+Elle avait allumé quelques bougies, après quelques essais infructueux avec les allumettes. Elle se faisait petit à petit à toutes ces sources de lumière qu'utilisaient les humains pour s'éclairer la nuit, n'ayant pas de vision nocturne, et elle admettait que toutes ces lampes, torches, chandelles et autres lumignons avaient un certain charme. Il y en avait si peu, chez les elfes...
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+Elle détacha son regard de la flamme dansante, et fit --pour la centième fois-- quelques pas dans la chambre. Et si \denise ne revenait pas ? Non, il ne fallait pas penser à cela, se dit-elle en tremblant, tant de froid que de crainte. Que faire, plutôt ? Qui prévenir, et comment ? La moindre information qui filtrerait risquait de causer du tort à \ismael et \chloe... pour peu que ce pseudo-\ismael ou son acolyte le sache. Et quels autres complices avaient-ils ?
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+Ah, elles étaient loin, les inquiétudes à propos du tournoi et des elfes noirs... Elle aurait bien aimé avoir une oreille amie avec qui discuter de tout cela, mais elle préférait encore être seule qu'avec le sosie. Son visage ressemblait tellement à celui qu'elle avait rencontré au milieu de la forêt que c'était vraiment gênant de le voir parler, bouger, sourire un peu comme lui mais... Son sourire était si différent ! Celui d'\ismael, le vrai, était si plein de naturel, de simplicité qu'il était juste magnifique. Celui de l'autre... sinistre, sombre. Elle en frissonna. Pourvu qu'il ne soit rien arrivé de --trop-- fâcheux à ce paladin...
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+Soudain, elle sursauta, en entendant un bruit venir de la pièce d'à côté. Les murs du château étaient très épais, mais ce bruit filtrait très légèrement à travers la porte menant sa chambre à celle de \denise. Avait-elle rêvé ? Dans le silence des murs de pierre, un nouveau bruit, qu'il était difficile d'identifier. Était-ce simplement un rat ? Rongée par la curiosité, et parce que tout valait mieux que de se morfondre, elle s'approcha de la porte. Le pseudo-\ismael l'avait déverrouillée en partant, et avait posté deux gardes devant leurs deux portes de chambres, annonçant en public qu'elles voulaient n'être dérangées sous aucun prétexte ce soir. D'ailleurs, les gardes postés étaient-ils des complices, ou de simples soldats obéissants ?
+
+Elle allait poser sa main sur la poignée de la porte lorsqu'elle s'arrêta. Et si ce qu'il y avait derrière était dangereux ? Un autre complice, ou... ? Elle fit un pas en arrière. Qu'aurait fait \denise si à sa place ? Elle jeta un {\oe}il au pied du lit, où étaient posées les armes de son amie. Elle aurait pris son épée à la main et aurait fait face au danger. Elle prit une grande inspiration, puis en retenant ses tremblements de toutes ses forces, elle arma une flèche sur son arc, et maintint l'ensemble d'une main tout en faisant jouer précautionneusement la poignée.
+
+La lumière de sa propre chambre illumina en partie celle de son amie. Une silhouette sembla s'y soustraire à l'instant pour se réfugier plus loin dans l'ombre. Elle tendit la corde de son arc, regrettant de n'avoir pas sa dague à sa ceinture. Ah, c'est vrai, ces chemises de nuits humaines n'avaient pas de ceinture. Le contraste de lumière l'empêchait de voir son adversaire. D'un coup de pied, elle referma la porte, et retrouvant sa capacité à distinguer les ombres dans l'obscurité, elle dirigea son arme vers l'intrus, qui s'était aplati contre le mur de l'autre côté du lit, et avait cessé de bouger.\\
+--- Tu as intérêt à avoir une très très bonne raison d'être là, menaça-t-elle.
+
+\recit{\jerome}
+
+Oh, comment avait-il pu être aussi stupide ? Elle, c'était l'autre elfe, sa compagne, la princesse qu'il avait vue sur la place de la fontaine. Et bien sûr, elle voyait dans le noir comme \denise...\\
+--- Je t'en prie, ne tire pas. Je ne te veux pas de mal, dit-il en s'avançant avec précautions.\\
+--- Réponds à ma question d'abord, répondit la voix sèchement.\\
+--- Je cherche juste... \denise.\\
+--- Qu'est-ce que tu lui veux ?\\
+Il y avait des tremblements dans sa voix. Mais du peu de lumière qui filtrait par le bas de la porte et qui nimbait doucement la silhouette de l'elfe, il pouvait voir que son arc tendu avait toujours une flèche pointée dans sa direction. Alors qu'il s'avançait, essayant d'avoir l'air le moins menaçant possible, elle abaissa brusquement son arme.\\
+--- Mais... tu es le jeune jongleur de ce matin... s'exclama-t-elle, sur le ton de la surprise absolue.\\
+Il hocha la tête, ne sachant que répondre.\\
+--- Comment es-tu entré ici ? reprit-elle méfiante.\\
+Son arc était baissé, mais il suffirait d'une demi-seconde pour qu'elle le retende dans sa direction. Les explications allaient être un peu compliquées...\\
+--- Par la fenêtre. C'est une longue histoire... commença-t-il gêné.\\
+Elle marqua une seconde de silence durant laquelle elle regarda la fenêtre, refermée et intacte.\\
+--- J'écoute tes explications, alors, reprit-elle sur un ton ferme.\\
+--- Euh, par où commencer... Est-ce que \denise t'a déjà parlé de moi ?
+
+À sa grande surprise, l'elfe --dont il distingait à peine la silhouette-- se mit à trembler. Son arc et sa fèche lui glissa des doigts et tomba au sol. Il ne sut pas trop comment réagir, jusqu'à ce qu'il entende quelque chose qui ressemble à un sanglot.\\
+--- J'ai dit quelque chose de mal ?\\
+Elle était désarmée, du moins à première vue. Il osa faire un pas vers elle, doucement. Elle ne bougea pas.\\
+--- Qu'est-ce qui se passe ?\\
+Elle releva son visage vers lui et lui prit le bras.\\
+--- Je... viens.\\
+Elle ouvrit la porte, et l'amena dans la pièce à côté.
+
+\recit{\aure}
+
+Elle s'assit sur le lit, et voyant son visage en pleine lumière, elle lui demanda d'achever ses explications. C'était bien le jongleur de la fontaine, avec des vêtements gris sombre au lieu du orange, et un air à la fois aux aguets et inquiet.\\
+--- Je souhaitais rejoindre \denise... \\
+Elle leva les yeux au ciel, et il sembla comprendre parfaitement ce qu'elle avait compris.\\
+--- Bref,