suis Uhr, un guerrier du clan Bhasthon. Nous avons tous �t� tu�s ou
fait prisonniers. J’ai r�ussi � me lib�rer. Et toi, qui es-tu<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il montra � la silhouette, toujours aussi sombre, ses cha�nes.<br
class="newline" />— Mon nom est Farl. Je suis envoy� pour assassiner le roi Bloupy. Je
suppose que tu aimerais te venger, non<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Peut-�tre pouvons-nous nous
entraider<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Uhr se demanda un instant comment un homme aussi petit et fr�le pouvait
se charger de cette t�che. Puis la vision de l’assassinat du garde lui revint en
m�moire, et il hocha la t�te. De toutes fa�ons, ce gars �tait dangereux,
mieux valait �tre de son c�t�. Et puis n’importe quel c�t� valait mieux que
celui de son ennemi.<br
class="newline" />— J’ai pu observer. Dans les quatre tentes qui sont l�-bas, le roi dort dans
celle qui est la plus oppos�e � nous. Il y a deux gardes devant, mais c’est
tout. Il porte une couronne. Un bandeau de cuir autour du front, avec des
pierres pr�cieuses rouges dessus.<br
class="newline" />Il reprit son souffle. Il n’avait pas l’habitude d’expliquer aussi longuement,
d’habitude ses camarades s’arr�taient aux quatre premiers mots. Mais
l’�tranger l’�coutait attentivement, tout en sortant un sac en cuir d’un arbre
creux, et en fouillant dedans.<br
class="newline" />— Dans la tente qui est du c�t� de la lune, il y a d’autres chefs barbares, en
dessous de lui. Celle qui est la plus proche de nous contient son tr�sor de
guerre, enfin je crois. La derni�re, je crois qu’il y a des prisonniers
importants.<br
class="newline" />Le jeune homme le regarda, en sortant un outil de son sac.<br
class="newline" />— Comment as-tu vu tout �a<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Cela fait plusieurs jours que je les observe. Je voulais me venger, mais
seul, comment faire...
<!--l. 50--><p class="indent" > Le jeune homme le regarda longuement, sans dire un mot.<br
class="newline" />— Donne moi tes poignets.<br
class="newline" />Il ob�it, et l’�tranger utilisa son outil pour ouvrir silencieusement et
rapidement les cha�nes qui le retenaient.<br
class="newline" />— Maintenant, nous avons moyen de mettre cette vengeance en pratique.
<!--l. 55--><p class="indent" > Il lui sourit, et Uhr lui rendit son sourire. Ami.
<!--l. 57--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Farl</span>
<!--l. 59--><p class="indent" > D�cid�ment, ce jeune barbare �tait hors du commun. Il n’avait pas l’air
si diff�rent des autres, et pourtant il avait r�fl�chi et observ�, esp�rant la
vengeance qu’il savait illusoire. Et sa patience pour ouvrir ses cha�nes...
Sans compter qu’avec les informations qu’il avait, il allait enfin pouvoir
mettre en place l’assassinat. Et peut-�tre m�me plus. Il r�fl�chit quelques
instants, alors que le barbare jouait avec ses chaines d�faites, savourant sa
libert�.<br
class="newline" />— Bon, voil� ce que nous allons faire.<br
class="newline" />Il dessina sur le sol, de la pointe de sa dague, un vague plan du campement.
Le barbare fron�a les sourcils, jeta un œil vers le camp, puis vers le plan, et
sembla comprendre.<br
class="newline" />— Je vais m’occuper de neutraliser les deux gardes du roi. Tu vas pouvoir
entrer dans la tente du roi, je te laisse le plaisir de l’assassiner, je crois que
tu en es parfaitement capable. Au besoin je viendrai t’aider. Pendant ce
temps, je vais aller lib�rer les prisonniers importants dans la tente d’�
c�t�.<br
class="newline" />— Mais on va �tre d�couverts, ils vont donner l’alerte, non<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui, �videmment. Mais la panique qui va se cr�er va nous aider � nous
enfuir.<br
class="newline" />— Si on a le temps, tu crois qu’on peut lib�rer les autres<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— �ventuellement, on verra. �a te va<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 69--><p class="indent" > Le barbare r�fl�chit encore un instant.<br
class="newline" />— Je n’ai pas d’�p�e. Les cha�nes, c’est bien pour donner des coups de
poing, mais pour tuer rapidement, �a ne marche pas.<br
class="newline" />— Tu as raison. L’homme que je viens de tuer, il avait une �p�e, je crois.
Cela te conviendrait<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui. D’ailleurs, il faudra se d�p�cher avant qu’ils ne voient qu’il est mort.
Les gardes changent de temps en temps.<br
class="newline" />Il hocha la t�te, et ils se lev�rent. Le barbare lui tendit sa main. Il la serra,
et ils se sourirent.
<!--l. 75--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Uhr</span>
<!--l. 77--><p class="indent" > Il suivit en silence son nouveau compagnon. Malgr� sa silhouette si fr�le,
il n’eut aucun mal � ma�triser les quelques gardes qui le s�paraient de son
objectif, la tente du roi. Et tout cela sans bruit... Il lui fit un signe de t�te et
entra.
<!--l. 79--><p class="indent" > Une faible lueur venant d’une lampe blafarde �clairait l’int�rieur de la
tente. Divers objets, plus ou moins pr�cieux semblaient tra�ner dans un
coin. Sur un lit fait de paille recouverte de tissus pr�cieux –un luxe pour des
standards barbares–, dormaient deux silhouettes. Celui qu’il reconnut
imm�diatement comme le roi, avec sa carrure et sa couronne, et une
jeune fille aux cheveux blonds emm�l�s, enti�rement nue. Il h�sita
quelques instants. Devait-il la tuer aussi<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle portait des traces de
coups sur les bras et le dos. Vraisemblablement, on ne lui avait pas
laiss� le choix de partager la couche du roi. Une prisonni�re, comme
lui...
<!--l. 81--><p class="indent" > Sans attendre, il trancha la gorge du roi endormi, tout en plaquant
brutalement sa main sur la bouche de la jeune fille. Celle-ci se r�veilla en
sursaut, et se mit � paniquer. Il s’approcha pour lui murmurer �
l’oreille.<br
class="newline" />— Toi, pas un mot, pas un bruit. Sinon...<br
class="newline" />Elle vit la lame ensanglant�e s’approcher de sa gorge, puis aper�ut du coin
de l’œil le roi assassin�. Peur ou plaisir de vengeance<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Les deux<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Toujours
est-il qu’elle se calma rapidement. Il la l�cha, tout en la surveillant.
Elle le fixant avec m�fiance et crainte, se demandant � qui elle avait
affaire... Mais apr�s tout, c’�tait une barbare, tout comme lui, et elle
avait d� en voir d’autres. Elle se leva sans un bruit, et pointa du
doigt un tas d’objets divers. On y trouvait notamment les affaires du
roi.
<!--l. 85--><p class="indent" > Il hocha la t�te, et se saisit d’une belle �p�e, orn�e de quelques pierres.
Si d’habitude il trouvait ces fioritures inutiles, il devait admettre que l’arme
�tait d’excellente facture et les coups sur la lame montraient qu’elle avait
servi maintes fois. Il la glissa dans sa ceinture. Il y avait aussi des bijoux,
avec des motifs divers et des formes vari�es. Des troph�es de guerre,
probablement. Chez les barbares, quand un bijou n’�tait pas une preuve
d’un ennemi vaincu, c’�tait au pire une monnaie d’�change, leur aspect
d�coratif �tant tr�s secondaire.
<!--l. 87--><p class="noindent" >— Aleeeerte<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Il sursauta, et la jeune fille aussi, cherchant � lui dire des yeux que non, elle
n’y �tait pour rien. Il ne r�fl�chit pas plus longtemps, saisit la couronne du
roi et se rua au dehors, son �p�e � la main.
<!--l. 90--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Farl</span>
<!--l. 92--><p class="indent" > Quatre chefs barbares �taient enferm�s dans la tente. Malgr� leurs
cha�nes, ils �taient impressionnants. Ils �taient grands, particuli�rement
muscl�s et portaient de longues cicatrices. Ces trois hommes et cette femme
avaient dans le regard une telle fiert� et une telle col�re d’�tre ainsi r�duits
� l’�tat d’esclaves qu’il s’�tait demand� un instant s’il n’�tait pas encore
plus dangereux de les d�livrer.
<!--l. 94--><p class="indent" > Mais il s’�tait mis rapidement � l’œuvre, et les barbares, bien que tr�s
surpris de voir un moustique en capacit� de leur venir en aide, ne s’�taient
pas plaints. Il �tait en train de faire sauter la derni�re serrure lorsqu’il
entendit un cri � l’ext�rieur.
<!--l. 96--><p class="noindent" >— Aleeeerte<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Les quatre chefs bondirent sur leurs pieds, et ramassant des armes, sortirent
rapidement en lui adressant un signe de reconnaissance.
<!--l. 99--><p class="indent" > Dehors, il n’eut aucun mal � se fondre � nouveau dans la nuit, surtout
avec l’agitation qui d�marrait. Les quatre combattants se retrouv�rent nez �
nez avec d’autres guerriers, et se d�fendirent farouchement. Dans la cohue, il
aper�ut la silhouette d’Uhr, l’�p�e ensanglant�e. Il eut un soupir de
soulagement. �a, c’�tait fait. Il se glissa dans sa direction, et lui fit signe de
le suivre. Il fallait faire vite avant que tout le campement ne soit en
�bullition.
<!--l. 102--><p class="indent" > Ils crois�rent soudain cinq barbares, l’�p�e � la main, visiblement alert�s
par les cris. Il n’eut aucun mal � dispara�tre dans l’ombre d’une tente, mais
pas Uhr, � qui ils adress�rent un regard inquisiteur. Il h�sita quelques
instants � le laisser et � filer vers les prisonniers, mais c’�tait le laisser courir
� sa perte, et eut des remords. M�me s’il �tait arm�, il �tait tout de m�me
plus petit que ses adversaires, et seul face � cinq... Il s’accroupit et s’appr�ta
� bondir � sa d�fense.
<!--l. 104--><p class="indent" > � sa grande surprise, au lieu de brandir son �p�e, le jeune barbare
se contenta de d�signer du bras le centre du campement, d’o� ils
venaient.<br
class="newline" />— L�-bas<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Il y a des intrus<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Les gardes se ru�rent dans la direction indiqu�e, sans r�fl�chir plus
longuement � la pr�sence d’Uhr, ni � son butin.
<!--l. 108--><p class="indent" > Ils se mirent � courir, et rapidement, arriv�rent pr�s de l’enclos des
prisonniers. Il y avait deux gardes en alerte devant la barri�re qui servait de
porte.<br
class="newline" />— Farl, va les lib�rer pendant que j’occupe ceux-l�.<br
class="newline" />Il hocha la t�te, et contournant l’entr�e, il escalada lestement la palissade et
sauta au milieu des barbares encha�n�s. <br
class="newline" />Ceux-ci avaient �t� r�veill�s par l’agitation du camp, et prirent un air
m�fiant en le voyant.<br
class="newline" />— Les gars, couvrez-le, il va vous d�livrer. <br
class="newline" />C’�tait la voix d’Uhr, de derri�re la barri�re. Les barbares se calm�rent
imm�diatement, et il se mit � l’ouvrage. Les sortes de cadenas grossiers
retenaient plusieurs personnes � la fois, et �taient peu difficiles � crocheter,
ainsi la t�che allait tr�s vite. Les premiers hommes et femmes lib�r�s
saisirent leur cha�nes, les enroul�rent dans leurs poings et se ru�rent vers
l’entr�e de l’enclos en hurlant de rage. Il ne voyait pas ce qui s’y passait,
mais � l’agitation qu’il devinait, il semblait que les deux gardes avaient �t�
rejoints par des renforts.
<!--l. 116--><p class="indent" > Dans la cohue, cependant, un des assaillants parvint � p�n�trer au cœur
de l’enclos et l’aper�ut, en train de faire sauter la derni�re serrure. Surpris
de le voir, mais comprenant rapidement qui �tait � l’origine de l’�chapp�e
des esclaves, il se rua sur lui. Farl esquiva habilement les coups violents et
extr�mement rapides, bien qu’heureusement impr�cis que le barbare
engagea contre lui, mais dut reculer contre la palissade. Il savait manier ses
dagues courtes � la perfection, mais contre un adversaire alerte et avec une
telle allonge, le combat �tait plus complexe. Il devait escalader cette
barri�re et trouver un abri rapidement pour pouvoir sortir une arme de
jet...
<!--l. 119--><p class="indent" > C’est alors qu’une main se referma sur son bras, et le souleva. En un clin
d’œil il se retrouva juch� au sommet de l’�chafaudage, avec Uhr qui lui
souriait.<br
class="newline" />— Merci.<br
class="newline" />— On file et on discute apr�s<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il lui rendit son sourire.<br
class="newline" />— �a marche.
<!--l. 125--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Uhr</span>
<!--l. 127--><p class="indent" > Ils se mirent � courir en direction de la for�t. L’agitation caus�e par
les prisonniers qui se rebellaient et la mort du roi avait d�tourn�
suffisamment l’attention, et ils atteignirent sans encombre l’abri des
arbres. Farl le regardait avec une certaine admiration. Il lui avoua qu’il
n’aurait pas os� lui-m�me parler aux gardes pour les �loigner, et
que c’�tait tr�s intelligent de sa part, entre autres. Il fit une l�g�re
moue.<br
class="newline" />— Ce n’est pas une qualit� tr�s appr�ci�e chez moi... <br
class="newline" />L’�tranger lui sourit.<br
class="newline" />— Comme tu peux le constater, �a n’a pas �t� inutile<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />— Bah, on y dit aussi qu’il faut �tre grand et large pour �tre un bon
combattant. Et toi, tu es petit, tout fr�le, et tu en as tu� beaucoup, tr�s
efficacement ce soir.<br
class="newline" />— Merci.
<!--l. 134--><p class="indent" > Ils rest�rent un instant silencieux, le temps de reprendre leur
souffle.<br
class="newline" />— Qu’est-ce que tu vas faire maintenant<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je ne sais pas. Je n’ai plus vraiment de clan. Je ne sais pas trop
o� aller. J’ai gard� quelques objets de valeur, �a peut peut-�tre
servir...<br
class="newline" />— Tiens, tu n’as pas gard� la couronne et l’�p�e du roi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il secoua la t�te.<br
class="newline" />— Non, �a aurait �t� compliqu� � revendre, enfin je pense. Alors je les ai
donn�s � des prisonniers. En plus, �a repr�sente quelque chose pour
eux.<br
class="newline" />Farl sourit � nouveau.<br
class="newline" />— �a aussi c’est plut�t malin.<br
class="newline" />Il se tut quelques instants, puis reprit.<br
class="newline" />— Tu sais quoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Tu pourrais presque venir � la capitale. Si tu le
souhaites bien s�r. Il y a toujours du boulot pour des gens costauds et
d�brouillards...<br
class="newline" />Il n’avait pas os� proposer cette option. Aller vivre dans la grande
ville, celle dont il avait entendu parler plus jeune... Elle �tait parfois
d�crite comme un endroit fantastique, o� la nourriture et le luxe
coulaient � flots, et o� on pouvait revendre des troph�es et acheter des
armes. Et parfois m�pris�e, car les gens qui y vivaient –humains ou
autres races humaines– �taient moins costauds et ne savaient pas se
battre comme il faut. Et il s’y passait des choses tr�s compliqu�es
parfois...
<!--l. 146--><p class="indent" > Il sourit et hocha la t�te.
<!--l. 150--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Farl</span>
<!--l. 152--><p class="indent" > Il p�n�tra dans la taverne, et aper�ut Uhr, assis � une table. Il lui fit
signe en souriant, et se h�ta de le rejoindre. Il portait une tunique grise sans
manches et un pantalon de toile sombre tenu par une ceinture de cuir. Il
avait l’air d’un habitant tout � fait normal de la capitale, hors sa
musculature imposante.
<!--l. 154--><p class="indent" > Depuis leur rencontre improbable dans les plaines barbares, il avait
�norm�ment chang�. Il avait profit� de l’argent de la vente des bracelets
trouv�s pour se payer des v�tements normaux, et en suivant ses conseils,
avait trouv� un petit travail � charger et d�charger des caisses de mat�riel
depuis les bateaux qui arrivaient par la rivi�re. C’�tait peu, mais assez
pour se payer une chambre modeste et se d�brouiller. Il avait ensuite
appris, sur le tas mais avec une certaine facilit�, � lire, �crire et
compter. Son employeur, pensant avoir affaire � un idiot, avait tent�
de l’arnaquer sur sa paie, en vain �videmment. Depuis, il avait fait
d’autres petits boulots, demandant g�n�ralement beaucoup de bras
et peu de r�flexion, le dernier en date �tant celui d’un videur de
taverne.
<!--l. 156--><p class="indent" > Et malgr� leurs diff�rences, tous deux �taient rapidement devenus aussi
ins�parables que deux fr�res.
<!--l. 158--><p class="indent" > Il s’installa � sa table, et ils command�rent des boissons. Son ami �tait
radieux, il y avait probablement quelque chose de nouveau dans sa
vie.<br
class="newline" />— Quelles nouvelles, Uhr<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je vais changer de m�tier.<br
class="newline" />— Encore<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il lui sourit.<br
class="newline" />— J’ai d�cid� de m’engager dans la garde de la capitale. Tenir une �p�e me
manque trop, d�cid�ment...<br
class="newline" />— S�rieusement<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— H� oui<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />— La garde a une bonne r�putation, ce n’est pas trop compliqu� d’y
entrer<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Il y a des unit�s d’�lite, qu’il est difficile d’int�grer. Mais il y a de la
place pour y �tre simple soldat, et apr�s, qui sait...<br
class="newline" />Il lui sourit.<br
class="newline" />— C’est vrai que tu pourrais bien t’en sortir. <br
class="newline" />— J’esp�re en tous cas<span class="frenchb-thinspace"> </span>! �a promet d’�tre int�ressant. Et toi, comment va
ton boulot<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 172--><p class="indent" > Il prit un moment pour boire une gorg�e de bi�re. Il ne savait pas
comment aborder le sujet.<br
class="newline" />— H� bien... moi aussi, j’h�site � changer de m�tier.<br
class="newline" />Uhr eut un regard surpris.<br
class="newline" />— Vraiment<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Pourtant, tu avais l’air de te plaire dans celui d’assassin...<br
class="newline" />— Oui, je m’y plaisais... Mais... <br
class="newline" />— Le fait de tuer te g�ne<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Plut�t celui de tuer froidement, sans envie, de n’�tre qu’une lame bien
pay�e.<br
class="newline" />Son ami r�fl�chit un moment avant de r�pondre.<br
class="newline" />— Tu sais, en tant que soldat de la garde, je vais me poser un jour ou
l’autre les m�mes questions... en moins bien pay�, par contre.<br
class="newline" />Uhr lui donna une pichenette sur l’�paule. Il r�pondit par un sourire.<br
class="newline" />— Et ton ma�tre assassin, il ne va pas appr�cier, non<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oh, �a, �a va. En fait c’est plus ou moins lui qui m’en a parl� en
premier. Il m’expliquait qu’un bon assassin devait avoir un m�tier
relativement normal � c�t�, pour lui servir de couverture. Il m’a parl� de
quelques cas d’assassins qui avaient progressivement choisi leur seconde vie
� leur premi�re. Il ne parlait pas d’eux en tra�tres. Je me demande s’il
se doute de mes sentiments, en fait... Peut-�tre a-t-il �voqu� cela
expr�s<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 185--><p class="indent" > Il marqua une pause.<br
class="newline" />— La question est, que vas-tu faire � la place<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je ne sais pas encore. C’est bien le probl�me.<br
class="newline" />Uhr sourit, et termina sa chope.<br
class="newline" />— Tu trouveras bien quelque chose qui te pla�t.<br
class="newline" />Il lui rendit son sourire, et termina la sienne � son tour. Il trouverait bien,
oui...
<center class="par-math-display" >
<img
src="aventuriers2x.png" alt="[
" class="par-math-display" ></center>
<!--l. 1--><p class="nopar" >
<!--l. 3--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Irdann</span>
<!--l. 5--><p class="indent" > Enfin, il avait le droit de sortir du temple<span class="frenchb-thinspace"> </span>! � la fois �merveill� et
surpris, il observait les gens autour de lui. Ce n’est pas qu’il n’avait vu
personne dans le temple, mais l’attitude des gens y �tait fort diff�rente. Par
crainte et respect de la d�esse, ils y gardaient une attitude pos�e, presque
soumise. Dehors, il les voyait rire et pleurer, s’aimer et se d�tester, bref, �tre
humains. Sans compter qu’il n’avait jamais vu la capitale, qui �tait tr�s
diff�rente du ch�teau du duc son p�re, au moins dans ses souvenirs
d’enfant.
<!--l. 8--><p class="indent" > La rue qu’il suivait �tait si anim�e, malgr� l’heure tr�s matinale, qu’il
regrettait de voir la distance le s�parant du poste de garde diminuer. Allons,
il aurait d’autres occasions de voir la ville, se dit-il. Il avait rendez-vous avec
ma�tre Ernest, qui devait lui enseigner l’art de l’�p�e. Il existait beaucoup
de ma�tres d’armes, mais Khil avait d�cid� de l’envoyer chez le meilleur
�p�iste qui soit.
<!--l. 10--><p class="indent" > Il �tait arriv� devant le poste de garde. Il prit une grande inspiration, et
s’adressa au garde qui en gardait l’entr�e.<br
class="newline" />— Excusez-moi, je dois voir ma�tre Ernest.<br
class="newline" />L’homme l’observa quelques instants. Irdann portait une longue tunique
blanche, avec dans un �cusson le symbole de sa d�esse, le tout sur un
pantalon de lin gris clair. Des sandales en cuir compl�taient sa tenue, ainsi
qu’une ceinture � laquelle pendait une �p�e assez ouvrag�e.<br
class="newline" />— C’est vous le novice du temple de Melna<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il vous attend. Venez.
<!--l. 15--><p class="indent" > Irdann suivit le garde � l’int�rieur. Un homme d’une quarantaine
d’ann�es, habill� en soldat, discutait tout en lisant une lettre avec un
archer, mince, aux cheveux longs, et aux oreilles pointes. Un elfe<span class="frenchb-thinspace"> </span>! C’�tait la
premi�re fois qu’il en voyait un. On lui avait dit qu’on croiserait
toutes sortes de types dans la capitale, il aurait pu s’y attendre.
L’archer �tait v�tu d’une tunique verte, d’un pantalon blanc et d’une
cape vert fonc�, tous dans un tissu qui semblait tr�s fin. L’homme
souriait.<br
class="newline" />— ...mon grand-p�re fut son ma�tre d’escrime. � mon tour d’instruire son
�l�ve<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Vous pouvez lui dire de me l’envoyer d�s que possible.<br
class="newline" />L’elfe hocha la t�te et sourit en retour, � l’instant o� l’homme aper�ut
Irdann.<br
class="newline" />— Ah, excusez-moi un instant. <br
class="newline" />Le garde qui l’accompagnait le pr�senta.<br
class="newline" />— Un autre �l�ve<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Quelle heureuse co�ncidence. Vous a-t-on expliqu� les
modalit�s d’apprentissage ici<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Irdann secoua la t�te.<br
class="newline" />— C’est tr�s simple. Je ne demande pas d’argent en �change de mon
enseignement. En revanche, pendant toute cette dur�e, les �l�ves sont
soldats de la garde de la ville. Ce service rendu est aussi formateur pour
vous, car on y apprend beaucoup de choses. Cela vous convient<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Irdann hocha la t�te et retint un sourire. Voil� qui allait changer de la vie
du temple<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Et puis, �tre trait� comme un soldat, un garde comme les
autres, cela le changerait. Fini le fils du duc, fini l’apprenti paladin. Le
ma�tre se tourna vers l’elfe, qui attendait en retrait.<br
class="newline" />— La r�gle sera la m�me pour tous les �l�ves, bien entendu.<br
class="newline" />L’archer hocha la t�te et quitta la pi�ce. Un autre �l�ve comme
lui<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Un elfe<span class="frenchb-thinspace"> </span>? �a aussi, c’�tait nouveau et excitant. Il savait qu’il y
avait des elfes qui vivaient dans la capitale, et il en avait vu un ou
deux dans le temple de Melna. Mais il n’en avait jamais vraiment
rencontr�...
<!--l. 27--><p class="indent" > Tout en se laissant guider hors de la pi�ce, Il se demanda combien
d’�l�ves avait ce ma�tre, et lesquels.
<!--l. 29--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Uhr</span>
<!--l. 31--><p class="indent" > Six lits align�s, un coffre en bois brut sous chacun d’eux. Dans un coin,
une petite porte vers ce qui ressemblait � une salle de bains assez simple.
Sur un des c�t�s, un large rideau, qui pouvait potentiellement couper la
pi�ce en deux, derri�re lequel se situaient deux autres lits, semblables aux
autres. Il n’y avait aucune d�coration sur les murs, et une petite fen�tre
apportait un peu de lumi�re dans ce qui n’�tait qu’un dortoir pour gardes,
semblable � celui qu’il avait connu pendant un an, lorsqu’il s’�tait
engag�.
<!--l. 33--><p class="indent" > Il choisit un lit qui avait l’air inoccup�, et posa les quelques possessions
qu’il avait dans le coffre. Puis il s’assit, pensif. Il avait r�ussi<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Ma�tre
Ernest l’avait jug� digne de suivre son entra�nement � l’�p�e, et d’int�grer
cette unit� d’�lite. Non seulement le boulot serait beaucoup mieux pay�
qu’en tant que soldat de base, mais l’exp�rience serait s�rement
tr�s enrichissante. Un coll�gue garde l’avait un peu renseign� sur
les diff�rentes recrues de cette section. Des profils tr�s vari�s, dont
beaucoup venaient de loin, et avaient pr�vu de repartir apr�s avoir
suivi son enseignement. Il se demandait si lui y resterait toute sa
vie...
<!--l. 35--><p class="indent" > Ses pens�es furent interrompues par l’entr�e d’un jeune homme, l’air un
peu timide. Il portait une tenue de pr�tre, ou ce qui y ressemblait, et avait
sous le bras son uniforme de garde. Comme lui, il sembla estimer la pi�ce,
puis d�signa le lit � c�t� du sien.<br
class="newline" />— Celui-ci est libre<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je crois oui. Tu es une nouvelle recrue<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui. Je m’appelle Irdann.
<!--l. 40--><p class="indent" > Il lui tendit une poign�e de main, que le d�nomm� Irdann serra. Le
soir allait tomber bient�t, et les autres gardes allaient rentrer sous
peu, ils allaient probablement d�ner ensemble. La tenue de novice
l’intriguait.<br
class="newline" />— Tu viens d’un temple<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui, je suis apprenti paladin. Et toi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il hocha la t�te. Le premier, mais vraisemblablement pas le dernier,
songeait-il, des profils surprenants qu’il risquait de rencontrer ici. Combien y
en aurait-il<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je suis Uhr. J’�tais un simple soldat jusqu’� hier, et j’ai enfin eu le
droit d’int�grer cette unit� et de suivre l’apprentissage de ma�tre
Ernest.
<!--l. 46--><p class="indent" > Le jeune homme lui sourit et posa un petit sac sur le lit � c�t�
du sien. Il remarqua son �p�e, orn�e de gravures d�licates et d’un
blason.<br
class="newline" />— D’o� te vient cette arme<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— De mon p�re. Il me l’a offerte quand je suis parti pour le temple, quand
j’avais onze ans.<br
class="newline" />— Tu sais, ils fournissent les armes ici.<br
class="newline" />— Je sais, c’�tait le cas au temple. Mais c’est essentiellement le seul objet
qui me vienne de ma famille. Alors je l’ai gard�e.<br
class="newline" />Uhr lui sourit.<br
class="newline" />— Je peux comprendre. Tu viens de loin<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Du duch� De Vane.<br
class="newline" />Il hocha la t�te.<br
class="newline" />— En effet, c’est assez �loign�<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />— Et si diff�rent<span class="frenchb-thinspace"> </span>! L� bas, on ne croise jamais de nains ou d’elfes par
exemple. Je te laisse imaginer la suprise que j’ai eue en en croisant dans les
rues...<br
class="newline" />— J’imagine, oui. Sais-tu qu’il y en a � la garde<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— J’ai entendu parler d’un elfe qui arrive dans quelques jours...<br
class="newline" />Il hocha la t�te. Le coll�gue lui en avait parl�. <br
class="newline" />— Une elfe. Il y a aussi un nain.<br
class="newline" />Irdann parut surpris.<br
class="newline" />— Une elfe<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Une femme<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui. Il y a une autre femme aussi dans la garde. Elles ont cette partie du
dortoir, l�-bas. Pourquoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Le jeune homme sembla h�siter et r�fl�chir quelques secondes, visiblement
g�n�.<br
class="newline" />— Mais ne sont-elles pas trop faibles<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Enfin, d’o� je viens... ce n’est pas
vraiment courant. Voire pas du tout.<br
class="newline" />Uhr haussa les �paules.<br
class="newline" />— D’o� je viens, les femmes se battent comme les autres hommes et ne sont
pas toujours les plus faibles.<br
class="newline" />Son interlocuteur, visiblement mal � l’aise avec la question d’une femme �
l’�p�e, profita de la diversion.<br
class="newline" />— D’o� viens-tu, d’ailleurs<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Ce fut son tour d’h�siter. Il n’avait pas tellement envie d’�taler son pass�
dans les plaines barbares.<br
class="newline" />— J’ai des origines... modestes...<br
class="newline" />Irdann le regarda quelques instants, et lui sourit.<br
class="newline" />— De toutes fa�ons, �a ne change pas grand chose. Nous sommes d�sormais
soldats, au m�me rang, n’est-ce pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Soulag� de constater qu’il ne comptait pas insister sur le sujet, il lui rendit
son sourire.
<!--l. 76--><p class="indent" > Du bruit se fit soudain entendre dans le couloir, et les autres recrues, en
tenue de soldat entr�rent dans le dortoir.
<!--l. 78--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Silw</span><span
class="ecti-1095">�</span>
<!--l. 80--><p class="indent" > C’�tait la premi�re fois qu’elle voyait une grande ville humaine. Des
centaines, voire peut-�tre des milliers, de maisons faites de pierre et de bois,
construites � m�me le sol. Entre ces maisons, des rues pav�es de pierre, et
bien peu d’arbres... Et il y avait tant d’humains<span class="frenchb-thinspace"> </span>! D’accord, c’�tait idiot,
elle s’attendait � en voir<span class="frenchb-thinspace"> </span>; mais ici, il n’�tait m�me pas possible de les
�viter, tellement ils �taient nombreux, dans la rue, aux fen�tres des
maisons, dans des boutiques qui �talaient leurs produits... Ils les
observaient, elle et l’archer qui l’accompagnait, d’un air curieux. Elle se
rapprocha de lui, un peu inqui�te. Ce qu’on disait sur les humains n’�tait
pas toujours tr�s rassurant.<br
class="newline" />— H�, ne panique pas. Les humains ne sont pas m�chants. Et ma�tre
Ernest est quelqu’un de tr�s bien. D’ailleurs, nous arrivons.
<center class="par-math-display" >
<img
src="aventuriers3x.png" alt="[
" class="par-math-display" ></center>
<!--l. 3--><p class="nopar" >
<!--l. 5--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Irdann</span>
<!--l. 7--><p class="indent" > Une grande plaine s’�talait devant lui. Sur la droite, une for�t �paisse,
et des montagnes au loin. Dans la plaine, quelques villages, et au
centre, un grand temple, d�di� � sa d�esse. Comment le savait-il<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il
le savait. Une belle jeune femme apparut debout devant lui. Elle
portait la longue tunique rouge et or et les attributs des grandes
pr�tresses de Melna. Elle �tait aur�ol�e de lumi�re. Il s’agenouilla devant
elle.<br
class="newline" />— Irdann, tu es un futur grand paladin.<br
class="newline" />— Merci, � grande pr�tresse.<br
class="newline" />— J’ai besoin de toi pour une mission importante.<br
class="newline" />Il releva la t�te, surpris.<br
class="newline" />— Mon nom est Samantha, et je vis dans ce temple que tu vois, pr�s de la
ville de Touryre.<br
class="newline" />Elle d�signa le temple au centre de la plaine.<br
class="newline" />— J’y suis la grande pr�tresse, mais j’y vis enferm�e. Le personnel du
temple croit qu’il est inconvenant pour une pr�tresse de quitter l’endroit,
alors que tant de gens dans le monde pourraient profiter de mes
b�n�dictions. J’ai besoin de toi pour m’enfuir.<br
class="newline" />— Comment les raisonner<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Crois-moi, j’ai essay�, mais les gens de ce pays croient peu � la raison. En
revanche, ils croient volontiers aux l�gendes et aux histoires. Ce qu’il me
faut, c’est une l�gende. Et un h�ros pour m’enlever.<br
class="newline" />— Un h�ros<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je sais que tu peux y arriver. Sois ce h�ros, ou trouve-le. Je compte sur
toi, Irdann.<br
class="newline" />La jeune femme sourit, et disparut subitement. Le d�cor vacilla quelques
secondes, puis disparut � son tour.
<!--l. 21--><p class="indent" > Irdann ouvrit les yeux. Il faisait nuit, le dortoir �tait calme �
part quelques ronflements venant des lits voisins. Quel �tait ce r�ve
�trange<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 23--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Samantha</span>
<!--l. 25--><p class="indent" > Elle se releva, et essuya son front. Cette invocation avait �t� �puisante.
C’�tait la premi�re fois qu’elle envoyait un r�ve � quelqu’un qu’elle
ne connaissait pas, c’est peut-�tre la raison de la difficult� de la
t�che.<br
class="newline" />— Vous allez bien, grande pr�tresse<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Une jeune novice, v�tue de blanc, le visage inquiet, s’approcha. Elle lui
sourit.<br
class="newline" />— Je te remercie. Juste un peu d’�puisement.<br
class="newline" />L’avantage d’�tre grande pr�tresse, c’est qu’on lui posait peu de
questions sur ce qu’elle faisait dans le temple. L’inconv�nient, c’est qu’on
ne la laissait pas sortir et qu’elle �tait surveill�e tout le temps...
Ah quelle malchance elle avait eu de se retrouver pr�tresse dans ce
trou perdu<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Elle avait discut� avec un pr�tre venu de la capitale. Il
avait pu quitter son temple, et partir � l’aventure. Cela l’avait fait
r�ver. Mais comment sortir du temple<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ils �taient si born�s, si
but�s... impossible de leur faire comprendre... Elle avait essay�, en
vain.
<!--l. 32--><p class="indent" > Elle suivit la jeune novice, munie d’une bougie, qui la ramenait � sa
chambre. S’enfuir par elle-m�me, elle y avait pens�. Mais c’�tait difficile, les
pr�tres �tant pour une bonne partie d’entre eux form�s au combat. Elle
avait appris le maniement de la dague, et ne quittait jamais la sienne – bien
cach�e sous sa robe. Mais que pouvait-elle faire face � des dizaines
d’hommes arm�es d’�p�es<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle avait beaucoup r�fl�chi, et avait conclu
qu’il lui fallait un h�ros. Quelqu’un qui parviendrait � p�n�trer dans le
temple, pour l’enlever. Et de fa�on suffisamment spectaculaire pour
impressionner tout le monde, et dissuader les pr�tres de partir � sa
recherche. Construire une l�gende, voil� ce qu’il lui fallait. Une l�gende, rien
que �a...
<!--l. 34--><p class="indent" > Elle avait envoy� un r�ve � ce fameux aventurier pr�tre de la capitale.
Lui �tait libre comme l’air, et pouvait lui trouver ce h�ros. Quelques jours
plus tard, il lui avait envoy� un r�ve en retour, il �tait � pr�sent beaucoup
trop loin pour �a. En revanche, il connaissait peut-�tre l’homme de la
situation<span class="frenchb-nbsp"> </span>: un jeune apprenti paladin du nom d’Irdann, qu’il avait form� �
l’�p�e quelques ann�es plus t�t, et qui finissait sa formation dans la
garde de la capitale, aupr�s du plus grand �p�iste connu, ma�tre
Ernest.
<!--l. 36--><p class="indent" > Elle se coucha alors que la jeune femme quittait respectueusement la
pi�ce en laissant la bougie sur sa table de chevet. Pourvu qu’il y parvienne...
Elle ne le connaissait pas du tout. En cherchant � le contacter par la voie
des r�ves, elle avait juste senti son �me, celle d’un jeune homme courageux,
droit, et intelligent. Il pouvait r�ussir...
<!--l. 38--><p class="indent" > � pr�sent, elle ne pouvait qu’attendre qu’il se passe quelque chose. Dans
combien de temps<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il pouvait mettre des jours, voire des semaines �
arriver... Cette attente allait �tre longue et insupportable, mais peut-�tre y
avait-il la libert� � la cl�. Peut-�tre.
<!--l. 40--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Uhr</span>
<!--l. 42--><p class="indent" > Uhr appr�ciait les moments o� il patrouillait dans la rue avec Irdann et
Silw�. Ils formaient un trio � la fois tr�s disparate et redoutablement
efficace. Visuellement, ils incarnaient respectivement la force brute,
l’intelligence pos�e, et la subtilit�. Cela les faisait sourire de savoir qu’en
r�alit�, la petite elfe � l’air fragile �tait tout autant capable que les autres
de manier l’�p�e, et que le barbare musculeux �tait bien plus intelligent
qu’il n’en avait l’air. Mais ce petit jeu d’apparences �tait � leur avantage, et
ils n’h�sitaient pas � jouer avec.
<!--l. 44--><p class="indent" > Ces patrouilles, lorsque tout se passait bien, �taient aussi l’occasion de
discuter tranquillement tous les trois. Uhr avait not� qu’Irdann n’�tait pas
dans son assiette depuis ce matin, mais n’avait pas os� aborder le
sujet. Une fois la routine mise en place, et quelques banalit�s sur
l’entra�nement de la matin�e �chang�es, ce fut finalement lui qui en
parla.<br
class="newline" />— J’ai fait un r�ve louche, cette nuit.<br
class="newline" />— Raconte<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— J’ai vu une grande pr�tresse de Melna, qui me demandait de l’aide pour
la sortir de son temple.<br
class="newline" />— Et c’est la premi�re fois que tu r�ves de grandes pr�tresses<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Pourtant,
tu as d� en voir beaucoup durant ton enfance, non<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Questionna Silw�
<br
class="newline" />— Oui mais... l� j’ai l’impression que... c’�tait diff�rent. Elle �tait
extr�mement nette, ainsi que le d�cor derri�re elle.<br
class="newline" />— Les pr�tres de Melna ont-ils la capacit� d’envoyer des r�ves<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je crois. Il me semble que c’est une invocation tr�s difficile, mais c’est
pour �a que ce r�ve m’intrigue.<br
class="newline" />— Pourquoi une grande pr�tresse aurait-elle besoin d’aide pour sortir de son
temple<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— D’apr�s elle, le personnel du temple ne veut pas qu’elle le quitte. Et elle
souhaite qu’on vienne l’enlever... de fa�on spectaculaire.<br
class="newline" />Alors que Silw� ouvrait des yeux incr�dules, Uhr r�fl�chissait.<br
class="newline" />— Une pr�tresse � enlever... de fa�on spectaculaire... hm. Tu veux bien tout
nous raconter en d�tails<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 57--><p class="indent" > Alors qu’Irdann racontait tous les tenants de son r�ve, Uhr se prit �
sourire.<br
class="newline" />— Tu as une id�e en t�te, c’est �a<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Demanda Irdann.<br
class="newline" />— Une petite. On se retrouve le soir au bar habituel, je vous explique tout
�a.<br
class="newline" />— On ne sait m�me pas si c’est un vrai r�ve ou un message...<br
class="newline" />— Pour �a, proposa Irdann, tu peux toujours aller voir le temple de Melna
ce soir, et leur demander si la d�nomm�e Samantha existe bien, et est bien
grande pr�tresse du temple pr�s de la ville en question. Ils doivent le savoir
non<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Certes. Bon, le tour arrive � sa fin. � ce soir<span class="frenchb-thinspace"> </span>!
<!--l. 64--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Silw</span><span
class="ecti-1095">�</span>
<!--l. 66--><p class="indent" > Elle regarda aux alentours lorsqu’elle entra dans la taverne. Il y avait pas
mal de monde, comme d’habitude, mais ils appr�ciaient l’ambiance
d�tendue de cet endroit, o� se c�toyaient toutes sortes d’humains. Certains
soirs, comme celui-ci, des m�nestrels ajoutaient un peu d’animation. Elle
regarda d’un œil distrait un joueur de mandoline accompagner de sa
musique un jongleur de couteaux, tout en cherchant ses amis au milieu de la
foule.
<!--l. 68--><p class="indent" > Elle finit par les apercevoir, � une table un peu � l’�cart. Irdann,
visiblement essouffl�, venait d’entrer. Elle leur fit un geste et les
rejoignit.<br
class="newline" />— Je reviens tout juste du temple. Il y a bien une grande pr�tresse du nom
de Samantha, dans la ville de Touryre, � quatre � cinq jours de marche d’ici.
Il y a trois ou quatre villages � c�t�, et une grande for�t qui jouxte le
temple.<br
class="newline" />Elle hocha la t�te. Il ne s’agissait donc pas d’un r�ve...<br
class="newline" />— Bon, maintenant il n’y a plus qu’� construire une l�gende.<br
class="newline" />Uhr avait pris un sourire � la fois amus� et myst�rieux. Il continua.<br
class="newline" />— Que peut-on trouver de plus �pique et l�gendaire qu’un myst�rieux
barbare venu de nulle part, p�n�trant dans le temple, �liminant ses ennemis
� mains nues, enlevant la belle pr�tresse et s’enfuyant sur son cheval
blanc<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle le regarda un instant, l�g�rement incr�dule. Il avait le physique de
l’emploi, c’�tait �vident, mais de l� � r�ussir une telle t�che... Elle jeta un
œil � Irdann � c�t�, qui fron�a les sourcils. Voyant leur air surpris, Uhr
�clata de rire.<br
class="newline" />— C’est ce que les pr�tres et les habitants verront, �videmment. Il va
falloir mettre en sc�ne tout cela, et on ne sera pas trop de trois,
croyez-moi.<br
class="newline" />Il prit une grande inspiration et se pencha vers l’avant de la table, abaissant
la voix.<br
class="newline" />— D’abord, il nous faudra obtenir la complicit� de la pr�tresse, et donc se
d�brouiller pour lui parler d’une fa�on ou d’une autre. Ensuite, faire en
sorte de compliquer au maximum la t�che du personnel du temple. Par
exemple, les droguer pour les rendre un peu moins combattifs... Ce sera � la
fois impressionnant et moins dangereux. Puis il faut organiser la fuite, de
fa�on � ce qu’elle ait l’air la plus spectaculaire possible. Il y a bien s�r des
d�tails � r�gler...<br
class="newline" />Irdann hocha la t�te et prit la parole.<br
class="newline" />— Les pr�tres de Melna savent normalement se battre. Ils sont une
quinzaine dans ce temple, d’apr�s ce que j’ai entendu dire. Le reste du
personnel ne devrait pas poser de soucis je pense... Mais ces pr�tres, outre
des comp�tences � l’�p�e, peuvent lancer des enchantements, et c’est de �a
qu’il faudra se prot�ger.<br
class="newline" />— Peux-tu pr�ciser<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Melna est la d�esse-m�re, cr�atrice de vie et protectrice des moissons...
