<meta name="originator" content="TeX4ht (http://www.cse.ohio-state.edu/~gurari/TeX4ht/)">
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-<meta name="date" content="2014-12-23 21:47:00">
+<meta name="date" content="2014-12-29 23:23:00">
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</head><body
>
longs étaient soigneusement attachés en deux nattes, entrelacées de
rubans.
<!--l. 7--><p class="indent" > Elle sourit. Sa gouvernante ne supportait ni la poussière, ni les
-araignées, voire parfois les rats, qu’on trouvait ici<span class="frenchb-thinspace"> </span>; et Sélène était ravie de
-s’en débarrasser pour quelques heures. Les greniers du château n’avaient pas
-été rangés ou nettoyés depuis des générations, et on y trouvait de tout,
+araignées, ni même les rats qu’on y trouvait parfois<span class="frenchb-thinspace"> </span>; et Sélène était ravie
+de s’en débarrasser pour quelques heures. Les greniers du château n’avaient
+pas été rangés ou nettoyés depuis des générations, et on y trouvait de tout,
vieilles armes, tableaux, ustensiles divers, ... Tout ce qui n’avait pas été
<!--l. 316--><p class="noindent" >— Là-bas, je vois l’orée<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Les soldats laissèrent échapper une exclamation de joie. Après quatre jours
dans la forêt, ils n’étaient pas mécontents de retrouver la civilisation. De
-son côté, Zach, installé à côté du cocher, rêvassait. Il se demandait
-bien qui était l’occupante du carosse, qu’il n’avait pas le droit de
-voir l’occupante du carosse, en théorie. En pratique, la damoiselle
-ayant tout de même besoin de sortir de temps en temps, il avait pu
+son côté, Zach, installé à côté du cocher, rêvassait. Il se demandait bien qui
+était l’occupante du carosse, qu’il n’avait pas le droit de voir, en théorie. En
+pratique, la damoiselle ayant tout de même besoin de sortir de temps en
+temps, il avait pu entr’apercevoir, à plusieurs reprises, une silhouette de
-entr’apercevoir, à plusieurs reprises, une silhouette de petite taille,
-couverte de la tête aux pieds d’un long manteau bleu marine richement
-orné.
+petite taille, couverte de la tête aux pieds d’un long manteau bleu marine
+richement orné.
<!--l. 319--><p class="noindent" >— Hé, gamin<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
class="newline" />Sortant de sa rêverie, il tourna la tête vers le soldat, qui lui adressa un
grand sourire.<br
class="newline" />— Noble dame<span class="frenchb-thinspace"> </span>! C’est un tel honneur de vous accueillir ici... J’espère que
notre pauvre logis vous conviendra. <br
class="newline" />La pièce comportait essentiellement une grande table en bois massif
-entournée de deux chaises et deux bancs. Dans un coin, un coffre, et un
-buffet un peu plus loin, tous deux anciens, donnant un aspect un peu
-austère mais d’une stabilité rassurante. Un grand feu brûlait dans la
-cheminée, et une douce odeur de légumes et de viande émanait de la pièce
-voisine, la cuisine probablement. La pièce était éclairée par plusieurs
-lampes à huile et chandelles, et semblait assez accueillante malgré sa
-simplicité. Elle inclina la tête et lui sourit.<br
+entournée de deux chaises et deux bancs. Contre les murs, un grand coffre et
+un buffet, tous deux anciens, donnaient à la pièce un aspect un peu austère
+et rassurant à la fois. Un grand feu brûlait dans la cheminée, et une douce
+odeur de légumes et de viande émanait de la pièce voisine. La pièce
+était éclairée par plusieurs lampes à huile et chandelles, et semblait
+assez accueillante malgré sa simplicité. Elle inclina la tête et lui
+sourit.<br
class="newline" />— Merci, je pense que ce sera parfait.<br
class="newline" />Derrière, Zach et Irdann, l’un aidant toujours l’autre à marcher, passèrent
la porte à leur tour.<br
alors deux en une fois, ça faisait beaucoup. Elle resta clouée quelques
instants, dévisageant les deux jeunes femmes d’un air incrédule.
Pourtant, Sélène trouvait qu’elle n’étaient pas si différentes que ça des
-humaines. Le teint pâle, par exemple, étaient peut-être naturel elfes
+humaines. Le teint pâle, par exemple, était peut-être naturel chez les elfes
sylvains, mais de nombreuses jeunes femmes nobles cherchaient à
l’obtenir, avec plus ou moins de succès. Tout comme la silhouette
fine. Tout cela, et on pouvait y ajouter d’autres critères, comme la
class="newline" />— Excusez notre curiosité, mais c’est la première fois que nous voyons des
elfes. Que faites-vous dans la région<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
class="newline" />— Nous nous rendons au château du duc De Vane. Il organise un grand
-tournoi de tir à l’arc, et j’ai été conviée à y participer. Silwë m’accompagne
-pour me protéger sur le chemin.<br
+tournoi de tir à l’arc, et j’ai été conviée à y participer. Silwë est mon garde
+du corps.<br
class="newline" />[ToDo!] se pencha pour observer Silwë, assise à côté de Zach, de
l’autre côté. Il considéra un instant son air frêle, puis son regard se
porta sur Aldariel, en face d’elle. Il ouvrit la bouche pour faire une
avec le protocole, et ce titre de « dame ». N’importe quoi. Vivement qu’elle
rentre à la capitale, les rues sentaient peut-être mauvais parfois, mais au
moins on y respirait la liberté.