De ce fait, les pr�tres ne poss�dent qu’un seul enchantement purement
offensif, il s’agit bien s�r de l’invocation de foudre. J’y suis moi-m�me
immunis�, tout comme l’int�rieur du temple, mais tu ne l’es pas...<br
class="newline" />Silw� fron�a les sourcils.<br
class="newline" />— Cette protection peut-elle s’�tendre � d’autres personnes<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Seulement si je m’interpose entre le ciel et la cible, donc � moins d’�tre
sur le m�me cheval que vous deux, �a sera compliqu�. Et ce serait dommage
pour la l�gende que je sois vu... Sans compter le poids que va devoir
supporter la pauvre b�te.<br
class="newline" />— La grande pr�tresse ne peut-elle pas l’immuniser elle-m�me<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Apr�s
tout, elle souhaite qu’on l’enl�ve, si j’ai bien compris...<br
class="newline" />— Oui, � condition qu’elle puisse coop�rer activement, et de plus c’est un
risque qu’on la voit l’aider...<br
class="newline" />Uhr avait �cout� le morceau de conversation, en r�fl�chissant. Il reprit la
parole.<br
class="newline" />— H�, vous m’avez donn� une tr�s bonne id�e. Dans la fuite, il faut que
vous deux preniez ma place et celle de la pr�tresse, d’une fa�on ou d’une
autre.<br
class="newline" />— En supposant je puisse me faire passer pour toi, effectivement, �a
r�glerait le souci de l’immunit�.<br
class="newline" />— En supposant que je r�ussisse � me faire passer pour la pr�tresse, cela
permettrait aussi de te remplacer... N’oublions pas que la bataille dans le
temple ne sera pas simple, tu sera �puis�, et tu pourrais m�me �tre
bless�<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />— Comment peut-on se faire passer pour vous deux<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Je ne te ressemble
pas beaucoup, et je t’assure que, dans mon r�ve, la pr�tresse n’est pas non
plus le style de Silw�...<br
class="newline" />Il hocha la t�te.<br
class="newline" />— De nuit, � une distance raisonnable, je pense que personne ne verrait le
changement. Bien s�r, il faut faire l’�change hors de vue, et le plus
loin d’eux possible. On peut m�me en profiter pour leur faire croire
qu’on a pris une sacr�e longueur d’avance, si vous partez de plus
loin...<br
class="newline" />— Tout ce qu’ils verront, finalement, c’est une silhouette masculine, sur un
cheval, portant dans ses bras une jeune femme dans une robe et �a leur
suffira<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Uhr sourit.<br
class="newline" />— Exactement. En plus, si �a tourne mal, je peux vous faire confiance pour
vous d�fendre et vous cacher efficacement...
<!--l. 98--><p class="indent" > Ils firent une petite pause pour commander � manger et � boire. Le plan
se dessinait lentement.<br
class="newline" />— Il reste l’introduction dans le temple pour parler � la pr�tresse.<br
class="newline" />— Silw�, tu sais faire �a, n’est-ce pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle secoua la t�te.<br
class="newline" />— Dans une for�t, oui, je peux circuler � peu pr�s partout sans �tre vue.
Mais dans un temple, c’est plus compliqu�...<br
class="newline" />— Ne vous inqui�tez pas, je connais quelqu’un qui peut nous aider pour
�a.<br
class="newline" />— Il faut se procurer des costumes de barbare, et un de grande pr�tresse
aussi, mais �a ne doit pas �tre tr�s compliqu�.<br
class="newline" />— Surtout qu’il n’est pas n�cessaire que les doublures aient un costume
parfait, il suffit que �a soit � peu pr�s ressemblant de loin. Vous ne vous
approcherez pas des pr�tres de toutes fa�ons.<br
class="newline" />Irdann, qui semblait un peu g�n�, fit part d’une remarque.<br
class="newline" />— Tout de m�me, j’aurais quelques scrupules � te voir tuer tous ces gens du
temple de Melna...<br
class="newline" />— C’est pour �a qu’on va essayer au maximum de les assommer, et de
s’enfuir rapidement. Pour �a, les droguer peut-�tre une solution.<br
class="newline" />— S’enfuir d’un temple endormi, ce n’est pas tr�s h�ro�que, non<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Il faudra ajuster pour qu’ils soient juste assez sonn�s pour �tre
peu r�sistants. Mais les pr�tres pourront quand m�me invoquer des
enchantements pour se prot�ger...<br
class="newline" />Silw� fron�a les sourcils.<br
class="newline" />— Irdann, Peux-tu nous faire la liste compl�te de ce que ces pr�tres peuvent
invoquer, en fait<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Des charmes de protection, qui rendent la peau plus r�sistante
aux armes tranchantes. D’autres incluant la m�t�o et la v�g�tation,
mais ce sont plut�t les hauts pr�tres qui en sont sp�cialistes. Je
me souviens aussi que certains pr�tres de mon temple avaient des
charmes qui leur permettaient de d�tecter les �tres vivants autour
d’eux.<br
class="newline" />— Effectivement, cela peut nous compliquer la t�che. Il me faudra donc
faire vite, et que nous fassions l’�change rapidement. Que sais-tu faire, en
tant qu’apprenti paladin de la d�esse<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il haussa les �paules.<br
class="newline" />— � part l’immunit� dont je vous ai parl�, je ne vois rien qui puisse nous
aider. Mais c’est d�j� pas mal...<br
class="newline" />— Quelle drogue pourrait fatiguer les pr�tres juste assez pour qu’ils soient
moins efficaces sans s’en rendre compte<span class="frenchb-thinspace"> </span>? <br
class="newline" />Uhr sourit.<br
class="newline" />— Je connais quelqu’un qui peut nous fournir �a, ne vous inqui�tez
pas.
<!--l. 121--><p class="indent" > Silw� soupira.<br
class="newline" />— Qui sont ces gens dont tu nous parles qui peuvent nous aider<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
Ou...<br
class="newline" />Elle vit son ami sourire de plus en plus.<br
class="newline" />— ... Ou cette personne, en fait<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il se mit � rire devant son air m�fiant.<br
class="newline" />— Je vais vous pr�senter le type qu’il nous faut. Un ami � moi,
capable de s’introduire dans n’importe quel b�timent, et sp�cialiste en
poisons.<br
class="newline" />— Un assassin<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Mieux encore. Disons... Un m�nestrel. Je reviens, ne bougez pas.<br
class="newline" />Il se leva et se faufila dans la foule dense. Irdann et Silw� se regard�rent en
haussant les sourcils.
<!--l. 131--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Farl</span>
<!--l. 133--><p class="indent" > Farl terminait son assiette avec app�tit. C’�tait effectivement une
excellente adresse, il regrettait de ne pas �tre venu ici plus t�t. Uhr lui avait
propos� de le retrouver ici pour un plan bien pr�cis, sans lui donner de
d�tails. Tant qu’� venir, il avait propos� ses services et ceux de son ami
Eldon pour animer la taverne. Le cachet n’�tait pas �norme, mais le repas
�tait compris, et c’�tait d�j� bien pour des m�nestrels qui n’avaient pas
totalement termin� leur formation. De plus, l’ambiance �tait agr�able, et le
public accueillant. La soir�e commen�ait bien. Mais que lui voulait son
ami<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 135--><p class="indent" > La g�rante s’approcha en souriant et proposa aux deux artistes une
nouvelle ration. Eldon accepta volontiers, et il s’appr�tait � faire de m�me
lorsqu’il aper�ut Uhr s’approcher de la table. Il souriait.<br
class="newline" />— Tu nous rejoins<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il se leva.<br
class="newline" />— Bien s�r. Tu vas me dire ce que tu pr�pares, enfin<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— J’apporte une nouvelle assiette � la table au fond, si j’ai bien compris<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
demanda la g�rante.<br
class="newline" />— Oui, merci<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />— Tant qu’� y �tre, amenez-en quatre, ajouta Uhr.
<!--l. 143--><p class="indent" > Il lui avait d�j� parl� de ses compagnons de la garde, mais c’�tait la
premi�re fois qu’il les rencontrait. Ils �taient habill�s, tout comme Uhr, en
soldats –d’une tunique brune et cotte de maille–, mais ils �taient aussi
surprenants que diff�rents.
<!--l. 145--><p class="indent" > Le d�nomm� Irdann, l’apprenti paladin, �tait un grand brun, aux
cheveux mi-longs, plut�t mince, � moins que ce ne soit le contraste avec Uhr
qui lui donnait cet effet-l�. Beaucoup d’hommes avaient l’air fr�les � c�t�,
en fait. L’autre compagnon �tait une elfe aux longs cheveux clairs, nomm�e
Silw�. S’il ne connaissait pas la r�putation de la garde et de ma�tre
Ernest, il se serait s�rieusement demand� ce qu’elle y faisait. Ils lui
sourirent et il s’assit � c�t� d’eux, pendant que Uhr lui d�tailla leur
plan.
<!--l. 147--><p class="indent" > Les yeux ronds, il fixait les trois soldats � tour de r�le.<br
class="newline" />— Mais... c’est compl�tement insens� votre histoire.<br
class="newline" />Ils hoch�rent la t�te.<br
class="newline" />— S’introduire dans un temple qui se situe loin d’ici, enlever la grande
pr�tresse, faire toute cette mise en sc�ne, et s’enfuir, comme �a<span class="frenchb-thinspace"> </span>? C’est
totalement fou.<br
class="newline" />Uhr sourit.<br
class="newline" />— Tu te joins � nous<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il �clata de rire.<br
class="newline" />— Bien s�r que je viens. Je ne voudrais pas rater �a<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Il vit ses interlocuteurs se d�tendre et lui sourire � leur tour.<br
class="newline" />— Bon, plus s�rieusement, je peux me procurer un poison l�ger qui rend
l�g�rement apathique. Par contre, il en faudra une bonne quantit�, et �a
peut prendre un petit moment. Je peux aussi trouver quelques fumig�nes,
tr�s pratiques pour se cacher. Et c�t� infiltration, vous pouvez compter sur
moi.<br
class="newline" />Il sourit devant leur regard incr�dule. Il �tait toujours v�tu de sa tunique
orange d�cor�e, plus adapt�e � une sc�ne de spectacle qu’� une mission
secr�te. Il se pencha vers le centre de la table.<br
class="newline" />— Je vous expliquerai tout cela en d�tails plus tard, c’est un peu long �
raconter. Faites-moi confiance pour le moment.<br
class="newline" />Ils termin�rent leurs plats et se lev�rent.<br
class="newline" />— Il se fait tard, il nous faut rentrer. On se retrouve demain pour mettre au
point les d�tails<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Quand partirons-nous<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Si ma�tre Ernest nous accorde un cong� rapidement, on peut partir d’ici
une dizaine de jours... le temps de tout pr�parer. Il faut compter le trajet
aussi.<br
class="newline" />Ils opin�rent, puis quitt�rent la taverne apr�s avoir pay� la g�rante.
<!--l. 165--><p class="indent" > Farl rentra seul, son compagnon l’ayant quitt� nettement plus t�t.
Avait-il eu raison d’embarquer dans cette histoire<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ils n’y gagneraient
aucune gloire, puisqu’ils resteraient incognito... Peu d’argent, m�me s’ils
avaient convenu que, dans la mesure du possible, ils piocheraient dans les
r�serves du temple pour au moins amortir le co�t du trajet. Juste
une histoire folle... Il savait qu’il n’�tait pas des plus dou�s pour
�crire de belles sagas �piques digne d’un grand troubadour, mais
cette histoire le m�riterait amplement. Peut-�tre pourrait-il se faire
aider<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 167--><p class="indent" > Il ne savait quasiment rien des deux compagnons de Uhr... Que
valaient-ils<span class="frenchb-thinspace"> </span>? S’ils �taient �l�ves de ma�tre Ernest, ils �taient probablement
des virtuoses de l’�p�e, mais cela ne serait pas suffisant. Mais il avait
confiance en son ami, qui n’�tait pas du genre � tenter des projets insens�s
sans avoir m�rement r�fl�chi aux risques. Lui connaissait ses amis depuis
quatre ans maintenant, et devait savoir ce qu’il faisait.
<!--l. 169--><p class="indent" > Il se coucha en se demandant vaguement pourquoi il se demandait s’il y
avait quelque chose entre l’elfe et le jeune paladin, qui semblaient tr�s
familiers l’un envers l’autre. Ils l’�taient aussi avec Uhr, en fait, et
cette question �tait stupide, il verrait assez rapidement de toutes
fa�ons.
<center class="par-math-display" >
<img
src="aventuriers4x.png" alt="[
" class="par-math-display" ></center>
<!--l. 1--><p class="nopar" >
<!--l. 3--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">S</span><span
class="ecti-1095">�l</span><span
class="ecti-1095">�ne</span>
<!--l. 5--><p class="indent" > S�l�ne jura int�rieurement. Elle venait de rater le d�part du convoi
public, compos� d’une diligence et de quelques soldats, qui lui aurait permis
de rentrer chez elle seule. Elle en avait assez d’�tre escort�e des gardes de
son ch�teau, qui ne lui laissaient absolument aucun champ libre, et elle avait
eu bien assez de mal � convaincre ses parents de la laisser se d�brouiller
seule. La premi�re partie du trajet s’�tait pass�e sans aucun probl�me, elle
avait m�me fait quelques rencontres int�ressantes, et avaient rendu les
journ�es moins longues.
<!--l. 8--><p class="indent" > Elle soupira. On �tait en milieu d’apr�s-midi, et il fallait bien qu’elle
fasse quelque chose. Elle poussa la porte de la seule auberge du village, et
alla parler � la patronne, une jeune femme � peine plus �g�e qu’elle, au
visage accueillant.<br
class="newline" />— Un repas et une chambre pour la nuit<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Bien s�r. Ce sera pr�t ce soir.
Mais que fait donc une dame de votre rang seule dans ce modeste
village<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— � vrai dire... j’ai subi un l�ger contretemps. D’ailleurs, peut-�tre
pouvez-vous me renseigner. Je cherche un moyen de traverser la for�t pour
me rendre en la seigneurie de Assem.<br
class="newline" />— Si vous savez monter, vous pouvez louer des chevaux et engager
des hommes pour vous prot�ger. Je peux vous indiquer quelques
contacts.<br
class="newline" />S�l�ne r�fl�chit quelques instants. Elle n’aimait pas voyager avec beaucoup
d’argent sur elle, et n’�tait pas s�re de pouvoir se payer un cheval et une
escorte arm�e de plusieurs hommes. La jeune femme sembla saisir son
embarras.<br
class="newline" />— En fait, si vous n’avez pas peur de marcher et que vous n’�tes pas
press�e, vous pouvez vous passer du cheval. Par contre, une bonne escorte
est vraiment n�cessaire. Il y a beaucoup de bandits dans ces bois. Je peux
vous recommander...<br
class="newline" />La jeune femme sembla r�fl�chir quelques instants.<br
class="newline" />— Mince, maintenant que j’y pense, la plupart des hommes disponibles et
comp�tents sont d�j� partis escorter d’autres convois � travers la for�t. Ils
rentreront dans quelques jours.<br
class="newline" />� sa mine d��ue, elle ajouta<span class="frenchb-nbsp"> </span>:<br
class="newline" />— Il y a bien Zach, qui habite la petite cabane en bordure du village. Il est
parti plus t�t que les autres, et le connaissant, il sera tr�s rapidement de
retour, peut-�tre m�me l’est-il d�j�. Mais ne partez pas seule avec lui, il est
un peu...<br
class="newline" />— Un peu... quoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />La tenanci�re haussa les �paules.<br
class="newline" />— Oh ne vous inqui�tez pas, il n’est pas m�chant, et il ne vous arrivera rien
de vraiment grave avec lui. C’est m�me probablement le meilleur guide de la
r�gion. Seulement, il est un peu brusque, un peu sauvage, et euh, tr�s peu
d�licat... Pas du tout convenable � une jeune fille de votre rang. Enfin, si je
puis me permettre.<br
class="newline" />— Merci pour vos conseils, je vais r�fl�chir.
<!--l. 23--><p class="indent" > Aller ou ne pas aller voir ce fameux guide<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle h�sitait. Attendre
quelques jours n’�tait pas mortel. Elle pouvait peut-�tre m�me faire
parvenir une missive � ses parents pour les pr�venir de son retard. D’un
autre c�t�, le � jeune fille de votre rang � lui restait un peu en travers de la
gorge. Elle avait l’habitude, � l’universit� de magie, d’�tre trait�e comme les
autres, et n’aimait pas, lorsqu’elle rentrait chez elle, redevenir une jeune
femme pos�e et douce, � l’attitude noble qui sied � son rang. Rien que pour
cela, l’id�e de partir dans la for�t avec un sauvage �tait tentante.
Qu’avait-elle � perdre � aller voir<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il n’�tait peut-�tre pas rentr� de toutes
fa�ons.
<!--l. 25--><p class="indent" > Lorsqu’elle arriva pr�s de la petite cabane, elle eut quand m�me un
instant d’h�sitation. Cet endroit ressemblait plus � un abri pr�caire qu’�
une maison. Une partie d’elle-m�me sembla presque soulag�e de ne voir
aucune lumi�re � l’int�rieur. Elle s’approcha n�anmoins de la porte, et
s’appr�ta � y frapper.
<!--l. 27--><p class="noindent" >— Vous cherchez quelqu’un<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Surprise, elle se retourna vivement. Elle n’avait pas entendu l’homme
approcher dans son dos.<br
class="newline" />— Je cherche un guide du nom de Zach. S’agit-il de vous<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— C’est moi.<br
class="newline" />L’homme �tait tr�s diff�rent de ceux qu’elle avait d�j� fr�quent�s. En fait il
�tait tr�s diff�rent de tous ceux qu’elle avait pu voir, qu’il s’agisse de nobles,
de serviteurs, de coll�gues magiciens ou de paysans. Son air fin et �lanc�
rappelait celui des elfes, mais sa barbe et ses oreilles le d�mentait. Il �tait
v�tu d’une tunique en lin gris et us�e, d’un pantalon de toile �paisse brune,
et � son c�t� pendait une �p�e.<br
class="newline" />— Je cherche � me rendre dans la seigneurie de Assem.<br
class="newline" />— Vous �tes seule<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Vous avez une monture<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je suis seule et � pied.<br
class="newline" />Le guide marqua un temps d’arr�t, h�sitant. Il semblait la jauger du regard.
Peut-�tre ne la croyait-il pas capable de le suivre<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Alors<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Vous voulez traverser � pied<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Cela va durer six � sept jours.<br
class="newline" />— �a ne m’effraie pas.<br
class="newline" />— Vue la saison, il faudra marcher hors des sentiers battus, pour
�viter les attaques. Donc il n’y aura pas d’auberge ou de refuge sur le
chemin, on devra dormir � la belle �toile. Le couvert sera spartiate
aussi.<br
class="newline" />Il essayait de la faire renoncer, c’est s�r. Mais le trajet ne l’effrayait pas. La
vie � la dure ne lui faisait pas peur, cela lui rappellerait sa premi�re ann�e
d’universit�, avec les paillasses inconfortables pour dormir et le chauffage
intermittent en plein hiver.<br
class="newline" />— D’accord.<br
class="newline" />Il hocha alors l�g�rement la t�te, et fit un pas vers elle. Puis soudain, il
attrapa un pan de sa robe et le souleva. Elle poussa un cri de col�re et de
surprise en m�me temps, tout en se d�gageant et en reculant d’un pas.
Comment osait-il<span class="frenchb-thinspace"> </span>? <br
class="newline" />— Les chaussures. Vous ne pouvez pas courir les chemins avec �a.
Trouvez-vous des bottes.<br
class="newline" />Furieuse, elle retint difficilement une gifle. L’homme en face �tait plus
grand, plus fort qu’elle, et arm� qui plus est. Et puis elle ne comptait
pas renoncer maintenant. Ne serait-ce que pour ne pas perdre la
face.<br
class="newline" />— J’aurai les chaussures qu’il faut demain. D’autres... d�tails<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle avait peut-�tre un peu trop insist� sur le mot � d�tails �, mais c’�tait
sorti tout seul, d’agacement. Il ne releva pas, et se contenta de hausser les
�paules.<br
class="newline" />— Rendez-vous demain matin, d�s les premi�res lueurs de l’aube. Je
m’occuperai des vivres. Le trajet co�tera cinq pi�ces d’or. March� conclu,
mademoiselle...<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il lui tendit la main. Elle frappa dans la sienne.<br
class="newline" />— March� conclu. Appelez-moi S�l�ne.
<!--l. 51--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Zach</span>
<!--l. 53--><p class="indent" > Le soir, sur sa paillasse, Zach r�fl�chissait. Il avait d�j� accomagn� des
voyageurs insolites, mais quelque chose lui disait que cette S�l�ne lui
r�servait quelques surprises.
<!--l. 55--><p class="indent" > Elle avait le teint p�le et d�licat, une robe violette travaill�e, aux
bordures dor�es, qui semblait convenir � une noble plut�t qu’� une
voyageuse. L’air de d�fi qu’elle avait correspondait aussi, bien qu’il �tait
plus r�pandu chez les seigneurs que chez les dames, � qui on enseignait
douceur et ob�issance. Alors que sur son geste –certes � la fois ambig� et
peu d�licat de sa part– pour v�rifier ses chaussures, la plupart des femmes
qu’il avait crois� auraient – selon la situation – hurl� de peur, manqu� de
s’�vanouir, ou glouss�<span class="frenchb-thinspace"> </span>; elle avait plut�t donn� l’impression de vouloir le
transpercer d’une �p�e. Heureusement qu’elle n’en avait pas � ce moment
l�, en fait...
<!--l. 57--><p class="indent" > Et puis elle �tait venue seule, et rien que �a, c’�tait �trange.
<!--l. 59--><p class="indent" > Et il y avait ce nom, tout simple. �tait-ce vraiment le sien<span class="frenchb-thinspace"> </span>? D’habitude,
les nobles aimaient � �taler des noms � rallonge, comme si ce seul nom
faisait leur valeur. �tait-elle vraiment sans pr�tention, ou avait-elle quelque
chose de louche � cacher<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 61--><p class="indent" > � l’aube, elle �tait l�, pr�te. Habill�e comme la veille, aux bottines pr�s,
avec un manteau brun, et munie d’un sac en cuir en bandouli�re, en
apparence bien rempli. Lui avait ajout� � sa tenue son armure et ses
brassards de cuir, et avait lui aussi une besace charg�e et une cape, gris
fonc�.
<!--l. 63--><p class="indent" > Il hocha la t�te, lui tendit une gourde et une couverture, qu’elle mit dans
son sac sans dire un mot, et ils se mirent en route.
<!--l. 65--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">S</span><span
class="ecti-1095">�l</span><span
class="ecti-1095">�ne</span>
<!--l. 67--><p class="indent" > S�l�ne regrettait un peu d’avoir accept� de le suivre. Zach avait un
rythme de marche tr�s soutenu qu’il �tait difficile de suivre. De plus, elle se
prenait chaque branche, foug�re, buisson, racine, comme si la for�t enti�re
avait d�cid� de l’emp�cher d’avancer. Lui �tait tellement � l’aise qu’il
semblait que ces m�mes obstacles s’effa�aient devant lui. Sur une
racine particuli�rement vicieuse, elle s’�tala de tout son long dans des
branchages. Zach, qui marchait devant sans la regarder, s’arr�ta pourtant
instantan�ment, et se retourna. Pourvu qu’il �vite une remarque
sarcastique, c’�tait bien assez humiliant comme �a. Sans dire un mot, il lui
tendit simplement la main, et la releva. Elle n’avait pas os� croiser son
regard.
<!--l. 69--><p class="indent" > Quelques heures plus tard, alors que ses pieds commen�aient � la faire
s�rieusement souffrir, et que son souffle se faisait de plus en plus court, il
d�cr�ta une pause. Elle se sentit � la fois soulag�e et g�n�e. Faisait-il la
pause expr�s pour elle<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Certes, il �tait midi, mais peut-�tre qu’il ne
s’arr�tait pas toujours, et mangeait en chemin.<br
class="newline" />— Comment vont vos pieds<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— �a va. Pourquoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Parce que vous boitez, depuis trois heures. Ampoules<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle avait essay� de ne pas le montrer, pourtant. Et puis elle n’avait
pourtant rien dit, de quoi il se plaignait<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle garda le regard fix� sur le
liser� de la manche de sa robe, �vitant son regard. <br
class="newline" />— Oui peut-�tre. Mais je peux continuer, hein.<br
class="newline" />Elle �ta ses bottes et ses chaussettes et retint un g�missement. C’�tait
encore pire que ce � quoi elle s’attendait.<br
class="newline" />— Allez tremper vos pieds dans le ruisseau juste l�, pendant que je sors de
quoi manger.<br
class="newline" />Le ton s’�tait adouci. Venait-elle de passer une sorte de test<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ou avait-il
piti�, finalement<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle releva les yeux et son regard croisa le sien le temps
d’une seconde. Il lui souriait.
<!--l. 79--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Zach</span>
<!--l. 81--><p class="indent" > Il �tait �vident que S�l�ne n’avait quasiment jamais mis les pieds dans
une for�t. Elle tr�buchait sur chaque branche, chaque racine, sursautait �
chaque bruit. Pourtant, il ne l’avait pas entendue se plaindre de la journ�e,
il �vita donc quelques remarques amus�es qui lui br�laient les l�vres. Il
remarqua aussi tr�s rapidement qu’elle n’avait pas l’habitude de marcher
tout court. Non seulement elle s’�tait mise � boiter, mais son souffle �tait de
plus en plus court et son visage de plus en plus rouge. Il maintint le rythme
jusqu’au soir, et quand les ombres s’allong�rent, il la sentit � bout.
Ayant rep�r� un endroit convenable, il s’arr�ta et se tourna vers
elle.<br
class="newline" />— Reposez-vous ici, je vais chercher de quoi faire un feu.<br
class="newline" />Elle r�pondit imm�diatement, d’un ton presque agac�.<br
class="newline" />— Merci, mais je vais bien, je peux rester debout, et vous aider.<br
class="newline" />Il lui sourit. D�cid�ment, elle avait du cran, et �a lui plaisait.<br
class="newline" />— Pas la peine de me le cacher, je vois bien que vous �tes �puis�e. Il n’y a
pas de mal � �a.<br
class="newline" />Elle fron�a les sourcils. Il reprit plus doucement.<br
class="newline" />— Vous avez bien m�rit� un peu de repos. Tous les voyageurs � qui je fais
traverser cette for�t ne suivent pas mon rythme comme vous sans se
plaindre, croyez-moi.<br
class="newline" />Elle sembla h�siter, puis s’assit dos � un arbre, et posa son sac, laissant
�chapper un l�ger soupir de soulagement.
<!--l. 91--><p class="indent" > Il revint une dizaine de minutes plus tard. En plus du bois, il avait
trouv� quelques baies. La nuit �tait quasiment tomb�e, mais cela ne lui
avait jamais pos� probl�me. S�l�ne �tait toujours assise, adoss�e au
m�me arbre, pench�e en avant, immobile. Endormie<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle avait
vraiment l’air �puis�e, c’est vrai... Elle avait �t� ses bottes, et ses mains
�taient pos�es sur ses pieds, laissaient entrevoir une peau intacte. Il
fron�a les sourcils. Il se souvenait d’avoir vu ses pieds presque en
sang � midi. Peut-�tre que ses doigts cachaient les blessures, apr�s
tout, ses chaussettes pos�es � c�t� d’elle en portaient toujours les
traces.
<!--l. 93--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">S</span><span
class="ecti-1095">�l</span><span
class="ecti-1095">�ne</span>
<!--l. 95--><p class="noindent" >— Vous allez bien<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle sursauta et ouvrit les yeux. Il faisait noir autour d’elle. Elle cacha
rapidement ses pieds sous sa robe, en se redressant.<br
class="newline" />— Oui, oui. Je crois que je me suis assoupie, d�sol�e...<br
class="newline" />Ah, pourquoi ce moment d’endormissement<span class="frenchb-thinspace"> </span>? En fait, elle savait tr�s bien.
Elle avait tellement mal aux pieds qu’elle avait profit� de l’absence de
son guide pour lancer un l�ger sort. Un qui n’avait pas besoin de
son b�ton pour �tre efficace. Un simple apaisement des blessures
mineures. Elle eut honte, pourtant ce n’�tait pas sa premi�re blessure, et
d’habitude, elle savait tenir la douleur. Lorsqu’on s’entra�ne � la magie,
c’est m�me tr�s courant. En plus, c’�tait un risque, il aurait pu la
voir... Lancer un sort �tait rarement discret, elle le savait. Et ce
moment de sommeil... Oui, elle savait que la magie pouvait �puiser.
Mais ce n’�tait pas un si petit sort qui aurait d� l’endormir, tout de
m�me<span class="frenchb-thinspace"> </span>!
<!--l. 101--><p class="indent" > Elle regarda son guide, qui venait de r�ussir � allumer un feu. Il ne
semblait pas se douter de ce qui s’�tait pass�. Ouf, elle n’�tait pass�e pas
loin de la catastrophe. La chaleur et la lumi�re lui rendirent un peu de
forces, et plus encore le repas qu’il lui tendit, compos� essentiellement de
pain, de fromage et de lard.<br
class="newline" />— J’ai pu trouver quelques myrtilles pour le dessert. C’est toujours �a.
Peut-�tre que demain, j’aurai le temps de chasser quelque chose, �a
am�liorera le repas.<br
class="newline" />Il semblait presque gentil avec elle, maintenant. Piti� ou sympathie<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Son
sourire semblait plut�t franc.<br
class="newline" />— Enroulez vous dans votre couverture, je vais baisser le feu pour la
nuit.<br
class="newline" />— Vous ne dormez pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Ce coin de for�t est assez calme, et j’ai v�rifi� les alentours. Il n’y a pas
de gros soucis, donc je dormirai aussi. Et ne vous en faites pas, ajouta-t-il en
voyant son air inquiet, je dors souvent seul en for�t et je sais me r�veiller si
quelque chose d’anormal se passe.
<!--l. 108--><p class="indent" > Elle sortit la couverture, s’enveloppa dedans, posa sa t�te sur sa besace
et avant d’avoir le temps de constater que le sol �tait bien trop dur, elle
s’endormit profond�ment.
<!--l. 110--><p class="noindent" > <span
class="ecti-1095">Zach</span>
<!--l. 112--><p class="indent" > Pendant les quelques minutes o� il s’occupait du feu, de fa�on �
s’assurer qu’il ne d�g�n�re pas, il observa la jeune femme. Elle �tait
�puis�e. Peut-�tre avait-il �t� un peu rude avec elle<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Finalement, elle
suivait � peu pr�s son rythme, sans se plaindre, et sa compagnie n’�tait pas
d�sagr�able. Ces cinq ou six jours de travers�e ne s’annon�aient pas si mal.
Il �carta aussit�t une id�e idiote qui lui traversa l’esprit. Non, pas
avec une noble. Surtout sa cliente. �’aurait �t� une paysanne, ou
une servante, il se serait peut-�tre pos� la question, mais avec une
damoiselle de haut rang, c’�tait le meilleur moyen de s’attirer les pires
ennuis...
<!--l. 114--><p class="indent" > Il se leva en s’�tirant, fit un tour rapide du campement de fortune, puis
s’enroula dans sa propre couverture, de l’autre c�t� du feu, et s’endormit �
son tour.
<!--l. 116--><p class="indent" > Le lendemain, il se r�veilla de tr�s bonne humeur. Habitu� � dormir �
m�me le sol, il avait pass� une tr�s bonne nuit. � la grimace que fit S�l�ne
en se levant, il se rappela que ce n’�tait pas le cas de tout le monde. Si on y
ajoutait les courbatures dues � l’effort qu’elle avait fourni la veille,
le r�veil �tait probablement beaucoup moins agr�able pour elle.
Pourtant, elle suivit sans broncher le m�me rythme, et semblait un
peu plus d�tendue. Il se permit m�me quelques remarques amus�es,
qu’elle ne prit pas trop mal. Vers le d�but de l’apr�s-midi, elle lui
posa m�me quelques questions sur certaines plantes et arbres qu’ils
crois�rent.
<!--l. 119--><p class="indent" > Alors que le soir approchait, il la laissa encore pr�s du campement pour
aller chercher de quoi faire un feu. Avec un peu de chance, il trouverait
peut-�tre du petit gibier, et ils feraient un bon repas, pour changer. Ils
pouvaient se permettre de prendre un peu de temps, car ils avaient bien
avanc�. Ce n’�tait pas parce qu’il avait une r�putation de sauvage qu’il ne
savait pas appr�cier quelques bons moments.
<!--l. 121--><p class="indent" > Son sang se gla�a soudain lorsqu’il entendit un cri. C’�tait sa voix. Si
elle avait �t� n’importe quelle autre fille, il aurait cru � une rencontre
inattendue avec une araign�e. Mais l�... D�gainant d’un m�me geste son
�p�e de sa ceinture et son couteau de sa botte, il se pr�cipita vers le
camp.
<!--l. 123--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">S</span><span
class="ecti-1095">�l</span><span
class="ecti-1095">�ne</span>
<!--l. 125--><p class="indent" > Elle recula lentement, de fa�on � garder toujours dans son champ de
vision les deux hommes. Leurs v�tements �taient sales et un peu d�chir�s,
ils �taient arm�s l’un d’un gourdin et l’autre d’une vieille �p�e. Ne pas
paniquer. � l’universit� de magie, elle s’�tait entra�n�e � combattre
physiquement, en utilisant son b�ton de magicienne comme d’une arme
lorsqu’elle ne voulait ou ne pouvait pas utiliser la magie. Elle n’avait trouv�
� la place qu’une branche cass�e, lourde et peu pratique � manier<span class="frenchb-thinspace"> </span>; mais
elle comptait bien ne pas se laisser faire. Au pire, elle pouvait essayer de
gagner du temps. Pourvu que Zach arrive vite... mais �tait-il capable de
ma�triser ces deux brutes<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 127--><p class="indent" > Elle �tait si concentr�e qu’elle ne fit m�me pas attention � ce
qu’ils lui dirent. L’un d’eux, celui � l’�p�e, s’avan�a. Elle pivota
et pla�a son arme si d�risoire dans sa direction. Ne pas le laisser
s’approcher, co�te que co�te. Qu’avait-elle � perdre<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ces deux brigands
n’allaient pas se contentent du peu d’or qu’elle poss�dait de toutes
fa�ons...
<!--l. 129--><p class="indent" > � l’instant o� le bandit leva son �p�e pour d�gager le b�ton, l’homme au
gourdin disparut soudainement de son champ de vision. Sentant la panique
monter, elle dirigea d’un mouvement brusque la branche vers le visage de
l’autre. Si elle touchait ses yeux avec les brindilles � son extr�mit�, elle
pouvait gagner encore un peu de temps... Il esquiva le coup, puis d�gagea la
branche sur le c�t� du plat de sa lame, avant de s’avancer vers elle d’un
pas.
<!--l. 131--><p class="indent" > Alors qu’il allait l’atteindre, il s’effondra brusquement, � ses pieds. Elle
n’eut pas le temps de comprendre ce qui se passait lorsqu’une main se
posa sur son �paule. Cette fois, elle ne put retenir un cri de panique.
Maintenant sa prise � deux mains sur son arme de fortune, ramenant les
bras vers elle, elle donna un grand coup dans son dos, de toutes ses
forces. Elle sentit un choc, entendit un bruit mat et un g�missement
�touff�.<br
class="newline" />— H�, c’est moi<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Reconnaissant la voix, elle se retourna. Zach �tait l�, sa main gauche pos�e
sur ses c�tes, son �p�e couverte de sang dans la main droite, et un couteau
aussi sale gliss� rapidement dans sa ceinture. Elle regarda alors autour
d’elle. Les deux hommes gisaient � terre. Elle l�cha la branche, en
tremblant. Il lui prit d�licatement la main.<br
class="newline" />— Viens, il ne faut pas tra�ner ici. D’autres pourraient venir.<br
class="newline" />
<!--l. 136--><p class="indent" > Zach ramassa leurs deux sacs, les passa en bandouli�re, et l’emmena au
pas de course. Elle le suivit sans r�fl�chir.
<!--l. 138--><p class="indent" > Combien de temps s’�tait pass� lorsqu’elle reprit un peu ses esprits<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
Elle l’ignorait. Mais la nuit achevait de tomber, et ses jambes commen�aient
� faiblir. Il n’avait pas l�ch� sa main.<br
class="newline" />— O� va-t-on<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je connais un endroit o� on est s�rs de passer une nuit en s�curit�. Nous
y sommes presque.<br
class="newline" />Quelques minutes plus tard, ils arriv�rent devant un amas rocheux.<br
class="newline" />— C’est un peu escarp�, mais pas trop difficile. Ne l�che pas ma main, et
n’h�site pas � t’accrocher de l’autre � la roche ou � la v�g�tation.
<!--l. 144--><p class="indent" > L’ascension fut difficile, et tenait presque plus de l’escalade que de la
marche. Elle devait se tenir sans cesse � la paroi qu’elle voyait de plus
en plus mal. Sans compter qu’elle ne pouvait plus tenir sa robe,
et se prenait les pieds dedans. Comment lui faisait-il pour grimper
avec les deux sacs, en tenant sa main, et sans montrer le moindre
effort<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 146--><p class="indent" > Une pierre se d�tacha subitement sous son pied gauche, dans un
l�ger craquement. Elle sentit son second pied glisser, et sa main
chercha –en vain– de quoi se raccrocher � la paroi. Par r�flexe, son
autre main s’aggrippa encore plus fort � celle de Zach, en laissant
�chapper un l�ger cri. Sa chute, qui lui parut durer une �ternit�, s’arr�ta
une quarantaine de centim�tres plus bas, retenue par cette main
salvatrice.<br
class="newline" />— Tout va bien. Reprends tes appuis, tranquillement. Attrape la racine, au
niveau de ta t�te.<br
class="newline" />Ne pas regarder en bas. Ne pas regarder en bas. Tremblante, elle saisit la
prise qu’il lui avait d�sign�e, et reposa ses pieds sur un rocher. Puis elle leva
les yeux vers lui. Il lui adressa un sourire encourageant.<br
class="newline" />— C’est presque fini.
<!--l. 151--><p class="indent" > Quelques m�tres plus loin, la paroi se fit carr�ment verticale et lisse.
Zach d�signa un buisson au dessus de sa t�te.<br
class="newline" />— C’est ici. Par contre, tu vas devoir l�cher ma main quelques instants.<br
class="newline" />Ell vit sa silhouette escalader lestement les derniers m�tres et disparut
dans le buisson sombre. Puis ce buisson s’�carta l�g�rement, laissant
entrevoir une grande faille dans laquelle il se tenait assis. Il se mit � plat
ventre au bord, et tendit son bras. Elle le saisit, et il la hissa jusqu’�
lui. Le buisson se repla�a sur l’entr�e de la faille, coupant toute
lumi�re.
<!--l. 155--><p class="noindent" >— O� sommes-nous<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Dans une petite grotte cach�e sur cette falaise. Fais attention, c’est un
peu bas de plafond. Il n’y a que moi qui connaisse cet endroit.<br
class="newline" />— Comment peux-tu en �tre s�r<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je l’ai d�couverte il y a quelques ann�es, je l’utilise parfois pour stocker
des choses. Jusqu’ici, hormis la nourriture, rien n’a jamais disparu. Mais en
g�n�ral, c’est simplement un lieu de bivouac plut�t confortable. Enfin,
quand je suis seul.<br
class="newline" />— Quel est ce bruit<span class="frenchb-thinspace"> </span>? De l’eau qui coule<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Il y a un petit ruisseau qui se d�verse dans une vasque dans un coin de la
grotte. Ce l�ger bruit a l’avantage de masquer nos sons, d�j� un peu
�touff�s par la paroi et les buissons. D’ailleurs, je vais en profiter pour
remplir les gourdes d’eau fra�che.
<!--l. 162--><p class="indent" > Elle l’entendit des bruits de pas s’�loigner rapidement vers le
fond de la grotte, tandis qu’elle-m�me s’�loignait de l’entr�e de la
grotte, lentement, � quatre pattes et en essayant de ne pas se cogner.
<br
class="newline" />— Mais comment fais-tu pour t’y retrouver dans cette obscurit�<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Et pour
ne pas te prendre la paroi<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Je ne vois absolument rien...<br
class="newline" />— Je connais cette grotte comme ma poche. �a aide.<br
class="newline" />
<!--l. 166--><p class="indent" > Elle l’entendit revenir et s’asseoir face � elle. Il prit doucement sa main
et y d�posa la gourde qu’il venait de remplir. L’eau �tait d�licieusement
glac�e. Puis il fit de m�me avec un morceau de pain. Qu’il connaisse sa
cachette les yeux ferm�s, d’accord, mais qu’il trouve directement sa
main...<br
class="newline" />— Tu vois dans le noir, n’est-ce pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Ses doigts �taient encore en contact avec les siens, et elle le sentit, pour la
premi�re fois, marquer un instant d’h�sitation g�n�.<br
class="newline" />— J’ai des yeux de chat, il para�t.<br
class="newline" />Le contact entre leurs doigts se rompit.
<!--l. 172--><p class="indent" > Alors qu’ils mangeaient en silence, elle r�fl�chissait. Ainsi, il voyait dans
le noir... Ce genre de don �tait peu courant. Elle fit mentalement la liste des
�tres qui avaient cette capacit�. Les elfes et les nains, d�j�, bien que le
m�canisme soit totalement diff�rent pour les deux races. Il y avait aussi les
loups-garous, et les vampires... Elle eut un l�ger frisson et passa
machinalement la main sur son cou, un peu soulag�e de n’y sentir aucune
marque de blessure.
<!--l. 174--><p class="indent" > Elle se rappela alors que si elle ne voyait rien, lui la distinguait
parfaitement, du moins semblait-il. Avait-il suivi sa pens�e sur son visage<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
Voulait-il �loigner le sujet des � yeux de chat �<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Toujours est-il qu’il
reprit la parole.<br
class="newline" />— D�sol�, on fait mieux question confort. Mais au moins on est en s�curit�
ici.<br
class="newline" />— Tu penses vraiment qu’il peut y avoir d’autres brigands<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle l’entendit soupirer.<br
class="newline" />— D’habitude, ce coin de for�t est plut�t calme, et �a m’a surpris d’en voir.
C’est ma faute, j’aurais d� mieux v�rifier. Ces deux gars �taient peut-�tre
un cas isol�, mais dans le doute...<br
class="newline" />— Tu emm�nes souvent des gens dans cette cachette<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Non. Tu es la premi�re.
<!--l. 182--><p class="noindent" > <span
class="ecti-1095">Zach</span>
<!--l. 184--><p class="indent" > Il la vit terminer de manger avec un air pensif. Les brigands, la fuite,
l’ascension, la chute, la cachette... Tout cela devait faire beaucoup pour
quelqu’un qui n’avait pas l’habitude. Elle semblait un peu choqu�e, mais elle
tenait �tonamment bien le coup. Ou alors elle cachait-elle tr�s bien son
trouble<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 186--><p class="indent" > Il la vit frotter ses mains et ses bras. Avant qu’il ne fasse une remarque
sur la temp�rature, elle anticipa.<br
class="newline" />— Il fait froid dans cette grotte.<br
class="newline" />Il se rappela qu’elle ne voyait rien, contrairement � lui. Cela devait �tre
extr�ment g�nant pour elle, de se sentir observ�e sans pouvoir observer en
retour.<br
class="newline" />— On ne peut pas faire de feu, et l’humidit� n’aide pas. Installe-toi sur le
lit, vers le fond, et couvre-toi le plus possible. Enfin, lit... le tas de bruy�re.
Ce n’est pas tr�s confortable, mais c’est mieux que la roche, et �a isole du
froid.
<!--l. 191--><p class="indent" > Pendant qu’elle s’installait, il se rapprocha de l’entr�e et �carta
l�g�rement le buisson qui la masquait. L’autre avantage de cette cachette,
c’est qu’elle faisait un excellent point d’observation. La for�t �tait calme.
Une lueur, tr�s lointaine, dans la direction oppos�e � leur trajet.
Brigands ou voyageurs<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Rien d’inqui�tant vue la distance de toutes
fa�ons.
<!--l. 193--><p class="indent" > Il revint vers le fond de la grotte, et ne put s’emp�cher de remarquer que
S�l�ne tremblait.<br
class="newline" />— Tu as toujours froid<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui, un peu.<br
class="newline" />Il marqua une seconde d’h�sitation, et se racla la gorge.<br
class="newline" />— Il reste un moyen de se r�chauffer<span class="frenchb-nbsp"> </span>: se serrer l’un contre l’autre.<br
class="newline" />Il la vit froncer les sourcils et r�fl�chir quelques secondes. Puis elle se tourna
vers lui.<br
class="newline" />— Bon d’accord. Mais tu as int�r�t � garder tes mains de ton c�t�,
sinon...<br
class="newline" />— Compris<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Il n’avait pas forc�ment envie d’entendre la liste des supplices qu’elle
pr�voyait de lui faire subir s’il avait le malheur de laisser tra�ner une main
au mauvais endroit. De plus, son ton presque mena�ant lui donnait
l’impression qu’elle allait mieux. Et pour �tre honn�te avec lui-m�me, sans
cela, il aurait probablement eu froid lui aussi. Il d�fit sa ceinture qu’il
posa pr�s de lui, de fa�ons � garder son �p�e � port�e de main en
cas de besoin, et s’enroula dans sa couverture, tout contre la jeune
femme.
<!--l. 203--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">S</span><span
class="ecti-1095">�l</span><span
class="ecti-1095">�ne</span>
<!--l. 206--><p class="indent" > Zach sentait la transpiration et le cuir de son armure –qu’il n’avait
m�me pas enlev�e–, mais elle r�alisa subitement qu’elle-m�me ne devait pas
sentir bien meilleur. Elle ne l’aurait pas admis tout haut, mais elle �tait
soulag�e de l’avoir pr�s de lui. Non seulement il lui tenait chaud, mais sa
pr�sence, son souffle calme, m�me cette odeur la rassurait. Elle avait un peu
de mal � r�aliser tout ce qui s’�tait pass� cette soir�e. Il l’avait sauv�e des
bandits, l’avait amen�e dans cet endroit si bien prot�g� et connu de lui
seul... �tait-il sinc�re lorsqu’il lui avait avou� qu’elle �tait la premi�re � y
p�n�trer<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 208--><p class="indent" > Elle r�alisa soudainement que si quelque chose se passait mal, elle �tait
incapable de s’enfuir de cet endroit sans se rompre le cou. Il pouvait la
garder prisonni�re ici s’il le voulait. Que pourrait-elle faire, s’il d�cidait
d’abuser de la situation<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle chassa cette id�e. Il n’aurait pas attendu ce
soir pour �a.
<!--l. 210--><p class="noindent" >— S�l�ne<span class="frenchb-thinspace"> </span>? �a va<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui, oui...<br
class="newline" />Son visage n’�tait pas tourn� vers elle. Il avait d� sentir son trouble aux
battements de son cœur.<br
class="newline" />— Je peux te poser une question b�te<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Euh, vas-y...<br
class="newline" />— O� tu as trouv� des bottes en si peu de temps, l’autre jour<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle sourit.<br
class="newline" />— Ah, �a<span class="frenchb-thinspace"> </span>! J’en ai discut� avec la tenanci�re de la taverne. Elle a �t� ravie
d’�changer mes jolies chaussures contre une paire de bottines � elle. M�me
si elle m’a r�p�t� plusieurs fois que c’�tait une mauvaise id�e de partir avec
toi.<br
class="newline" />Il se mit � rire. <br
class="newline" />— �a ne m’�tonne pas de ma sœur �a.<br
class="newline" />— Et elle avait parfaitement raison<span class="frenchb-nbsp"> </span>: c’�tait une mauvaise id�e de partir
avec toi. Tu as vu dans quelle situation je me retrouve<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle marqua une pause, puis se rem�mora la g�rante de la taverne.
Charmante femme, au teint p�le et aux cheveux roux...<br
class="newline" />— Euh, attends... c’est ta sœur<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle n’avait pas besoin de voir son visage pour savoir qu’elle venait de
pointer du doigt quelque chose. La tension dans son corps �tait explicite.
<br
class="newline" />— Oui...<br
class="newline" />Son ton de r�ponse semblait g�n�. Lui, qu’elle avait toujours vu si assur�, si
calme, ma�tre de lui-m�me, se trouvait si mal � l’aise sur ce genre de
question<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 227--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Zach</span>
<!--l. 229--><p class="indent" > Il n’avait pas besoin d’entendre ses question ou ses interrogations. Son
corps � c�t� du sien semblait lui crier qu’il se moquait d’elle. Pourtant elle
ne disait rien... N’osait pas poser la question<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il soupira. Au point o� il en
�tait... <br
class="newline" />— J’ai �t� abandonn� b�b�, sur le pas d’une porte. Les gens qui
vivaient l�, des b�cherons, m’ont recueilli et �lev� comme si j’�tais le
leur. Mais effectivement, j’admets qu’il n’y a pas vraiment d’air de
famille.<br
class="newline" />Surprise, S�l�ne se tut quelques instants. Puis elle reprit, l�g�rement g�n�e
� son tour.<br
class="newline" />— D�sol�e...<br
class="newline" />— Il n’y a pas de mal. Tu ne pouvais pas savoir.
<!--l. 235--><p class="indent" > Elle laissa passer un moment de silence. Elle semblait plus d�tendue
qu’au d�but. Il valait mieux qu’elle se pose des questions sur lui que sur
tout ce qui s’�tait pass� ce soir, finalement... Pourtant il sentait
qu’elle r�fl�chissait encore. Elle reprit la parole quelques minutes plus
tard.<br
class="newline" />— Je peux te poser une question � mon tour<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il haussa les �paules et sourit dans le noir –l’avait-elle per�u<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— C’est ton tour.<br
class="newline" />— Ta capacit� � voir dans le noir... �a m’intrigue beaucoup. Tu n’aurais pas
du sang elfe par hasard<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il soupira. Il aurait d� se douter qu’elle finirait par revenir l�-dessus. Il
arrivait bien � cacher ce don, habituellement, mais en l’emmenant dans
cette grotte obscure, il �tait illusoire de s’imaginer le garder secret... Elle
dut sentir sa g�ne, et reprit doucement.<br
class="newline" />— Tu ne veux peut-�tre pas en parler<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Non, non... En fait, je n’en sais pas plus que toi. Rapport � ce que je t’ai
dit plus t�t. Je ne connais pas mes g�niteurs. Et puis tu sais, d’o� je viens,
elfe, ce n’est pas vraiment un compliment.<br
class="newline" />— Je sais. Je ne disais pas �a pour me moquer, rassure-toi. Tu ne t’es
jamais pos� la question<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Si, � vrai dire. Mais comment savoir<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Aller voir des elfes, et leur dire
� Bonjour, est-ce que tu penses que je peux �tre ton fils<span class="frenchb-thinspace"> </span>?�<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il la sentit sourire � cette plaisanterie.<br
class="newline" />— Certes. <br
class="newline" />Il h�sita � la questionner plus. Elle avait l’air de conna�tre un peu le sujet...
<br
class="newline" />— Comment tu ferais, toi, pour savoir<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— En fait, il y a plusieurs fa�ons de voir dans le noir. Peux-tu me d�crire
exactement comment tu fais<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je n’ai pas l’impression de voir diff�remment. En fait si je laisse mes yeux
s’accoutumer � l’obscurit�, je finis par voir tr�s bien. J’ai m�me �t� tr�s
surpris de constater que j’�tais le seul de ma fratrie � pouvoir faire �a, je
croyais �a tout � fait naturel... J’ai l’impression que s’il n’y avait aucune
source de lumi�re, je ne verrais rien. Mais �a n’arrive jamais, il y a toujours
un petit quelque chose...<br
class="newline" />Elle sembla r�fl�chir quelques instants, puis expliqua.<br
class="newline" />— �a correspond bien � la vision d’un elfe. Les nains voient diff�remment<span class="frenchb-nbsp"> </span>:
ils ont l’infravision, c’est-�-dire la capacit� de voir la chaleur d�gag�e par les
corps et les objets. Ce qui revient grosso-modo � voir dans le noir. Les
loups-garous, eux, ont l’odorat tellement d�velopp� qu’ils ont une aussi
bonne perception de leur environnement que s’ils avaient les yeux ouverts en
pleine lumi�re. Il reste les vampires, qui comme certains magiciens, ont une
vision nocturne parfaite gr�ce � leurs pouvoirs magiques. Ce qui n’a pas l’air
d’�tre ton cas.
<!--l. 254--><p class="indent" > Zach �tait impressionn�.<br
class="newline" />— D’o� tu sais tout �a<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je l’ai lu.<br
class="newline" />� ses battements de cœur et la tr�s l�g�re tension dans son corps, il sut
qu’elle ne disait pas tout � fait la v�rit�. Il h�sitait � la questionner, mais il
risquait de la braquer. Or, il apprenait tout de m�me des choses
int�ressantes... Ce fut elle qui reprit.<br
class="newline" />— Apr�s, il y a aussi des gens, des humains je veux dire, qui naissent avec
une vision nocturne comme �a, sans explications, ni origines sp�cifiques.
C’est plut�t rare cela dit. Vue ta silhouette, il est plus probable que tu aies
des ant�c�dents elfiques.<br
class="newline" />Elle avait �a d’un ton tout � fait neutre. Sans la moindre condescendance ou
animosit�.<br
class="newline" />— C’est dr�le, tu n’as pas l’air de consid�rer cela comme une tare.<br
class="newline" />Il la sentit hausser les �paules.<br
class="newline" />— D’o� je viens aussi, c’est tr�s mal vu. Personnellement, je ne vois gu�re
de diff�rence. Les elfes sont des hommes comme les autres.
<!--l. 265--><p class="indent" > Zach se demanda d’o� elle tenait cet avis assez ouvert, pour quelqu’un
qui semblait venir du m�me coin que lui. Peut-�tre des lectures<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ou... dans
ce qu’elle n’avait pas dit<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il avait voyag� avec beaucoup de gens, au cours
de sa carri�re<span class="frenchb-thinspace"> </span>; certains �taient particuli�rement virulents vis � vis des
autres races humaines, d’autres n’en avaient rien � faire, d’autres les
admiraient et les enviaient... Surtout les elfes, soi-disants plus beaux,
plus agiles, plus sages, plus tout un tas de choses... Il se gardait en
g�n�ral de donner son avis sur le sujet, et personnellement, il attendait
d’en rencontrer avant de juger. Il n’avait jamais crois� de nain, et
avait entr’aper�u des elfes une fois. Bien s�r, ces derniers n’ayant
pas besoin de lui pour traverer la for�t, et les nains n’aimant pas
trop voyager, cela ne lui avait pas laiss� beaucoup d’opportunit�s.
Pouvait-il lui-m�me avoir du sang elfique<span class="frenchb-thinspace"> </span>? C’�tait une question qu’il
n’avait jamais envisag� s�rieusement jusqu’alors. Mais S�l�ne semblait
bien conna�tre le domaine... et �a, il �tait s�r que ce n’�tait pas du
bluff.
<!--l. 267--><p class="indent" > Il entendit sa respiration et son pouls se ralentir. Elle s’�tait endormie.
Berc� par ce rythme r�gulier et la chaleur de son corps � c�t� du sien, il ne
tarda pas � faire de m�me.
<!--l. 269--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">S</span><span
class="ecti-1095">�l</span><span
class="ecti-1095">�ne</span>
<!--l. 271--><p class="indent" > Lorsqu’elle ouvrit les yeux, S�l�ne mit un petit moment � savoir o� elle
�tait. La grotte �tait �clair�e par la lumi�re du jour, qui filtrait largement �
travers le buisson masquant son entr�e. Elle pouvait enfin voir � quoi
ressemblait cette fameuse cachette. Elle �tait plus petite que ce qu’elle
s’�tait imagin�<span class="frenchb-nbsp"> </span>: allong�e sur le lit de bruy�re, elle touchait le mur froid de
sa main droite alors que l’entr�e n’�tait qu’� quelques m�tres � sa
gauche. Elle s’assit sur le matelas, finalement pas si inconfortable que
cela.
<!--l. 273--><p class="indent" > Zach n’�tait plus �tendu pr�s d’elle, et il avait laiss� � c�t� sa ceinture
et son �p�e, sa tunique et son armure. Elle l’aper�ut au fond de la grotte,
cinq m�tres plus loin, agenouill� aupr�s de la vasque o� s’�coulait un
mince filet d’eau. Son dos, fin et muscl�, rappelait effectivement la
silhouette des elfes, m�me si ses �paules �taient plus carr�es. Et
la force qu’il avait eue lorsqu’il fallait la hisser la veille au soir...
Un demi-elfe<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Possible... Il y en avait quelques-uns � l’universit�
de magie, mais elle n’avait pas forc�ment eu le loisir de les voir �
demi-nus.
<!--l. 275--><p class="indent" > Elle r�alisa soudainement que ce n’�tait peut-�tre pas tr�s convenable
de l’observer ainsi, d’autant plus qu’il ignorait probablement qu’elle �tait
�veill�e. D�tournant le regard, elle se leva. <br
class="newline" />— Ouille<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Le plafond �tait effectivement bas. Entendant cela, Zach se retourna. Il lui
sourit.<br
class="newline" />— Bien dormi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui, � part le choc du r�veil...<br
class="newline" />Elle chercha tout d’abord � ne pas le regarder, puis constata qu’il ne
semblait nullement g�n� d’�tre torse nu devant elle. Elle remarqua alors une
marque rouge, longue d’une dizaine de centim�tres, sur son �paule
gauche.<br
class="newline" />— Qu’est-ce que tu as l�<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Tu t’es bless�<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il regarda son �paule.<br
class="newline" />— Ah, �a... Je me suis pris un mauvais coup, il y a dix jours. Rien de
grave.<br
class="newline" />— Fais voir<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />
<!--l. 286--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Zach</span>
<!--l. 288--><p class="indent" > S�l�ne s’approcha, s’accroupit pr�s de lui, et lui saisit le bras. Elle
examina la coupure d’un air critique. Certes, ce n’�tait pas un coup si
anodin... M�me s’il avait d�j� connu pire. Et la blessure �tait en bonne voie
de cicatrisation.<br
class="newline" />— Tu n’avais pas pu recoudre<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Pas vraiment...<br
class="newline" />— Ne bouge pas.<br
class="newline" />Elle l�cha son bras, et se leva pour aller fouiller dans son sac. Il entendit
quelques bruits de m�tal et de verre. Il avait entendu ces bruits, la veille, en
transportant ce m�me sac, et n’y avait pas pr�t� attention dans l’urgence.
Maintenant qu’il avait le temps de se poser la question, son contenu
l’intriguait.
<!--l. 294--><p class="indent" > Elle revint rapidement, tenant une petite bo�te m�tallique � la main
qu’elle ouvrit.<br
class="newline" />— Tu sais, �a va, ne t’en fais pas pour moi.<br
class="newline" />— Donne ton �paule.<br
class="newline" />Le ton �tait calme, mais ferme. Presque surpris lui-m�me, il ob�it. Elle
�tala d�licatement un baume sur sa blessure. Il piquait l�g�rement, mais
son odeur �tait agr�able.<br
class="newline" />— �a va acc�l�rer la cicatrisation, expliqua-t-elle.<br
class="newline" />— Euh, merci.<br
class="newline" />Il ne savait pas quoi r�pondre d’autre. Certes, il avait l’habitude de se
d�brouiller seul, mais �tait-ce une raison pour ne pas accepter une
petite aide spontan�e<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Et puis, le contact de sa main n’�tait pas
d�sagr�able.
<!--l. 302--><p class="indent" > Il se leva, et alla ramasser ses affaires.<br
class="newline" />— Si tu veux, tu peux profiter de la vasque au fond pour te rafra�chir. Je
vais faire un tour pendant ce temps.<br
class="newline" />Il lui adressa un sourire rapide, et sortit. Le soleil �tait d�j� haut dans le
ciel, et il savait qu’ils allaient devoir repartir rapidement, mais apr�s ce
qu’ils avaient v�cu hier, prendre un peu de temps ne serait pas forc�ment
perdu. Adoss� � la paroi, debout sur la petite corniche en dessous de
l’entr�e de la grotte, il finissait de s’�quiper tout en r�fl�chissant. Cette
S�l�ne �tait d�cid�ment hors du commun... Quels secrets cachait-elle<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
D’o� tenait-elle tout ce savoir<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Quelles autres surprises l’attendait avec
cette �trange voyageuse<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il r�alisa alors qu’il s’�tait mis � la tutoyer depuis
la veille au soir. Elle aussi. S’en �tait-elle rendu compte<span class="frenchb-thinspace"> </span>? �a n’avait pas eu
l’air de la choquer...
<center class="par-math-display" >
<img
src="aventuriers5x.png" alt="[
" class="par-math-display" ></center>
<!--l. 1--><p class="nopar" >
<!--l. 3--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Aldariel</span>
<!--l. 5--><p class="indent" > Elle entra dans la salle du tr�ne. Cette salle �tait toujours aussi
magnifiquement d�cor�e, mais l’impressionnait bien moins qu’avant, et son
air �tait d�cid�.<br
class="newline" />— Ah, Aldariel. J’ai r�fl�chi � ce que tu m’as dit.<br
class="newline" />Son p�re lui souriait. Avait-il l’intention d’accepter<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Nous savons tous les deux que ce serait un grand honneur pour le clan
d’avoir l’un des n�tres qui participe au grand tournoi humain de tir � l’arc,
organis� par le duc De Vane. Mon confr�re appr�ciait particuli�rement
ma venue, m�me bien apr�s que ma blessure m’emp�che de viser
droit. Cela entretient les bonnes relations entre humains et elfes
sylvains.<br
class="newline" />Aldariel n’ajouta rien. Pour le moment, �a se passait plut�t bien.<br
class="newline" />— J’ai discut� avec ton professeur de tir � l’arc, qui trouve que tu la
surpasses quasiment. Nous pensons que tu ferais honneur au clan en
participant � ce tournoi.<br
class="newline" />Elle sourit.<br
class="newline" />— Cependant... J’ai peur pour toi.<br
class="newline" />Son visage se ferma. Le convaincre allait �tre compliqu�.<br
class="newline" />— Les humains n’aiment pas toujours les elfes, tu le sais.<br
class="newline" />— Mais tu as d�j� �t� chez les humains non<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ils sont si... diff�rents<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Si
dangereux<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il soupira.<br
class="newline" />— C’est diff�rent. D�j� c’�tait il y a plus de dix ans, et les choses ont pu
changer. Ensuite, tu es une femme.<br
class="newline" />— �a change quoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Pour les humains, �a change beaucoup de choses. Tu sais, chez
les humains, les femmes sont souvent soumises, et doivent ob�ir �
leurs parents ou maris... on n’imaginerait pas les voir se promener
seules.<br
class="newline" />Aldariel ouvrit des yeux ronds d’incr�dulit�.<br
class="newline" />— S�rieusement<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je l’ai observ� de mes propres yeux, crois-moi. Ce n’est pas le cas dans
toutes les contr�es humaines, �videmment, mais dans le fief du duc De
Vane, c’est le cas.<br
class="newline" />— Tu penses que c’est vraiment dangereux<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il sourit.<br
class="newline" />— Laisse-moi terminer. Je ne veux pas que tu y ailles seule, c’est tout. J’ai
cherch� le compagnon id�al pour te prot�ger.<br
class="newline" />Aldariel leva les yeux au ciel. Si son p�re savait qu’elle n’�tait plus aussi
innocente qu’elle n’en avait l’air... Enfin bon, s’il fallait supporter un garde
ou deux pour avoir un peu de libert�, �a pourrait peut-�tre le faire. Et puis
il pourrait �tre sympathique, voire... plus<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je te pr�sente Silw�, une guerri�re qui nous revient de chez les
humains.
<!--l. 29--><p class="indent" > Une jeune femme entra. Elle �tait habill�e comme les soldats elfes,
d’une tunique mi-longue verte, d’un pantalon blanc, et des bottes.
Ses cheveux �taient tress�s derri�re son dos. � son c�t� pendait un
fourreau ouvrag�. Elle posa un genou en terre face au roi et � la
princesse.<br
class="newline" />— Merci. Silw�, je te pr�sente ma fille, Aldariel.<br
class="newline" />— Tu ne viens pas de me parler du risque que couraient les femmes seules
chez les humains<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— D’abord, vous serez deux. Ensuite, Silw� vient de passer cinq ans chez
les humains, et elle les conna�t tr�s bien. Enfin, elle y a appris le
maniement de l’�p�e chez le meilleur ma�tre qui soit, donc elle pourra te
prot�ger.<br
class="newline" />— �a veut dire que tu me laisses y aller<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il sourit.<br
class="newline" />— Oui. J’ai envoy� un oiseau portant le message au duc, l’invitant � vous
accueillir toutes les deux.<br
class="newline" />Aldariel retint un cri de joie.
<!--l. 39--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Silw</span><span
class="ecti-1095">�</span>
<!--l. 41--><p class="indent" > Silw� �tait debout face � une table o� s’�talait une carte, dans un salon
du palais. Elle r�fl�chissait � cette nouvelle aventure. Elle ne s’attendait pas
� une telle responsabilit�, � peine rentr�e chez elle<span class="frenchb-thinspace"> </span>! C’�tait un grand
honneur et une grande confiance, car le roi lui confiait rien de moins
que sa fille. Elle doutait presque de ses capacit�s � mener une telle
mission...
<!--l. 43--><p class="indent" > Elle connaissait indirectement la princesse. Sa m�re avait �t� son
professeur particulier de tir � l’arc, et elle lui avait d�crit une jeune femme �
la fois d�termin�e et dou�e, mais aussi simple et sans complexes. Qu’en
�tait-il en r�alit�<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Que serait le trajet avec elle<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Allait-elle devoir jouer
les serviteurs en m�me temps que de garde du corps<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle n’�tait
certainement pas tr�s dou�e pour la premi�re des t�ches, en tous cas. Et
savait-elle se d�fendre un minimum, ou allait-elle devoir la prot�ger �
chaque pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>? En tous cas, elle avait eu l’air vraiment heureuse de
partir � l’aventure. Pouvait-elle l’en bl�mer<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle-m�me l’avait �t�
aussi...
<!--l. 46--><p class="indent" > C’est alors que la princesse entra. Elle avait troqu� sa longue robe contre
une plus courte, vert tr�s p�le, et un pantalon blanc. Des bottes avaient
remplac� ses jolies sandales, et elle n’avait gard� pour bijou que son fin
diad�me. Elle portait son arc et un carquois en bandouli�re, et une dague �
la ceinture. Son avant-bras gauche �tait prot�g� par un bracelet d’archerie,
en cuir, d�cor� de quelques motifs argent�s. Au moins elle semblait �quip�e
correctement.
<!--l. 48--><p class="indent" > Elle s’appr�ta � s’incliner devant elle, mais Aldariel lui fit signe de
s’abstenir. Elle s’approcha de la table.<br
class="newline" />— Quel est notre trajet<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Silw� lui montra la carte �tal�e sur la table.<br
class="newline" />— D’abord nous allons sortir de la for�t des elfes par ici, en quelques jours
nous y serons. Apr�s il nous faut traverser cette r�gion des humains. Trois
ou quatre jours. C’est proche de la capitale humaine, o� on trouve de tout,
et les gens y sont assez ouverts d’esprit, et plut�t accueillants. Attends-toi �
des regards curieux, ils ne voient pas des elfes tous les jours non
plus.<br
class="newline" />— On ne verra pas la capitale<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />La jeune princesse prit un air d��u.<br
class="newline" />— Non, d�sol�e. Cela ferait un d�tour de plusieurs jours, et nous n’avons
pas tellement le temps...<br
class="newline" />— C’est dommage... On m’a dit que cette ville est tr�s belle. N’est-ce pas l�
que tu as v�cu<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Silw� sourit. Elle serait bien aussi pass�e par la capitale, voir certaines
personnes qui y vivent.<br
class="newline" />— Oui. Et croyez-moi, �a me ferait plaisir d’y retourner... Peut-�tre
pourrons-nous y passer au retour<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Comment dort-on chez les humains<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Nous irons dans des auberges.<br
class="newline" />— Cela veut dire qu’on va aussi manger de la nourriture des humains<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
C’est bon<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— C’est diff�rent, mais tr�s bon aussi. Ne vous inqui�tez pas pour �a. Elle
se retourna vers la carte.<br
class="newline" />— Nous passerons par cette autre for�t ensuite, nous y serons plus
� l’aise. Il faudra �tre prudentes, il y a parfois des bandits. Je ne
connais pas cette for�t directement, mais je pense que nous n’aurons
aucun mal � la traverser dans sa longueur. Une dizaine de jours je
dirais.<br
class="newline" />Aldariel pointa du doigt la zone de l’autre c�t�.<br
class="newline" />— Et cette r�gion, c’est celle du duc De Vane<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Presque, c’est celle d’un de ses vassaux. Nous allons la traverser, et
encore celle-ci, avant d’arriver, apr�s deux jours, au ch�teau du duc, enfin.
C’est cette r�gion qui est particuli�re<span class="frenchb-nbsp"> </span>: ils n’aiment pas trop les elfes
et les autres races humaines, d�testent la magie, et tout ce qui y
ressemble de pr�s ou de loin, sauf en ce qui concerne la magie li�e aux
dieux.<br
class="newline" />— Qu’est-ce qu’on fera<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Cela ne veut pas dire qu’ils vont nous attaquer, en principe, ils
respecteront ta couronne de princesse et ton r�le d’ambassadrice. Mais on
n’y sera pas forc�ment tr�s bien vues. Au pire, on �vitera les villages, et
c’est tout.<br
class="newline" />— Et le duc, �a ne le g�ne pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— D’apr�s votre p�re, non, mais il a du mal � convaincre ses pairs. Il esp�re
d’ailleurs que notre venue puisse changer –un petit peu– les choses... Mais
nous verrons bien. Je ne connais pas cette r�gion non plus, pour tout vous
dire.
<!--l. 72--><p class="indent" > Elle laissa la jeune princesse observer la carte, pendant qu’elle v�rifiait
son �quipement. Elle enfila par dessus sa tunique une armure l�g�re en cuir,
qu’elle avait faite faire chez les humains, ajust�e � sa taille. Sans manches,
elle ne couvrait que le buste et descendait � mi-cuisse, fendue sur les c�t�.
Elle ajouta sa ceinture, avec le fourreau de son �p�e et de sa dague.
Elle ajusta �galement les bandes de cuir � ses poignets, qui � la fois
prot�geaient contre les coups, gardaient les articulations � chaud, et
fournissait un morceau de sangle en cas de besoin. L� encore, c’�tait un
souvenir pratique de chez les humains. Puis elle v�rifia le contenu de
son sac. Tout �tait bon. Sauf peut-�tre de quoi se soigner en cas de
probl�mes. D’accord, il n’y aurait probablement pas de probl�mes.
Mais...<br
class="newline" />— Princesse<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle h�sita une seconde. Est-ce que ce genre de chose se demande � une
princesse<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— J’ai entendu dire que vous �tiez une bonne soigneuse<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />La jeune princesse sourit.<br
class="newline" />— En effet. Je pensais d’ailleurs emmener quelques baumes et de quoi
panser des blessures. Penses-tu que �a puisse �tre utile<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle poussa un soupir de soulagement.<br
class="newline" />— Oui, tout � fait.<br
class="newline" />La princesse sourit, puis ajouta.<br
class="newline" />— Est-ce que je peux te demander quelque chose d’un peu... inhabituel<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Euh... oui<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— � l’instant o� on quitte le village des elfes, arr�te de m’appeler princesse.
Appelle-moi par mon pr�nom, et dis-moi tu. S’il-te-pla�t.<br
class="newline" />Silw� se redressa, suprise et soulag�e en m�me temps. <br
class="newline" />— D’accord.
<!--l. 89--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Aldariel</span>
<!--l. 91--><p class="indent" > Aldariel examinait la chambre avec int�r�t. Une petite pi�ce, avec deux
lits humains et deux tables de chevet, une vieille armoire en bois, et dans un
angle de la pi�ce, un petit miroir et un baquet vide pos� sur une meuble.
Une fen�tre de petite taille laissait entrer les derni�res lueurs du soir. Elle
voulait poser des questions sur tout, mais Silw� n’�tait pas encore
mont�e.
<!--l. 93--><p class="indent" > Trois jours qu’elle �taient parties. Elles avaient quitt� la for�t en d�but
d’apr�s-midi, et �taient arriv�es dans un premier village humain. Un peu
effray�e, elle n’avait pas quitt� sa compagne –qui semblait tr�s � l’aise–
d’une semelle. Les gens les avaient regard�es avec curiosit� et bienveillance,
et elles s’�taient dirig�es vers l’auberge. Le repas qui y avait �t� servi –une
soupe de l�gumes et de lard, avec du pain des humains– avait �t� une
nouvelle surprise. Sa compagne l’avait d�vor� avec app�tit, mais
elle-m�me avait eu un peu de mal avec ces nouveaux go�ts et odeurs. Il
para�t qu’on s’y faisait rapidement... Difficile � croire, mais elle verrait
bien.
<!--l. 96--><p class="indent" > � cet instant, Silw� entra dans la pi�ce.<br
class="newline" />— D�sol�e, quelques d�tails � r�gler avec le g�rant... Tu n’es pas encore
couch�e<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— J’avoue que... ces lits m’intriguent...<br
class="newline" />Elle sourit.<br
class="newline" />— Si tu ne te sens pas � l’aise, tu peux toujours t’enrouler dans ta
couverture elfique. Les couvertures humaines ont besoin d’�tre plus �paisses
pour �tre aussi chaudes, c’est pourquoi leur aspect est plus grossier. Mais
elles sont tr�s bien<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />
<!--l. 102--><p class="indent" > Sans attendre sa r�ponse, Silw� se d�shabilla et se glissa rapidement
entre les draps. Un peu h�sitante, elle l’imita. Ce n’�tait pas aussi
inconfortable qu’� premi�re vue, finalement.<br
class="newline" />— Pourquoi y a-t-il une bougie sur la table de chevet<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Rappelle-toi que les humains voient tr�s mal dans l’obscurit�, ainsi ils
utilisent beaucoup plus de lampes que nous. Imagine-toi que l�, pour lire, ils
ont besoin de lumi�re suppl�mentaire.<br
class="newline" />— �a doit �tre difficile d’�tre un humain<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Comment font-ils<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je me suis dit la m�me chose. Et pourtant ils arrivent � faire des choses
extraordinaires, alors... Peut-�tre cette difficult� les pousse � trouver des
solutions<span class="frenchb-thinspace"> </span>? C’est incroyable ce que les humains peuvent �tre plein de
ressources et d’id�es, parfois...
<!--l. 109--><p class="indent" > Aldariel fixa le plafond de la chambre pendant un moment. Elle se
rem�mora les regards surpris des villageois en les voyant arriver. Beaucoup
leur avaient souri. Mais certains les avaient regard�es en fron�ant les
sourcils. Un homme s’�tait �loign� � la table la plus loin d’elles lorsqu’elles
�taient entr�es dans la taverne.<br
class="newline" />— Pourquoi certains humains nous d�testent<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle l’entendit soupirer.<br
class="newline" />— D�j� parce que nous sommes diff�rents. Pour certains, avoir des oreilles
pointues ou pas de barbe, �a suffit. Ensuite, je crois que certains
nous envient. Ils nous trouvent plus beaux, plus intelligents, plus
agiles. D’autres voient plut�t que nous sommes plus fr�les, moins
forts physiquement, que nous vivons dans les arbres, et nous voient
comme des animaux sauvages. Il y a peut-�tre souvent un m�lange des
deux...<br
class="newline" />Elle marqua une pause, puis reprit.<br
class="newline" />— Et il y a, surtout, la diff�rence des mœurs. Tu sais, depuis mon retour,
j’ai un cousin qui m’ignore royalement, parce que soi-disant, je suis
� devenue humaine �. Comme quoi, il ne faut pas grand chose... Et
puis il y a autre chose aussi. Les humains ne contr�lent pas leur
fertilit�.<br
class="newline" />— S�rieusement<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui. Ils ne choisissent pas. Et en plus, ils consid�rent qu’il est tr�s mal
d’avoir un enfant sans avoir un compagnon d�finitif.<br
class="newline" />— C’est un peu vrai chez nous, non<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— �videmment, mais eux ne peuvent pas le choisir. R�sultat, ils sont assez
coinc�s sur le sujet... Ajoute � �a le fait que certains consid�rent qu’une
femme doit �tre soumise, et je te laisse imaginer la r�putation qu’on peut
avoir aupr�s d’eux...<br
class="newline" />— Forc�ment, vu comme �a...<br
class="newline" />— Cela dit, ne t’inqui�te pas trop, �a ne veut pas dire qu’on est en danger
chez les humains. Je crois te l’avoir d�j� dit, mais m�me s’ils ne
nous aiment pas, ils nous respectent en g�n�ral. Que ce soit � cause
de nos armes, ou de crainte de cr�er des ennuis diplomatiques, ou
simplement parce qu’ils n’ont pas envie de s’en m�ler. Donc pas
d’inqui�tude.
<!--l. 122--><p class="indent" > Les humains �taient d�cid�ment surprenants. Il y avait d’autres
questions qu’elle voulait poser. Et les autres races<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Les nains, par exemple,
en avait-elle crois�<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Mais elle entendit � sa respiration qu’elle s’�tait
endormie. Tant pis, elle aurait tout le temps de lui demander dans les jours
qui viennent.
<!--l. 126--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Silw</span><span
class="ecti-1095">�</span>
<!--l. 128--><p class="indent" > La for�t, enfin<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Elle avait beau �tre habitu�e � vivre chez les humains,
elle appr�ciait �tre au calme en for�t. Aldariel semblait elle aussi de
nouveau � son aise, bien qu’elle se soit accoutum�e tr�s rapidement. Elle
avait m�me mang� avec app�tit la nourriture humaine de la taverne de ce
matin. Mais ne plus sentir tous ces regards curieux, plus ou moins
bienveillants, �tait reposant. De plus, la compagnie d’Aldariel �tait
vraiment agr�able, et elle avait de plus en plus la sensation de voyager avec
une amie et non une princesse.
<!--l. 130--><p class="indent" > C’est vers le d�but de l’apr�s-midi qu’elles entendirent un bruit
inhabituel. Des cris, des bruits m�talliques et de chevaux. Elles h�sit�rent,
puis la curiosit� �tant plus forte, d�cid�rent de s’approcher prudemment. �
cet endroit, la v�g�tation �tait tr�s dense et les arbres tr�s proches les uns
des autres, ce qui leur permit d’arriver de fa�on tr�s discr�te. Quelques
minutes plus tard, la sc�ne s’�talait sous leurs yeux.
<!--l. 132--><p class="indent" > Sur un sentier, deux carosses tir�s par des chevaux, dont un richement
d�cor�, �taient arr�t�s sur la route. Une dizaine de soldats � cheval
–certains avaient mis pied � terre– les d�fendaient contre un groupe de
pillards qui les avait pris en embuscade. Silw� observa la sc�ne pendant
quelques secondes, surprise. Les soldats avaient fort � faire, avec les brigands
qui semblaient chercher � atteindre le carosse d�cor� en priorit�. Il ne
restait qu’un garde pour d�fendre le second, d’o� elle vit appara�tre une
t�te effray�e, et fermer pr�cipitamment le panneau de bois qui servait de
fen�tre. Le soldat se d�fendait vaillamment contre trois brigands, mais
difficilement.
<!--l. 134--><p class="indent" > Aldariel n’�tait plus � c�t� d’elle. Elle avait lestement escalad� un arbre,
et pr�parait d�j� une fl�che pour son arc. Avant de viser, h�sitante, elle lui
jeta un regard interrogateur. Elle lui r�pondit en hochant la t�te, et en
d�gainant silencieusement son �p�e. Puis elle avan�a vers le champ de
bataille.
<!--l. 136--><p class="indent" > Le trait fin et meurtrier, partant de l’arbre, toucha dans la nuque l’un
des brigands, qui s’effondra. L’un des survivants, m�fiant, fit signe �
son comparse de rester face au garde pendant qu’il allait voir ce
qui se passait dans cet arbre. Avan�ant dans les broussailles, et se
retrouvant subitement face � Silw�, il poussa un cri de surprise,
qui ne dura que le temps n�cessaire pour recevoir une �p�e dans la
poitrine. Elle enjamba son corps, et avan�a jusqu’� �tre au bord
du sentier. Le brigand restant, le plus fort des trois, avait accul� le
garde jusque contre la porte du carosse, et lui avait port� un coup
violent au bras droit, lui faisant l�cher son �p�e. Parant les coups
qu’il pouvait avec son �cu, le garde, en tr�s mauvaise posture, vit
soudainement une lame venue de nulle part traverser la gorge de son
adversaire. Derri�re lui, la jeune elfe recula prudemment, cach�e par la
carrure imposante de l’homme qui s’effondrait lentement, et disparut �
nouveau dans le buisson. Une seconde avant d’�tre parfaitement
dissimul�e, elle aper�ut, sur sa droite, venant de l’autre carosse, un
quatri�me homme qui courait vers elle. Il l’aper�ut, et ouvrit la
bouche pour crier. Avant que le moindre son ne sorte de sa gorge, un
second trait mortel, venant des arbres, toucha le brigand en plein dans
l’œil.
<!--l. 138--><p class="indent" > Elle rejoignit Aldariel dans l’arbre et lui sourit.<br
class="newline" />— Merci, c’�tait tout juste.<br
class="newline" />Reprenant son souffle, elle observa avec elle le champ de bataille. Le soldat
seul et bless� reprenait ses esprits, et avait visiblement du mal � comprendre
ce qui s’�tait pass�. � c�t� de l’autre carosse, les autres gardes avaient repris
le dessus sur les brigands, et les survivants �taient en fuite. Elle
remarqua alors que sa compagne, qui n’avait pas boug�, tremblait
l�g�rement.<br
class="newline" />— C’est la premi�re fois que tu tires sur quelqu’un<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui...<br
class="newline" />Elle lui posa la main sur l’�paule, doucement.<br
class="newline" />— Allez viens, inutile de rester ici. On finirait par �tre vues.
<!--l. 146--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Aldariel</span>
<!--l. 148--><p class="indent" > Les deux jeunes femmes repartirent, par la voie des arbres dans un
premier temps, avant de continuer � pied. Elle avait agi d’instinct, sans trop
r�fl�chir. �tait-ce une bonne id�e de s’impliquer dans un combat d’humains
qui ne les concernait pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Pourtant son amie avait fait de m�me.
Elles avaient failli �tre vues d’ailleurs... Elle r�alisa qu’elle avait
laiss� quelques fl�ches... y feraient-ils attention<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Et qui �taient ces
gens dans les carosses<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Trop de questions se bousculaient dans son
esprit.
<!--l. 150--><p class="indent" > Elles s’arr�t�rent face � une large rivi�re, qu’elles long�rent jusqu’�
trouver un moyen simple de la traverser. Arrivant pr�s de ce qui ressemblait
� un gu�, elle virent passer trois hommes, qui couraient eux aussi vers le
cours d’eau. Ils les aper�urent avant qu’elles n’aient le temps de se cacher.
D’abord surpris, les hommes d�gain�rent leurs �p�es et se tourn�rent
rapidement vers elles. Elle reconnut l’un des brigands qui avait attaqu� les
voyageurs... Le premier souriait.<br
class="newline" />— Faute de riche carosse � d�pouiller, on ne sera peut-�tre pas bredouilles
ce soir...<br
class="newline" />— M�fie-toi, elles sont arm�es quand m�me.<br
class="newline" />— Et alors<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Moi aussi.<br
class="newline" />Aldariel encocha une fl�che et tendit son arc dans leur direction. Elle
entendit son amie d�gainer son �p�e � c�t� d’elle, et s’adresser �
eux.<br
class="newline" />— Faute de riche carosse, vous pouvez aussi rester en vie ce soir. Faites
encore un pas, et vous �tes morts.<br
class="newline" />Deux des hommes h�sit�rent. Le premier qui avait parl� ne sembla pas
prendre la menace au s�rieux, et se mit � courir dans leur direction. Elle
prit une grande inspiration, ajusta sa cible et l�cha les doigts. Il s’effondra �
ses pieds, la poitrine transperc�e d’une fl�che. Silw� �tait rest�e en garde �
ses c�t� et n’avait pas boug�. Les deux autres brigands se regard�rent, et
s’�loign�rent rapidement.
<!--l. 158--><p class="noindent" >— Bien jou�, Alda.<br
class="newline" />Son amie �tait aller rechercher sa fl�che dans le corps �tendu par terre, puis
�tait revenue pr�s d’elle, et lui souriait. Il y avait du respect et de
l’admiration dans son regard.<br
class="newline" />— Bon, on la traverse cette rivi�re<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui, oui... Est-ce qu’on va croiser d’autres brigands dans cette
for�t<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Silw�, qui s’avan�ait d�j� dans l’eau, haussa les �paules.<br
class="newline" />— J’esp�re que non. Je ne pensais pas en croiser si t�t, tout de m�me... On
va s’�loigner des sentiers humains, �a va aider je pense.
<!--l. 165--><p class="indent" > Elles travers�rent rapidement la rivi�re, puis march�rent encore un
moment, sans rien dire.<br
class="newline" />— �a va, Aldariel<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui... Un peu de mal � r�aliser, en fait.<br
class="newline" />Son amie la prit par les �paules.<br
class="newline" />— Tu as fait exactement ce qu’il fallait faire. Tu es une vraie combattante,
maintenant.<br
class="newline" />Elle sourit.
<center class="par-math-display" >
<img
src="aventuriers6x.png" alt="[
" class="par-math-display" ></center>
<!--l. 1--><p class="nopar" >
<!--l. 3--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Samantha</span>
<!--l. 5--><p class="indent" > Elle se concentra sur le pot qu’elle tenait entre les mains, et murmura
une douce m�lop�e. Une pousse germa, sortit de la terre meuble,
grandit et une superbe fleur finit par �clore. Elle eut un petit sourire
satisfait.
<!--l. 7--><p class="indent" > Elle posa le pot par terre et se redressa en soupirant. Conna�tre les
grands enchantements de la d�esse et les utiliser pour �tre fleuriste, c’�tait
un peu triste, c’est vrai. Elle avait h�te de pouvoir � nouveau endosser le
r�le de pr�tresse, et de quitter sa petite routine, mais pour cela il fallait
qu’on ait cess� de la chercher. En attendant, travailler ses enchantements
n’�tait pas inutile.
<!--l. 9--><p class="indent" > Cela faisait presque deux ans qu’elle s’�tait enfuie avec Uhr et ses amis,
et les rumeurs qu’ils avaient entendues depuis �taient plut�t bonnes.