+<!--l. 647--><p class="noindent" ><span
+class="ecti-1095">Zach</span>
+<!--l. 649--><p class="indent" > Le repas avançant, Zach fut soulagé de constater que l’ambiance
+s’était petit à petit détendue. Si ses parents étaient toujours très
+respectueux envers Sélène et Irdann, ils semblaient avoir compris que ces
+nobles gens appréciaient la simplicité de leur accueil. Quand aux deux
+elfes, une fois passé l’effet de curiosité mêlée de crainte, elles furent
+traitées chaleureusement, presque comme si elles faisaient partie
+de la famille. Sa mère insista même pour qu’Aldariel se resserve
+plusieurs fois de la soupe, remarquant gentiment qu’elle était un peu
+frêle.
+<!--l. 651--><p class="indent" > Il y eut tout de même un moment un peu gênant, lorsqu’ils se levèrent
+
+
+de table. Son père, vraisemblablement enhardi par le vin et la bonne
+ambiance, lui donna un coup de coude en lui demandant comment « il s’en
+sortait » avec les deux elfes, tout en lui adressant un clin d’œil peu discret.
+Pris de court, il avait répondu qu’il ne se passait rien, mais il n’était pas sûr
+de l’avoir convaincu. Aldariel et Silwë, qui avaient entendu, avaient échangé
+un regard gêné, tandis qu’Irdann et Sélène avaient difficilement contenu un
+fou rire.
+<!--l. 653--><p class="indent" > Mais c’était probablement le seul « incident » qu’il pourrait déplorer. Il
+y avait pire. Par contre, au moment d’aller se coucher, ses parents avaient
+rappelé que la petite chaumière ne comportait que deux chambres. Ils
+avaient insisté pour que les deux « nobles » prennent la meilleure des deux,
+la leur, proposant aux trois autres la chambre qui hébergeait autrefois leurs
+enfants. Eux-mêmes dormiraient dans une paillasse au grenier. Il aurait bien
+suggéré un autre arrangement, mais il doutait fort que ses parents le
+laissent faire.
+<!--l. 655--><p class="indent" > Il fit quelques pas dans la pièce, qui l’avait abrité pendant toute
+son enfance. Elle n’avait pas tellement changé depuis, si ce n’est
+qu’elle paraissait vide sans ses trois frères et sa sœur. Trois lits sur les
+cinq avaient été faits. Il s’assit et posa son sac sur celui qui avait
+été le sien pendant toutes ces années. Il commençait à retirer ses
+bottes et son armure lorsque Silwë entra, une bougie à la main.
+Constatant qu’il n’y avait que lui, elle l’éteignit et la posa sur une table à
+côté.<br
+class="newline" />— Ce n’est pas comme si nous en avions besoin... Mais je n’ai pas osé
+refuser.<br
+class="newline" />Elle déposa son sac et celui d’Aldariel, puis vint s’asseoir à son tour sur un
+lit avec un sourire de satisfaction.<br
+class="newline" />— On a beau dire, les matelas humains sont quand même confortables.<br
+class="newline" />— Et c’est une elfe qui dit ça<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Elle marqua une pause dans le démêlage de ses longs cheveux pour lui
+lancer un regard qu’elle aurait probablement voulu meurtrier. Constatant
+son échec, elle esquissa un sourire.<br
+class="newline" />— Tiens, j’y pense, d’où te vient une telle réputation<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Euh, de quoi tu parles<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />C’est le moment que choisit Aldariel pour entrer à son tour dans la chambre
+
+
+–ou peut-être avait-elle attendu ce moment pour se manifester<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle
+s’installa à son tour et sourit.<br
+class="newline" />— À propos de la remarque de ton père, tout à l’heure, tu sais bien.
+<!--l. 666--><p class="indent" > Il faillit répondre que son père avait juste un peu bu, puis il hésita à
+répliquer que tout cela venait de toutes façons des rumeurs qui couraient
+sur les elfes. Mais il savait bien qu’elles ne se contenteraient pas de
+ces esquives maladroites. Les quatre yeux bleus qui le fixaient dans
+l’obscurité lui donnaient l’impression de le clouer au mur derrière lui. Il
+abdiqua.