Si tout le monde parlait de ce myst�rieux enl�vement, l’histoire se
modifiait petit � petit, et se ramifiait en de nombreuses versions toutes
plus ou moins cr�dibles. Encore un peu, et � force d’entendre des
r�cits diff�rents, ils auraient oubli� pr�cis�ment qui ils �taient, elle et
lui, et personne ne les reconna�trait, m�me au sein de la ville de
Touryre.
<!--l. 11--><p class="indent" > En attendant, elle avait repris contact avec Khil, qui �tait actuellement
install� � la capitale. Il avait beaucoup ri en entendant son histoire. En
m�me temps, il y avait de quoi... Elle sourit, puis quitta la petite cour
int�rieure o� elle faisait pousser ses plantes pour p�n�trer dans la boutique.
Malgr� l’heure tardive, quelqu’un venait d’y entrer.
<!--l. 13--><p class="indent" > Un soldat se tenait dans l’entr�e de la boutique. Grand, muscl�, v�tu
d’une cotte de mailles sur d’une tunique brune et un pantalon gris, ainsi que
des solides bottes de cuir �pais. Une ceinture � laquelle pendait une �p�e
compl�tait sa tenue. Elle lui sourit.<br
class="newline" />— Uhr<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Tu as fini ta journ�e<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il soupira.<br
class="newline" />— Oui, enfin. Ce n’�tait pas de tout repos...<br
class="newline" />— Quel genre de probl�me<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oh, rien de tr�s grave. Mais devoir annoncer � une femme la mort
tragique de son compagnon, ce n’est jamais dr�le...<br
class="newline" />Il s’assit sur un petit si�ge, pendant qu’elle fermait la boutique.<br
class="newline" />— Elle devait �tre effondr�e...<br
class="newline" />— Oui, et je t’avoue que j’�tais plut�t mal � l’aise. Surtout que c’est plut�t
le genre magicienne sp�cialis�e dans le combat que douce et d�licate �pouse
�plor�e...<br
class="newline" />— A�e. Elle n’a pas trop mal r�agi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Bah, comme quelqu’un qui apprend la mort de son compagnon, que
veux-tu...<br
class="newline" />— Il �tait magicien, lui aussi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui. Il a eu une dispute avec un confr�re. Tous deux ont p�ri dans un
incendie ravageur.<br
class="newline" />Samantha frissonna. Les disputes entre magiciens, �a ne plaisantait pas. Les
pr�tres, au moins n’�taient pas comme �a... Enfin, � bien y r�fl�chir, il y
avait quand m�me des sacr�es tensions parfois. Et puis, hm, son
� enl�vement � ne s’�tait pas fait dans la d�licatesse...
<!--l. 28--><p class="indent" > Elle prit un tabouret, s’assit � c�t� de lui et lui prit le bras.<br
class="newline" />— Sur quoi travaillaient ces magiciens, pour en venir aux mains comme
�a<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Enfin, aux mains... fa�on de parler. Juste par curiosit�.<br
class="newline" />— Je ne suis pas charg� directement de l’enqu�te. Mais d’apr�s ce que j’ai
compris, l’un travaillait sur des cr�atures exotiques fortement li�es � la
magie. L’autre �tait un soigneur et m�tamorphe.<br
class="newline" />Elle fron�a les sourcils. Elle ne s’int�ressait pas vraiment aux diff�rentes
branches de la magie, mais elle connaissait les grands axes de travail des
magiciens, et pourtant elle n’avait jamais entendu parler de m�tamorphose.<br
class="newline" />— M�tamorphe<span class="frenchb-thinspace"> </span>? �a existe, �a<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je ne sais pas, visiblement oui.
<!--l. 35--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Uhr</span>
<!--l. 37--><p class="indent" > Elle ne disait rien, mais il voyait bien que le sujet l’interpellait.
Depuis qu’il �taient revenus de Touryre, elle avait endoss� le r�le
d’une fleuriste, d’une jeune femme mod�le de la cit� –elle portait
actuellement une jupe rouge sombre, un chemisier blanc et un petit corset
noir–, mais il savait bien que derri�re, elle br�lait d’envie de faire
de grandes choses. Ils savaient tous deux qu’ils devaient attendre
encore un peu, que leurs visages soient oubli�s, mais ensuite, que
feraient-ils<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 39--><p class="indent" > Il avait pens� � que feraient-ils � et non � que fera-t-elle �. Encore. Il
savait que leur aventure les avait beaucoup rapproch�s –et m�me plus–,
mais de l� � penser de la sorte<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 41--><p class="noindent" >— Quand m�me, un m�tamorphe... Tu ne trouves pas �a bizarre<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il sursauta, interrompant le fil de ses pens�es.<br
class="newline" />— Tu penses � quoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— D�j� c’est surprenant qu’ils se soient tous les deux tu�s. Qu’il n’y en ait
pas un qui ait pris le dessus.<br
class="newline" />— Tu verrais l’incendie qu’il y a eu, tout l’appartement a �t� ravag� il
para�t...<br
class="newline" />— Oui, mais enfin, � force de manipuler le feu, ils devraient �tre habitu�s �
le g�rer non<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— O� tu veux en venir<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle haussa les �paules. <br
class="newline" />— Je me demande si c’est vraiment un accident et s’ils sont vraiment
morts.<br
class="newline" />— Aucune id�e. Mais tu sais, ce n’est pas � toi ni � moi que l’enqu�te a �t�
confi�e... Et puis comment le v�rifier<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle se redressa et lui sourit.<br
class="newline" />— Je peux le faire.<br
class="newline" />— Comment<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Trouve moi un objet qui leur appartient. N’importe lequel, et je te donne
la r�ponse.
<!--l. 57--><p class="indent" > Il consid�ra un instant cette proposition. Il devait admettre qu’il �tait
un peu curieux d’en savoir plus, mais ce n’�tait pas son travail...
<br
class="newline" />— Mais �a ne va pas �tre �vident de se procurer de tels objets. Je te
rappelle que je ne suis pas charg� de l’enqu�te, et leurs appartements sont
sous scell�s maintenant...<br
class="newline" />Elle lui sourit.<br
class="newline" />— Ne connais-tu pas quelqu’un qui pourrait y p�n�trer discr�tement<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 62--><p class="indent" > Si, �videmment. Mais il n’avait pas vraiment envie de se m�ler de cette
histoire, ni d’y inclure Farl. Il le voyait peu ces derniers temps, et avait not�
son humeur plut�t maussade. Depuis que Silw� avait quitt� la garde, il y a
six mois, il voyait bien que celui-ci n’�tait plus aussi enthousiaste
qu’avant. Mais cela dit, une telle histoire lui changerait peut-�tre les
id�es.<br
class="newline" />— Tu crois que Farl aimerait s’en m�ler<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Bah, c’est un plan douteux. Bien s�r qu’il aimerait s’en m�ler.
<!--l. 66--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Farl</span>
<!--l. 68--><p class="indent" > Cela faisait longtemps qu’il n’avait pas rev�tu les v�tements sombres
d’un assassin. Depuis qu’il avait d�cid� de changer de voie, il n’avait jou� �
ce jeu l� qu’� deux ou � trois occasions. Avait-il perdu la main<span class="frenchb-thinspace"> </span>? D�s qu’il
avait une occasion, il s’effor�ait de s’entra�ner, discr�tement, au
maniement de ses armes, � l’escalade, et � �tre furtif. M�me en tunique
orange. Il n’�tait pas s�r de bien savoir pourquoi et dans quel but,
d’ailleurs. Il appr�ciait �norm�ment son travail de m�nestrel, mais... il
n’arrivait pas totalement � couper tous les ponts avec son ancienne
vie.
<!--l. 70--><p class="indent" > Il sortit de chez lui par la fen�tre. Tout �tait calme, dans la rue. Il glissa
sans bruit au sol et se dirigea vers le centre-ville. Aller chercher un objet
personnel de ces deux mages... et les remettre en place apr�s. Quelle dr�le
d’id�e<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Mais Samantha semblait savoir ce qu’elle faisait. Et puis, personne
ne le saurait...
<!--l. 72--><p class="indent" > Il leva les yeux. Le b�timent devant lui portait les traces fra�ches du
terrible incendie. Cet immeuble de trois �tages, abritant plusieurs locataires,
avait failli finir totalement en ruine. Au dernier �tage, les fen�tres avaient
�t� scell�es � l’aide de panneaux de bois. C’�tait l�, dans l’appartement de
feu le mage Mortag qu’il devait aller. Tout en constatant que cette
expression �tait d’assez mauvais go�t vue la situation, il escalada
rapidement le mur, d�bloqua ais�ment un des panneaux de bois et se glissa
� l’int�rieur.
<!--l. 74--><p class="indent" > Il dut allumer une petite bougie de main pour y voir, tellement
l’int�rieur �tait sombre. Ah, s’il avait les yeux d’elfe de Silw�... Il secoua la
t�te. Ce n’�tait pas tellement le moment de penser � �a. Toute la
pi�ce �tait carbonis�e, et les deux traces de craie blanche au sol,
dessinant les contours des deux corps, ressortaient d’autant plus. Il
n’allait rien trouver ici. Il s’avan�a pr�cautionneusement vers la pi�ce
qui devait �tre la chambre, et finit par trouver, sous un meuble,
une broche de m�tal � demi fondue. Il aurait peut-�tre du mal �
trouver mieux, et puis c’�tait toujours un objet personnel, m�me
ab�m�. Samantha lui avait dit qu’elle se d�brouillerait m�me dans ce
cas.
<!--l. 76--><p class="indent" > Le second b�timent qu’il devait visiter, la demeure du mage Septim,
�tait un immeuble � quelques rues de l�, dans une zone un peu plus ais�e. Il
semblait avoir plus de moyens. Fort heureusement, il n’�tait pas plus
surveill�, et la fen�tre ne lui r�sista pas plus longtemps que les panneaux de
bois de l’autre demeure.
<!--l. 78--><p class="indent" > � l’int�rieur, un salon propre, des affaires tr�s bien rang�es –pour
quelqu’un qui n’avait pas forc�ment pr�vu de mourir ce soir l�– et
quelques d�corations. Il ne fallait pas tra�ner. Il se saisit d’un bougeoir
ouvrag� qui semblait avoir �t� utilis� r�cemment, et courut rejoindre
Samantha.
<!--l. 80--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Samantha</span>
<!--l. 82--><p class="noindent" >— Alors<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle s’avan�a dans la petite pi�ce, o� l’attendaient Farl et Uhr avec
impatience et inqui�tude. <br
class="newline" />— Tu en as mis du temps...<br
class="newline" />— Je voulais �tre s�re.<br
class="newline" />Elle s’assit � table avec les deux hommes, posant les deux objets au
centre.<br
class="newline" />— Ce type-l�, Mortag, n’est plus de ce monde, c’est s�r.<br
class="newline" />Elle d�signa la broche fondue.<br
class="newline" />— Par contre, l’autre est vivant.<br
class="newline" />— Quoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Ils avaient sursaut� en m�me temps lorsqu’elle avait d�sign� le bougeoir.<br
class="newline" />— J’ai bien v�rifi� plusieurs fois. Il est en vie, j’en suis certaine.<br
class="newline" />Ils marqu�rent un instant de silence. Tous suivaient la m�me pens�e.<br
class="newline" />— Donc ce n’est pas un accident, c’est un meurtre.<br
class="newline" />Elle hocha la t�te.<br
class="newline" />— Cette histoire de m�tamorphose m’a donn� envie de v�rifier. Avec une
telle comp�tence, il doit �tre ais� de changer de visage, ou de changer celui
d’un cadavre...<br
class="newline" />— C’est bien beau, mais que fait-on<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Je ne peux pas d�barquer � la garde
en leur expliquant ce qu’on a fait...<br
class="newline" />Farl se leva et ramassa les objets.<br
class="newline" />— D’ailleurs, je vais aller les remettre vite fait. Il ne faudrait pas qu’on
s’aper�oive qu’ils ont disparu... On ne sait jamais. Je vous laisse d�battre
pendant ce temps.
<!--l. 101--><p class="indent" > Il ouvrit la porte et la silhouette sombre disparut dans la nuit. Elle
regarda Uhr.<br
class="newline" />— Je me sens mal � l’aise de garder un tel secret. Si la garde le sait t�t, ils
auront peut-�tre une chance de retrouver le coupable avant qu’il ne
disparaisse pour de bon...<br
class="newline" />— C’est vrai, mais je risque ma carri�re en faisant �a. J’h�site... M�me si
effectivement il faudrait leur dire. Peut-�tre les aiguiller sur cette
piste<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Ils vont perdre trop de temps... C’est tellement b�te... Pourquoi n’ont-ils
pas pens� � faire appel � un pr�tre pour �a<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Parce qu’il fallait deviner que les pr�tres ont ce genre de pouvoir<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il me
semble que ce n’est pas de notori�t� publique...<br
class="newline" />Elle soupira.<br
class="newline" />— Tu as raison. Attendons le retour de Farl, et nous discuterons de �a
ensuite.
<!--l. 109--><p class="indent" > Elle rapprocha sa chaise de la sienne et posa sa t�te sur son �paule.
<!--l. 111--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Farl</span>
<!--l. 113--><p class="indent" > De nouveau dans la chambre carbonis�e, il prit bien soin de remettre la
broche � sa place, et d’effacer toutes ses traces. Il avait fait de m�me chez
Septim, tout �tait bon. Personne ne saurait qu’il �tait pass� par
l�.
<!--l. 115--><p class="indent" > Il sursauta soudainement. De la lumi�re et des bruits de pas
lui parvinrent depuis la pi�ce principale, par laquelle il �tait entr�.
Son sang se gla�a. Quelqu’un �tait entr�... Il �teignit rapidement sa
minuscule bougie, se plaqua contre le mur, et jeta un œil � l’autre
pi�ce.
<!--l. 117--><p class="indent" > La lumi�re n’�tait pas celle, jaun�tre, d’une bougie ou d’une lampe.
C’�tait une lumi�re blanche, presque aveuglante, qui semblait sortir
des yeux d’une silhouette de taille moyenne. Un mage<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Ici<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Cela
confirmait que quelque chose de louche se passait ici. Allait-il venir
vers lui<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Allait-il le voir, l’entendre, ou le d�tecter d’une fa�on
quelconque<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 119--><p class="indent" > La silhouette, qu’il finit par identifier comme celle d’une femme, passa
devant la porte derri�re laquelle il se tenait et s’avan�a droit vers un pan
de mur. Elle semblait l’examiner avec pr�cautions, et fit briller ses
yeux plus fort, vraisemblablement pour y voir plus clair. Un bruit
venant de l’ext�rieur la fit sursauter, et elle se retourna. Elle tenait un
b�ton de mage � la main, qu’elle avait dirig� contre le bruit, en
tremblant l�g�rement. Pas tr�s � l’aise visiblement... mais toujours aussi
dangereuse.
<!--l. 121--><p class="indent" > Elle se mit � regarder aux alentours, effray�e. Si elle se mettait � fouiller
l’appartement, elle allait finir par le voir. Deux solutions<span class="frenchb-nbsp"> </span>: sortir et
s’�chapper tout de suite, ou... �tre totalement fou.<br
class="newline" />— Puis-je savoir ce que vous cherchez ici<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle sursauta, et dirigea son regard lumineux dans sa direction. Il sortit de
la chambre, et se posa devant elle, en tentant d’avoir l’air le plus calme
possible. Ne pas d�gainer ses poignards. Ne pas avoir l’air –trop–
mena�ant...<br
class="newline" />— Qui �tes vous<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Que faites vous ici<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle semblait paniqu�e. Dans le m�me temps, des filaments aussi lumineux
que ses yeux se mirent � voler autour d’elle, de son b�ton, et se concentrer
dans sa main. Un sort... Il frissonna et leva les mains.<br
class="newline" />— Calmez vous. Je doute que vous ayiez le droit d’�tre plus ici que moi.
Peut-on discuter calmement<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle sembla marquer un instant d’h�sitation. Dans sa main, les filaments
lumineux commen�aient � prendre la teinte bleut�e d’une �toile de glace
aux bords ac�r�s... Elle se redressa.<br
class="newline" />— Je me donne ce droit. Je n’ai pas confiance dans les gardes. Je ne crois
pas � cette histoire d’accident qui a tu� mon compagnon. Alors j’ai d�cid�
de venir par moi-m�me. Et vous<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle avan�a sa main vers lui, dans laquelle, en l�vitation, l’�toile mortelle
venait de prendre forme. Il n’avait jamais combattu de magicien, et ne
savait pas qui serait le plus rapide, mais ce n’�tait pas le moment de le
tester. Il s’avan�a et sourit.<br
class="newline" />— H� bien, voyez-vous, je suis l� pour � peu de choses pr�s la m�me raison
que vous. Et j’ai de s�rieuses raisons de ne pas croire non plus � un
accident.<br
class="newline" />Elle h�sita, puis l’�toile de glace diminua l�g�rement. Des filaments s’en
�chapp�rent, comme si elle disparaissait peu � peu comme elle �tait
apparue. <br
class="newline" />— Expliquez-vous.<br
class="newline" />Il eut du mal � retenir un soupir de soulagement.<br
class="newline" />— J’ai la certitude que Septim se fait passer pour mort, mais est
vivant.<br
class="newline" />— Quoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je veux bien tout vous expliquer, mais ne pensez-vous pas qu’on serait
mieux ailleurs<span class="frenchb-thinspace"> </span>? On pourrait finir par nous voir ou nous entendre...
<!--l. 138--><p class="indent" > La magicienne le regarda en fron�ant les sourcils. Elle ne semblait pas
tout � fait s�re de pouvoir lui faire confiance, ce qui �tait compr�hensible en
fait... Lui non plus, � vrai dire. Elle finit par reprendre la parole.<br
class="newline" />— D’accord. Mais pas avant d’avoir r�cup�r� ce que je suis venue chercher
ici.<br
class="newline" />Elle fit quelques pas vers un angle de la pi�ce, qu’elle �claira de son regard
luminescent. Elle passa ses mains sur le mur de briques noircies, et en
trouva une descell�e. Elle l’extirpa avec pr�cautions, puis passa sa main
dans l’ouverture.<br
class="newline" />— Ah. Mince.<br
class="newline" />Elle lui montra. Au fond de l’ouverture se trouvait une paroi m�tallique
munie d’une serrure. Il hocha la t�te.<br
class="newline" />— Qu’est-on cens� y trouver<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle semblait extr�mement tendue, mais le � on � sembla la rassurer un
peu.<br
class="newline" />— Je sais qu’il y mettait des objets et documents auxquels il tenait.
Peut-�tre qu’ils... nous<span class="frenchb-thinspace"> </span>? donneront des indices.<br
class="newline" />Elle s’�tait mis au � nous �. M�me s’il avait senti son h�sitation, c’�tait
bon signe.<br
class="newline" />— Je ne sais pas o� il gardait la cl�. Probablement sur lui...<br
class="newline" />— Une cl�... normale<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle fron�a les sourcils.<br
class="newline" />— N’aurait-il pas prot�g� magiquement cette cachette<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle secoua la t�te.<br
class="newline" />— J’en doute. Je ne peux pas v�rifier, il y a trop de distorsions magiques
dans ce lieu, avec ce qui s’y est pass�. Mais le connaissant, il aurait pr�f�r�
une m�thode plus classique. Si de nombreux mages savent s’en sortir face �
un glyphe de protection magique, peu d’entre eux savent forcer une serrure,
en r�alit�. Enfin, de fa�on non destructrice, si vous voyez ce que je veux
dire.<br
class="newline" />Il eut un petit sourire.<br
class="newline" />— Je vois tout � fait. Et, si vous me permettez, c’est tout � fait dans mes
comp�tences.<br
class="newline" />Elle recula pour le laisser passer.<br
class="newline" />— Je vous en prie.
<!--l. 158--><p class="indent" > Il s’agenouilla devant la serrure, et sortit de sa tunique ses outils. Il avait
d�j� pratiqu� ce genre de jeu, il y a longtemps, mais les r�flexes revinrent
rapidement. La serrure �tait complexe � crocheter, mais il y parvint au bout
d’une minute. Au fond de ce qui ressemblait � un coffre d’acier, il y avait
des rouleaux de papier et un large rubis mont� sur un collier d’or. Elle eut
un sourire en les saisissant.<br
class="newline" />— Bravo. Allons regarder cela ailleurs, comme vous l’avez propos�.<br
class="newline" />— Tout � fait. Je propose de venir chez les amis qui m’ont envoy�
ici.<br
class="newline" />Elle eut un regard l�g�rement m�fiant, puis finit par accepter.
<!--l. 163--><p class="indent" > Ils marchaient dans la rue, faiblement �clair�e par quelques lampadaires.
S’ils ne croisaient pas grand monde � cette heure tardive, les rares passants
ne sembl�rent pas leur pr�ter attention. Farl avait l’habitude de ce genre de
situation<span class="frenchb-nbsp"> </span>: la tenue d’assassin �tait con�ue pour dispara�tre ais�ment dans
les ombres, mais aussi pour para�tre tout � fait normale –le noir n’�tant pas
si rare– en pleine lumi�re. La tenue discr�te id�ale en somme. N’�tant
plus �bloui par son regard magique, il pouvait d�sormais observer la
magicienne. Grande, mince, aux longs cheveux noirs, v�tue d’une
longue robe noire –pour le deuil, ou la discr�tion<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Peut-�tre les deux,
en fait–, ses traits semblaient tir�s comme si elle �tait �puis�e ou
particuli�rement �prouv�e. C’�tait probablement le cas, en fait... Il lui
aurait donn� une quarantaine d’ann�es, et sans ce visage ferm� et
ces traits tir�s, elle devait �tre belle. Elle marchait d’un air d�cid�,
sans cacher son b�ton de magie, surmont� d’une grande pierre bleu
glac�.
<!--l. 165--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Uhr</span>
<!--l. 167--><p class="indent" > Mais que faisait Farl<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il aurait d� �tre rentr� depuis un moment d�j�.
Ou �tait-ce seulement le temps qui lui paraissait si long<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il soupira. Et s’il
lui arrivait quelque chose<span class="frenchb-thinspace"> </span>? S’il �tait vu<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Le couvrir serait tr�s
compliqu�...<br
class="newline" />La t�te pos�e sur son �paule, Samantha murmura.<br
class="newline" />— Tu dors<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Non. Je m’inqui�te pour Farl.<br
class="newline" />Elle hocha la t�te.<br
class="newline" />— Moi aussi, un peu. Mais tu sais, il est tr�s dou�...<br
class="newline" />— Je sais, mais... il a mis moins de temps la premi�re fois non<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il n’a
aucune raison d’�tre plus lent cette fois-ci...
<!--l. 175--><p class="indent" > � ces mots, il entendit, non sans un certain soulagement, quatre
coups nets sur la porte d’entr�e. La silhouette sombre et famili�re
de Farl se profila. Il sursauta lorsqu’il s’aper�ut qu’il n’�tait pas
seul, et fut d’autant plus surpris de reconna�tre la personne qui
l’accompagnait.<br
class="newline" />— Zanakielle<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Mais... <br
class="newline" />� son tour, elle marqua un instant de suprise.<br
class="newline" />— N’�tes-vous pas l’un des gardes qui est venu cet apr�s-midi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il hocha la t�te.<br
class="newline" />— En effet. Farl, peux-tu m’expliquer...<br
class="newline" />Le jeune homme sourit, ferma la porte et proposa un si�ge � la magicienne.
Puis raconta l’�trange rencontre qu’il avait faite sur les lieux de ce qu’il
fallait d�sormais appeler un crime.
<!--l. 183--><p class="noindent" >— J’avais aussi un doute quand � cette histoire d’accident. Mais je sais que
la douleur d’avoir perdu mon compagnon aurait pu me rendre folle... au
moins aux yeux des autres, et rendre mes soup�ons absurdes. C’est pourquoi
je n’ai pas pens� � vous en parler. Et que je suis all�e v�rifier par
moi-m�me...<br
class="newline" />Elle fit une pause, et d�tourna le regard de la lumi�re de la bougie,
�touffant un sanglot. Il pr�f�ra ne pas relever, et prit la parole.<br
class="newline" />— Comme vous pouvez le constater, vous aviez h�las raison.<br
class="newline" />— Comment pouvez-vous �tre s�r que Septim est vivant<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 188--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Samantha</span>
<!--l. 190--><p class="indent" > Elle h�sita quelques instants. Non seulement elle n’avait r�v�l� �
personne son identit� jusque l�, mais en plus � une magicienne...
Traditionnellement, mages et pr�tres s’entendaient toujours assez mal.
Chacun faisait ses miracles dans son coin, en gardant ses secrets.
<!--l. 192--><p class="indent" > Mais l’heure n’�tait pas � ce genre de querelle.<br
class="newline" />— Je suis une pr�tresse. Je poss�de ce genre de pouvoir, sous certaines
conditions, par exemple le fait d’avoir en main un objet appartenant � ma
cible. C’est pourquoi Farl �tait sur place, il est all� prendre puis remettre
ces objets.<br
class="newline" />La magicienne eut un mouvement de recul, et la consid�ra avec un m�lange
de surprise et de d�go�t. Apr�s un instant de silence, son visage se radoucit
l�g�rement, et elle parut g�n�e.<br
class="newline" />— Excusez ma r�action. C’est idiot.<br
class="newline" />— Il n’y a pas de mal, la rassura-t-elle. Toujours est-il que j’ai la certitude
que Septim est vivant, contrairement �...<br
class="newline" />Elle s’interrompit. La magicienne s’�tait lev�e, et avait fait quelques pas,
leur cachant son visage. Samantha voyait bien que la pauvre femme �tait
terriblement �prouv�e. Mais que pouvait-elle faire<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Et si nous revenions � ce que nous avons trouv�<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle se retourna brusquement, et d�posa des objets sur la table. Une liasse
de papiers, et un collier ouvrag�. Le visage de Zanakielle �tait de
nouveau ferme et d�cid�, malgr� ses yeux l�g�rement rouges. Tous
trois hoch�rent la t�te, pr�f�rant se concentrer sur cette nouvelle
t�che.
<!--l. 201--><p class="indent" > Ils firent un premier tri rapide. Apr�s avoir mis de c�t� le bijou –qui
n’�tait vraisemblablement qu’un objet de grande valeur mis � l’abri–, et un
certain nombre de documents administratifs importants, ils trouv�rent trois
ou quatre feuilles, �crites � la main, qui ressemblaient � des notes de
recherche.
<!--l. 203--><p class="noindent" >— Effectivement, il m’avait parl� de �a... Regardez. Ce document n’est pas
de sa main, c’est une lettre qu’on lui a transmise. Un rapport d’un garde
vivant dans un village pr�s de la for�t de Sossirant. Il raconte une trouvaille
bizarre, le cadavre d’une cr�ature inhabituelle, charri�e par des d�bris de la
rivi�re.<br
class="newline" />Elle leur montra la lettre, o� on pouvait lire la description d’un insecte de la
taille d’un gros chien. Mais lorsque le garde avait voulu la nettoyer pour
l’observer plus en d�tail, la carcasse s’�tait en partie dissoute. En dessous,
avec une autre �criture, que la magicienne identifia comme celle de Mortag,
une note<span class="frenchb-nbsp"> </span>: � araknes<span class="frenchb-thinspace"> </span>? �.<br
class="newline" />— Qu’est-ce que cela<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Les araknes sont des cr�atures aujourd’hui disparues. Des sortes
d’araign�es g�antes... Ah, justement, les documents suivants en parlent<span class="frenchb-thinspace"> </span>!
<!--l. 208--><p class="indent" > Les pages suivantes �taient visiblement des notes prises � ce sujet. Ces
sortes d’araign�es –elle eut un frisson � les imaginer, et elle remarqua que
les trois autres ne semblaient pas tr�s joyeux � cette �vocation non plus–
semblaient vivre originellement dans des grottes tr�s sombres, ne
sortant que lorsqu’elles n’y trouvaient pas assez � manger, et encore,
seulement de nuit. Supportant mal la lumi�re et surtout l’eau pure, elles
n’existaient que sous les contr�es tr�s chaudes, o� il ne pleuvait
quasiment jamais. Et m�me l�-bas, jug�es trop nuisibles, elles avaient �t�
chass�es par les elfes noirs et les humains, et il n’en restait plus en
th�orie.
<!--l. 210--><p class="noindent" >— Il y aurait donc de nouveau ces cr�atures dans la for�t<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Comment<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Il est tr�s peu probable qu’elles soient apparues toutes seules, surtout
dans un environnement qui leur est hostile, ajouta Uhr.<br
class="newline" />— Oui, et s’il n’y avait que �a, pourquoi chercher � faire dispara�tre celui
qui travaille sur le sujet et ses documents<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ajouta Zanakielle.<br
class="newline" />Farl, qui avait somnol�, �puis�, en �coutant la conversation, se redressa
pour faire une remarque.<br
class="newline" />— La for�t de Sossirant est tr�s grande, largement inexplor�e il me semble,
il peut y avoir n’importe quoi, y compris des grottes assez grandes et
profondes pour y loger ces bestioles... non<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 216--><p class="indent" > Ils firent une pause pour faire le point. Si Septim avait cherch� � cacher
les d�couvertes de Mortag, c’est que quelqu’un �tait vraisemblablement en
train de les r�introduire au cœur de cette for�t. Et secr�tement.<br
class="newline" />— Mais, interrompit Uhr, il faut trouver quel est son int�r�t l�-dedans. Il,
ou elle, ou eux, ne ferait pas �a pour le plaisir de voir r�appara�tre une
pauvre cr�ature disparue.<br
class="newline" />— N’y a-t-il pas un moyen de les contr�ler d’une fa�on ou d’une autre<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
Proposa Samantha.<br
class="newline" />— Peut-�tre. Ce serait alors une arme puissante. Je me demande pourquoi
personne n’y a pens� plus t�t... il faudrait �tudier la question, et ce n’est
pas ma sp�cialit�.
<!--l. 222--><p class="noindent" >— D’un point de vue plus pratique, on fait quoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>? On dit quoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Uhr regarda les trois autres.<br
class="newline" />— Si je dis tout �a � mes sup�rieurs, je suis en mauvaise posture...<br
class="newline" />— Soit on m�ne l’enqu�te de notre c�t�, soit on leur dit. Mais on ne peut
pas ne rien faire<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />— Tu as raison, Samantha. Mais je crains que ce probl�me ne nous
d�passe.<br
class="newline" />La magicienne proposa alors<span class="frenchb-nbsp"> </span>:<br
class="newline" />— Je vais tout leur dire. Et je prendrai votre d�fense � tous les trois. Et si
jamais on vous cause des ennuis, je vous couvrirai et je trouverai moyen de
vous envoyer enqu�ter. Il est hors de question que je reste sans rien
faire.<br
class="newline" />Elle s’�tait lev�e, d�cid�e, presque en col�re.<br
class="newline" />— Vous avez raison. Je ne pourrai pas garder ce secret ind�finiment, et
mieux vaut qu’ils l’apprennent t�t. Mais discutez-en directement avec le
capitaine Mazrok. Il d�cidera ensuite d’en informer les enqu�teurs.<br
class="newline" />Elle hocha la t�te.<br
class="newline" />— En attendant, je vous propose de recopier rapidement tout ce qu’il y a
sur ces documents. Puis, il faudra les red�poser � leur place...<br
class="newline" />Ils jet�rent un œil � Farl, qui poussa un soupir.<br
class="newline" />— Bah, �a ne sera que la troisi�me fois de la nuit...
<!--l. 236--><p class="indent" > Ils hoch�rent la t�te et se mirent au travail.
<!--l. 238--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Uhr</span>
<!--l. 240--><p class="indent" > Le capitaine faisait les cent pas, tr�s �nerv�.<br
class="newline" />— J’esp�re que tu es conscient de ce que tu as fait. De ce que vous avez
fait.<br
class="newline" />Il ne r�pondit pas, tr�s mal � l’aise. La magicienne leur avait dit qu’elle irait
le voir pour leur raconter l’histoire, et prendre leur d�fense, mais � quel
point l’avait-elle fait<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Et m�me si elle avait fait de son mieux, ce n’�tait
pas elle qui �tait seule dans le bureau de Mazrok, ce n’�tait pas elle qui
risquait de perdre sa carri�re... Il r�alisa soudainement qu’elle avait perdu
pire, en fait, et cessa ses plaintes int�rieures.<br
class="newline" />— J’avais bien quelques doutes sur cette histoire d’accident. J’avais engag�
une enqu�te � ce sujet... M�me si j’admets que personne n’avait pens� �
faire appel � un pr�tre.<br
class="newline" />Il n’avait rien � r�pondre qui puisse am�liorer sa situation.<br
class="newline" />— Et aller fouiller dans des maisons sous scell�s... Y r�cup�rer des objets...
Tu te rends compte<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il baissa les yeux. Le capitaine laissait �chapper sa col�re tout haut,
comme souvent, mais il savait, pour l’avoir fr�quent�, qu’il n’�tait pas
un homme injuste. Une fois le calme revenu, il ne lui appliquerait
pas une sanction disproportionn�e. Sauf qu’objectivement, il savait
qu’il en avait m�rit� une... M�me s’il n’�tait pas seul dans cette
histoire.
<!--l. 248--><p class="indent" > Le capitaine Mazrok resta silencieux pendant quelques minutes, puis se
posta face � lui.<br
class="newline" />— Malgr� cela, vous avez tous les quatre plus avanc� dans l’enqu�te que
nous n’aurions fait en une semaine.<br
class="newline" />Il avait parl� d’une voix calme. Y avait-il un espoir<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Sauf que je suis tr�s emb�t�. Officiellement, l’enqu�te n’en est pas l�.
Officiellement, il s’agit toujours d’un accident.<br
class="newline" />Il se tut, et fit quelques pas, r�fl�chissant.<br
class="newline" />— Mais ces informations vont nous faire gagner un temps pr�cieux, surtout
si l’assassin ne sait pas qu’il est identifi�. Puisque tu es le seul au courant,
tu vas partir enqu�ter discr�tement sur ce qui se passe dans cette
for�t.<br
class="newline" />Il leva les yeux vers lui. Il lui sembla qu’il attendait une r�ponse.<br
class="newline" />— Seul<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Tu peux emmener quelques personnes de confiance avec toi. Par exemple,
les amis qui t’ont aid� dans cette t�che<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Je couvrirai vos d�penses, bien
entendu.<br
class="newline" />— Euh, d’accord.<br
class="newline" />— De mon c�t�, je vais faire avancer l’enqu�te comme je pourrai, afin de
parvenir � la m�me conclusion officiellement. Mais tu auras pris de l’avance
en attendant, une avance pr�cieuse.<br
class="newline" />Il hocha la t�te. Non seulement il �chappait au pire, mais l’id�e d’une
mission importante n’�tait pas pour lui d�plaire. Une mission avec
Samantha et Farl... s’ils acceptaient.<br
class="newline" />— Il y a cependant quelques points � r�gler. Le premier, c’est que j’aurais
besoin d’�tre en contact avec toi le plus efficacement possible, et bien
entendu discr�tement. Que ce soit pour te tenir au courant de l’enqu�te, ou
que tu m’apprennes ce que tu trouves.<br
class="newline" />— J’ai peut-�tre une id�e pour ce point, interrompit-il.<br
class="newline" />Le capitaine sembla surpris.<br
class="newline" />— Je t’�coute.<br
class="newline" />— Les pr�tres poss�dent un moyen de communiquer par la pens�e. Si je
voyage avec une pr�tresse, il m’est possible de vous tenir au courant de mon
avanc�e rapidement.<br
class="newline" />— Mh, c’est effectivement plut�t malin. Bien que je n’aie jamais
fait cela, je dois reconna�tre que c’est une bonne id�e. Soit. Tu vas
aller pr�parer ton d�part, au plus vite. Je m’occupe d’autres d�tails
techniques.
<!--l. 267--><p class="indent" > Alors qu’il tournait les talons et quittait la pi�ce, le capitaine le rappela
une derni�re fois.<br
class="newline" />— Uhr<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je devrais �tre furieux pour ce que vous avez fait, mais je suis quand
m�me un peu fier. Ne me d��ois pas pour la suite.<br
class="newline" />Un l�ger sourire marquait son visage.
<center class="par-math-display" >
<img
src="aventuriers7x.png" alt="[
" class="par-math-display" ></center>
<!--l. 2--><p class="nopar" >
<!--l. 5--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Zach</span>
<!--l. 7--><p class="indent" > Deux jours s’�taient �coul�s depuis leur m�saventure. Deux jours qui
avaient �t� plut�t calmes. En s’�loignant encore des sentiers, ils n’avaient
pas recrois� de brigands, m�me si la for�t y �tait plus dense encore. S�l�ne
commen�ait � se sentir � l’aise en for�t –ou �tait-ce une aisance avec lui<span class="frenchb-thinspace"> </span>?–
et avait beaucoup moins de difficult�s � suivre son rythme. Il se surprit � la
consid�rer comme une amie et plus une cliente � transporter d’un point �
un autre.
<!--l. 9--><p class="indent" > Elle marchait � c�t� de lui, un long b�ton de marche � la main. Il lui
avait taill� une branche qui lui servait non seulement de support pour
avancer, mais aussi –potentiellement– de moyen de d�fense. Il avait �t�
impressionn� par son courage face aux deux bandits, et avait propos� de lui
apprendre quelques techniques.
<!--l. 11--><p class="indent" > Il lui sourit alors qu’elle passait � c�t� de lui. Il sentait encore le coup
qu’elle lui avait mis dans le c�t� droit. Heureusement qu’il n’avait pas
enlev� son armure... Ou peut-�tre aurait-il eu droit � une de ses potions
bizarres<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Sa coupure � l’�paule gauche �tait compl�tement gu�rie, gr�ce �
elle. Sans �a, il aurait probablement senti la blessure le tirailler plusieurs
semaines... Elle lui rendit son sourire. La soir�e s’annon�ait plut�t
bien.
<!--l. 13--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">S</span><span
class="ecti-1095">�l</span><span
class="ecti-1095">�ne</span>
<!--l. 15--><p class="indent" > S�l�ne s’arr�ta sur le lieu de bivouac. Depuis ces quelques jours, elle
�tait � pr�sent tr�s � l’aise en for�t. Ou �tait-elle tr�s � l’aise avec son
guide particulier<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle essayait de l’imaginer accompagnant d’autres
voyageurs, mais elle doutait fort qu’il avait la m�me familiarit� avec
d’autres... Entre eux s’�tait tiss�e une solide complicit�.
<!--l. 17--><p class="indent" > Alors qu’il s’accroupissaient tous les deux pour pr�parer le feu –elle
n’avait pas sa technique, mais elle apprenait vite–, elle aper�ut, dans son
dos, quatre disques rouges, brillants, dans l’ombre. Elle se redressa
subitement.<br
class="newline" />— Zach<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Derri�re toi...<br
class="newline" />Il pivota instantan�ment en entendant le ton de sa voix.<br
class="newline" />— Qu’est-ce que c’est que...<br
class="newline" />Il n’eut pas le temps de finir sa phrase. Ce qui surgit des buissons lui
arracha un cri de surprise et d’horreur. La cr�ature ressemblait � une
araign�e, noire, de la taille d’un gros chat. Les lumi�res rouges �taient ses
yeux, qui brillaient dans les ombres de la for�t. Elle n’en avait vu
que dans des livres jusque l�, et rien que le dessin �tait d�j� peu
rassurant...<br
class="newline" />
<!--l. 23--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Zach</span>
<!--l. 25--><p class="noindent" >— Une arakne<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Zach avait d�gain� son �p�e. Lorsque la cr�ature se jeta sur lui, il fit un pas
de c�t�, et d’un geste vif, planta son arme dans son corps. La b�te roula au
sol, recroquevillant ses longues pattes, alors qu’un liquide noir coulait de sa
blessure. Rapidement, elle ne bougea plus et la lueur rouge de ses deux
paires d’yeux s’�teignit. Assez �trangement, le sang noir coula de sa lame
sans y laisser la moindre trace, comme s’il ne pouvait pas adh�rer au
m�tal.<br
class="newline" />— Quelle est cette horreur<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il leva les yeux vers S�l�ne, aussi effray�e que lui.<br
class="newline" />— Une arakne. Je n’en avais vu que dans des livres jusque l�... Je croyais
que ces cr�atures �taient �teintes, du moins sous nos contr�es. Que fait-elle
ici, je n’en sais rien...<br
class="newline" />Du bout de son b�ton, elle remua le cadavre de la b�te, retenant un frisson
d’horreur. Il remercia ses r�flexes, sans lesquels... il ne pr�f�ra pas imaginer
la suite.<br
class="newline" />— Elles attaquent rarement seules, il ne vaudrait mieux pas rester
ici...<br
class="newline" />— Attention<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Deux autres cr�atures venaient de sortir du sous-bois. Il se pla�a entre elles
et S�l�ne, et sortit son couteau de sa botte. Deux adversaires humains, il
avait d�j� fait, mais deux bestioles comme �a...
<!--l. 35--><p class="indent" > La plus grosse des cr�atures bondit, et vint s’embrocher sur son �p�e et
y resta. D’un geste ample, il d�gagea le corps inerte de la b�te de son arme
–au moins, elles n’�taient pas tr�s r�sistantes– et chercha du regard la
deuxi�me. Une douleur extr�mement vive le saisit dans la cuisse droite.
L’arakne venait d’y planter ses mandibules.
<!--l. 37--><p class="indent" > Avant qu’il n’ait le temps de la frapper de son couteau, S�l�ne se
pr�cipita, et au lieu d’utiliser son b�ton contre la cr�ature, elle lui d�versa
le contenu de sa gourde. � sa grande surprise, la b�te l�cha prise et fit un
bruit qui ressemblait � un cri de douleur. L’eau semblait la br�ler, et une
fum�e inqui�tante semblait s’�chapper de son corps. Elle s’�croula sans vie
� ses pieds.<br
class="newline" />— Les araknes ne supportent pas l’eau pure, expliqua-t-elle. Donc le
meilleur moyen de se mettre � l’abri, c’est de trouver une rivi�re ou un lac.
Et vite. M�me un petit ruisseau suffira...<br
class="newline" />Zach regarda aux alentours, craignant de voir arriver une autre de ces
horreurs, mais pour le moment, rien. Il s’adossa � un arbre et jeta un œil �
sa jambe.
<!--l. 41--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">S</span><span
class="ecti-1095">�l</span><span
class="ecti-1095">�ne</span>
<!--l. 43--><p class="noindent" >— Assieds-toi.<br
class="newline" />Il ob�it, en retenant difficilement une grimace de douleur. Elle examina la
plaie. Deux ouvertures profondes et larges, les traces des mandibules de
l’arakne. Heureusement, elle n’avait laiss� aucun morceau, mais elle savait
que ce n’�tait pas suffisant, car elles �taient venimeuses...<br
class="newline" />— Premi�re �tape, nettoyer �a. Apr�s, je vais te donner quelque chose pour
retarder la diffusion du poison...<br
class="newline" />— Poison<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Un poison qui paralyse lentement, et tue en une dizaine d’heures. Ne
bouge pas, je te dis<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />L’inqui�tude se lisait sur son visage. Elle essaya de le rassurer.<br
class="newline" />— Je sais fabriquer l’antidote pour ce genre de cas. Mais cela prend du
temps, et il faut trouver les bonnes plantes...<br
class="newline" />Il lui prit le bras.<br
class="newline" />— Donne-moi ce que tu peux, et mets-toi � l’abri de suite... Si tout se
passe bien, tu peux peut-�tre revenir � temps avec l’antidote. Sinon...
au moins tu seras en s�curit�. Pas la peine d’�tre deux � mourir
ici.<br
class="newline" />Elle le regarda. Elle r�alisa alors que pour rien au monde elle ne le laisserait
ici. <br
class="newline" />— Oh, et puis zut.<br
class="newline" />Il n’y avait qu’une seule solution, et elle le savait. Elle rejeta ses cheveux en
arri�re, d�gagea son bras de sa prise, et se releva.
<!--l. 57--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Zach</span>
<!--l. 59--><p class="indent" > Il la vit se redresser, et son regard se mettre � briller. Plus pr�cis�ment,
des filaments de lumi�re blanche, l�g�rement moir�s, travers�rent son iris.
Elle l�cha son b�ton de marche, et apparut alors dans sa main droite, � la
place, un long b�ton, couleur bois, fait de deux branches entrelac�es,
presque aussi grand qu’elle. Au sommet, les deux branches entouraient ce
qui ressemblait � une pierre, qui brillait de la m�me fa�on que ses
yeux.
<!--l. 61--><p class="indent" > Une sorci�re<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Il ne savait pas s’il devait hurler, ou s’enfuir en
courant. De toutes fa�ons, vue sa jambe, elle le rattraperait vite. Et �
choisir, il pr�f�rait mourir de la main de S�l�ne que par un poison
lent...
<!--l. 63--><p class="indent" > Ses yeux brill�rent plus fort alors qu’elle s’approchait de lui. D’autres
filaments de lumi�re semblaient voler, partant ou arrivant vers la pierre de
son b�ton. Certains semblaient converger vers sa main gauche, qui devenait
de plus en plus lumineuse. Elle �tait magnifique ainsi. Magnifique et
terrible.
<!--l. 65--><p class="indent" > Elle posa sa main sur sa cuisse. Stup�fait, il sentit la douleur s’apaiser,
les chairs se refermer, lentement. La lueur presque aveuglante de ses yeux
s’apaisa, les filaments lumineux disparurent. Sous sa main, toujours pos�e
d�licatement, il savait que sa jambe �tait intacte. Les yeux de S�l�ne
�taient de nouveaux normaux. Quelques gouttes de sueur perlaient de son
front. Elle le regardait intens�ment.
<!--l. 67--><p class="indent" > Tremblant, il posa sa main sur la sienne. Une partie de lui-m�me lui
criait de s’enfuir pendant qu’il en �tait encore temps. Qu’il risquait de
tomber sous son charme. Qu’elle �tait en train de l’ensorceler. Une autre
voix, plus raisonnable, lui posait des milliers de questions. Les sorciers
devaient-ils forc�ment �tre mal�fiques, apr�s tout<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ne venait-elle pas de lui
sauver la vie<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Qu’avait-elle fait de mal<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Une troisi�me petite voix, mais
criant plus fort que les autres, lui proposait de ne rien dire, et de la serrer
dans ses bras. Les trois consciences finirent par se mettre d’accord sur le fait
que, s’il voulait �viter de tomber sous son charme, c’�tait d�j� bien trop
tard.
<!--l. 69--><p class="noindent" >— Merci.<br
class="newline" />Elle lui sourit, puis son visage se ferma. <br
class="newline" />— Inutile de te dire que, d�sormais, tu partages un secret dangereux...<br
class="newline" />— Je sais. Tu risques d’�tre br�l�e vive, et moi avec, rien que pour avoir
pris ta d�fense.<br
class="newline" />Elle sembla un peu rassur�e de l’entendre dire qu’il la d�fendrait sans
conditions.<br
class="newline" />— J’esp�re que personne ne nous a vus, ou entendus...<br
class="newline" />Comme r�pondant � son interrogation, des �clats de voix leur parvinrent. Ils
sursaut�rent tous les deux.<br
class="newline" />— Il y a des gens<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Je suis perdue<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />� l’id�e de devoir mourir de la main de ses pairs apr�s avoir surv�cu aux
araknes, Zach ne r�fl�chit pas longtemps. Il ramassa son �p�e, et bondit
dans la direction des voix.
<!--l. 79--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Aldariel</span>
<!--l. 81--><p class="noindent" >— Aldariel... C’est quoi ces horreurs<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Les deux cr�atures gisaient sur le sol, devant elles. L’une �tait transperc�e
d’une fl�che, l’autre fendue en deux. <br
class="newline" />— �a me dit quelque chose... je crois que j’ai vu �a dans un livre. Des
araknes, si mes souvenirs sont bons<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Attention, l�<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Deux autres b�tes s’approchaient � grande vitesse. Silw� bondit, et cueillit
au vol la premi�re. Aldariel voulut armer une fl�che, mais elle �tait trop
pr�s pour avoir le temps de viser. Elle fit deux pas rapides en arri�re pour
tenter de gagner du temps. La cr�ature avait bondi. Alors qu’elle tentait
d’esquiver, elle vit son amie, � sa gauche, s’interposer, et son �p�e la
transpercer d’un coup d’estoc.
<!--l. 86--><p class="indent" > Elle recula encore de quelques pas, l’arc tendu. Plus d’autre arakne en
vue. Elle se tourna alors vers son amie, agenouill�e au sol, le visage crisp�
par la douleur.<br
class="newline" />— Sil<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />L’�p�e avait si bien travers� la b�te que son corps s’�tait enfonc� jusqu’� la
garde, et que ses mandibules s’�taient plant�es profond�ment dans son
poignet. S’asseyant � ses c�t�, et tout en surveillant les environs, Aldariel
commen�a par d�gager avec pr�caution les pinces de l’arakne. Son
avant-bras comportait deux entailles. L’une des mandibules avait
�t� amortie par la bande de cuir qui entourait son poignet, l’autre
s’�tait plant�e directement dans la chair, et la plaie �tait inqui�tante.
<br
class="newline" />— Avant toute chose, tu vas boire �a.<br
class="newline" />Elle sortit un petit flacon de son sac.<br
class="newline" />— Un antipoison. Il met un peu de temps � faire effet, donc bois-le de
suite.<br
class="newline" />Silw� ob�it, tandis qu’elle cherchait dans son sac de quoi nettoyer la plaie.
C’est alors qu’elle aper�ut, dans l’obscurit�, une lueur vive derri�re les
arbres, � une trentaine de m�tres environ. D’autres araknes<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ou pire
encore<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Qu’est-ce que c’est que �a<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle ramassa son arc, et Silw� son �p�e, en grima�ant l�g�rement. Toutes
deux avanc�rent vers la lueur qui s’estompait lentement.<br
class="newline" />— �a ira ton bras, Sil<span class="frenchb-thinspace"> </span>? murmura-t-elle en voyant le sang couler de la
plaie.<br
class="newline" />— On fera avec...<br
class="newline" />La lueur, qui diminuait, semblait venir de derri�re un large arbre. Il y avait
des voix. Sentant le danger, Aldariel se mit � l’abri dans un buisson, tandis
que son amie, toujours devant elle, prit son �p�e � deux mains et
s’approcha de l’arbre. C’est alors qu’un homme surgit et se rua sur
Silw�.
<!--l. 99--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Zach</span>
<!--l. 101--><p class="indent" > Son adversaire �tait plus petit que lui, mais il parait ses coups avec
pr�cision. Il ne devait pas le sous-estimer. Sur le troisi�me coup qu’il lui
porta, il sentit pourtant une certaine faiblesse dans la parade. Maintenant le
contact de sa lame contre la sienne, il for�a son adversaire � �carter son
�p�e vers la gauche. Dans le m�me mouvement, il lui donna un coup
d’�paule qui l’envoya contre l’arbre, tout en saisissant son poignet de sa
main libre.
<!--l. 103--><p class="indent" > � sa grande surprise, l’adversaire l�cha son arme en laissant �chapper un
l�ger g�missement de douleur. L’avant-bras qu’il maintenait �tait
couvert de sang. Il constata alors que celui qu’il avait pris, au vu de
sa silhouette, pour un adolescent, �tait en fait une jeune femme.
Une elfe, m�me, corrigea-t-il. Stup�fait, il laissa passer une seconde
qui faillit lui �tre fatale. De sa main gauche et valide, l’elfe avait
d�gain� une fine dague, qu’il para de justesse, tandis qu’un violent
coup de genou le cueillit dans les c�tes et le fit reculer de quelques
pas.
<!--l. 105--><p class="indent" > Elle chercha � se d�gager de sa prise sur son poignet bless�, mais il
garda les doigts serr�s. Il esquiva un nouveau coup de dague en se
rapprochant d’elle. Il �tait de toutes fa�ons un peu trop pr�s pour utiliser
convenablement son �p�e. Entourant ses �paules de son bras droit, il la
souleva d’un coup de hanche et l’accompagna au sol. Sous le choc, le souffle
coup�, la jeune femme l�cha sa dague. Maintenant fermement son poignet
droit par terre, il posa son genou contre sa poitrine pour l’emp�cher de se
relever. Elle cessa de chercher � se d�gager lorsqu’il posa la lame de son
�p�e � plat sur sa gorge.
<!--l. 107--><p class="indent" > C’�tait la premi�re fois qu’il voyait une elfe de si pr�s. Il l’observa avec
curiosit�. Ses cheveux fins �taient retenus par une longue tresse, et ses yeux
bleus marquaient un m�lange de col�re et de peur. Mais � part ses oreilles
pointues, elle n’�tait pas si diff�rente physiquement d’une humaine,
finalement... Elle portait une armure l�g�re de cuir, qui ressemblait
beaucoup � la sienne. En revanche, la tunique en dessous �tait d’un tissu
�trange, en apparence tr�s l�ger, qu’il n’avait jamais vu. Son regard
se porta vers son avant-bras. La blessure qui s’y trouvait rappelait
beaucoup une autre qu’il avait subie il y a tr�s peu de temps... Elle
aussit s’�tait battue contre des araknes<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Le souvenir de la douleur
associ�e lui donna des frissons, et il desserra tr�s l�g�rement son
�treinte.
<!--l. 109--><p class="indent" > Reprenant ses esprits, il appuya l�g�rement la lame contre sa
gorge.<br
class="newline" />— Tu vas me dire qui tu es, ce que tu fais l�, et pourquoi tu nous
espionnes.<br
class="newline" />Il n’eut pas le temps d’attendre sa r�ponse. Zach sentit soudainement une
pointe ac�r�e se poser sur sa nuque. Il aurait d� se douter qu’elle n’�tait pas
seule...<br
class="newline" />— Je vais r�pondre � sa place. Elle, c’est le garde du corps de la princesse
elfe Aldariel Lalril�, qui t’ordonne de la l�cher imm�diatement si tu ne veux
pas que cette fl�che traverse ton cou.<br
class="newline" />Le ton de la voix �tait imp�ratif, et la pointe dans sa nuque l’�tait
tout autant. Un regard rapide en arri�re lui laissa entrevoir une
silhouette d�licate, v�tue de vert p�le, arm�e d’un arc tendu vers
lui.
<!--l. 115--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Silw</span><span
class="ecti-1095">�</span>
<!--l. 117--><p class="indent" > Elle n’avait rien pu faire. Elle enrageait d’�tre ainsi bless�e, et � la merci
de son ennemi. Le brigand qui la maintenait au sol l’observait avec une
fascination inqui�tante. Son arme �tait pos�e � plat sur sa gorge,
signe qu’il n’avait –apparemment– pas l’intention de la tuer tout de
suite. Peut-�tre comptait-il abuser d’elle avant<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ce n’�tait gu�re
mieux...<br
class="newline" />— Tu vas me dire qui tu es, ce que tu fais l�, et pourquoi tu nous
espionnes.<br
class="newline" />Son ton la suprit presque autant que sa phrase. Il y avait une note petite
d’inqui�tude dans sa voix. Que voulait-il, finalement<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle tenta de
reprendre son souffle, mais le poids de son genou sur sa poitrine n’aidait pas.
Et son bras, qui la faisait souffrir... Elle s’appr�tait � r�pondre, quand elle
aper�ut, derri�re lui, la silhouette de sa compagne, son arc tendu, le
menacer � son tour.
<!--l. 121--><p class="indent" > L’homme sembla h�siter. Si Aldariel d�cidait de le tuer, il avait de
toutes fa�ons le temps de l’�gorger avant de mourir. De m�me, il
pouvait choisir de la tuer elle, mais le payerait de sa vie. Il sembla
choisir la solution raisonnable. Elle le vit �loigner lentement son �p�e
de sa gorge, sans la quitter des yeux. Mais il ne l’avait pas encore
l�ch�e.
<!--l. 125--><p class="indent" > C’est alors que de derri�re l’arbre surgit une jeune femme, portant une
longue robe violette et un b�ton de magie dans la main droite.<br
class="newline" />— L�che-le imm�diatement.<br
class="newline" />Ses yeux et son b�ton se mirent � briller, et des filaments d’une lumi�re
presque aveuglante vinrent se concentrer juste au dessus de son autre main,
qu’elle tenait paume vers le ciel. Une sph�re lumineuse s’y forma, d’abord
rouge sombre, puis qui s’�claircit progressivement jusqu’� devenir quasiment
blanche. Une boule de feu...
<!--l. 129--><p class="indent" > Toujours immobile, impuissante, elle vit Aldariel h�siter, tandis que
l’homme avait pris une expression m�lant soulagement, crainte et surprise.
C’est alors qu’elle remarqua des lueurs rouges, dans l’obscurit�, derri�re la
magicienne. Elle essaya de crier, mais avec le poids qui �crasait sa poitrine,
seuls quelques mots en sortirent.
<!--l. 131--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Zach</span>
<!--l. 133--><p class="indent" > Il sentit un mouvement venant de l’elfe qu’il tenait toujours plaqu�e au
sol. Son visage �tait tourn� vers S�l�ne, mais son regard semblait focalis�,
non pas sur la jeune femme, mais derri�re...<br
class="newline" />— Les... ara... Il porta son regard dans sa direction, essayant de ne
pas se faire aveugler par la lumi�re �mise par la magicienne. Puis il
hurla.<br
class="newline" />— S�l�ne, �carte-toi<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Il entendit alors avec effroi, dans son dos, le bruit de la corde d’un arc qui se
d�tendait.
<!--l. 139--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">S</span><span
class="ecti-1095">�l</span><span
class="ecti-1095">�ne</span>
<!--l. 141--><p class="indent" > S�l�ne ob�it instinctivement et fit un pas rapide vers la droite. Une
�norme arakne bondit � l’endroit o� elle se tenait quelques secondes
plus t�t, et y fut accueillie par une fl�che droit dans un de ses yeux.
La b�te continua sa course et s’effondra, inerte, aux pieds de Zach,
stup�fait. Une seconde cr�ature, arrivant du m�me endroit, se dirigea
droit vers elle. Avant de lui laisser le temps de r�agir, elle reprit le
contr�le de sa boule de feu –toujours suspendue dans les airs, l� o� elle
l’avait laiss�e– et la dirigea de toute la force de sa volont� vers la
b�te, qui ne fut bient�t plus qu’un petit tas de cendres � l’odeur
d�sagr�able.
<!--l. 144--><p class="indent" > Elle tourna son regard vers les trois combattants. Zach avait l�ch� sa
prisonni�re, et se tenait debout, l’�p�e � la main. L’arch�re armait une
nouvelle fl�che, en observant les environs, tandis que l’autre elfe, bless�e, se
redressait avec difficult�s. <br
class="newline" />— Je sugg�re qu’on r�gle nos diff�rents plus tard, une fois � l’abri des
araknes, proposa-t-elle calmement. Il pourrait tr�s bien y en avoir
d’autres...<br
class="newline" />L’arch�re et Zach se fix�rent d’un air m�fiant quelques instants, puis
hoch�rent la t�te. S�l�ne aper�ut alors, � ses pieds, une �p�e. Celle de la
guerri�re elfe. Elle h�sita quelques instants.
<!--l. 148--><p class="noindent" >— D’autres araknes<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />C’�tait la voix de l’arch�re, montrant d’un signe de t�te un nouveau groupe
de cr�atures. S�l�ne cessa de se poser la question. S’ils devaient combattre
ces horreurs, ils allaient avoir besoin d’un bras suppl�mentaire. Au sens
propre... Elle ramassa l’�p�e et courut vers la jeune elfe, toujours au sol,
grima�ant de douleur.<br
class="newline" />— ’Bouge pas, je m’occupe de �a.<br
class="newline" />Elle posa d�licatement sa main sur le poignet bless�, et se concentra sur son
sort.
<!--l. 154--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Aldariel</span>
<!--l. 156--><p class="indent" > Sans avoir besoin de se concerter, Aldariel et l’�trange homme
s’�taient plac�s de part et d’autre de la magicienne et de Silw�, pour
les prot�ger du mieux qu’ils pouvaient. Mais son arc n’�tait pas
l’arme id�ale contre les araknes. Elles arrivaient vite, et elle devait
tirer quasiment � bout portant. Elle se demandait ce que faisait la
magicienne, dans son dos, mais elle ne pouvait pas s’en pr�occuper
maintenant. Elle l�cha un trait sur une autre cr�ature, de justesse.
Aurait-elle assez de fl�ches<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ah, si Silw� �tait � leurs c�t�s pour
combattre...
<!--l. 158--><p class="indent" > Comme r�pondant � sa pens�e, elle vit la silhouette famili�re passer
entre elle et l’homme, et bondir, l’�p�e � la main, sur les cr�atures. Son
avant-bras �tait intact. D’un coup de taille, elle trancha litt�ralement en
deux une des araknes qui arrivait sur elle, et fit de m�me sur la
seconde, d’un retour rapide de lame. De l’autre c�t�, elle vit la jeune
magicienne pr�parer une petite boule de feu, qu’elle dirigea avec
pr�cision sur une autre cr�ature. Voir ces renforts arriver lui redonna
courage.
<!--l. 160--><p class="indent" > Quelques instants plus tard, le calme se fit. Les quatre jeunes gens,
toujours dos � dos, laiss�rent passer quelques secondes, reprenant leur
souffle. Des dizaines de cadavres d’araknes gisaient au sol.<br
class="newline" />— Il ne faut pas rester ici. On ne sait pas... combien il y en a.. Il faut... ooh
ma t�te...<br
class="newline" />C’�tait la voix, affaiblie de la magicienne. Aldariel se tourna vers elle. Elle
�tait tr�s p�le, des gouttes de sueur coulaient de son front, et elle
tremblait. Son compagnon l’avait d�j� attrap�e par les �paules pour la
soutenir.<br
class="newline" />— S�l�ne, tu vas bien<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Sans r�pondre, la jeune femme s’effondra dans ses bras. <br
class="newline" />— �puisement magique<span class="frenchb-thinspace"> </span>? proposa-t-elle.<br
class="newline" />— Comment �a<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />L’humain semblait paniqu�.<br
class="newline" />— Lorsque les mages invoquent beaucoup de sorts puissants d’affil�e, ils
s’�puisent tr�s vite, expliqua-t-elle. <br
class="newline" />Elle posa sa main sur le front de la jeune magicienne, et hocha la t�te en
guise de confirmation. Elle connaissait tr�s bien ce ph�nom�ne, tr�s
classique chez les mages.<br
class="newline" />— Et on fait quoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Aldariel haussa les �paules.<br
class="newline" />— Rien, elle a juste besoin de se reposer. Nous aussi de toutes fa�ons, et il
faut qu’on se mette � l’abri, rien ne nous dit qu’il ne va pas y avoir d’autres
araknes.<br
class="newline" />— Elle avait dit... que ces bestioles ne supportaient pas l’eau pure, et qu’il
fallait trouver une rivi�re. De m�moire, il y en a une dans cette
direction.<br
class="newline" />Elle hocha la t�te, tout en ramassant ses fl�ches aux alentours. Cela lui
revenait maintenant, elle avait bien lu quelque chose comme �a.
<br
class="newline" />— Transporte-la, on vous couvre.<br
class="newline" />L’homme les regarda toutes les deux. Il sembla h�siter une seconde, puis
rangea son �p�e, prit la magicienne inanim�e dans ses bras ainsi que son
b�ton, et se mit en route.
<!--l. 178--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Zach</span>
<!--l. 180--><p class="indent" > Ils avan�aient en silence dans la for�t. L’arch�re �tait � sa gauche, et la
guerri�re � sa droite. Tous trois scrutaient les environs avec inqui�tude,
mais rien n’arrivait. Pouvaient-ils �tre venus � bout de ces horreurs,
finalement<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 182--><p class="indent" > Il repensa � la bataille qu’ils venaient de mener. L’arch�re n’avait pas
rat� une seule fois sa cible, m�me si elle n’�tait pas toujours dans la
meilleure des postures pour toucher les cr�atures. Quand � la guerri�re...
�tait-ce la rage d’�tre rest�e passive pendant toute une partie de l’action,
bless�e<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Le contrecoup de la douleur<span class="frenchb-thinspace"> </span>? L’efficacit� meurtri�re qu’elle avait
mise en œuvre, une fois gu�rie, �tait � la fois rassurante et inqui�tante.
Rassurante parce qu’elle �tait � c�t� d’elle, son �p�e tir�e, pr�te �
bondir sur le moindre danger les mena�ant. Inqui�tante, parce qu’elle
�tait � c�t� d’elle, son �p�e tir�e... pr�te � bondir sur lui si l’envie
l’en prenait. Il savait qu’il n’aurait de toutes fa�ons pas le temps de
d�gainer son �p�e, et aucun espoir de s’enfuir avec S�l�ne dans ses
bras.
<!--l. 184--><p class="indent" > Certes, ils avaient convenu d’une tr�ve, le temps de se mettre � l’abri des
araknes. Et c’est gr�ce � S�l�ne qu’elle �tait gu�rie. Mais... que se
passerait-il une fois qu’ils seraient en s�curit�<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Lui pardonnerait-elle, entre
autres, de l’avoir plaqu�e au sol et menac�e lorsqu’elle �tait bless�e<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Et
si... les deux elfes ne tenaient pas leur parole<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il d�testait se sentir ainsi,
� la merci de ces deux inconnues. Mais avait-il le choix, de toutes
fa�ons<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il �tait le seul assez fort pour pouvoir porter facilement
S�l�ne. � bien y r�fl�chir, il n’aurait pas laiss� quelqu’un d’autre le
faire.
<!--l. 186--><p class="indent" > Le son de l’eau qui coule se fit rapidement entendre, et la large rivi�re,
calme, apparut sous leurs yeux.<br
class="newline" />— Nous y voici. Il n’y a plus qu’� traverser. Tu sauras nager avec
elle<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />C’�tait la voix de l’arch�re, qui s’�tait tourn�e vers lui. Il hocha la t�te,
m�me si l’id�e de se jeter � l’eau avec tout son �quipement, et la jeune
femme inanim�e ne l’enchentait gu�re.<br
class="newline" />— On n’est pas oblig�s de traverser tout de suite, proposa la guerri�re. On
peut la longer jusqu’� trouver un gu�. Il y a peu de chances que cette rivi�re
se transforme en torrent d’ici l�, et rien ne nous emp�che de nous jeter �
l’eau en cas de gros probl�me.<br
class="newline" />Ils acquiesc�rent, et suivirent le cours d’eau vers l’aval.
<!--l. 192--><p class="indent" > Ce n’est que quelques minutes plus tard qu’il remarqua que le lit de la
rivi�re s’�tait �largi, et qu’elle semblait nettement moins profonde.
Quelques rochers affleuraient m�me � la surface.<br
class="newline" />— L�, on peut peut-�tre traverser.<br
class="newline" />Sans r�pondre, l’arch�re s’avan�a dans l’eau. � mi-chemin, elle n’avait de
l’eau qu’� mi-mollet. Elle s’arr�ta et lui sourit.<br
class="newline" />— Bien vu<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Il s’avan�a � sa suite. Soudain, alors qu’elle atteignait presque la rive
oppos�e, l’elfe s’arr�ta brusquement et se retourna vers lui, les sourcils
fronc�s.<br
class="newline" />— Silw�... Tu ne m’avais pas dit que les humains voyaient tr�s mal dans
l’obscurit�<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Sans avoir besoin de se retourner, il entendit la guerri�re, qui le
suivait, s’arr�ter � son tour. La nuit �tait tomb�e depuis presque une
heure.<br
class="newline" />— Si...<br
class="newline" />Il sentait leurs regards, interrogateurs, presque mena�ants. Ce n’�tait
peut-�tre pas le moment de se lancer dans de longues explications...<br
class="newline" />— C’est une longue histoire, je vous explique apr�s, promis. Est-ce qu’on
peut se mettre en s�ret� d’abord<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />L’arch�re, devant lui, hocha la t�te, et se remit en marche.
<!--l. 204--><p class="noindent" >— On peut peut-�tre s’arr�ter l�<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Les deux elfes regard�rent les alentours, et hoch�rent la t�te. Ils �taient �
une trentaine de m�tres de la rivi�re. Il vit les deux jeunes femmes le jauger
du regard, puis se jeter un regard entendu. Lentement, elles rang�rent leurs
armes. Il ne put retenir un l�ger soupir de soulagement. Il s’assit au sol,
d�posa S�l�ne � c�t� de lui, d�licatement, et fit quelques mouvement pour
soulager ses bras douloureux.
<!--l. 207--><p class="indent" > Les deux elfes s’install�rent en face de lui, avec un air un peu m�fiant.
L’arch�re prit la parole, d’une voix douce.<br
class="newline" />— Comment va-t-elle<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Elle respire calmement.<br
class="newline" />L’elfe se leva et posa une main d�licate sur le front de la jeune femme
endormie.<br
class="newline" />— Elle a un peu froid. Tu devrais la couvrir.<br
class="newline" />Il prit leurs deux couvertures dans leurs sacs respectifs et l’enveloppa
doucement dedans. Un silence passa, puis il se d�cida.<br
class="newline" />— Je m’appelle Zach. Je suis guide, et j’escorte cette jeune personne,
S�l�ne, � travers la for�t, jusqu’� la seigneurie de Assem. Et... vous<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Silw� et moi-m�me, Aldariel, sommes des elfes sylvaines. Nous sommes
invit�es par le duc De Vane, qui organise un grand tournoi de tir �
l’arc.<br
class="newline" />Zach allait demander s’il n’�tait pas dangereux pour deux femmes seules de
faire ce long trajet. Puis il se souvint des traits de l’arch�re et de l’�p�e de
la guerri�re, et se ravisa. Cette derni�re reprit.<br
class="newline" />— Pour r�pondre � ta question initiale, nous n’�tions pas en train de vous
espionner. Nous avons �t� attaqu�es par les araknes, et nous avons vu de la
lumi�re... Je suppose que c’�tait elle<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle d�signa S�l�ne. Zach soupira et hocha la t�te.<br
class="newline" />— En effet. Nous avons, comme vous, �t� attaqu� par ces cr�atures...
J’�tais gravement bless�, et elle a utilis� sa magie pour me soigner.
<br
class="newline" />Il montra sa cuisse, et le tissu d�chir� encore t�ch� de sang. Il vit la
d�nomm�e Silw�, en face de lui, marquer un l�ger frisson. Lentement, elle
d�fit la bande de cuir qui entourait son poignet droit. La peau �tait
intacte, mais le cuir marquait de profondes entailles. Il soupira et
continua.<br
class="newline" />— La magie fait tr�s peur, dans nos contr�es. Les magiciens sont
pourchass�s et br�l�s vifs... Jusqu’� ce moment, j’ignorais qu’elle
avait de tels pouvoirs, et si quelqu’un nous d�nonce, nous sommes
en grave danger... J’ai eu peur. D�sol� de ma r�action un peu...
brutale.<br
class="newline" />L’arch�re reprit.<br
class="newline" />— Nous avons tous eu peur, je crois. Et sans coop�rer, nous ne serions pas
tous vivants maintenant. Il est temps de se restaurer un peu et de
dormir.<br
class="newline" />Elle sourit l�g�rement. La tr�ve �tait prolong�e au moins jusqu’au
lendemain, et c’�tait bon signe. Il sortit quelques vivres de son sac, et les vit
faire de m�me. Il h�sita un peu. Le pain �tait rassis, la viande encore plus
s�ch�e, mais il leur proposa tout de m�me. <br
class="newline" />— D�sol�, ce n’est pas tr�s frais, mais si vous en voulez...<br
class="newline" />Alors que, jusque l�, la guerri�re avait gard� un air l�g�rement m�fiant, elle
sourit et se servit une tranche de pain et de lard qu’elle mangea avec
app�tit. En retour, elle lui tendit une petite galette.<br
class="newline" />— Du pain elfique. C’est tr�s bon et nourrissant, mais crois-moi, on s’en
lasse au bout d’un moment.<br
class="newline" />Il la remercia d’un sourire, et mangea quelques bouch�es de la galette. Elle
avait un go�t de miel, et effectivement, nourrissait bien malgr� sa
finesse. Sa compagne prit quelques morceaux de pain rassis, et fit la
grimace.<br
class="newline" />— Excuse-moi, mais je n’ai pas encore l’habitude de la nourriture
humaine...<br
class="newline" />— C’est la premi�re fois que vous venez en territoires humains<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Silw� sourit entre deux bouch�es de pain.<br
class="newline" />— Elle, oui. En ce qui me concerne, j’ai pass� cinq ans chez les humains,
donc ce n’est pas une nouveaut� pour moi...<br
class="newline" />Devant son regard supris, elle expliqua.<br
class="newline" />— J’y ai appris le maniement de l’�p�e. C’est d’ailleurs pour �a, et
pour mon exp�rience humaine, que j’ai eu l’honneur d’escorter notre
princesse.<br
class="newline" />Elle adressa un sourire amus� � Aldariel. Elle �tait donc bien une princesse,
comme elle lui avait annonc� –il eut un l�ger frisson– � la pointe de sa
fl�che... Il se demanda s’il devait la traiter en tant que telle. Son
� garde du corps � ne semblait pas s’encombrer de protocole, mais
lui<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je te pr�viens, ne t’avise pas de m’appeler � princesse � si tu ne veux
pas recevoir une fl�che perdue.<br
class="newline" />Avait-elle suivi sa pens�e<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Son ton �tait ferme, mais il y avait une petite
pointe de plaisanterie dans sa voix...
<!--l. 238--><p class="indent" > Il ne put retenir un b�illement. La journ�e avait �t� longue, �puisante et
riche en �motions... Aldariel hocha la t�te.<br
class="newline" />— Il est effectivement temps de se reposer.<br
class="newline" />— Peut-�tre serait-il prudent de se relayer pour monter la garde<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Je ne fais
pas �a d’habitude, mais le danger qui nous menace est assez inhabituel,
proposa-t-il.<br
class="newline" />— Pourquoi pas, r�pondit Silw�, puisque visiblement nous sommes tous les
trois capables de voir dans le noir.<br
class="newline" />Elle le pointa du doigt.<br
class="newline" />— D’ailleurs, � ce sujet, tu nous dois quelques explications...<br
class="newline" />Il avait presque oubli� ce d�tail. Mais finalement, ce n’�tait pas forc�ment
plus mal. Maintenant qu’il avait enfin des elfes face � lui, il allait peut-�tre
savoir...<br
class="newline" />— Effectivement, j’ai la capacit� de voir dans l’obscurit�, mais j’ignore
pourquoi. Je suis un enfant trouv� sur le pas d’une porte et adopt�... S�l�ne
pense que j’ai des ant�c�dents elfiques.<br
class="newline" />Les deux jeunes femmes l’observ�rent un moment. Puis se jet�rent un
regard entendu. Aldariel se leva et vint s’asseoir � c�t� de lui, une main sur
son �paule, puis pointa du doigt un arbre au loin.<br
class="newline" />— Tu vois la chouette sur sa branche, l�-bas<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Celle qui tient dans ses serres un cadavre de mulot<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ou celle qui est
quelques branches plus haut<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Mmm... Et dans ce buisson � droite, tu distingues quelque chose<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Il y a ce qui ressemble � une entr�e de terrier, et un renard semble en
sortir avec prudence. Ah, il vient de rentrer...<br
class="newline" />Nouveau regard entendu, presque inquiet. Il avait l’impression d’avoir fait
quelque chose de mal, mais quoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Silw� reprit la parole.<br
class="newline" />— Est-ce qu’il t’arrive d’�tre g�n� par la lumi�re du jour, en �t�<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Parfois, quand le soleil est haut dans le ciel et qu’il n’y a aucun nuage,
admit-il. Pourquoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Les deux jeunes femmes semblaient mal � l’aise.<br
class="newline" />— Elfe noir<span class="frenchb-thinspace"> </span>? murmura l’arch�re.<br
class="newline" />— Oui...<br
class="newline" />Il se racla la gorge, et fron�a les sourcils.<br
class="newline" />— Est-ce que je peux savoir de quoi vous parlez<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Aldariel prit une grande inspiration, et expliqua.<br
class="newline" />— Tu vois encore mieux que nous dans l’obscurit�. Tout comme ta l�g�re
sensibilit� � la lumi�re, c’est typique des elfes noirs. Il faut que tu
saches que... nous ne sommes pas vraiment en bons termes avec
eux.<br
class="newline" />Elle semblait g�n�e. Son amie reprit, presque doucement.<br
class="newline" />— Tu n’y es pour rien. Mais je te conseille de cacher ce don face � des elfes
sylvains...<br
class="newline" />— J’ai d�j� l’habitude de le cacher aupr�s des humains. Les elfes sont mal
vus, d’o� je viens, et d�j� qu’on me traitait d’elfe quand j’�tais petit, parce
que j’�tais soi-disant tout fr�le...<br
class="newline" />Silw� sourit.<br
class="newline" />— De ce que j’ai pu voir, il y a des humains grands, petits, forts, fr�les, � la
peau claire, sombre... Je ne me fierais pas � ta seule apparence pour en
juger. Mais il faut reconna�tre que ton teint mat, tes cheveux sombres, ta
silhouette rappellent un peu un elfe noir. Avec la barbe en plus, et les
oreilles pointues en moins.<br
class="newline" />— Tu penses qu’il est un... hybride<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Un demi-elfe<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui.<br
class="newline" />L’arch�re parut consid�rer cette r�ponse.<br
class="newline" />— Mais... c’est courant, des liaisons entre elfes et humains<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— �a... arrive.<br
class="newline" />L’arch�re sembla consid�rer son amie avec curiosit� et retenir une question.
Puis elle se leva.<br
class="newline" />— Bon, je prends la premi�re garde. Allez dormir.<br
class="newline" />— D’accord, je prendrai la suivante, ajouta-t-il.<br
class="newline" />— Je m’occuperai de la derni�re.
<!--l. 276--><p class="indent" > Il commen�a � s’installer pr�s de S�l�ne, qui � son grand soulagement,
semblait toujours dormir paisiblement. Aldariel lui tendit ce qui ressemblait
� un drap l�ger.<br
class="newline" />— Laisse-lui les deux couvertures, et prends la mienne pour dormir. Ne
t’inqui�te pas, elle est assez chaude.<br
class="newline" />— Merci.<br
class="newline" />Il posa, comme � son habitude, sa ceinture � c�t� de lui et s’enroula dans la
couverture. Elle �tait effectivement tr�s confortable et tenait chaud, malgr�
sa finesse. Un m�tre � sa droite, Silw� l’avait imit�e. Son �p�e se
retrouvait pos�e non loin de la sienne. Ils �chang�rent un regard.
M�fiance ou curiosit�<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il n’aurait pas su dire. Puis elle ferma les
yeux. Il vit, du coin de l’oeil, l’arch�re, perch�e sur une branche, aux
aguets. Devait-il �tre rassur� ou inquiet<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il n’eut pas le temps de se
poser plus longtemps la question, la fatigue l’envahit et il s’endormit
profond�ment.
<!--l. 281--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Aldariel</span>
<!--l. 283--><p class="indent" > Les heures s’�tiraient longuement, et elle se sentait �puis�e. Mais il
fallait rester �veill�e. Le campement de fortune �tait calme, et aucune
menace ne semblait se profiler � l’horizon, m�me venant de la rivi�re. Elle se
leva, et fit quelques pas sur sa branche, pour se d�gourdir les jambes et se
r�chauffer.
<!--l. 285--><p class="indent" > Un bien �trange personnage que ce Zach... Maintenant qu’elle y pensait,
il avait bien un petit air d’elfe, si elle l’imaginait sans barbe. Mais �tait-ce
important, finalement<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il semblait plut�t sinc�re lorsqu’il avait
expliqu� qu’il ne connaissait pas ses ant�c�dents. Bien s�r, il aurait
pu mentir pour �viter d’�tre pris pour un elfe noir, surtout aupr�s
d’elles. Habitu�e � �voluer parmi la haute noblesse elfique, elle savait
assez bien d�coder les expressions de ses cong�n�res, et les humains
semblaient fonctionner de la m�me mani�re, m�me si l’�tiquette
diff�rait. Mais elle n’�tait pas aussi s�re qu’elle le voulait. Cela dit, dans
ce cas, pourquoi aurait-il r�pondu sinc�rement � ses questions sur
sa vue<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il aurait tr�s bien pu pr�tendre voir un petit peu moins
bien...
<!--l. 287--><p class="indent" > Il avait eu une attitude tr�s... protectrice vis-�-vis de la magicienne.
Prenait-il son travail tr�s au s�rieux, ou �tait-il r�ellement attach� � elle<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
Si elle avait �t� s�re que le langage corporel des humains �tait le m�me que
celui des elfes, elle aurait pari� sans h�siter pour le second cas. Elle �tait
curieuse d’observer l’attitude de S�l�ne en retour, quand celle-ci se
r�veillerait. S�l�ne, qui avait soign� –presque– sans h�siter son amie...
Certes, d’un point de vue purement technique, cela leur permettait de lutter
plus efficacement contre les araknes, mais tout de m�me. Une fa�on de se
faire pardonner de l’avoir menac�e<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Dommage qu’elle soit rest�e inanim�e,
elle lui aurait bien pos� toutes sortes de questions... Peut-�tre en aurait-elle
l’occasion le lendemain<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 289--><p class="indent" > L’heure avan�ait, et elle allait bient�t devoir r�veiller Zach pour monter
la garde � sa place. �tait-il vraiment de confiance<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il avait avou� avoir agi
par peur, lorsqu’il avait attaqu� Silw�, mais qu’est-ce qu’il lui disait qu’il
n’agirait pas ainsi d’autres fois<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Si il les attaquait, toutes les deux, alors
qu’elles dormaient<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ce serait bien un comportement irrationnel d’elfe noir
�a... Elle secoua la t�te. C’�tait ridicule. Il avait grandi chez les
humains, et se comportait tout � fait comme un humain. Enfin, pour
ce qu’elle semblait comprendre des humains. Et puis, elle n’avait
jamais rencontr� d’elfe noir, peut-�tre que tout ce qu’on disait sur eux
n’�tait que des rumeurs ridicules entretenant une haine s�culaire<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
Elle se promit de demander � son amie, peut-�tre en avait-elle vu �
la capitale, apr�s tout<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Tiens, maintenant qu’elle y pensait, elle
�tait persuad�e d’avoir per�u une l�g�re g�ne de la part de Silw�
lorsqu’elle avait parl� de relations hybrides. �tait-ce un sujet tabou,
l�-bas<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ou se pouvait-il que...<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Les humains �taient si diff�rents
des elfes, elle avait du mal � imaginer une telle relation. Mais qui
sait...<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 294--><p class="noindent" >— Zach... R�veille-toi...<br
class="newline" />L’homme ouvrit les yeux et parut mettre quelques instants � r�aliser ce qui
se passait.<br
class="newline" />— Que se passe-t-il<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Rien, c’est juste ton tour de veiller.<br
class="newline" />Il se leva, s’�tira et ramassa son �p�e. Puis il lui tendit la couverture et
s’�loigna rapidement pour trouver un point d’o� surveiller le campement.
<!--l. 300--><p class="indent" > Allong�e dans sa couverture –qui avait une odeur... d’humain<span class="frenchb-thinspace"> </span>?–, elle
mit quelques minutes � s’endormir, malgr� la fatigue. Le calme �tait revenu
sur le campement, et elle distinguait sa silhouette, debout, adoss�e �
un arbre. Ses capacit�s � monter la garde, elle n’en doutait pas. Il
voyait mieux qu’elle dans la nuit, et elle l’avait vu manier l’�p�e
avec une belle efficacit�. Pour avoir d�j� vu son amie � l’œuvre, elle
doutait que le premier brigand venu soit capable de venir � bout de
Silw�, m�me bless�e. Il n’y avait pas de raison de s’inqui�ter, se
r�p�ta-t-elle...
<!--l. 302--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Zach</span>
<!--l. 304--><p class="indent" > Une partie de la nuit �tait d�j� pass�e, et il n’avait pas –encore– eu la
gorge tranch�e pendant son sommeil... jusque l�, tout allait bien. Enfin, si
on exceptait les araknes, la r�v�lation de S�l�ne, la rencontre –peu amicale
au premier abord– avec les elfes, la fuite... Il avait d�j� v�cu un certain
nombre de situations �tranges, mais celle-ci les d�passait de tr�s
loin.
<!--l. 306--><p class="indent" > S�l�ne... Qui semblait si fragile, et si forte en m�me temps. Que
serait-il devenu sans elle... Que seraient-ils devenus, corrigea-t-il, si
elle n’avait pas �t� l� pour soigner les morsures mortelles de ces
horreurs. Qu’est-ce qu’il lui avait pris de vouloir la serrer dans ses bras,
tout � l’heure, juste apr�s avoir �t� gu�ri<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Le contre-coup de la
douleur<span class="frenchb-thinspace"> </span>? La crainte de mourir qui s’�tait apais�e brutalement<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Le
choc d’apprendre qu’elle poss�dait des pouvoirs hors du commun<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
Le danger que ces m�mes pouvoirs repr�sentaient<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Finalement,
heureusement qu’il avait entendu les elfes arriver, cela lui avait �vit� une
sacr�e b�tise. Elle n’aurait probablement pas appr�ci�, et il se serait
vraisemblablement retrouv� avec une boule de feu dans la t�te. Ou
ailleurs.
<!--l. 308--><p class="indent" > Il porta son regard vers les deux jeunes elfes endormies. Jeunes
d’ailleurs<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elles avaient l’air d’�tre un peu moins �g�es que lui, mais
les elfes ayant la r�putation d’avoir une grande long�vit�, �a ne
voulait peut-�tre pas dire grand chose... Elles dormaient l’une contre
l’autre. Pour le froid, ou y avait-il plus que de l’amiti� entre elles<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il
ne connaissait les mœurs des elfes que de r�putation, et on disait
des choses bien �tranges sur leur sujet... Il fit mentalement la liste
de ces on-dits, tout en rayant int�rieurement toutes les questions
qu’il ne leur poserait jamais. Hem. Il ne restait plus grand chose...
Mieux valait peut-�tre s’en tenir � ce qu’il pouvait observer. Les
elfes sylvains sont beaux, agiles et rapides, et sont de redoutables
combattants. Ces points semblaient effectivement valides. Les elfes se
battent � l’arc. Rat� en partie. Ils savent tisser des �toffes fines, l�g�res
et chaudes. �a, il avait effectivement valid�. Ils parlent une langue
inconnue et �trange<span class="frenchb-nbsp"> </span>: rat� encore. Ou alors ces deux voyageuses avaient
appris la langue des humains<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il en doutait, sinon elles auraient
utilis� –au moins ponctuellement– leur langage pour parler dans son
dos.
<!--l. 311--><p class="indent" > Il soupira. Apr�s tout, s’il se posait des questions idiotes, c’est qu’il �tait
encore en vie. Enfin... il restait un tiers de la nuit. Pendant laquelle ce serait
Silw�, la guerri�re, qui monterait la garde. Oh, elle le ferait s�rement tr�s
bien... peut-�tre m�me trop bien. Elle n’avait pas appr�ci� d’avoir �t�
humili�e en �tant immobilis�e au sol et menac�e d’une lame sur la
gorge, visiblement. En m�me temps, admit-il, lui n’aurait pas trop
aim� non plus... Chercherait-elle � se venger<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Cela dit, elle n’avait
rien tent� contre lui lorsqu’ils fuyaient les araknes, et qu’il �tait
d�sarm� et charg�, y compris apr�s avoir travers� la rivi�re. Et elle
devait la vie � S�l�ne. Mais elle ne lui devait pas grand-chose, �
lui...
<!--l. 313--><p class="indent" > Quand � la � princesse �... qui ne souhaitait pas qu’on la traite en tant
que telle. Que pouvait �tre le protocole, chez eux, d’ailleurs<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Comment
traitait-on les princesses l�-bas<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Peut-�tre en avait-elle assez des
courbettes. Ou c’�tait peut-�tre tout simplement la situation d’urgence, qui
faisait passer au second plan ce genre de consid�rations. En tous cas,
elle �tait redoutable, elle aussi. Il n’avait jamais vu un archer aussi
efficace, rapide et pr�cis. Il se rem�mora l’instant terrible o� il avait
entendu le son de son arc se d�tendre dans son dos. Fort heureusement,
elle avait estim� que l’arakne �tait une meilleure cible que lui... Il
frissonna.
<!--l. 315--><p class="indent" > Il y a quelques jours, il n’aurait jamais admis, ni m�me imagin� une
seule seconde avoir peur d’une femme. Et pourtant, les trois qui �taient
�tendues sous ses yeux, toutes plus petites et plus fragiles que lui,
endormies, sans d�fense –ou presque– l’effrayaient. Mais... n’est-ce pas ce
qui les rendait si fascinantes<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Et puis... que pouvait-il dire, de son
c�t�<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il avait d�j� un style de vie atypique, passant plus de temps en
for�t plut�t que dans les villes. Et voil� qu’il apprenait qu’il �tait
peut-�tre un demi-elfe noir... C�t� �trange, il n’�tait pas vraiment en
reste.
<!--l. 319--><p class="indent" > L’heure avait tourn�. Le campement �tait toujours aussi calme, et les
jeunes femmes dormaient toujours profond�ment, berc�es par les bruits
nocturnes. Tout allait bien. Il s’approcha doucement de Silw�, et lui posa la
main sur l’�paule.<br
class="newline" />— Psst... Silw�<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />L’elfe se r�veilla et sembla paniquer � sa vue. Sa main se tendit vers son
arme, pos�e � c�t� d’elle.<br
class="newline" />— H�, ne t’affole pas. C’est moi, Zach.<br
class="newline" />Elle s’assit, et le reconnaissant, se calma.<br
class="newline" />— Ah, pardon. Je suppose que c’est mon tour de veiller<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui. Rien � signaler pour le moment.<br
class="newline" />Elle se leva, lui tendit sa couverture, s’�quipa rapidement et s’�loigna.
<!--l. 329--><p class="indent" > Il fallait dormir. Faire confiance � la guerri�re. Il prit une grande
inspiration. Tout allait bien... La couverture de la guerri�re �tait d�j�
chaude, et confortable. Il tourna la t�te vers S�l�ne, �tendue tout contre lui.
�tait-il dangereux de dormir si pr�s d’une... sorci�re<span class="frenchb-thinspace"> </span>? De toutes fa�ons, ce
n’�tait pas la premi�re fois, et il �tait toujours en un seul morceau,
apparemment. Son visage d�licat �tait si paisible, si doux... Dire qu’on lui
avait parl� de vieilles femmes hideuses avec des verrues sur le nez. En m�me
temps, si on d�crivait, dans les histoires pour enfants, les sorci�res comme
celle qu’il avait sous les yeux, il serait plus compliqu� d’entretenir une telle
haine � leur sujet... � moins que ce ne soit justement �a qui fasse
peur<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 331--><p class="indent" > La fatigue l’envahit � nouveau, interrompant ses pens�es. Il ferma les
yeux, et s’endormit � son tour.
<!--l. 333--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Silw</span><span
class="ecti-1095">�</span>
<!--l. 335--><p class="indent" > La nuit allait bient�t s’achever, sans qu’il se soit pass� quoi que ce soit.
C’�tait plut�t rassurant... Pas d’autre menace venant de la rivi�re. Pas de
menace non plus de leurs compagnons d’infortune. La magicienne dormait
toujours, et � ses c�t�, Zach semblait s’�tre endormi. Il n’avait pas
tent� de les attaquer, ou de les voler pendant leur sommeil... Elle se
demandait s’il �tait vraiment un guide ou s’il �tait juste un brigand qui
avait invent� cette histoire pour se couvrir. L’un n’emp�chait pas
l’autre apr�s tout... M�me si la jeune femme qui l’accompagnait
semblait lui accorder sa confiance. Lui r�v�ler qu’elle �tait magicienne
n’�tait pas rien, dans cette r�gion, m�me si c’�tait pour lui sauver la
vie...
<!--l. 337--><p class="indent" > Elle se demandait, d’ailleurs, quelle �tait la relation r�elle entre ces deux
jeunes gens. � voir Zach, en tous cas, il semblait �vident qu’il y avait
plus qu’un simple contrat entre un guide et sa passag�re. Mais elle
interpr�tait peut-�tre. Et puis... cela ne la regardait pas vraiment en
fait.
<!--l. 339--><p class="indent" > Mais la magicienne l’avait quand m�me sauv�e, elle... Alors qu’elle
l’avait menac�e quelques instants plus t�t. Bon indirectement, via
l’�p�e de son guide, mais �a comptait quand m�me. �tait-ce par
simple opportunisme, sachant qu’il leur fallait un bras de plus pour
combattre les araknes<span class="frenchb-thinspace"> </span>? S’�taient-ils alli�s � elles parce qu’ils se
savaient en danger seuls, et allaient ils se retourner contre elles une
fois la magicienne r�veill�e<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle secoua la t�te. La nuit lui faisait
imaginer les pires sc�narios. Ils �taient vraisemblablement, comme
elles, deux voyageurs supris par ces cr�atures, et avaient eu peur.
D’o� venaient ces horreurs d’ailleurs<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle aurait pay� cher pour le
savoir...
<!--l. 342--><p class="indent" > Elle fit quelques pas, se hissa sur une branche, et fit jouer son �p�e dans
sa main pour se r�chauffer l�g�rement. Ce soi-disant guide �tait plut�t dou�
avec une �p�e d’ailleurs... Ah si elle avait �t� valide, elle ne se serait
pas retrouv�e immobilis�e aussi facilement. Elle prendrait bien sa
revanche, mais l’attaquer n’�tait pas forc�ment la meilleure fa�on de lui
montrer ses bonnes intentions... d’autant qu’il semblait se m�fier
un peu d’elle. Et... aurait-elle le dessus, en fait<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ce n’�tait pas
clair...
<!--l. 344--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">S</span><span
class="ecti-1095">�l</span><span
class="ecti-1095">�ne</span>
<!--l. 346--><p class="indent" > Lorsque S�l�ne ouvrit les yeux, elle fut surprise de trouver Zach � c�t�
d’elle, encore assoupi. Elle eut un petit sourire, en le regardant dormir. Les
autres fois, il r�cup�rait plus vite qu’elle et se levait avant... Peut-�tre
s’�tait-il plus fatigu� hier<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Hier... Les �v�nements de la veille lui revinrent
brusquement en m�moire. Les araknes... La blessure de Zach. Le sort de
soin... il savait d�sormais. Et l’�trange rencontre avec les deux elfes,
leur alliance temporaire quand d’autres cr�atures avaient attaqu�,
et... le trou noir. Elle avait lanc� beaucoup de sorts en si peu de
temps, elle n’avait pas tenu le coup. Elle manquait encore tellement
d’entra�nement.
<!--l. 348--><p class="indent" > Elle se redressa. Elle avait les deux couvertures sur elle, et son
compagnon �tait enroul� dans un drap gris clair. Un peu plus loin, l’arch�re
elfe dormait profond�ment. Elle fron�a les sourcils. Que s’�tait-il donc
pass�<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Bien dormi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle sursauta et se retourna. L’autre elfe, la guerri�re, �tait derri�re elle,
adoss�e � un arbre, l’�p�e � la main. Elle lui souriait.<br
class="newline" />Elle se leva, ramassa son b�ton de magie, pos� � c�t� d’elle. Devait-elle se
m�fier d’elle, ou pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>? La jeune elfe rangea son �p�e � sa ceinture –pour la
rassurer peut-�tre<span class="frenchb-thinspace"> </span>?– et lui fit signe de s’approcher.<br
class="newline" />— Laisse les autres dormir. Ils sont �puis�s.<br
class="newline" />Elle lui raconta tout ce qui s’�tait pass� depuis son �vanouissement.
<br
class="newline" />— Vous avez vraiment mont� la garde toute la nuit<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui. Nous nous sommes relay�s... C’est pourquoi Zach et Aldariel
dorment encore.<br
class="newline" />Elle hocha la t�te. Beaucoup trop de questions lui venaient � l’esprit, elle ne
savait pas par o� commencer. Peut-�tre par la plus critique<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Si je ne me trompe pas, vous �tes des elfes sylvaines<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— En effet.<br
class="newline" />— La magie n’est pas interdite chez vous<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Non pas du tout. Mais je sais tr�s bien que l� o� nous allons, c’est le cas,
et elle y est m�me pire qu’interdite... Je comprends que tu aies eu peur
d’�tre d�couverte. Tu ferais mieux de cacher ton b�ton de magie,
d’ailleurs.<br
class="newline" />Il n’y avait pas besoin d’avoir � expliquer la situation, au moins. Elle poussa
un soupir de soulagement.<br
class="newline" />— Je suis d�sol�e pour le malentendu hier... Sans vous deux, nous n’aurions
pas pu passer cette rivi�re vivants.<br
class="newline" />— C’est moi qui dois te remercier de toutes fa�ons...<br
class="newline" />La guerri�re lui montra son poignet, et sourit.
<center class="par-math-display" >
<img
src="aventuriers8x.png" alt="[
" class="par-math-display" ></center>
<!--l. 2--><p class="nopar" >
<!--l. 4--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Irdann</span>
<!--l. 6--><p class="indent" > Irdann savourait cette toute nouvelle libert�. Moins d’un mois qu’il avait
�t� adoub� paladin de la d�esse, et qu’il pouvait sillonner le pays,
rendant divers services �� et l�. Bien s�r, il savait qu’il ne ferait
pas fortune ainsi, mais il �tait libre comme l’air et accueilli plut�t
g�n�reusement un peu partout. Que pouvait-il r�ver de plus<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Peut-�tre
un peu de compagnie. Oh non, il �tait loin du clich� du chevalier
parcourant le pays avec sa Dame l’attendant dans son ch�teau, mais
ses anciens amis, de la garde lui manquaient un peu. Il ne les avait
pas vus depuis qu’il �tait reparti dans le temple pour finaliser sa
formation. Et ils avaient quitt� la capitale entre deux... S’ils l’avaient vu
maintenant<span class="frenchb-thinspace"> </span>!
<!--l. 9--><p class="indent" > Il avait fi�re allure avec son tabar blanc, orn� d’un �cusson argent �
l’effigie de Melna. Dessous, un pantalon et une tunique gris clair, et une
cotte de mailles l�g�re, ainsi que des solides gants de cuir. � sa ceinture, il
portait ses armes, flambant neuves, et sa t�te �tait couverte d’un heaume
ouvrag�. Il avait quitt� la for�t le matin m�me, et s’approchait du ch�teau
du seigneur Assem, qui ferait une bonne �tape pour la nuit. Peut-�tre
pouvait-il rester quelques jours pour se reposer, apr�s la travers�e �puisante
de cette for�t... Il avait promis � ses parents, qu’il n’avait pas vus depuis des
ann�es, qu’il serait pr�sent pour l’ouverture du grand tournoi de tir
� l’arc qui �tait organis� en leur domaine. Mais il avait le temps,
finalement.
<!--l. 13--><p class="noindent" >— Sieur Irdann, c’est un honneur de vous accueillir ici<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Il posa respectueusement un genou � terre devant le seigneur et sa dame,
qui �taient venus le saluer personnellement. La situation de paladin semblait
effectivement respect�e ici, et il �tait tout de m�me le fils de leur suzerain,
bien que n’en portant pas le titre. Le seigneur se leva pour l’accompagner
lui-m�me � la chambre qui lui �tait pr�par�e. Il ne s’attendait pas � un tel
accueil.<br
class="newline" />— Nous ferez-vous le plaisir de d�ner avec nous<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Bien volontiers, d’autant que voil� plusieurs jours que je n’ai pas fait un
bon repas � table.<br
class="newline" />— Vous avez travers� la for�t<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— En effet.<br
class="newline" />Le seigneur sembla prendre un air inquiet, comme si cela lui rappelait
quelque chose. Il sembla h�siter, puis s’arr�ta au milieu du couloir.<br
class="newline" />— Irdann... En tant que paladin de la d�esse Melna, vous �tes investi de
certains de ses secrets, n’est-ce pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il hocha la t�te. Que cherchait-il � lui dire<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Nous aimerions, mon �pouse et moi, vous charger d’une requ�te...<br
class="newline" />Ah, voil� une des raisons, peut-�tre, de leur attitude. Mais apr�s tout,
pourquoi pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Mon �p�e est � votre service, seigneur.<br
class="newline" />L’homme soupira, puis lui montra un portrait dans le couloir.<br
class="newline" />— Voici notre fille, S�l�ne. Il y a quelques ann�es, elle a �pous� un riche
seigneur de la capitale, et nous la voyons peu.<br
class="newline" />Irdann observa le portrait. La damoiselle devait avoir une quinzaine
d’ann�es quand le tableau avait �t� peint. Des longs cheveux ch�tains
tress�s avec des rubans, de jolis yeux noisette, et une longue robe de couleur
cr�me, brod�e d’or. Un air sage, convenable � une jeune fille de son
rang.<br
class="newline" />— Elle devait nous rendre visite, seule car son �poux est tr�s occup�, et a
pr�f�r� ne pas attendre le carosse et l’escorte de soldats que nous lui
envoyions d’habitude. Mais elle devrait d�j� �tre arriv�e, depuis plusieurs
jours d�j�...<br
class="newline" />Le seigneur s’interrompit. Il semblait sinc�rement inquiet.<br
class="newline" />— Nous n’avons eu aucune nouvelle, si ce n’est des rumeurs populaires sur
une recrudescence de brigands dans la for�t qu’elle devait traverser...<br
class="newline" />Irdann n’ajouta rien. Il aurait bien confirm� ces rumeurs, mais ce n’�tait
peut-�tre pas la peine d’accabler le seigneur.<br
class="newline" />— Elle est peut-�tre morte, ou enlev�e par des bandits... Comment savoir<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
Vous, un paladin, vous pouvez peut-�tre la retrouver...<br
class="newline" />— Mais comment la trouver<span class="frenchb-thinspace"> </span>? La for�t est immense, et si dense...<br
class="newline" />L’homme le regarda un instant.<br
class="newline" />— Les paladins de Melna sont instruits, dit-on, des secrets divins. Ceux qui
permettent de retrouver n’importe qui. Il y a ces l�gendes... Ce paladin qui
sut retrouver sa dame, m�me lorsque celle-ci se fit enlever dans le plus
grand secret et emmen�e tr�s loin de lui. On raconte qu’il chevaucha
droit vers elle. Et cette autre dame, qui attendant le retour de son
aim�, se jeta du haut de sa tour � l’instant o� celui-ci mourait sous
les coups de l’ennemi, bien avant que les h�rauts ne lui annoncent
sa mort... Il y en a d’autres comme celle-ci, je pense que vous les
connaissez.<br
class="newline" />Irdann h�sita un instant. Oui, il connaissait un moyen, puissant, complexe
et dangereux, mais ne l’avait jamais mis en place jusqu’alors... Mais
peut-�tre �tait-ce le moment o� jamais. Et puis, une qu�te h�ro�que, digne
d’un grand paladin... Cela serait excitant et enrichissant. Le regard inquiet
du seigneur acheva de le convaincre.<br
class="newline" />— Je ferai tout mon possible pour retrouver votre fille, seigneur Assem,
vous pouvez me faire confiance.<br
class="newline" />Il le vit esquisser un sourire plein d’espoir, et lui serrer le bras.<br
class="newline" />— Dites-moi tout ce que je puis faire pour vous aider dans votre t�che,
noble paladin.
<!--l. 41--><p class="indent" > Il ferma soigneusement la porte de la chambre de S�l�ne, apr�s avoir
demand� � n’�tre d�rang� sous aucun pr�texte. Puis il fit le tour de la
pi�ce. �a n’allait pas �tre simple, et il le savait. Ne connaissant pas
personnellement la jeune femme, il lui fallait trouver un objet tr�s
personnel, auquel elle �tait attach�e �motionnellement. Mais lequel<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Un
v�tement<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Un bijou<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Un livre<span class="frenchb-thinspace"> </span>? S’il devait invoquer l’enchantement
de Melna sur chaque objet qui lui semblait convenir, il n’avait pas
termin�.
<!--l. 44--><p class="indent" > Il s’assit sur le lit, et r�fl�chit. La jeune dame ne vivait plus ici depuis de
nombreuses ann�es, il y avait probablement peu d’objets auxquels elle tenait
r�ellement. S’il supposait qu’un tel objet existait, comment le trouver<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
Tout d’abord, elle n’a pas emmen� cet objet chez son �poux. Donc elle le lui
cache, et probablement � ses parents �galement. Cela ne lui facilitait pas la
t�che s’il devait en plus fouiller toutes les cachettes potentielles... Un bijou
offert par un amour d’adolescente<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Un journal intime<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Mais si elle est
r�ellement attach�e � cet hypoth�tique objet, elle aurait pu tenter de
l’emmener avec elle, cach� dans le grand coffre qu’elle emportait en tant que
trousseau. Donc... cet objet, s’il existe, n’est pas petit et discret.
Voil� qui le rendait un peu moins difficile � trouver. Enfin, d’un
point de vue purement logique, s’il devait chercher un objet petit et
cach�, il n’avait probablement aucune chance. Mais un objet d’un
volume moyen et cach�, il pouvait peut-�tre... Pourquoi ne pas le
chercher<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 47--><p class="indent" > Il se leva et se mit � chercher. Au bout d’une vingtaine de minutes, il
finit par trouver un paquet, envelopp� dans un tissu, coinc� entre le matelas
et le sommier. S’il �tait dissimul� ici, il y avait une bonne raison... Le cœur
battant, il le sortit et le d�balla pr�cautionneusement.
<!--l. 49--><p class="indent" > C’�tait un grand livre, � la reliure en cuir orn�e d’or, aux pages jaunies
par le temps. Il l’ouvrit et en lut quelques lignes. C’�tait un livre de
sorcellerie... Il en eut sueurs froides. Il avait grandi en apprenant que la
magie, si elle ne venait pas des dieux, �tait tr�s dangereuse. Son p�re faisait
office d’avant-gardiste en consid�rant, au moins, les autres races humaines
avec une certaine bienveillance. Mais la magie, il n’en n’�tait pas question.
Et puis il avait commenc� � vivre � la capitale... o� se c�toyaient toutes
sortes d’�tres –presque– sans frictions et o� la magie �tait une pratique
courante –il y avait m�me une universit� pour l’apprendre<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Le contraste
avec cette r�gion �tait si saisissant... � la garde, ma�tre Ernest ne
faisait m�me pas la diff�rence entre les hommes et les femmes, alors
qu’ici...
<!--l. 51--><p class="indent" > Il secoua la t�te. Ce n’�tait pas le moment de faire revenir de vieux
souvenirs, il avait autre chose � s’occuper. Ce livre �tait plus qu’interdit ici,
il le savait, ce qui voulait dire que ladite S�l�ne n’�tait pas la jeune �pouse
parfaite, douce et d�licate qu’il aurait pu imaginer. Cela pouvait-il avoir un
lien avec sa disparition<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Avec son mariage avec le sieur de Quayle, si loin, �
la capitale<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ce nom, d’ailleurs, ne lui disait rien. Certes, il ne connaissait
pas tout le gratin de la ville, mais il s’attendait � un nom un minimum
familier.
<!--l. 53--><p class="indent" > Il sortit de sa poche un simple caillou qu’il avait ramass� dans la cour, et
le posa � c�t� du livre, et d�buta son incantation.
<!--l. 55--><p class="indent" > Combien de temps s’�tait pass�<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Difficile � dire, mais de ce qu’il voyait
par la fen�tre, la nuit �tait tomb�e. Il ramassa d�licatement la pierre pos�e
sur le sol. Dans sa main, elle pulsait doucement. Il avait r�ussi son
enchantement, et S�l�ne �tait vivante... L’enchantement du cœur,
ainsi d�nomm� par les paladins. Puissant et redoutable... La pierre
allait d�sormais pulser au rythme de ses battements de cœur. En se
concentrant, il pouvait �galement sentir dans quelle direction approximative
elle se trouvait, ce qui lui permettrait de la retrouver, o� qu’elle se
trouve.
<!--l. 59--><p class="indent" > Il se leva, rangea pr�cautionneusement le livre dans sa cachette d’origine
et sortit de la chambre de la jeune femme. Il fit indiquer au seigneur qu’il se
mettrait en route d�s le lendemain, � l’aube, et partit se coucher,
�puis�.
<!--l. 63--><p class="indent" > Trois heures qu’il �tait en route. Trois heures qu’il sentait, au
fond de sa poche, ces battements incessants. Il savait qu’il voyageait
dans la bonne direction, mais au fur et � mesure qu’il avan�ait, il
se sentait de plus en plus mal � l’aise. Les pulsations indiquaient
qu’elle �tait toujours en vie, ce qui �tait rassurant, mais les variations
de rythme le perturbaient. Cette acc�l�ration soudaine, il y a une
demi-heure, �tait-elle due � un moment de peur<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Un effort physique
imm�diat<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Un �moi<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Un danger<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Tout s’�tait calm� rapidement...
Impossible de savoir �videmment, mais cela donnait une sensation
�trange, voire vraiment g�nante. L’impression d’�tre dans l’intimit�
de quelqu’un, sans le voir ni l’entendre, juste � ses battements de
cœur.
<!--l. 65--><p class="indent" > Il frissonna et sortit la pierre de sa poche. Entre de mauvaises mains, cet
enchantement pouvait �tre tr�s dangereux. Avoir cet objet contre soi
tout en ayant la personne en face de soi permettait, avec un peu
d’entra�nement et d’�coute, de tout savoir sur elle... ses �mois, ses
sensations, quand bien m�me elle garderait un visage parfaitement
impassible. C’�tait une des raisons pour lesquelles cet enchantement �tait
tenu secret...
<!--l. 67--><p class="indent" > De plus, il avait entendu lui aussi toutes les l�gendes de ces paladins
retrouvant leur bien-aim�e. Sauf s’il en connaissait la face sombre. Celle qui
racontait que nombre d’entre eux, hant�s, obs�d�s par ces battements
incessants, incapables de savoir ce qui arrivait � l’objet de leurs pens�es tout
en ayant la sensation d’en �tre si proches, avaient fini par perdre
compl�tement la raison.
<!--l. 69--><p class="indent" > Et ce caillou qui pulsait toujours... Heureusement pour lui, il n’avait
aucun lien affectif avec la personne qu’il recherchait, sinon, le m�me sort
l’attendait. Mais m�me malgr� cela il �tait mal � l’aise. Il ouvrit les
sacoches cavali�res de sa monture, d�coupa un morceau de sa couverture
dans laquelle il enveloppa la pierre, qu’il pla�a au fond d’une des sacoches.
�touff�es par le tissu, les pulsations ne lui �taient –enfin– plus perceptibles.
Il poussa un soupir de soulagement. Il le sortirait dans quelques heures pour
v�rifier sa direction, c’�tait bien suffisant. Et d�s qu’il aurait retrouv�
dame S�l�ne, il faudrait qu’il se d�barrasse de cet objet au plus
vite.
<!--l. 71--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">S</span><span
class="ecti-1095">�l</span><span
class="ecti-1095">�ne</span>
<!--l. 73--><p class="indent" > Assise en tailleur, S�l�ne observait le contenu du petit chaudron, pos�
sur un feu, qui se trouvait devant elle. Depuis la veille, ils avaient d�cid� de
faire route avec les deux elfes, qui s’�taient av�r�es d’agr�ables compagnes
de voyage. Elles �taient aussi � l’aise en for�t que des poissons dans l’eau,
plus encore que Zach. Aldariel, assise en face d’elle, lui avait parl� de
recettes de potions � base de plantes, et S�l�ne avait �t� enthousiaste �
l’id�e de les partager. <br
class="newline" />— C’est une chance que tu aies ce petit chaudron avec toi.<br
class="newline" />S�l�ne sourit.<br
class="newline" />— Oui, m�me si je regrette celui que j’ai � l’universit�... Ah je pourrais te
montrer d’autres m�langes<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />— J’aimerais beaucoup... si nous en avons l’occasion.<br
class="newline" />Aldariel remua doucement la mixture avec un petit morceau de bois.<br
class="newline" />— �a s’�paissit, je pense que �a va bient�t �tre bon.<br
class="newline" />— Il faudra filtrer quand m�me, il y a plein de morceaux de feuilles... Tiens,
je me demande si on ne peut pas ajouter �a...<br
class="newline" />Elle fouilla dans son sac, et en sortit une petite fiole qu’elle tendit � l’elfe.
Celle-ci tenta de lire l’�tiquette, fron�a les sourcils. Puis elle l’ouvrit, renifla
l�g�rement le contenu.<br
class="newline" />— Ah, je connaissais. Mais pas sous cette forme...<br
class="newline" />Elle ajouta quelques gouttes du liquide dans le m�lange, et lui rendit. —
J’avoue, j’ai toujours achet� les plantes chez l’herboriste, sous forme d’huile
ou de plantes s�ch�es... C’est un vrai plaisir de les d�couvrir fra�ches dans
la for�t<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />— Et encore, il faudra que je te montre certaines qu’on ne trouve pas
ici...<br
class="newline" />— Tu veux dire, dans votre for�t elfique<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui, il y a des plantes m�dicinales sp�cifiques � notre r�gion... �a te
plaira<span class="frenchb-thinspace"> </span>!
<!--l. 90--><p class="indent" > S�l�ne ferma les yeux � demi, berc�e par le l�ger bruit du m�lange qui
fr�missait et l’odeur agr�able qui s’en d�gageait. Il faisait beau,
et ils avaient profit� d’un coin calme et d’un bras de rivi�re pour
faire une pause pour se laver. Zach, qui avait sagement attendu son
tour, devait encore y �tre. Elle l’avait aper�u, en allant remplir le
chaudron d’eau. Elle �tait rest�e quelques secondes � l’observer,
l�g�rement g�n�e de constater qu’elle n’avait pas du tout honte de le
faire.
<!--l. 92--><p class="indent" > Elle d�tendit ses jambes. Sa robe n’�tait plus aussi impeccable qu’au
d�part... Toutes les broderies du bas �taient sales ou ab�m�es � force de
marcher dans la for�t, et une longue d�chirure verticale remontait jusqu’�
son genou gauche. Il y a une semaine, elle aurait trouv� �a presque
ind�cent, mais � pr�sent elle s’en moquait. Ses courbatures et ampoules
du d�but s’�taient estomp�es, et elle suivait d�sormais quasiment
sans effort le rythme de marche de Zach. Et elle avait d�couvert la
for�t... qui lui semblait si hostile au d�but, et qui recelait tant de
suprises...
<!--l. 94--><p class="indent" > Zach s’�tait approch�. Ses cheveux �taient mouill�s et encore plus en
bataille que d’habitude, et il finissait d’enfiler sa tunique.<br
class="newline" />— L’eau �tait bonne<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Excellente. Vous auriez d� venir.<br
class="newline" />Son sourire se figea soudain en voyant le petit chaudron et son contenu, d’un
jaune verd�tre, fr�mir doucement. Il fron�a les sourcils.<br
class="newline" />— Qu’est-ce que vous faites<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 101--><p class="noindent" >— Aldariel me montre une recette de chez elle. Ne t’inqui�te pas, ce n’est
pas dangereux.<br
class="newline" />Il s’approcha de l’�trange mixture, et prit un air dubitatif.<br
class="newline" />— Si tu le dis. Bon, je vais vous laisser... Je vais aller discuter chiffons et
quinquaillerie avec Silw�.<br
class="newline" />Il s’�loigna en direction de la guerri�re, assise un peu plus loin.
<!--l. 106--><p class="indent" > Une fois qu’il fut hors de port�e de voix, Aldariel et S�l�ne se
regard�rent en souriant.<br
class="newline" />— Il ne faut pas lui en vouloir, il n’a pas l’habitude...<br
class="newline" />— C’est vrai, mais sa r�action est toujours aussi dr�le.<br
class="newline" />— Est-ce qu’on lui dit que ce n’est qu’une recette de savon<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oh non, surtout pas.<br
class="newline" />Elles �clat�rent de rire.
<!--l. 113--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Zach</span>
<!--l. 115--><p class="indent" > Ses longs cheveux l�ch�s autour d’elle pour les laisser s�cher, assise dos �
un arbre avec son armure sur les genoux, visiblement tr�s affair�e, Silw� ne
leva m�me pas la t�te lorsqu’il approcha.<br
class="newline" />— Qu’est-ce qui t’arrive<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle lui montra son ouvrage. Une couture lat�rale, visiblement destin�e �
ajuster la tunique de cuir � des formes f�minines, avait rompu.<br
class="newline" />— J’essaie de r�parer �a... Mais je n’ai pas tout � fait ce qu’il faut.<br
class="newline" />Au moins, il s’agissait d’une occupation plus rassurante que ce qu’il venait
de voir... Il s’assit � c�t� d’elle et observa l’armure. Elle ressemblait de
beaucoup � la sienne, m�me si le cuir n’�tait pas le m�me...<br
class="newline" />— Elle vient de chez les elfes, cette armure<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Non, je l’ai achet�e � la capitale. Les bonnes armures elfiques sont tr�s
rares. Par contre, ils ont d� faire quelques retouches qui n’ont pas tr�s bien
tenu.<br
class="newline" />Il hocha la t�te.<br
class="newline" />— Tu as appris l’�p�e durant ton s�jour � la capitale, c’est �a<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui, chez ma�tre Ernest. Tu le connais<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— De r�putation, mais je ne l’ai jamais rencontr� directement. D’ailleurs...
<br
class="newline" />Il se leva et alla chercher son �p�e, pos�e avec sa ceinture quelques m�tres
plus loin. <br
class="newline" />— Je suis curieux de voir ce que donne son enseignement.<br
class="newline" />Elle leva les yeux vers la lame, qu’il avait point�e sur elle en souriant.<br
class="newline" />— Tu en as d�j� eu l’occasion, il me semble.<br
class="newline" />�tait-ce une pointe d’amertume dans sa voix<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle n’avait toujours pas
boug�. <br
class="newline" />— Tu �tais bless�e. Il n’y avait aucun challenge.<br
class="newline" />— Quoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Comment �a<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Vex�e, voire m�me furieuse, elle s’�tait lev�e, et le fixait, les bras crois�s. Il
avait peut-�tre un peu exag�r�. En le voyant accentuer son sourire, et
comprendre son jeu, elle soupira.<br
class="newline" />— Tu as gagn�. Tu r�ussi � me faire lever.<br
class="newline" />Elle ramassa tranquillement son �p�e, et se retourna rapidement vers lui,
son arme point�e, avec un l�ger sourire de d�fi.<br
class="newline" />— En garde<span class="frenchb-thinspace"> </span>!
<!--l. 138--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Silw</span><span
class="ecti-1095">�</span>
<!--l. 140--><p class="indent" > Elle avait � la fois redout� et esp�r� ce moment. Mais elle s’�tait fait
pi�ger, et n’avait pas l’intention de reculer maintenant. Ils pass�rent
quelques instants � se mesurer du regard. Zach tenait son �p�e, un peu plus
courte que la sienne, � une main. Sa position de garde �tait impeccable. Il
semblait h�siter � porter le premier coup. �tait-il aussi s�r de lui
qu’il en avait l’air, finalement<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle prit une grande inspiration
et engagea un coup de taille, pour tester. Il le para avec efficacit�
et pr�cision, et contre-attaqua imm�diatement, d’un coup qu’elle
d�via rapidement. Comme elle l’avait devin�, elle avait affaire �
un bon escrimeur. Mais cette fois, comme il l’avait effectivement
fait remarquer, elle n’�tait pas bless�e. Le d�fi promettait d’�tre
int�ressant...
<!--l. 143--><p class="indent" > Ils �chang�rent d’autres coups, plus agressifs et plus rapides. Un tr�s
bon escrimeur, corrigea-t-elle mentalement. Pourtant... sur une passe un peu
inhabituelle, elle r�ussit � cr�er une faible ouverture dans sa garde. Faible,
mais suffisante... Son �p�e s’arr�ta � quelques millim�tres de sa poitrine.
Elle esquissa un l�ger sourire.
<!--l. 145--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Zach</span>
<!--l. 147--><p class="noindent" >— Ah<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Il soupira, un peu vex�, mais soulag� malgr� tout qu’elle ait stopp� son
coup. Leur �change n’avait pas dur� une quinzaine de secondes.<br
class="newline" />— Bien jou�.<br
class="newline" />Il lui sourit et recula d’un pas. Il avait bien l’intention de ne pas en rester l�
de toutes fa�ons...<br
class="newline" />— On remet �a<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle recula � son tour et hocha la t�te.
<!--l. 154--><p class="indent" > Ils reprirent le combat. L’�p�e de Silw� �tait l�g�rement plus longue que
la sienne, et elle la maniait � deux mains la plupart du temps. Sa main
gauche, alors plac�e pr�s du pommeau, l’aidait � orienter plus rapidement
et plus pr�cis�ment la lame. Mais contrairement � beaucoup de combattants
de ce style, elle savait aussi, et n’h�sitait pas l�cher la seconde main pour
profiter de l’amplitude que seuls certains mouvements � une main
permettaient.
<!--l. 156--><p class="indent" > Il n’arrivait pas � trouver de faille dans sa garde. Et il parait avec
difficult� les coups qu’elle lui rendait. Non, ce n’�tait pas parce que son
�p�e �tait mieux �quilibr�e, ou plus longue. Sa technique �tait juste
irr�prochable. Sur les trois �changes qui suivirent, il ne parvint � en gagner
qu’un, de peu.
<!--l. 158--><p class="indent" > Leurs lames s’entrechoqu�rent � nouveau, et gliss�rent jusqu’� la garde.
Il �tait tout proche d’elle. Des gouttes de sueur perlaient le long de ses
tempes et des m�ches de ses cheveux –toujours d�tach�s– �taient coll�es sur
son visage. Au moins, il n’�tait pas pour elle un adversaire facile... Et sur ce
genre de passe en force, il pouvait peut-�tre avoir un avantage. � l’instant
o� elle allait c�der sous la pression, elle fit pivoter brusquement sa
lame autour du point d’appui, et sa garde vint s’appuyer de l’autre
c�t� de la poign�e de sa propre arme. L’�lan qu’il avait pour tenter
de la faire reculer, combin� � l’effet de levier qu’elle appliquait, lui
fit l�cher son �p�e. Perdu encore... ou pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il �tait toujours tr�s
pr�s d’elle, � une distance peu pratique pour manipuler une arme
longue.
<!--l. 160--><p class="indent" > Alors que la lame de Silw� revenait vers lui, il marqua un infime instant
de pause, et au dernier moment se jeta sur elle, saisissant son poignet et
d�viant son arme vers le haut. De l’autre bras, il lui entoura les �paules et
l’entra�na au sol.<br
class="newline" />— H���<span class="frenchb-thinspace"> </span>! C’est de la triche, �a<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />— Quelle triche<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Les ennemis contre qui tu combats respectent quelles
r�gles<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 164--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Silw</span><span
class="ecti-1095">�</span>
<!--l. 166--><p class="indent" > Elle �tait furieuse. Contre elle-m�me plus que contre Zach. De s’�tre fait
avoir si facilement, et puis, il avait raison...<br
class="newline" />— Certes.<br
class="newline" />Elle avait cru gagner, et avait rel�ch� son attention. Elle aurait d� reculer
plus vite, et l’esquiver. Elle avait �t� b�te, c’est tout... Alors qu’elle
cherchait � reprendre son souffle, elle vit qu’il lui souriait. Il jouait.
Pourquoi s’�nerver ainsi<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle se d�tendit et lui rendit son sourire. Elle prit
quelques instants pour reprendre le contr�le de sa respiration, puis
brusquement, ramena sa jambe droite qu’elle utilisa pour repousser la
poitrine de son adversaire. Zach roula sur le c�t�, mais sans l�cher son
poignet qu’il maintenait toujours fermement, et la torsion inflig�e lui fit
l�cher son arme � son tour. Ils se redress�rent rapidement, en souriant
toujours. Le jeu continuait.
<!--l. 170--><p class="indent" > Elle s’�tait d�j� entra�n�e � lutter, y compris contre des adversaires
plus grands et forts qu’elle. Mais il �tait aussi tr�s agile et rapide, plus
qu’elle ne l’aurait imagin�... surtout qu’il ne commettrait �videmment pas
l’erreur de la sous-estimer. Elle esquiva rapidement le bras qui tentait
d’attraper le sien, et plongeant vers son adversaire, le ceintura pour le faire
tomber au sol. Malgr� de tr�s bons appuis, il fut d�s�quilibr�, et manqua de
tomber en arri�re. Il fallait profiter de ce l�ger avantage...
<!--l. 172--><p class="indent" > Sauf qu’au lieu de reculer d’un pas pour reprendre son �quilibre, il se
laissa volontairement tomber en arri�re, profitant de l’�lan pour la faire
tomber � son tour. Il roul�rent tous les deux, chacun tentant de renverser
l’autre sur le dos. Malgr� ses efforts, Zach eut rapidement le dessus. Apr�s
l’avoir immobilis�e, il pla�a ses mains autour de son cou et fit mine de
l’�trangler. Elle sourit l�g�rement.<br
class="newline" />— Bien vu.
<!--l. 175--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Zach</span>
<!--l. 177--><p class="indent" > Il lui rendit son sourire et rel�cha d�licatement son cou. Puis il lui tendit
la main et l’aida � se relever. � peine sur pied, elle fit deux pas rapides
en arri�re et fl�chit l�g�rement les genoux. Alors qu’il s’avan�ait
vers elle, elle fit un saut rapide de c�t� et le cueillit d’un coup de
genou dans les c�tes. A�e. Il fit quelques pas sur le c�t�, le temps de
reprendre son souffle, puis tenta � nouveau de s’approcher pour lui
saisir un bras. M�me saut lat�ral, mais cette fois il put anticiper et
esquiver habilement le coup de pied qui le mena�ait. Il retenta la
m�me approche deux fois. Elle sautait avec l�g�ret�, donnant presque
l’impression de danser en l’�vitant, insaisissable. Mais elle s’�puiserait vite
ainsi.
<!--l. 179--><p class="indent" > Elle marqua une pause, � quelques m�tres de lui. Elle semblait
essouffl�e... Profitant de l’occasion, il bondit et parvint � la ceinturer. Le
choc lui coupa le souffle pour de bon, et il n’eut aucun mal � saisir son bras
et � la bloquer d’une cl� de bras dans son dos.<br
class="newline" />— Bien d�fendu, mais tu t’es fatigu�e trop vite...<br
class="newline" />Elle ne r�pondit pas de suite, trop occup�e � retrouver sa respiration. Puis
elle se tendit soudainement. Au m�me instant, il lui sembla entendre un
bruit inhabituel. Un cheval qui ren�clait... Il recula rapidement dans un
buisson proche, entra�nant Silw� avec lui.<br
class="newline" />— Quelqu’un vient... pas un bruit, murmura-t-il dans son oreille.<br
class="newline" />Ils rest�rent silencieux quelques instants, �coutant le bruit des sabots qui se
rapprochaient.<br
class="newline" />— Euh, Zach<span class="frenchb-thinspace"> </span>? chuchota-t-elle.<br
class="newline" />— Oui<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Tu peux quand m�me me l�cher, non<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Ah... euh oui d�sol�.
<!--l. 189--><p class="indent" > Ils se dirig�rent alors silencieusement en direction du son, et se post�rent
de mani�re � voir l’intrus arriver sans �tre d�couverts.
<!--l. 191--><p class="indent" > Le cavalier qui s’approchait �tait v�tu de blanc et portat un large
heaume masquant son visage. Un chevalier<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Il �tait seul, ce qui �tait
plut�t surprenant. Il stoppa sa monture et prit quelques instants
pour l’attacher � une branche voisine. Zach remarqua alors les armes
que l’homme portait � sa ceinture. Il n’�tait pas rare de voir des
combattants en poss�dant deux. Silw� avait une dague en plus de son
�p�e longue. Il avait lui-m�me un couteau en compl�ment de sa
lame, m�me si celui-ci lui servait plus souvent � couper du pain
que des chairs. Ce chevalier-l� poss�dait simplement deux �p�es
longues...
<!--l. 193--><p class="indent" > Un frisson le parcourut. Il porta la main � sa ceinture, constatant avec
horreur qu’il l’avait laiss�e, ainsi que son armure pr�s de S�l�ne et
d’Aldariel. Il tourna la t�te vers Silw�, tout aussi d�munie que lui. Et leurs
�p�es �taient � une quinzaine de m�tres de l�...
<!--l. 195--><p class="indent" > Le chevalier, qui ne les avait visiblement pas remarqu�s, semblait
concentr� � fouiller dans une des sacoches cavali�res de sa monture. Puis
regarda aux alentours, semblant chercher sa direction. <br
class="newline" />— C’est moi ou il a l’intention d’aller droit vers le campement<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il avait � peine prononc� les mots, mais l’elfe semblait avoir compris. Ils se
regard�rent, inquiets. Puis elle secoua la t�te, se leva et se pencha vers son
oreille.<br
class="newline" />— File chercher du renfort. Je vais essayer de lui parler pour le retenir.<br
class="newline" />Il lui attrapa le bras.<br
class="newline" />— Tu veux te faire tuer<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle lui adressa un l�ger sourire qu’elle voulait probablement rassurant.<br
class="newline" />— C’est un paladin. En principe il a un code d’honneur. Il ne me tuera pas
tout de suite... En principe...<br
class="newline" />Il soupira et rel�cha le bras.<br
class="newline" />— Au pire, tu peux toujours essayer de lui faire du charme...<br
class="newline" />Elle ne releva pas sa tentative d�sesp�r�e d’humour pour se rassurer, et se
leva en direction de l’�tranger. Sans perdre de temps, il se leva � son tour et
se mit � courir vers le campement.
<!--l. 207--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Irdann</span>
<!--l. 209--><p class="indent" > Il savait qu’il approchait du but. La pierre qui pulsait ne lui
donnait aucune indication de la distance � laquelle se trouvait dame
S�l�ne, mais la donn�e de la direction depuis plusieurs endroits,
avec un peu de r�flexion logique, lui avait permis de conclure. Il
r�ussissait � garder son sang-froid quand il la manipulait, d�sormais,
mais il se demandait toujours ce qu’il ferait lorsqu’il rencontrerait
la jeune femme en question... Et que faisait-elle en pleine for�t<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
Prisonni�re quelque part<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Comment l’en sortirait-il si c’�tait le
cas<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 211--><p class="indent" > Il v�rifia que sa monture �tait bien attach�e, puis se dirigea r�solument
vers sa destination. Soudain, devant lui, une silhouette sortit des buissons si
rapidement et silencieusement qu’il eut l’impression de la voir se
mat�rialiser sous ses yeux.
<!--l. 213--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Silw</span><span
class="ecti-1095">�</span>
<!--l. 215--><p class="indent" > Le cœur battant, elle se planta � quelques m�tres du paladin. Pourvu
qu’il fasse vite...<br
class="newline" />— Stop<span class="frenchb-thinspace"> </span>! O� vous rendez-vous comme �a<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />L’homme, la voyant se placer sur son chemin, d�gaina aussit�t ses armes, et
se pla�a en position d�fensive.<br
class="newline" />— Je suis � la recherche de dame S�l�ne, et aucun obstacle ni aucun homme
ne m’�loignera de ma route.<br
class="newline" />Elle frissonna. Il avait d�gain� l’�p�e de la main gauche juste avant la main
droite... Cela lui rappelait quelqu’un... <br
class="newline" />— Qu’est-ce que vous lui voulez<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />C’�tait idiot, elle le savait. Mais il fallait juste parler, pour gagner du temps.
Zach, d�p�che-toi...
<!--l. 223--><p class="indent" > � sa grande suprise, il ne r�pondit pas et se figea.<br
class="newline" />— Silw�<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />D’o� connaissait-il son nom<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Et cette d�marche, cette voix, bien que
modifi�e par le port de ce casque... Est-ce que �a pouvait-�tre...<br
class="newline" />— Irdann<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Le chevalier planta ses deux �p�es dans le sol � c�t� de lui. Puis il souleva
son casque, d�voilant son visage. C’�tait lui, aussi surpris qu’elle de le
voir.
<!--l. 229--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Irdann</span>
<!--l. 231--><p class="indent" > Il marqua une seconde de pause, incr�dule. Il n’avait pas revu Silw�
depuis presque un an, ni m�me eu de nouvelles... Toute une foule de
souvenirs partag�s lui revint � l’esprit, et il lui sourit. Elle se jeta sur lui
pour l’enlacer.
<!--l. 233--><p class="indent" > � cet instant, trois silhouettes surgirent devant ses yeux, � demi cach�s
par les cheveux en bataille de l’elfe. Son sourire se figea.
<!--l. 235--><p class="indent" > La premi�re �tait celle d’un homme arm� d’une �p�e courte, une
seconde plus longue gliss�e dans sa ceinture. Son air mena�ant et
concentr� disparut instantan�ment lorsqu’il l’aper�ut, et il sembla si
surpris qu’il manqua d’en l�cher son arme. La seconde silhouette
�tait celle, plus petite et fr�le, d’une jeune elfe aux longs cheveux
noirs. Rapidement, elle d�passa l’homme, toujours immobile, et en
l’espace d’un battement de cils, elle avait arm� une fl�che et tendu son
arc dans sa direction. La troisi�me silhouette resta cach�e derri�re
l’homme, mais il put entrevoir les traits d’une jeune femme aux cheveux
d�tach�s. Elle semblait inqui�te, mais la prise qu’elle avait sur un
b�ton semblait d�termin�e. Certaines explications risquaient d’�tre
compliqu�es...
<!--l. 240--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">S</span><span
class="ecti-1095">�l</span><span
class="ecti-1095">�ne</span>
<!--l. 242--><p class="indent" > Qu’avait-il dit d�j�<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Que Silw� tenterait de... discuter pour leur laisser
le temps d’arriver<span class="frenchb-thinspace"> </span>? On ne pouvait nier son efficacit�, l’homme ayant
visiblement l�ch� ses armes. Mais elle ne s’attendait pas vraiment � ce genre
de comportement. Devant elle, Zach n’avait pas boug�, et ce fut l’arch�re
qui se d�cida � rompre le silence. Elle fit deux pas dans la direction du
chevalier, son arc toujours point�.<br
class="newline" />— Silw�, �carte-toi. Toi, qui es-tu et que viens tu faire ici<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />L’�tranger l�cha l’elfe, et fit un pas en avant.<br
class="newline" />— Mon nom est Irdann, je suis paladin de la d�esse Melna. Je suis � la
recherche de dame S�l�ne.<br
class="newline" />Elle ne put retenir une exclamation de surprise. Il l’aper�ut, la d�visagea,
puis fit un pas dans sa direction, et posa un genou � terre devant
elle.<br
class="newline" />— C’est vous<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Vous �tes saine et sauve<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle recula d’un pas, m�fiante, serrant toujours son b�ton de marche. Zach
sembla reprendre ses esprit et sa prise sur son �p�e, et s’interposa entre
eux.<br
class="newline" />— Qu’est-ce que vous me voulez<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Vos parents, le seigneur et la dame Assem se font un sang d’encre pour
vous. Ils m’ont donc envoy� vous retrouver. Ils craignaient que vous ne soyez
morte, ou enlev�e par des brigands...<br
class="newline" />Elle �carta le bras de Zach et se planta devant le chevalier.<br
class="newline" />— Comme vous pouvez le voir, je vais tr�s bien, je suis parfaitement libre de
mes mouvements, et je serai bient�t rendue � bon port. Pourquoi
s’inqui�tent-ils � ce point<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Ils ont eu votre message lorsque vous partiez de chez votre �poux, le sieur
de Quayle, mais d’apr�s eux vous auriez d� �tre arriv�e voil� d�j� cinq
jours...<br
class="newline" />Elle croisa les bras, vex�e. Il n’avait pas besoin de r�v�ler tout cela devant
ses compagnons non plus...<br
class="newline" />— J’ai rat� la diligence en arrivant dans un des villages. Alors j’ai engag�
un guide et protecteur, et je suis venue � pieds � travers la for�t. Vous
pouvez donc les rassurer, je vais tr�s bien.<br
class="newline" />Le paladin se releva et hocha la t�te en souriant l�g�rement. <br
class="newline" />— La d�esse soit lou�e, c’est le cas.<br
class="newline" />� cet instant, Aldariel s’avan�a, son arc toujours point� vers la t�te de
l’�tranger.<br
class="newline" />— Un instant. Qu’est-ce qui nous dit qu’on peut te faire confiance<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Moi.
<!--l. 262--><p class="indent" > Silw� s’avan�a, et d�licatement, posa la main sur le bras de l’arch�re,
pour lui faire d�tendre son arc. Elle fit signe � Zach de baisser �galement
son arme.<br
class="newline" />— Je connais tr�s bien Irdann, depuis des ann�es, et je r�ponds de
lui.<br
class="newline" />Elle la regarda, l�g�rement m�fiante.<br
class="newline" />— Comment le connais-tu<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Lui et moi avons �t� �l�ves de ma�tre Ernest, � la capitale. C’est un ami
que je craignais de ne jamais revoir d’ailleurs...<br
class="newline" />Le sourire qu’ils �chang�rent semblait tr�s naturel et sinc�re. Elle se
retourna vers elle � nouveau.<br
class="newline" />— S�l�ne, tu peux lui faire confiance autant qu’� moi. Je lui confierais ma
vie sans aucune h�sitation.
<!--l. 270--><p class="indent" > Zach et Aldariel avaient baiss� leurs garde, mais restaient fig�s,
observant l’homme. Elle se tourna vers lui, bien d�cid�e � en apprendre
plus.<br
class="newline" />— Que faisiez-vous chez mes parents<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— J’ai �t� adoub� il y a quelques mois seulement, et je rentrais chez les
miens, apr�s de longues ann�es d’absence. Mon retour devrait d’ailleurs
co�ncider avec l’ouverture d’un grand tournoi de tir � l’arc que mon p�re
organise r�guli�rement. Comptiez-vous vous y rendre<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle fron�a les sourcils.<br
class="newline" />— Vous �tes... le fils du duc De Vane<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il s’inclina l�g�rement.<br
class="newline" />— Leur troisi�me fils.<br
class="newline" />Elle r�fl�chit quelques instants. Il ne lui semblait pas l’avoir d�j�
crois�, plus jeune, or elle avait d�j� fait connaissance avec toute
l’aristocratie locale, incluant –surtout– les potentiels jeunes hommes �
marier.<br
class="newline" />— Mais... pourquoi n’ai-je jamais entendu parler de vous<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— D�s l’�ge de dix ans, j’ai �t� envoy� dans un temple de la capitale, pour
y devenir un paladin. Je n’ai presque pas revu ma famille depuis, et ai
convers� avec eux essentiellement par courrier.<br
class="newline" />Elle hocha la t�te. Elle connaissait cette tradition d’envoyer les troisi�mes
fils dans des temples, tradition qu’elle avait toujours trouv� idiote,
d’ailleurs. Elle tourna la t�te vers Silw�, qui d’un signe de t�te confirma la
version d’Irdann. Et puis il n’�tait pas responsable de la peur de ses
parents, finalement... et n’avait pas l’air si d�sagr�able que cela. Elle se
d�tendit l�g�rement, sans arriver � mettre le doigt sur ce qui la mettait
mal � l’aise. C’�tait peut-�tre le moment de ranger les couteaux
tir�s.<br
class="newline" />— Permettez-moi de vous pr�senter Zach, le meilleur guide de la r�gion,
sans qui je ne serais pas en vie en ce moment...<br
class="newline" />La main tendue obligea Zach � ranger son �p�e pour le saluer. C’�tait le
but. Il lui serra la main, non sans lui lancer un regard m�fiant.<br
class="newline" />— ... la princesse Aldariel Lalril�, des elfes sylvains, ...<br
class="newline" />L’ach�re dut � son tour d�sarmer sa fl�che pour se laisser baiser la main.
Elle sembla extr�mement surprise et rosit l�g�rement. C’est vrai que cette
fa�on de saluer les femmes n’�tait pas vraiment courante chez les
elfes...<br
class="newline" />— ... elle se rend �galement au ch�teau du duc votre p�re, pour ce grand
tournoi, accompagn�e de son garde du corps, Silw�, que vous connaissez
d�j� visiblement. Nous les avons crois�es sur notre chemin, et faisons route
ensemble.<br
class="newline" />— Enchant� de faire votre connaissance, et je suis �galement soulag� de voir
que dame S�l�ne est en s�curit� avec vous. Je suis certain d’ailleurs que le
seigneur Assem sera ravi d’accueillir les courageux compagnons qui ont
guid� leur fille jusqu’� eux.<br
class="newline" />Elle observa la r�action de ses trois amis. Aldariel semblait int�ress�e, pr�te
� accepter. Elle jeta un œil � sa compagne, qui haussa les �paules. Zach, en
revanche, semblait extr�mement r�ticent.
<!--l. 289--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Irdann</span>
<!--l. 291--><p class="indent" > La tension semblait s’�tre apais�e, m�me si le guide semblait encore tr�s
mal � l’aise.<br
class="newline" />— Je ne suis pas s�r que ce soit une bonne id�e... Les ch�teaux, les
courbettes, ce n’est pas vraiment fait pour moi. Allez-y sans moi.<br
class="newline" />S�l�ne le regarda quelques instants. Puis elle reprit d’un ton ferme.<br
class="newline" />— Nous discuterons de cela plus tard. Allons d’abord nous restaurer et nous
reposer un peu plus loin. Il y a une rivi�re, votre monture pourra y
boire.<br
class="newline" />Elle d�signa une direction, et lui fit signe de la suivre. La princesse
sembla alors se r�veiller d’une longue apathie et jeta un regard �
S�l�ne.<br
class="newline" />— Je prends un peu d’avance, vous me rejoindrez...<br
class="newline" />Irdann ne put s’emp�cher de regarder l’elfe s’�loigner rapidement, avec
l�g�ret� et aisance. Les elfes sylvains �taient en for�t comme des poissons
dans l’eau...
<!--l. 299--><p class="indent" > Ils partag�rent rapidement une collation au bord de la rivi�re. La
princesse semblait un peu g�n�e vis-�-vis de lui, mais voyant la familiarit�
qu’il partageait avec Silw�, elle se d�tendit vite, et lui posa quelques
questions sur la fameuse capitale humaine, qu’elle semblait r�ver de visiter.
S�l�ne semblait l�g�rement distante, mais lui sourit tout de m�me en lui
racontant bri�vement leur trajet. Elle ne tarissait pas d’�loges pour son
guide, qui pourtant restait � l’�cart et ne parlait que pour ajouter quelques
pr�cisions.
<!--l. 301--><p class="indent" > Ils finirent par convenir qu’elle partirait seule avec lui. Les elfes, qui
seraient bien accueillis au ch�teau du duc, seraient probablement mal venus
dans la seigneurie d’Assem, o� ils risquaient d’�tre regard�s de travers. Bien
qu’ils y seraient fort bien trait�s, les deux jeunes femmes pr�f�raient un
trajet tranquille en rase campagne � des draps de soie et un accueil plus ou
moins froid. La jeune princesse ne semblait pas s’encombrer de protocole et
de belles paroles, �tait-ce le fait d’�tre en petit groupe en for�t, ou �tait-elle
toujours ainsi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 303--><p class="indent" > Ils se lev�rent, et Irdann prit le sac de S�l�ne pour l’attacher solidement
� la selle du cheval. Celle-ci �tait en discussion avec Zach, un peu � l’�cart.
Il se demandait bien ce qu’ils se disaient, mais par respect il l’attendit �
bonne distance. Il lui sembla qu’elle lui effleura le bras, puis tourna
le dos � son guide et se dirigea droit vers lui. Son visage semblait
impassible.<br
class="newline" />— Mettons-nous en route au plus vite, mes parents doivent s’inqui�ter.<br
class="newline" />Il souleva la jeune femme par la taille, et la d�posa sur la selle. Puis il
monta derri�re elle, et ils se mirent en route.
<!--l. 307--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Aldariel</span>
<!--l. 309--><p class="indent" > Ils s’�taient mis en route quelque temps apr�s le d�part de S�l�ne et
Irdann. Elle avait pos� quelques questions � son amie sur le fameux paladin,
auxquelles elle avait r�pondu avec enthousiaste. Ainsi, ils avaient appris
l’escrime aupr�s du m�me ma�tre et avaient d�j� v�cu des tas de choses
ensemble... Quelle chance avait-elle<span class="frenchb-thinspace"> </span>!
<!--l. 311--><p class="indent" > Ils s’arr�t�rent au pied d’un grand arbre, que Silw� proposa d’escalader
pour v�rifier leur chemin. Zach, qui n’avait pas dit un mot depuis que le
chevalier les avait quitt�s, haussa les �paules. Pourtant, c’�tait lui
qui connaissait bien le coin, normalement... Alors qu’il s’asseyait au
pied de l’arbre, elle se hissa sur une branche � peine au dessus de sa
t�te.<br
class="newline" />— H�, ne fais pas cette t�te. Si tu voulais la revoir, tu n’avais qu’� aller
avec elle.<br
class="newline" />Il soupira.<br
class="newline" />— Je n’arrive juste pas � croire qu’elle ne m’ait rien dit...<br
class="newline" />Elle sourit. Elle avait r�ussi � le faire parler, d�j�.<br
class="newline" />— Qu’elle ne t’ait pas dit pour sa magie<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Non, �a je comprends... Mais qu’elle soit la fille du seigneur Assem, et
qu’elle soit mari�e<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Ce n’est pas rien tout de m�me, et ce n’est pas comme
si sa vie en d�pendait<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />— Bah, tu savais bien qu’elle �tait noble, non<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle lui donna un petit coup de coude dans la t�te, ce qui le fit lever.<br
class="newline" />— Oui mais... ce n’est pas pareil. J’ai grandi dans un petit village non loin
de son ch�teau... Techniquement, je suis, enfin j’�tais, son fid�le
sujet...<br
class="newline" />Elle sourit et se mit accroupie sur la branche. Elle lui donna une petite
pichenette sur le front.<br
class="newline" />— Et alors<span class="frenchb-thinspace"> </span>? �a change quoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle bondit sur une branche un peu plus loin, un peu plus haut. Il soupira,
et se hissa � son tour l� o� elle �tait assise quelques instants plus
t�t.<br
class="newline" />— Et puis... Mais elle est mari�e de toutes fa�ons, la question ne se pose
pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Elle ne dit rien, et le regarda en souriant. Il se redressa, et fron�a les sourcils
en la voyant.<br
class="newline" />— Et elle ne m’a pas dit qu’elle �tait mari�e, et elle n’a pas d’alliance. Que
je sache, m�me � la capitale, ils en mettent, non<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle se tut, et se contenta de monter encore d’un cran, toujours en souriant.
Vex�, il s’�lan�a lestement vers elle, et se r�tablit sur la m�me branche. Sa
r�action �tait presque dr�le, en fait... <br
class="newline" />— Qu’est-ce que �a veut dire, hein<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 330--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Zach</span>
<!--l. 332--><p class="indent" > L’arch�re le fixait toujours, semblant presque se retenir de rire. Il �tait
sur la m�me branche qu’elle, tout pr�s, et ce sourire narquois lui donnait
presque envie de la frapper. C’�tait ridicule...<br
class="newline" />— �a veut dire que tu es juste b�te.<br
class="newline" />— H���<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Elle le poussa brusquement du coude, il perdit l’�quilibre et se rattrapa de
justesse � une branche au dessus de sa t�te.<br
class="newline" />— � ton avis, grand b�ta, si elle ne te l’a pas dit, c’est qu’elle pr�f�rait que
tu l’ignores... non<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il reposa ses pieds sur une branche pr�s de celle de l’arch�re, et s’accouda
sur une autre, face � elle. Il tenta de contenir la col�re qui montait
en lui. Contre qui d’ailleurs<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Contre Aldariel, qui continuait de le
regarder d’un œil moqueur<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Contre S�l�ne<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Contre Irdann<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Contre
lui-m�me<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 339--><p class="indent" > Il soupira et tenta de r�fl�chir.<br
class="newline" />— Elle peut avoir plein de raisons pour que je l’ignore, ne serait-ce que pour
ne pas r�v�ler son identit� compl�te. Ce n’est pas la premi�re fois que
j’escorte des gens qui souhaitent rester discrets.<br
class="newline" />Elle s’accouda � la m�me branche que lui, et le poussa doucement �
l’�paule, du bout du doigt. Il savait bien que ce n’�tait pas la r�ponse
qu’elle attendait, ni celle que lui souhaitait donner et qui commen�ait �
na�tre dans son esprit.<br
class="newline" />— Non, tu d�lires, je n’ai jamais eu aucune chance avec elle.<br
class="newline" />Elle ne dit rien, et continua de le pousser du bout du doigt en souriant.<br
class="newline" />— Dis plut�t que tu n’as pas os� saisir cette chance.<br
class="newline" />Vex�, il attrapa vivement le poignet de l’arch�re. Elle ne chercha m�me pas
� se d�gager.<br
class="newline" />— � ta place, je n’aurais pas h�sit�.<br
class="newline" />Il faillit lui r�pondre par une insulte sur les pr�tendues mœurs l�g�res des
elfes, et se ravisa. Il soupira, et rel�cha sa poigne.<br
class="newline" />— Facile � dire. C’est une noble dame, il lui faut un preux chevalier, pas un
sauvageon barbu et fauch�.<br
class="newline" />Elle gagna � nouveau une branche un peu plus �lev�e. Il ne l’aurait pas
avou�, mais pouvoir vider son sac le soulageait un peu. Il continua son
ascension � son tour.<br
class="newline" />— Ce paladin, d’ailleurs... Tu lui fais confiance<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle haussa les �paules. Son sourire s’�tait fig�.<br
class="newline" />— Tu veux dire que son air de prince charmant, loyal, courageux, fort, et
j’en passe, est trop parfait pour �tre vrai<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il fit une moue.<br
class="newline" />— Je m’inqui�te pour S�l�ne, c’est tout.<br
class="newline" />Elle eut un petit sourire et le rejoignit sur sa branche.<br
class="newline" />— Qu’est-ce qui t’inqui�te<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Qu’il ne soit pas ce paladin loyal, courageux,
fort aux airs de prince charmant qu’il semble �tre, et qu’elle soit en danger
avec lui<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ou... Est-ce que tu crains qu’il soit pr�cis�ment un paladin loyal,
courageux, fort, aux airs de prince charmant<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Vex�, il bouscula sans m�nagement l’arch�re. Celle-ci tomba en arri�re,
tendit le bras pour saisir une branche � peine plus bas, et gracieusement, se
r�tablit sur celle-ci. Puis elle remonta � sa hauteur. Pour se faire pardonner
d’avoir �t� si peu d�licat, il lui tendit la main.<br
class="newline" />— Tu grimpes sacr�ment bien pour, euh...<br
class="newline" />Il arr�ta net sa phrase. Elle le fixa en fron�ant les sourcils. <br
class="newline" />— Pour... une fille<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Une princesse<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Euh...<br
class="newline" />Refusant sa main, elle bondit � nouveau sur sa branche, et profita de son
�lan pour le pousser � son tour. D�s�quilibr�, il se rattrapa des deux bras
� la branche sur laquelle il se trouvait un peu plus t�t. Aldariel,
toujours debout sur cette m�me branche, l’observait d’un air critique. Il
effectua une traction rapide, et se r�tablit rapidement. Elle hocha la
t�te.<br
class="newline" />— �a va, tu t’en sors plut�t bien... pour un demi-humain.
<!--l. 365--><p class="indent" > Elle se mit � rire devant son air vex�. Il se prit au jeu, et tenta de la
bousculer une fois encore. Elle esquiva son coup d’�paule en sautant avec
l�g�ret� sur une branche � c�t�. Elle riait toujours. Il sourit et la suivit,
tentant encore une fois de la pousser, mais elle avait encore une fois bondi
un peu plus loin. Il n’y avait pas d’autre prise derri�re elle, pouvait-elle lui
�chapper cette fois-ci<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il plia les genoux, et sauta dans sa direction,
cherchant � l’attraper � la taille. Elle fit un pas en arri�re, se laissant
tomber verticalement, et saisit avec ses deux mains la branche sur laquelle
elle se trouvait une seconde plus t�t. Ses bras � lui n’attrap�rent que du
vide. Le temps de reprendre son �quilibre, elle avait d�j� pos� les
pieds sur une fourche en contrebas, et le regardait d’un air narquois.
Il savait bien qu’il n’aurait pas d� jouer � ce jeu-l� avec une elfe
sylvaine...
<!--l. 368--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Aldariel</span>
<!--l. 370--><p class="noindent" >— H��, les deux tourtereaux, vous ne voulez pas monter au lieu de
jouer<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />C’�tait la voix de Silw�. Malgr� la plaisanterie, le ton de sa voix semblait
l�g�rement inquiet. Elle �changea un regard avec Zach, et ils escalad�rent
rapidement l’arbre, jusqu’� la rejoindre � la cime, qui surplombait une
bonne partie de la for�t. Debout sur une branche fine, qui ployait
l�g�rement sous son poids, elle fixait l’horizon qui s’assombrissait avec la
tomb�e de la nuit.
<!--l. 373--><p class="indent" > Elle pointa du doigt la direction dans laquelle Irdann et S�l�ne �taient
partis. Une route –qu’ils avaient probablement rejointe depuis– se dessinait
� travers la for�t, � l’or�e de laquelle se profilaient des champs et un petit
village. Dans une petite clairi�re, � mi-chemin, elle distinguait un
attroupement, vraisemblablement humain, ainsi que ce qui ressemblait � des
feux.<br
class="newline" />— Zach, toi qui vois encore mieux que nous...<br
class="newline" />Il avait pliss� les yeux pour mieux distinguer la zone.<br
class="newline" />— Une douzaine d’hommes, qui campent dans la clairi�re. Ils n’ont pas
d’uniforme de soldat, mais sont arm�s apparemment... Pas des voyageurs
non plus apparemment. Je ne vois qu’une solution, ce sont probablement des
brigands.<br
class="newline" />— Si nombreux et pr�s du village<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Comment est-ce possible<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je n’en sais rien, et ce n’est pas rassurant. Ils ont l’air d’attendre quelque
chose...<br
class="newline" />Il p�lit.<br
class="newline" />— S�l�ne<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Silw� se mordit les l�vres.<br
class="newline" />— Irdann est tr�s dou�, mais il aura du mal face � tant de monde, surtout
s’il doit la prot�ger en m�me temps...<br
class="newline" />Zach n’avait pas �cout� et avait commenc� sa descente. Aldariel le rattrapa
par un bras.<br
class="newline" />— H�, o� tu cours comme �a tout seul<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Son visage �tait paniqu�.<br
class="newline" />— Je ne sais pas si j’ai une chance d’arriver � temps, mais je ne resterai pas
ici sans rien tenter.<br
class="newline" />Elle lui sourit.<br
class="newline" />— �videmment qu’on ne va pas rester ici sans rien tenter. �videmment
qu’on ne va pas te laisser y aller seul.<br
class="newline" />Elle l�cha son bras, et redressa.<br
class="newline" />— Ils n’ont pas �norm�ment d’avance sur nous, surtout s’ils ont d� faire
avancer un cheval dans une for�t dense. Zach, tu es le plus rapide � la
course � pied, et le plus endurant. Pars devant, et n’oublie pas que
l’obscurit� est ton alli�e. Silw� et moi nous occuperons de prendre tes
affaires. Nous arriverons aussi vite que possible, un peu apr�s toi. En
route<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Il lui adressa un sourire de reconnaissance, puis se rua en bas.
<!--l. 393--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Irdann</span>
<!--l. 395--><p class="indent" > Il sentait que la jeune femme n’�tait pas tr�s � l’aise avec lui. En m�me
temps, il pouvait la comprendre... Sans Silw� pour parler en sa faveur, elle
n’aurait probablement jamais accept� de venir avec lui, sans compter les
difficult�s � s’expliquer avec ses compagnons. La situation �tait �trange
pour lui. Il avait tant entendu parler d’elle, mais sans jamais la voir.
Il avait pens� � elle, senti son cœur battre dans sa main tant de
fois, qu’il l’avait presque sentie famili�re. Mais que savait-elle de lui,
au fond<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il se d�cida � entamer la conversation, pour tenter de la
rassurer.<br
class="newline" />— Nous sortirons probablement de la for�t en d�but de nuit. Nous pourrons
trouver une auberge o� loger, et demain nous arriverons enfin chez vos
parents.<br
class="newline" />— Vous n’aurez pas de mal � trouver votre chemin, � la nuit tombante<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je suis arriv� par l�. Il suffit d’aller tout droit et de retrouver la route.
M�me si la nuit tombe avant que nous ne sortions de la for�t, il sera facile
de la suivre.<br
class="newline" />— Parlant de �a... Comment m’avez-vous trouv�e, au beau milieu de nulle
part<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il soupira. C’�tait la question qu’il souhaitait �viter justement...<br
class="newline" />— Les paladins connaissent un enchantement secret, qui leur permet de
retrouver une personne pr�cise. Je ne puis vous en dire plus.<br
class="newline" />Elle sembla � demi satisfaite par la r�ponse. Elle prit une inspiration pour le
questionner, puis sentant sa g�ne, se ravisa. Apr�s quelques secondes de
silence, elle reprit.<br
class="newline" />— Pourquoi �tes-vous parti seul<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il la remercia int�rieurement de ne pas insister plus que cela sur
l’enchantement.<br
class="newline" />— Vos parents m’avaient propos� une arm�e pour m’accompagner... Mais
d’une part je souhaitais �viter d’attendre plusieurs jours qu’elle soit pr�te,
et d’autre part, je vous savais dans la for�t. Or une arm�e, m�me petite,
dans une for�t, c’est extr�mement inefficace, lent et peu discret. Je comptais
vous rep�rer, et si l’intervention d’hommes arm�s �tait n�cessaire, je
pouvais toujours revenir chercher de l’aide.<br
class="newline" />Elle hocha la t�te.<br
class="newline" />— D’ailleurs... Est-ce que je peux vous demander quelque chose<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui, bien s�r.<br
class="newline" />Elle soupira.<br
class="newline" />— Je ne sais pas monter � cheval, et je ne suis pas tr�s � l’aise en selle. Et
en plus, je crois qu’on fatigue inutilement votre monture, qui a d�j� bien du
mal � avancer dans cette v�g�tation dense. Vous ne croyez pas qu’on serait
tout aussi bien � pied<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Surpris, il ne r�pondit pas tout de suite. Elle avait raison, la pauvre jument
avait du mal � progresser, et le poids des deux jeunes gens �tait difficile
pour elle. Il mit pied � terre, et se tourna vers elle.<br
class="newline" />— Vous �tes s�re que vous pr�f�rez marcher<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle le regarda en souriant.<br
class="newline" />— Sieur Irdann, voil� presque six jours que je marche dans la for�t, avec
mon sac, et je suis toujours vivante. Je crois bien que je pr�f�re
marcher.<br
class="newline" />Il l’attrapa d�licatement par la taille et la d�posa au sol. Ils se remirent en
route, marchant � c�t� de la jument, visiblement soulag�e de n’avoir plus
tout ce poids � porter.<br
class="newline" />— Qu’est-ce qui vous a fait pr�f�rer la travers�e � pieds<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je devais prendre une diligence publique... mais je l’ai rat�e. Je n’avais
pas assez d’argent sur moi pour engager une escorte compl�te et des
chevaux. Mais finalement, ce n’est pas d�sagr�able, en fait.<br
class="newline" />Il la regarda avec surprise. La jeune dame semblait bien moins hautaine
que ce � quoi il s’attendait. Et en marchant ainsi, il pouvait voir
son visage, ce qui �tait nettement plus agr�able que de parler � sa
nuque.<br
class="newline" />— Vous �tes partie avec ce guide... vous avez fait des mauvaises
rencontres<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle hocha la t�te, laissant �chapper un l�ger frisson.<br
class="newline" />— Oui, des brigands. Heureusement qu’il �tait l� d’ailleurs... Apr�s cela, il a
pr�f�r� s’�loigner des sentiers battus pour �viter d’autres probl�mes de ce
genre.<br
class="newline" />Il d�signa du doigt l’ouverture dans les arbres.<br
class="newline" />— Voil� la route, nous pourrons avancer plus rapidement. �a tombe bien, le
soir tombe.<br
class="newline" />
<!--l. 425--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">S</span><span
class="ecti-1095">�l</span><span
class="ecti-1095">�ne</span>
<!--l. 427--><p class="indent" > La diversion de la route tombait � pic. Elle h�sitait � aborder le sujet
des araknes avec lui. Pourtant, ils devaient en parler � quelqu’un, pr�venir...
Mais qui, et comment<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Qui la croirait<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il faudrait qu’elle explique aussi
comment elle savait tout cela sur ces cr�atures, et ce qui s’�tait pass�...
Non, impossible de lui en parler. C’�tait presque rageant, de savoir autant
de choses importantes et de devoir les taire.<br
class="newline" />— Dame S�l�ne<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Vous allez bien<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Euh oui... Est-ce que je peux vous demander, au moins tant que nous
sommes seuls, de m’appeler simplement S�l�ne<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il lui sourit et hocha la t�te.<br
class="newline" />— Gardons le protocole pour plus tard. Vous pouvez m�me me tutoyer et
m’appeler Irdann.<br
class="newline" />Elle poussa un soupir de soulagement et sourit. Ce paladin �tait plut�t
sympathique, finalement... <br
class="newline" />— Irdann<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Tu as bien fait de laisser tomber le casque, tu as vraiment l’air effrayant
avec.<br
class="newline" />Il haussa les �paules.<br
class="newline" />— Silw� m’a dit �a. En plus, elle a raison sur le fait que, sans ce
casque qui limite ma vue, j’aurais eu une chance de les rep�rer, elle et
Zach.<br
class="newline" />— Tu sais vraiment te battre avec deux �p�es ou tu as ces armes pour
impressionner<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je sais r�ellement les utiliser. J’ai appris chez ma�tre Ernest, � la
capitale, le maniement de toutes sortes de lames, et comme j’�tais
ambidextre, il m’a enseign� le maniement sp�cifique aux deux �p�es...
J’admets cependant que je joue beaucoup sur le c�t� imposant de ces deux
armes. Cela fait aussi partie du jeu.<br
class="newline" />Il lui sourit, puis son sourire se figea soudain.
<!--l. 442--><p class="noindent" >— Qu’est-ce que c’est que �a<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il l�cha la bride de la jument, qui sursauta. Un groupe d’hommes arm�s
arrivait en courant dans leur direction, arm�s. Elle se retourna vivement,
deux autres arrivaient dans leur dos. Elle retint un cri.<br
class="newline" />— Place-toi derri�re moi.<br
class="newline" />En un clin d’œil, il avait d�gain� ses armes, et s’�tait plac� en garde,
surveillant les deux groupes s’approchant. Elle recula entre lui et la jument,
rageant de ne pouvoir l’aider. Elle n’avait m�me pas son b�ton de marche
pour se d�fendre...
<!--l. 447--><p class="indent" > Effectivement, Irdann �tait tr�s dou�, et ses �p�es fendaient l’air � une
vitesse impressionnante. Plusieurs des brigands tomb�rent � ses pieds, et il
se d�pla�a aussi vivement pour la prot�ger d’autres hommes qui arrivaient.
Il y en avait beaucoup trop pour qu’il tienne le coup... Difficile � dire
combien, avec l’obscurit� qui tombait, mais ils �taient en mauvaise
posture.<br
class="newline" />— S�l�ne, mets-toi � l’abri...<br
class="newline" />Il avait cri� �a entre deux coups d’�p�e. Elle recula vers la jument.
Pourrait-elle tenir en selle et s’enfuir<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Et l’abandonner<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle rep�ra au sol
un coutelas, abandonn� par un des brigands qui gisait au sol. Saurait-elle
s’en servir de toutes fa�ons<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 451--><p class="indent" > Elle sentit soudain un bras saisir son �paule, et poussa un cri. Irdann,
occup� par plusieurs adversaires � la fois, �tait trop loin d’elle pour
intervenir. L’homme approcha son �p�e de son visage, et elle se mit �
trembler. Elle enrageait int�rieurement de ne pas savoir se d�fendre comme
Silw� ou Aldariel... Mais elle ne se laisserait pas tuer ou enlever sans
essayer quelque chose. Elle posa son autre main contre sa poitrine, et
poussant un l�ger g�missement, s’effondra. Elle n’avait pas besoin de
jouer beaucoup, ses jambes tenaient � peine son poids de toutes
fa�ons...
<!--l. 453--><p class="indent" > Elle entendit Irdann crier son nom. Y avait-il un �cho dans sa voix, ou
avait-elle r�v�<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Les yeux ferm�s, elle sentit son bras s’approcher du sol,
tandis que l’homme la retenait vagument par un bras. Surpris, ou
simplement peu press�<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Apr�s tout, �vanouie ou debout, �a ne devait pas
changer grand chose pour lui. Elle �tait juste le lot � ramasser. Elle sentit
ses doigts se refermer sur la poign�e du coutelas, et une bouff�e de courage
et d’�nergie l’envahit. Elle reprit appui sur ses pieds, et en se redressant,
planta l’arme droit dans la poitrine de l’homme. Il eut un sursaut
et tomba au sol, le visage marqu� d’un m�lange de surprise et de
douleur.
<!--l. 455--><p class="indent" > Elle n’eut pas le temps de r�fl�chir plus � son geste. Irdann �tait
toujours en difficult�, et deux autres brigands s’approchaient d’elle, l’arme
en avant. Cette fois, elle ne pourrait plus jouer le jeu de la jeune
fille effarouch�e... Elle tremblait, mais serra malgr� tout le coutelas
–couvert de sang– dans ses mains. Elle ne se laisserait pas tuer ou
enlever sans essayer de se d�fendre... Zach aurait �t� fier d’elle...
s�rement.
<!--l. 457--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Zach</span>
<!--l. 459--><p class="indent" > Il avait couru sans s’arr�ter, son �p�e et son couteau � la main, jusqu’�
d�bouler sur le chemin. Il s’�tait fig� un instant en apercevant le champ de
bataille. Le paladin, entour� de plusieurs hommes, peinait � se d�fendre
malgr� son adresse aux �p�es. Les bandits semblaient plus occup�s avec lui
et ne semblaient pas surveiller S�l�ne, attendant visiblement d’avoir �limin�
leur menace principale.
<!--l. 461--><p class="indent" > Sauf un, qui s’�tait approch�, et lui avait saisi le bras. Elle avait cri�.
Malgr� son �puisement, il se remit � courir aussi vite que possible. Elle p�lit
et s’effondra, lentement. Ou �tait-ce le temps qui s’�tait ralenti pour
lui<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— S�l�ne<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Il avait l’impression qu’il n’arriverait jamais jusqu’� elle. Dans le soir qui
tombait, un dernier rayon de soleil se refl�ta sur une lame abandonn�e au
sol. La main de la jeune femme apparemment �vanouie venait de se refermer
sur la poign�e... Il la vit soudainement se redresser, et poignarder de toutes
ses forces son agresseur.
<!--l. 466--><p class="indent" > Il fut si surpris qu’il tr�bucha, et manqua de s’�taler par terre. Mais
ayant assist� � la sc�ne, d’autres brigands s’approchaient d�j� d’elle... Ce
n’�tait pas le moment de se poser des questions. Il atteignit enfin le premier
des deux hommes, qu’il transper�a d’un coup d’�p�e. L’autre se
retourna vers lui, et un coup de masse lui effleura les cheveux. En un
instant, il fut pr�s d’elle. Elle tenait toujours � la main le couteau
qui lui avait permis de se d�fendre. Ils �chang�rent un regard, le
temps d’une fraction de seconde, et il se pla�a entre elle et l’autre
brigand.
<!--l. 468--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Irdann</span>
<!--l. 470--><p class="noindent" >— S�l�ne<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Il avait vu l’homme s’approcher, il l’avait vue se sentir mal, sans pouvoir
rien faire. Il avait toujours trois adversaires face � lui, et peinait � parer
leurs attaques... Il en avait mis deux au sol auparavant, et ces trois-l� se
contentaient d’attaques prudentes, vraisemblablement dans le but de
l’�puiser lentement. S’il bondissait � son secours, il n’avait aucune chance...
ils n’attendaient que �a probablement. Et s’il le faisait tuer, alors qui
pourrait la prot�ger<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 473--><p class="indent" > Il para quelques nouveaux coups, alors que, du coin de l’œil, il eut
l’impression de voir la jeune femme poignarder violemment son adversaire
d’un couteau. Ne s’�tait-elle pas �vanouie quelques instants plus t�t<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Le
stress du combat, avec l’obscurit� qui tombait, devait lui jouer des tours. Et
l’�puisement, aussi... Il ne tiendrait pas longtemps comme �a. Il
aper�ut d’autres silhouettes arriver au loin, en courant, de diff�rentes
directions. Il recula de quelques pas, jusqu’� un large tronc, � la fois
pour se donner quelques secondes de r�pit, et emp�cher ses trois
adversaires –et les nouveaux– de le contourner. L’un sembla marquer un
instant d’h�sitation, en regardant dans la direction de S�l�ne. Il en
profita pour s’en d�barrasser, mais deux nouveaux adversaires le
remplac�rent quasiment imm�diatement. Il continua � se d�fendre et �
distribuer des coups d’�p�e de tous les c�t�s, mais il se fatiguait
lentement.
<!--l. 475--><p class="indent" > Soudain, une silhouette bondit depuis l’arbre au dessus de lui, en
poussant un cri de rage, et atterrit � ses c�t�s. Une silhouette f�minine qu’il
reconnut imm�diatement malgr� l’obscurit�.<br
class="newline" />— Silw�<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />La jeune elfe avait rev�tu une l�g�re armure de cuir, attach� ses longs
cheveux, et surtout avait brandi son �p�e pour parer un coup qu’un des
brigands tentait de porter. Elle lui adressa un sourire rapide.<br
class="newline" />— Besoin d’un coup de main<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— D’�p�e, plut�t.<br
class="newline" />Leurs adversaires sembl�rent surpris une seconde de ce retournement de
situation. Il reprit courage. Il n’�tait plus seul... Ils se plac�rent dos � dos,
et firent face aux brigands. <br
class="newline" />— Comme au bon vieux temps, Irdann<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Comme au bon vieux temps<span class="frenchb-thinspace"> </span>!
<!--l. 484--><p class="indent" > Ils retrouv�rent rapidement la coordination qu’ils avaient lorsqu’ils
combattaient ensemble, � la garde. Plusieurs des hommes tomb�rent � leurs
pieds.<br
class="newline" />— Vite, il faut aller aider S�l�ne<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />— Ne t’inqui�te pas pour elle. On s’occupe de tout.<br
class="newline" />— On<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Zach et Alda sont l� aussi.<br
class="newline" />D’un m�me geste, ils achev�rent leurs derniers adversaires. Il laissa passer
un instant pour reprendre son souffle, puis observa enfin le champ de
bataille.
<!--l. 491--><p class="indent" > � peine plus loin, S�l�ne tenait un coutelas ensanglant� � la main. Elle
semblait effray�e, mais sa prise sur son arme �tait ferme et d�cid�e. Zach
�tait � ses c�t�s, �p�e et couteau tir�s, scrutant l’obscurit� d’un air
inquiet. Plusieurs hommes gisaient � leurs pieds. � quelques pas de
l�, sa jument Kahrafe pi�tinait sur place. Un brigand �tait couch�
en travers de la selle, la poitrine transperc�e d’une fl�che. Avait-il
cherch� � s’enfuir<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il aper�ut alors d’autres hommes au sol, le corps
transperc� d’une ou plusieurs fl�ches. Combien d’adversaires avaient-ils d�
affronter<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 493--><p class="noindent" >— Vous venez<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />C’�tait la voix de l’arch�re. Il fit quelques pas dans sa direction, avec
quelques difficult�s. La lame d’un des brigands lui avait fait une belle
entaille au niveau du genou. Il l’aper�ut alors, debout sur un des brigands,
toujours vivant –du moins pour le moment–, allong� � plat ventre. La botte
gauche de la jeune elfe lui maintenait la poitrine au sol, et elle avait son arc
point� dans sa direction. Il eut un frisson en recomptant les hommes morts
de ses traits. D’ailleurs, il ne voyait aucune fl�che qui semblait avoir
manqu� sa cible... Ne jamais sous-estimer une elfe. M�me –encore plus–
lorsqu’il s’agit d’une princesse � l’air innocent, d�licat et fragile.
<br
class="newline" />— Je vous en ai gard� un.
<!--l. 497--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Aldariel</span>
<!--l. 499--><p class="indent" > Elle �tait essouffl�e, par la course comme par la bataille. Alors que Zach,
arrivant avec une nette avance, avait couru prot�ger S�l�ne, Silw� avait
bondi dans la m�l�e pour aider le paladin... En restant � couvert sous les
arbres, elle avait fait pleuvoir ses fl�ches mortelles sur les quelques hommes
restants, qui tentaient de s’approcher des combattants ou de s’emparer du
cheval, laiss� � l’abandon. Voyant le dernier d’entre eux s’enfuir, elle avait
cherch� � le capturer vivant. Si elle n’avait pas l’entra�nement � la lutte de
Zach ou de Silw�, la surprise et un arc aux fl�ches pointues avaient tr�s bien
fait l’affaire.
<!--l. 501--><p class="indent" > Ses compagnons s’approch�rent, m�fiants. Le jeune paladin la regardait
avec une expression m�mant suprise, crainte et admiration. L’aurait-il prise
pour une idiote sans d�fense<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Qu’est-ce que vous voulez de moi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />C’�tait la voix de son prisonnier.<br
class="newline" />— Je connais bien les habitudes des gens comme toi. Normalement, vous
ne prenez pas le risque de vous approcher si pr�s des habitations.
Pourquoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />L’homme tourna p�niblement la t�te vers Zach, qui venait de poser la
question. Il avait point� son �p�e sur lui, et lui fit signe de le l�cher. Elle
h�sita, puis ob�it, sans d�tourner son arc de sa cible. Le prisonnier se
redressa, et consid�ra ses adversaires, estimant ses chances. Apercevant
enfin le visage de celle qui l’avait mis hors combat, il marqua la suprise, puis
la peur.<br
class="newline" />— Je ne sais pas. Le chef a dit qu’il y aurait un paladin allant chercher une
dame riche qui passerait par ici.<br
class="newline" />N’osant pas faire un geste de la main, il d�signa du menton Irdann et
S�l�ne. Nous avons vu le paladin � l’aller, et nous l’avons attendu � son
retour sur le sentier.<br
class="newline" />— Qui vous a dit �a<span class="frenchb-thinspace"> </span>? interrogea Irdann.<br
class="newline" />— Je ne sais pas. Il fallait demander au chef. On lui a donn� l’info. Moi je
ne sais rien<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Laissez-moi partir<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Tout en surveillant l’homme du coin de l’œil, les compagnons se regard�rent.
Aldariel se pencha vers Irdann.<br
class="newline" />— Tu as parl� de ton exp�dition � beaucoup de monde autour de
toi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il haussa les �paules.<br
class="newline" />— Non. Mais j’imagine que les rumeurs vont vite...<br
class="newline" />— C’est surtout �trange une telle exp�dition pour deux malheureux jeunes
gens, interrompit Zach, les sourcils fronc�s. M�me riches.<br
class="newline" />— Laissons tomber, je crois que ce type ne sait rien de toutes fa�ons, ajouta
Silw�.
<!--l. 517--><p class="indent" > Apr�s avoir v�rifi� que l’homme ne portait plus aucune arme, ils le
laiss�rent partir, pr�f�rant ne pas s’encombrer d’un prisonnier. Il s’enfuit
sans demander son reste.
<!--l. 519--><p class="indent" > Aldariel remarqua alors le genou ensanglant� du paladin.
<!--l. 521--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Irdann</span>
<!--l. 523--><p class="noindent" >— Oh, tu es bless�<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il faillit r�pondre que ce n’�tait rien, mais la douleur manqua de le faire
tr�bucher. Il retint une grimace.<br
class="newline" />— On dirait.<br
class="newline" />— Assieds-toi, je vais regarder �a.<br
class="newline" />Il h�sita quelques instants. La jeune princesse avait rang� ses armes,
s’�tait approch�e, et le regardait avec douceur. Il jeta un œil � Silw�,
qui lui sourit. Un peu soulag� –si elle lui faisait confiance, il n’avait
rien � craindre–, il s’assit dos � un large tronc. Elle s’assit face �
lui.<br
class="newline" />— Silw�, tu peux aller chercher de quoi soigner dans mon sac<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Je l’ai
laiss�, ainsi que les v�tres, dans cet arbre.<br
class="newline" />Alors que sa compagne s’�loignait, elle lui fit remonter son pantalon pour
mieux examiner sa blessure.<br
class="newline" />— Ils ne t’ont pas rat�. Tu as pu continuer � combattre avec �a<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il haussa les �paules.<br
class="newline" />— Dans le feu de l’action, et quand on a sa vie en danger... Et puis je
n’avais pas tellement besoin de me d�placer.<br
class="newline" />— Je t’ai vu dans la bataille, de loin. Tu es impressionnant avec tes
�p�es<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />— Merci. Mais je ne sais pas ce que je serais devenu si vous n’�tiez pas
venus tous les trois � notre secours... Nous vous devons la vie.
<!--l. 536--><p class="indent" > � cet instant, Silw� r�apparut, tendant un sac de cuir fin � sa
compagne.<br
class="newline" />— Je vais r�cup�rer tes fl�ches pendant que tu t’occupes de lui. Et apr�s on
file au plus vite.<br
class="newline" />Elle s’�loigna de nouveau. Alors qu’Aldariel fouillait dans ses affaires � la
recherche d’il-ne-savait-quoi, il r�alisa qu’avec toutes ces �motions il n’avait
pas pens� � S�l�ne. Alors qu’il �tait cens� la prot�ger<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Comment avait-il
pu oublier<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Allait-elle bien<span class="frenchb-thinspace"> </span>? La bataille avait d� �tre un choc pour elle...
Il tourna la t�te, mais il faisait sombre, et il ne la voyait pas. La jeune elfe
lui sourit.<br
class="newline" />— Si c’est pour S�l�ne et Zach que tu t’inqui�tes, rassure-toi, ils sont
quelques pas derri�re toi, et ils vont tr�s bien. <br
class="newline" />Soulag�, il laissa la jeune elfe s’occuper de son genou.
<!--l. 543--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">S</span><span
class="ecti-1095">�l</span><span
class="ecti-1095">�ne</span>
<!--l. 545--><p class="indent" > �tait-ce la peur qu’elle avait ressentie, le soulagement li� � la fin du
combat, ou une combinaison des deux<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ils avaient regard� l’homme partir
avec m�fiance, et l’instant d’apr�s –ou longtemps apr�s<span class="frenchb-thinspace"> </span>?–, elle s’�tait
retrouv�e dans les bras de Zach. Elle entendait les voix de leurs
compagnons, autour d’eux, ils n’�taient pas loin, mais elle n’y pr�tait pas
attention. <br
class="newline" />— Tu vas bien<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Tu as �t� bless�<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je n’ai rien, �a va.<br
class="newline" />Ils rest�rent quelques instants silencieux, sans bouger.<br
class="newline" />— Merci d’�tre venu � mon secours. � notre secours.<br
class="newline" />— ... J’ai eu si peur quand je t’ai vue aux prises avec ce bandit.<br
class="newline" />— Moi aussi. Je ne pensais pas que j’y arriverais...<br
class="newline" />Il ne r�pondit pas, et ne bougea pas, la gardant contre lui. Il sentait la
sueur, le cuir de son armure, et le sang. Mais elle n’avait pas la moindre
envie d’en bouger.
<!--l. 555--><p class="noindent" >— Hm... d�sol�e de vous interrompre, mais il faudrait qu’on bouge.<br
class="newline" />C’�tait la voix de Silw�. Ils se l�ch�rent instantan�ment. Elle avait remis
son sac en bandouli�re, et tenait la jument d’Irdann par la bride. Quelques
m�tres plus loin, celui-ci s’approchait en boitant, tout en s’appuyant sur
Aldariel. Un bandage entourait son genou, et son pantalon montrait des
traces de sang. Elle eut honte de ne pas �tre all�e l’aider, alors qu’il �tait
bless�. Mais � bien y r�fl�chir, la jeune elfe s’�tait occup�e de sa plaie aussi
bien, voire mieux qu’elle. Il �tait �videmment hors de question qu’elle lui
montre ses pouvoirs... Au moins il allait bien, il souriait m�me, malgr� sa
blessure.
<!--l. 558--><p class="noindent" >— En route. Il nous reste une heure de marche � peu pr�s, et il fait d�j�
nuit.<br
class="newline" />Ils rejoignirent rapidement le sentier. Irdann avait toujours des difficult�s �
marcher, et ils durent insister pour qu’il monte sur le cheval.<br
class="newline" />— Je me sens mal � l’aise d’�tre � cheval si tu vas � pieds...<br
class="newline" />Elle haussa les �paules en souriant.<br
class="newline" />— Ne sois pas b�te. Tu es bless�, moi pas, et on ne doit pas tra�ner. Tant
pis pour le code d’honneur.<br
class="newline" />Il soupira, et finit par accepter l’aide de Zach pour monter sur le dos de sa
jument.
<!--l. 565--><p class="noindent" >— O� va-t-on, une fois sortis<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Il y a une auberge dans le village o� on arrive. Vous pourrez y louer une
chambre sans probl�me, si on ne vous l’offre pas directement, vu votre rang
et votre nom.<br
class="newline" />Y avait-il une sorte de g�ne lorsqu’il parlait de � leur nom �<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ce n’�tait
peut-�tre pas le moment de le relever.<br
class="newline" />— Et vous trois, que ferez-vous<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Zach haussa les �paules.<br
class="newline" />— Je connais ce village, c’est celui de mon enfance. S’il n’y a plus de
place � l’auberge, j’irai dormir chez mes parents, qui habitent une
petite maison en bordure de la for�t. �a me changera de la terre
battue...<br
class="newline" />— Et nous, ajouta Silw�, nous nous contenterons s�rement d’un arbre ou de
cette terre battue. Nous ne sommes pas les bienvenues dans cette r�gion,
n’est-ce pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je pr�f�re dormir par terre que d’avoir � craindre pour ma s�curit�,
confirma Aldariel.
<!--l. 574--><p class="indent" > Ils avanc�rent encore un peu en silence, puis Zach se tourna vers le
groupe.<br
class="newline" />— Je peux toujours proposer � ma famille de nous h�berger. Je ne pense
pas qu’ils hurleraient � la vue de deux elfes, et je suis s�r qu’on est en
s�curit� chez eux.<br
class="newline" />Il marqua une pause, h�sitant, puis se tourna vers elle et Irdann.<br
class="newline" />— Vous �tes �galement les bienvenus. M�me si je comprendrais que vous
pr�f�riez une taverne � une petite chaumi�re.<br
class="newline" />— Cela ne me d�range pas du tout, si cela va � S�l�ne, j’accepte volontiers.
Pour tout dire, je pr�f�re aussi un lieu simple et s�r.<br
class="newline" />Cela voulait dire voir Zach un tout petit peu plus longtemps. Elle hocha la
t�te en souriant.<br
class="newline" />— Tes parents sont ouverts sur la question des autres races humaines<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il lui sourit. Est-ce qu’il �tait content, lui aussi, de l’accompagner encore un
peu<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Bah, si ce n’�tait pas le cas, ils n’auraient pas d�cid� de m’adopter, avec
ma t�te d’elfe.<br
class="newline" />Devant la t�te suprise du paladin, il s’expliqua.<br
class="newline" />— Il semble que j’aie du sang d’elfe. Je n’en ai pas la certitude, puisqu’on
m’a trouv� sur le pas d’une porte, tout b�b�. Les gens qui vivaient
l� m’ont confi� � celle qui allait �tre ma m�re, qui venait d’avoir
son quatri�me enfant, et qui avait assez de lait pour deux... Je ne
sais toujours pas si elle n’avait rien contre les elfes � l’�poque, ou si
elle m’a d’abord adopt� et a ensuite chang� son point de vue sur la
question.<br
class="newline" />Zach semblait un peu plus � l’aise vis � vis du paladin. Ou �tait-ce une
impression<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il n’aurait pas racont� cette histoire sinon, ou du moins plus
succintement.
<!--l. 587--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Silw</span><span
class="ecti-1095">�</span>
<!--l. 589--><p class="indent" > Ils �taient vivants, tous les cinq, et quasiment sans blessure. C’�tait d�j�
beaucoup... Et ils allaient peut-�tre pouvoir passer la nuit au chaud. Tout
n’allait pas si mal... Elle tourna la t�te vers ses compagnons. Irdann
discutait avec S�l�ne et Aldariel, qui marchaient � c�t� de la jument. Ils
avaient l’air de s’entendre plut�t bien, finalement. Zach marchait devant,
d’un pas d�cid�, en surveillant les alentours. Pourquoi avait-elle un mauvais
pressentiment<span class="frenchb-thinspace"> </span>? �tait-ce la nuit, la fatigue, les �motions<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle s’approcha
du guide, en frissonnant.<br
class="newline" />— Zach<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il tourna la t�te vers elle. Il semblait d’assez bonne humeur.<br
class="newline" />— Tu en penses quoi, de ces brigands<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Tu disais que ce n’�tait pas normal
d’en voir autant et si pr�s...<br
class="newline" />Son visage se ferma. Il se rapprocha d’elle, et lui parla � voix basse.<br
class="newline" />— Il n’est pas tr�s surprenant de croiser des brigands dans cette for�t.
Surtout en ces temps difficiles, et lorsqu’un grand �v�nement est organis�,
faisant venir beaucoup de monde de loin, notamment des personnalit�s
riches et importantes. Mais si pr�s des habitations, des brigands qui
attendaient pr�cis�ment S�l�ne et Irdann... <br
class="newline" />— Ils sont, au moins de naissance, des nobles donc potentiellement des
personnalit�s importantes. Et si je comprends bien, un minimum connues de
nom.<br
class="newline" />— Oui... <br
class="newline" />Ah. Ce n’�tait peut-�tre pas le genre de phrase qui allait le mettre de bonne
humeur. Elle soupira.<br
class="newline" />— Je d�lire peut-�tre, je suis �puis�e. J’�tais juste inqui�te. J’ai une
princesse � prot�ger, je te rappelle.<br
class="newline" />Elle lui adressa un clin d’œil. Il r�pondit par un coup de coude.<br
class="newline" />— Moi aussi j’ai pour mission d’escorter et de prot�ger une noble dame
jusqu’� la sortie de la for�t.<br
class="newline" />� son tour, elle lui lan�a un coup de coude.<br
class="newline" />— J’ai bien vu ta fa�on de la prot�ger.<br
class="newline" />— Je ne vois pas du tout de quoi tu veux parler.<br
class="newline" />Il semblait fixer attentivement l’horizon, mais il souriait. Puis soudainement,
il d�signa du doigt une lueur au loin.<br
class="newline" />— L�-bas<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Tu vois cette chaumi�re, avec la lumi�re � la fen�tre<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Nous
arrivons<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />La petite �quipe poussa un soupir de soulagement.
<!--l. 608--><p class="indent" > La maison, de taille moyenne, �tait la premi�re en arrivant du sentier.
Elle �tait faite de pierre, recouverte en partie de lierre et visiblement vieille.
Une extension, partiellement en bois, semblait faire office de grange et
d’�curie. Plus loin, on voyait appara�tre quelques autres habitations, et
encore derri�re, la silhouette d’un village se d�coupait dans l’ombre. Zach
leur fit signe d’attendre.<br
class="newline" />— Je vais aller les pr�venir, restez l� quelques instants.<br
class="newline" />Il s’�lan�a vers la porte.
<!--l. 612--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">S</span><span
class="ecti-1095">�l</span><span
class="ecti-1095">�ne</span>
<!--l. 614--><p class="indent" > La porte s’ouvrit une nouvelle fois. La silhouette famili�re de Zach se
d�coupa dans la lumi�re, ainsi qu’une autre, plus massive.<br
class="newline" />— Entrez, messires. Soyez les bienvenus dans notre humble demeure. Mon
nom est [ToDo!], je suis le p�re de Zach.<br
class="newline" />L’homme s’avan�a vers eux, et s’inclina.<br
class="newline" />— Si vous me le permettez, seigneur, je vais m’occuper de votre cheval.
<br
class="newline" />Irdann lui tendit la bride de la jument, et s’appuya sur Zach venu l’aider.
Celui-ci lui fit un signe de t�te. H�sitante, S�l�ne regarda ses compagnons,
puis se d�cida � entrer la premi�re.
<!--l. 620--><p class="indent" > Une petite femme ronde, au visage jovial et aux cheveux roux et gris
m�lang�s, l’accueillit d’une r�v�rence un peu maladroite.<br
class="newline" />— Noble dame<span class="frenchb-thinspace"> </span>! C’est un tel honneur de vous accueillir ici... J’esp�re que
notre pauvre logis vous conviendra. <br
class="newline" />La pi�ce comportait essentiellement une grande table en bois massif
entourn�e de deux chaises et deux bancs. Contre les murs, un grand coffre et
un buffet, tous deux anciens, donnaient � la pi�ce un aspect un peu aust�re
et rassurant � la fois. Un grand feu br�lait dans la chemin�e, et une douce
odeur de l�gumes et de viande �manait de la pi�ce voisine. La pi�ce
�tait �clair�e par plusieurs lampes � huile et chandelles, et semblait
assez accueillante malgr� sa simplicit�. Elle inclina la t�te et lui
sourit.<br
class="newline" />— Merci, je pense que ce sera parfait.<br
class="newline" />Derri�re, Zach et Irdann, l’un aidant toujours l’autre � marcher, pass�rent
la porte � leur tour.<br
class="newline" />— J’esp�re que vous avez fait un bon voyage...<br
class="newline" />La femme se tourna vers Zach, et lui lan�a un regard qui aurait foudroy�
une arm�e.<br
class="newline" />— ... Et qu’il vous a trait�e avec tous les honneurs dus � votre rang.
N’est-ce pas Zach<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il se figea. S�l�ne retint un sourire amus�, commen�ant une liste mentale
de tout ce qu’elle pourrait lui reprocher sur ce point. Il semblait
d’ailleurs �viter son regard. Elle se tourna � nouveau vers sa m�re et
sourit.<br
class="newline" />— Il a �t� tr�s correct, rassurez-vous.<br
class="newline" />Elle jeta un dernier coup d’œil suspicieux � son fils, puis se tourna vers le
paladin, qui avait toujours des difficult�s � marcher.<br
class="newline" />— Bienvenue � vous, noble seigneur. Zach m’a dit que vous aviez �t� bless�
face des bandits. Votre blessure est-elle grave<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Vous �tes bien aimable, je vais bien, merci.
<!--l. 634--><p class="indent" > S�l�ne se trouva une place sur un des bancs. Elle avait presque oubli� ce
que c’�tait d’�tre trait�e comme une princesse, et ce n’�tait pas
une perte � son sens. Mais elle ne souhaitait pas vexer cette femme
qui avait l’air de faire tous ces efforts de fa�on plut�t sinc�re –�a,
par contre, �a lui changeait des cours des ch�teaux. � l’instant o�
Irdann fit de m�me � c�t� d’elle, Aldariel et Silw� entr�rent � leur
tour.
<!--l. 636--><p class="indent" > La femme du b�cheron n’avait probablement jamais vu un elfe de sa vie,
alors deux en une fois, �a faisait beaucoup. Elle resta clou�e quelques
instants, d�visageant les deux jeunes femmes d’un air incr�dule.
Pourtant, S�l�ne trouvait qu’elle n’�taient pas si diff�rentes que �a des
humaines. Le teint p�le, par exemple, �tait peut-�tre naturel chez les elfes
sylvains, mais de nombreuses jeunes femmes nobles cherchaient �
l’obtenir, avec plus ou moins de succ�s. Tout comme la silhouette
fine. Tout cela, et on pouvait y ajouter d’autres crit�res, comme la
tradition des cheveux longs, devait vraisemblablement entretenir, bien
malgr� eux, l’image des elfes comme id�al de beaut�. � moins que
ce canon de beaut� n’ait �t� influenc�, il y a bien longtemps, par
eux<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 638--><p class="indent" > Alors qu’elle laissait ses pens�es divaguer, les deux jeunes femmes
s’�taient assises, et le p�re de Zach venait d’entrer � son tour. Il jeta un œil
inquiet � la pile d’armes pos�es dans un coin de la pi�ce, les compta, tenta
d’attribuer mentalement une � chacun et fron�a les sourcils en d�visageant
Silw� et Aldariel. Zach pr�senta rapidement les diff�rents membres du
groupe, et ils commenc�rent � manger.
<!--l. 640--><p class="indent" > Apr�s tout ce temps dans la for�t � manger du pain dur, de la viande et
du fromage s�ch�s, parfois am�lior�s de quelques trouvailles, cette simple
soupe chaude de l�gumes dans laquelle flottaient quelques morceaux de
viande �tait un r�gal. La m�re de Zach, du nom de [ToDo!], sembla ravie de
constater qu’ils mangeaient avec app�tit tout ce qu’elle leur servait. Zach fit
un bref r�sum� de leur travers�e, expliquant leur rencontre avec les deux
elfes, puis celle du paladin, et enfin l’attaque des brigands pr�s du village.
Petit � petit, le b�cheron et son �pouse se d�tendirent et os�rent poser
quelques questions.<br
class="newline" />— Excusez notre curiosit�, mais c’est la premi�re fois que nous voyons des
elfes. Que faites-vous dans la r�gion<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Nous nous rendons au ch�teau du duc De Vane. Il organise un grand
tournoi de tir � l’arc, et j’ai �t� convi�e � y participer. Silw� est mon garde
du corps.<br
class="newline" />[ToDo!] se pencha pour observer Silw�, assise � c�t� de Zach, de
l’autre c�t�. Il consid�ra un instant son air fr�le, puis son regard se
porta sur Aldariel, en face d’elle. Il ouvrit la bouche pour faire une
remarque, mais son fils lui envoya un coup de coude pour le faire
taire.<br
class="newline" />— Crois-moi, tu n’as pas envie d’�tre du mauvais c�t� de son �p�e.<br
class="newline" />Leurs deux h�tes regard�rent un instant la jeune elfe se resservir, avec un
respect m�l� de crainte dans les yeux. Ah, ce qu’elle aimerait inspirer un tel
respect, non pas pour son rang, mais pour ses actes<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Ici, elle �tait coinc�e
avec le protocole, et ce titre de � dame �. N’importe quoi. Vivement qu’elle
rentre � la capitale, les rues sentaient peut-�tre mauvais parfois, mais au
moins on y respirait la libert�.
<!--l. 647--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Zach</span>
<!--l. 649--><p class="indent" > Le repas avan�ant, Zach fut soulag� de constater que l’ambiance
s’�tait petit � petit d�tendue. Si ses parents �taient toujours tr�s
respectueux envers S�l�ne et Irdann, ils semblaient avoir compris que ces
nobles gens appr�ciaient la simplicit� de leur accueil. Quand aux deux
elfes, une fois pass� l’effet de curiosit� m�l�e de crainte, elles furent
trait�es chaleureusement, presque comme si elles faisaient partie
de la famille. Sa m�re insista m�me pour qu’Aldariel se resserve
plusieurs fois de la soupe, remarquant gentiment qu’elle �tait un peu
fr�le.
<!--l. 651--><p class="indent" > Il y eut tout de m�me un moment un peu g�nant, lorsqu’ils se lev�rent
de table. Son p�re, vraisemblablement enhardi par le vin et la bonne
ambiance, lui donna un coup de coude en lui demandant comment � il s’en
sortait � avec les deux elfes, tout en lui adressant un clin d’œil peu discret.
Pris de court, il avait r�pondu qu’il ne se passait rien, mais il n’�tait pas s�r
de l’avoir convaincu. Aldariel et Silw�, qui avaient entendu, avaient �chang�
un regard g�n�, tandis qu’Irdann et S�l�ne avaient difficilement contenu un
fou rire.
<!--l. 653--><p class="indent" > Mais c’�tait probablement le seul � incident � qu’il pourrait d�plorer. Il
y avait pire. Par contre, au moment d’aller se coucher, ses parents avaient
rappel� que la petite chaumi�re ne comportait que deux chambres. Ils
avaient insist� pour que les deux � nobles � prennent la meilleure des deux,
la leur, proposant aux trois autres la chambre qui h�bergeait autrefois leurs
enfants. Eux-m�mes dormiraient dans une paillasse au grenier. Il aurait bien
sugg�r� un autre arrangement, mais il doutait fort que ses parents le
laissent faire.
<!--l. 655--><p class="indent" > Il fit quelques pas dans la pi�ce, qui l’avait abrit� pendant toute
son enfance. Elle n’avait pas tellement chang� depuis, si ce n’est
qu’elle paraissait vide sans ses trois fr�res et sa sœur. Trois lits sur les
cinq avaient �t� faits. Il s’assit et posa son sac sur celui qui avait
�t� le sien pendant toutes ces ann�es. Il commen�ait � retirer ses
bottes et son armure lorsque Silw� entra, une bougie � la main.
Constatant qu’il n’y avait que lui, elle l’�teignit et la posa sur une table �
c�t�.<br
class="newline" />— Ce n’est pas comme si nous en avions besoin... Mais je n’ai pas os�
refuser.<br
class="newline" />Elle d�posa son sac et celui d’Aldariel, puis vint s’asseoir � son tour sur un
lit avec un sourire de satisfaction.<br
class="newline" />— On a beau dire, les matelas humains sont quand m�me confortables.<br
class="newline" />— Et c’est une elfe qui dit �a<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle marqua une pause dans le d�m�lage de ses longs cheveux pour lui
lancer un regard qu’elle aurait probablement voulu meurtrier. Constatant
son �chec, elle esquissa un sourire.<br
class="newline" />— Tiens, j’y pense, d’o� te vient une telle r�putation<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Euh, de quoi tu parles<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />C’est le moment que choisit Aldariel pour entrer � son tour dans la chambre
–ou peut-�tre avait-elle attendu ce moment pour se manifester<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle
s’installa � son tour et sourit.<br
class="newline" />— � propos de la remarque de ton p�re, tout � l’heure, tu sais bien.
<!--l. 666--><p class="indent" > Il faillit r�pondre que son p�re avait juste un peu bu, puis il h�sita �
r�pliquer que tout cela venait de toutes fa�ons des rumeurs qui couraient
sur les elfes. Mais il savait bien qu’elles ne se contenteraient pas de
ces esquives maladroites. Les quatre yeux bleus qui le fixaient dans
l’obscurit� lui donnaient l’impression de le clouer au mur derri�re lui. Il
abdiqua.
<!--l. 668--><p class="indent" > Il finit d’�ter sa tunique et s’allongea, pr�f�rant regarder le plafond.<br
class="newline" />— Quand j’�tais adolescent, j’avais pas mal de succ�s aupr�s des filles, c’est
vrai. Le petit air d’elfe marchait plut�t bien aupr�s de certaines... Donc,
j’avoue, je n’ai pas vol� ma r�putation. Apr�s...<br
class="newline" />Il marqua une pause. Elle �coutaient toujours.<br
class="newline" />— Apr�s j’ai commenc� � �tre un guide et � passer mon temps �
traverser la for�t. Ce n’est pas tout � fait le genre de boulot qui accorde
du temps pour � ce � genre de choses... Et puis qui voudrait d’un
mari � moiti� sauvage, qui dort plus souvent sur le sol que dans
un lit, et qu’on ne voit jamais<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Certes, je rencontre beaucoup de
gens tr�s diff�rents, et j’ai bien eu des... occasions. Mais au final...
<br
class="newline" />Il soupira.<br
class="newline" />— ... Au final, je vis seul. Ma fianc�e, c’est la for�t. Ma seule vraie
compagne, fid�le et sinc�re, c’est mon �p�e.
<!--l. 675--><p class="indent" > Il se tut. Pourquoi n’avait-il pas tout � fait l’impression de dire la
v�rit�<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Le visage de S�l�ne �tait encore pr�sent dans son esprit. Mais
n’�tait-elle pas, finalement, qu’une de ces � occasions � comme les autres<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
Qu’il avait plus ou moins –� tort ou � raison– laiss�e passer. L’oublierait-il
aussi facilement que les autres<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Comme si elle semblait saisir le fil de ses
pens�es, Aldariel s’approcha et posa doucement une main sur son
�paule.<br
class="newline" />— Je me suis moqu�e de toi, cet apr�s-midi. Mais je n’imaginais pas � quel
point les diff�rences de classe sociale pouvaient �tre un tel obstacle dans des
relations entre humains. Toutes ces choses sont tellement plus simples chez
nous...<br
class="newline" />Il ne r�pondit pas. Peut-�tre qu’elle avait raison, mais peut-�tre aussi que la
situation �tait nettement plus simple quand on �tait une princesse. Et
surtout une princesse comme Aldariel... Tout devait lui tomber au creux de
la main, les hommes comme le reste.
<!--l. 679--><p class="noindent" >— � ce propos, Alda, comment va la blessure d’Irdann<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Et il fallait qu’elle parle du paladin, l�, maintenant... Il faillit lui
r�torquer que ce n’�tait pas la peine de retourner le couteau dans la
plaie, quand il sentit, � la fa�on dont Aldariel l�cha son �paule,
que la remarque ne lui �tait pas destin�e. Mais alors pas du tout.
<br
class="newline" />— Oh, plut�t bien. Rien de crucial n’a �t� touch�, je suis s�re qu’il se
remettra tr�s vite.<br
class="newline" />— C’est plut�t une bonne nouvelle.<br
class="newline" />Il aurait bien aim� voir ce qu’il y avait sur le visage de la jeune princesse,
mais elle s’�tait tourn�e vers son amie. Il repassa dans sa t�te la sc�ne de
bataille et la suite, remarquant alors ce que ses yeux avaient enregistr�
sans le voir. Le sourire amus� de Silw� sembla confirmer ce qu’il
pensait.<br
class="newline" />— D’ailleurs, qu’est-ce que tu m’as dit, un peu plus t�t aujourd’hui<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Qu’�
ma place, tu n’aurais pas h�sit�<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle se retourna brusquement vers lui, les sourcils fronc�s.<br
class="newline" />— Qu’est-ce que tu veux dire<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il regarda le plafond, sans pouvoir retenir un sourire.<br
class="newline" />— � ton avis<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 690--><p class="indent" > Aldariel semblait � la fois choqu�e et en col�re. Silw� s’�tait gliss�e sous
les draps et s’�tait tue. Soit elle �tait �puis�e et voulait dormir, soit elle lui
laissait volontairement le champ libre. Apr�s tout, c’�tait bien son tour de
se venger... <br
class="newline" />— Non, je n’aurais pas h�sit� � ta place. Et<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il avait connu des attaques verbales plus difficiles � contrer. Son sourire
s’�largit.<br
class="newline" />— Et le � noble paladin aux airs de prince charmant �, �a compte comme
une h�sitation<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle marqua une pause, surprise.<br
class="newline" />— Mais... qu’est-ce que tu imagines<span class="frenchb-thinspace"> </span>? C’est un humain. Un elfe, je ne dirais
pas, mais c’est un humain<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Belle tentative d’esquive, mais rat�e. � moins que... sa surprise semblait
sinc�re. C’�tait encore plus dr�le en fait.<br
class="newline" />— C’est �a. Et moi, je sors d’o�, alors, si elfes et humains ne sont pas
compatibles<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle r�pliqua aussit�t, pointant son doigt dans sa direction.<br
class="newline" />— Biologiquement compatibles, oui. �a ne prouve pas grand chose pour le
reste. Tu as dit toi m�me que tu ne savais rien d’eux, non<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Il devait admettre que la contre-attaque tenait plut�t bien la route. De plus,
il risquait de se laisser entra�ner sur un terrain plut�t glissant. Il lui restait
une botte secr�te. � son tour, il pointa son doigt dans sa direction, venant
effleurer le sien en souriant. Il lui chuchota.<br
class="newline" />— Pourtant, j’ai bien l’impression que Silw�, elle, ne s’arr�te pas � ce genre
de d�tail.<br
class="newline" />— Quoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Qu’est-ce que tu en sais<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Son attaque avait donc touch�. Il ne fallait pas baisser sa garde maintenant.
<br
class="newline" />— Elle a pass� cinq ans chez les humains. Je pense qu’elle a d� avoir un
certain succ�s aupr�s d’eux. Tu lui poseras la question...<br
class="newline" />Cherchant d�sesp�r�ment un peu de soutien, Aldariel se tourna vers son
amie, qui s’�tait visiblement endormie. Tout du moins, elle faisait
suffisamment bien semblant. Il l’en remercia int�rieurement.<br
class="newline" />— ...sinon tu te rappelleras sa r�action quand, un soir, tu avais �voqu� la
question.<br
class="newline" />Quelle chance il avait eu de retenir ce d�tail pourtant insignifiant, malgr� la
situation qui ne s’y pr�tait gu�re... Ils �taient plus � un cheveu de
s’entretuer que de jouer � ce jeu-l�.
<!--l. 709--><p class="indent" > Elle lui lan�a un dernier regard assassin, qu’il fit mine de ne pas
remarquer. Mais il avait du mal � se retenir de sourire. Elle soupira,
remonta ses draps sur ses �paules et ferma les yeux.
<!--l. 711--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">Irdann</span>
<!--l. 713--><p class="indent" > Il referma la porte de la petite chambre et posa le bougeoir sur la table
de chevet.<br
class="newline" />— H� bien<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Je m’attendais � ce que nos noms soient respect�s, mais � ce
point...<br
class="newline" />S�l�ne sourit.<br
class="newline" />— C’est vrai que c’�tait presque un peu trop... Et encore, personne ne leur
a dit qu’Aldariel �tait la fille du roi des elfes.<br
class="newline" />— Les pauvres. D�j� que voir des elfes pour la premi�re fois de leur vie
�tait un choc...<br
class="newline" />Elle fit quelques pas dans la pi�ce, puis son sourire se figea.<br
class="newline" />— Ah. Il y a un petit probl�me technique. Il n’y a qu’un lit.<br
class="newline" />— Effectivement. En m�me temps, c’est assez logique, c’est leur
chambre...<br
class="newline" />— Tu crois qu’ils pensent qu’on...<br
class="newline" />Il haussa les �paules. Il n’avait pas tellement envie de d�cevoir leurs h�tes et
surtout, de leur demander du travail en plus alors qu’ils se donnaient d�j�
tellement de mal pour eux.<br
class="newline" />— Bah, ne t’inqui�te pas, je dormirai par terre. J’ai connu pire, tu
sais<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />— Moi non plus �a ne me d�rangerait pas de dormir par terre. �a fait
presque une semaine que je fais �a<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Et en plus, toi, tu es bless�.<br
class="newline" />— Ah mais �a n’a rien � voir<span class="frenchb-thinspace"> </span>!
<!--l. 727--><p class="indent" > Ils se regard�rent en silence pendant quelques instants. Il lui aurait bien
r�pondu qu’elle �tait une dame et c’�tait une histoire de code d’honneur,
mais il doutait de l’efficacit� de cet argument. Il n’avait pas affaire � une
noble dame comme les autres, �a, il avait bien saisi. Ce fut finalement elle
qui prit une d�cision.<br
class="newline" />— Bon �coute, on ne va quand m�me pas dormir tous les deux par
terre, ce serait vraiment stupide. Il y a de la place pour deux sur ce
matelas. Chacun son c�t�, chacun sa couverture, �a te va comme
compromis<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— � condition que tu prennes quand m�me les draps pr�vus pour �a. Et
moi je prends une couverture de voyage.<br
class="newline" />Elle sourit en lui donnant un petit coup de coude.<br
class="newline" />— Vendu<span class="frenchb-thinspace"> </span>!
<!--l. 733--><p class="indent" > Ils s’install�rent rapidement, puis �teignirent la bougie, ce qui plongea la
pi�ce dans l’obscurit�. Il �tait �puis�, et il devait reconna�tre que ce
compromis avait du bon. Le matelas �tait vraiment confortable. Pourtant, le
sommeil ne venait pas. Trop de choses s’�taient pass�es dans cette journ�e...
� commencer par S�l�ne. La jeune femme qu’il devait chercher �tait
saine et sauve, et plut�t bien entour�e... Elle n’avait pas eu l’air si
heureuse que cela de le voir arriver. Quelle relation l’unissait � son
� guide �, d’ailleurs<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Leurs regards �taient tout de m�me assez
�loquents...
<!--l. 735--><p class="indent" > Il avait beau avoir quitt� assez t�t le palais de son p�re et l’ambiance
des cours, il connaissait assez bien la fa�on les mariages �taient conclus. Il
s’agissait bien souvent d’un enjeu complexe d’alliances entre seigneurs et de
cessions de terres, quand il ne s’agissait pas de guerres, toujours est-il qu’on
ne laissait pas beaucoup de choix aux jeunes nobles. Bien s�r, on
essayait g�n�ralement de faire en sorte qu’ils s’appr�cient au moins un
peu, et puis ils �taient bien souvent �duqu�s et conditionn�s pour
aimer les gens de leur rang... mais au final, ce n’�tait pas eux qui
d�cidaient sur ce plan-l�. Certains s’en accomodaient plut�t bien, d’autres
trouvaient leur bonheur ailleurs que dans les bras de celui ou de celle
qui leur �tait d�sign�. Bien s�r, rien de tout cela n’�tait officiel,
mais une oreille attentive et innocente pouvait entendre bien des
choses...
<!--l. 737--><p class="indent" > Il avait tendance � consid�rer que ce genre d’histoire ne le regardait pas.
Apr�s tout, entre un mari � la capitale, et ses parents ici, elle avait bien
droit � un peu de libert� entre deux... Il se mit � penser qu’il avait de la
chance d’�tre un paladin. Personne n’allait le forcer � se marier contre son
gr�, et il �tait vraiment libre... Certes, il devait rendre des services au nom
de la d�esse, mais � c�t� d’avoir toujours quelqu’un sur le dos, ce n’�tait
pas grand chose.
<!--l. 739--><p class="noindent" >— Irdann<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />Elle ne dormait donc pas non plus<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Oui<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je suppose qu’on repart demain... �a va aller ta blessure<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je pense, oui. Aldariel s’en est tr�s bien occup�. Mais c’est surtout une
chance que personne d’autre n’ait �t� bless�.<br
class="newline" />Il eu l’impression qu’elle frissonnait.<br
class="newline" />— Je n’ose pas imaginer ce qui se serait pass� si les autres n’�taient pas
venus � notre secours...<br
class="newline" />C’�tait malheureusement facile � deviner. Il aurait �t� tu�, et elle
faite prisonni�re. Et encore, prisonni�re, c’�tait dans le meilleur des
cas...<br
class="newline" />— Tu veux vraiment savoir<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— �a va, je me passerai des d�tails, merci.<br
class="newline" />— Je me moque, mais s�rieusement, nous aurions d� insister pour qu’ils
restent avec nous au moins jusqu’� la sortie de la for�t.<br
class="newline" />— Peut-�tre... et peut-�tre pas en fait. En arrivant un peu apr�s, ils ont pu
b�n�ficier d’un effet de surprise...<br
class="newline" />Pour quelqu’un qui n’avait connu que le confort des ch�teaux, elle avait une
sacr� t�te froide. Elle n’avait pas l’air trop choqu�e par tout ce qui s’�tait
pass�, ce qui �tait plut�t impressionnant. Et puisqu’elle semblait plut�t
encline � lui en parler, il allait pouvoir lui demander...<br
class="newline" />— C’est possible. J’y pense, il y a quelque chose que je n’ai pas tout � fait
compris dans ce combat.<br
class="newline" />— Ah<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— les brigands �taient occup�s avec moi, et tu �tais relativement
tranquille... Puis il y en a un qui s’est approch� de toi, je t’ai vue
t’effondrer... enfin je crois. Et puis l’instant d’apr�s, c’est lui qui �tait
effondr� � tes pieds. Je n’ai pas l’impression que Zach soit arriv� si
t�t...<br
class="newline" />Elle marqua une seconde de silence, mais lorsqu’elle r�pondit, il aurait jur�
qu’elle souriait.
<!--l. 757--><p class="noindent" ><span
class="ecti-1095">S</span><span
class="ecti-1095">�l</span><span
class="ecti-1095">�ne</span>
<!--l. 759--><p class="indent" > Lorsqu’elle termina son r�cit, il laissa passer un moment de silence. Que
pouvait-il bien en penser<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je ne m’attendais pas � �a, effectivement.<br
class="newline" />Il semblait simplement surpris. Mais �tait-ce en bien ou en mal<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<br
class="newline" />— Je n’avais simplement pas le choix, tu sais bien... Je pouvais bien
attendre que tu viennes � mon secours, mais tu tenais d�j� t�te � trois
hommes<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />— Mais tu as bien fait de te d�fendre<span class="frenchb-thinspace"> </span>! <br
class="newline" />Soulag�e, elle sourit –elle �tait soulag�e �galement de noter qu’il ne voyait
pas ses expressions dans le noir, lui– et r�pondit nettement plus
spontan�ment.<br
class="newline" />— �a n’a pas l’air de te choquer, alors, de voir une femme prendre les armes
pour d�fendre sa peau...<br
class="newline" />— Je trouve dommage qu’il soit n�cessaire d’avoir besoin d’une arme pour
�tre en paix. Mais puisque cela semble �tre le cas, autant que tu en sois
capable comme les autres.<br
class="newline" />Elle l’entendit soupirer avant de reprendre.<br
class="newline" />— Tu m’aurais dit �a il y a plusieurs ann�es, effectivement j’aurais trouv�
�a ind�cent, pas naturel, dangereux, inconvenant, et je ne sais quoi encore...
J’ai �t� �lev� dans un ch�teau selon les traditions s�culaires que tu connais
aussi bien que moi. Puis dans un temple, o� le poids des rituels �taient bien
pr�sent... Ensuite, j’ai pass� plusieurs ann�es � la garde la capitale. L�-bas,
je n’ai pas seulement appris l’art de l’�p�e, j’y ai compris qu’il n’y avait
pas vraiment de diff�rence entre les genres, ou les types d’humains.
Peut-�tre que c’est ce que cherchait � me faire apprendre les pr�tres en
m’envoyant l�... Mais peut-�tre que c’�tait juste un effet secondaire.
<br
class="newline" />— Ils voulaient peut-�tre faire de toi un vrai paladin, juste et ouvert, et pas
une simple �p�e bien entra�n�e et ob�issante...<br
class="newline" />— Je ne sais pas si, finalement, je corresponds � leurs crit�res...
<!--l. 772--><p class="indent" > Elle avait l’impression qu’il aurait volontiers pr�cis� sa pens�e. Qu’est-ce
que cela pouvait cacher<span class="frenchb-thinspace"> </span>? �tait-ce simplement de la modestie, ou avait-il un
� crit�re � particulier en t�te<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle br�lait d’envie de le questionner, mais
peut-�tre n’�tait-ce pas le moment. Elle tourna la t�te vers lui en
souriant.<br
class="newline" />— Tu sais, moi non plus je ne corresponds pas aux crit�res d’une vraie
� dame �. <br
class="newline" />— Je vois �a. D’ailleurs, j’y pense, qui t’a appris cette technique<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il faut
un sacr� cran pour oser faire ce que tu as fait<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Elle sourit.<br
class="newline" />— Personne... J’ai improvis�, dans le feu de l’action. Je ne sais pas trop
comment. Je ne sais pas si c’est du courage ou de la folie, d’ailleurs.
Peut-�tre qu’� force de fr�quenter des gens comme Zach, Aldariel, Silw�, et
m�me toi, ils d�teignent sur moi...<br
class="newline" />— Leur folie ou leur courage<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Les deux<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Je dirais effectivement qu’il est � la fois courageux et fou de chercher �
traverser la for�t � pied, seulement accompagn�e d’un guide.<br
class="newline" />Il �tait bien plac� pour parler de prudence...<br
class="newline" />— Comme d’aller � secourir � une noble dame inconnue dans une for�t,
seul et sans escorte<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 783--><p class="indent" > Il ne r�pondit pas.<br
class="newline" />— Je t’ai vex�<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Non... enfin, tu as raison. Nous sommes tous probablement un peu fous.
Et �a a failli nous co�ter cher.<br
class="newline" />— Nous seront en s�curit�, demain... Nous arriverons au ch�teau de mes
parents, n’est-ce pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
<!--l. 788--><p class="indent" > Elle n’arrivait pas � dire cela sur un ton soulag�, m�me pas un ton
neutre. Arriver l�-bas, c’�tait se dire que l’aventure se terminait, redevenir
une noble dame bien �lev�e, et surtout, ne plus voir Zach. Mais � quoi
bon se poser ce genre de question<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle avait su tout cela d�s le
d�but.
<!--l. 790--><p class="noindent" >— Oui.<br
class="newline" />Il avait mis aussi du temps � r�pondre. Pourquoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Bonne nuit.<br
class="newline" />— Bonne nuit.
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<!--l. 178--><p class="nopar" >
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