+<!--l. 668--><p class="indent" > Il finit d’ôter sa tunique et s’allongea, préférant regarder le plafond.<br
+class="newline" />— Quand j’étais adolescent, j’avais pas mal de succès auprès des filles, c’est
+vrai. Le petit air d’elfe marchait plutôt bien auprès de certaines... Donc,
+j’avoue, je n’ai pas volé ma réputation. Après...<br
+class="newline" />Il marqua une pause. Elle écoutaient toujours.<br
+class="newline" />— Après j’ai commencé à être un guide et à passer mon temps à
+traverser la forêt. Ce n’est pas tout à fait le genre de boulot qui accorde
+du temps pour « ce » genre de choses... Et puis qui voudrait d’un
+mari à moitié sauvage, qui dort plus souvent sur le sol que dans
+un lit, et qu’on ne voit jamais<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Certes, je rencontre beaucoup de
+gens très différents, et j’ai bien eu des... occasions. Mais au final...
+<br
+class="newline" />Il soupira.<br
+class="newline" />— ... Au final, je vis seul. Ma fiancée, c’est la forêt. Ma seule vraie
+compagne, fidèle et sincère, c’est mon épée.
+<!--l. 675--><p class="indent" > Il se tut. Pourquoi n’avait-il pas tout à fait l’impression de dire la
+vérité<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Le visage de Sélène était encore présent dans son esprit. Mais
+n’était-elle pas, finalement, qu’une de ces « occasions » comme les autres<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
+Qu’il avait plus ou moins –à tort ou à raison– laissée passer. L’oublierait-il
+aussi facilement que les autres<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Comme si elle semblait saisir le fil de ses
+pensées, Aldariel s’approcha et posa doucement une main sur son
+épaule.<br
+class="newline" />— Je me suis moquée de toi, cet après-midi. Mais je n’imaginais pas à quel
+point les différences de classe sociale pouvaient être un tel obstacle dans des
+relations entre humains. Toutes ces choses sont tellement plus simples chez
+
+
+nous...<br
+class="newline" />Il ne répondit pas. Peut-être qu’elle avait raison, mais peut-être aussi que la
+situation était nettement plus simple quand on était une princesse. Et
+surtout une princesse comme Aldariel... Tout devait lui tomber au creux de
+la main, les hommes comme le reste.
+<!--l. 679--><p class="noindent" >— À ce propos, Alda, comment va la blessure d’Irdann<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Et il fallait qu’elle parle du paladin, là, maintenant... Il faillit lui
+rétorquer que ce n’était pas la peine de retourner le couteau dans la
+plaie, quand il sentit, à la façon dont Aldariel lâcha son épaule,
+que la remarque ne lui était pas destinée. Mais alors pas du tout.
+<br
+class="newline" />— Oh, plutôt bien. Rien de crucial n’a été touché, je suis sûre qu’il se
+remettra très vite.<br
+class="newline" />— C’est plutôt une bonne nouvelle.<br
+class="newline" />Il aurait bien aimé voir ce qu’il y avait sur le visage de la jeune princesse,
+mais elle s’était tournée vers son amie. Il repassa dans sa tête la scène de
+bataille et la suite, remarquant alors ce que ses yeux avaient enregistré
+sans le voir. Le sourire amusé de Silwë sembla confirmer ce qu’il
+pensait.<br
+class="newline" />— D’ailleurs, qu’est-ce que tu m’as dit, un peu plus tôt aujourd’hui<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Qu’à
+ma place, tu n’aurais pas hésité<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Elle se retourna brusquement vers lui, les sourcils froncés.<br
+class="newline" />— Qu’est-ce que tu veux dire<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Il regarda le plafond, sans pouvoir retenir un sourire.<br
+class="newline" />— À ton avis<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
+<!--l. 690--><p class="indent" > Aldariel semblait à la fois choquée et en colère. Silwë s’était glissée sous
+les draps et s’était tue. Soit elle était épuisée et voulait dormir, soit elle lui
+laissait volontairement le champ libre. Après tout, c’était bien son tour de
+se venger... <br
+class="newline" />— Non, je n’aurais pas hésité à ta place. Et<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Il avait connu des attaques verbales plus difficiles à contrer. Son sourire
+s’élargit.<br
+class="newline" />— Et le « noble paladin aux airs de prince charmant », ça compte comme
+une hésitation<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Elle marqua une pause, surprise.<br
+class="newline" />— Mais... qu’est-ce que tu imagines<span class="frenchb-thinspace"> </span>? C’est un humain. Un elfe, je ne dirais
+pas, mais c’est un humain<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
+class="newline" />Belle tentative d’esquive, mais ratée. À moins que... sa surprise semblait
+sincère. C’était encore plus drôle en fait.<br
+class="newline" />— C’est ça. Et moi, je sors d’où, alors, si elfes et humains ne sont pas
+compatibles<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Elle répliqua aussitôt, pointant son doigt dans sa direction.<br
+class="newline" />— Biologiquement compatibles, oui. Ça ne prouve pas grand chose pour le
+reste. Tu as dit toi même que tu ne savais rien d’eux, non<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Il devait admettre que la contre-attaque tenait plutôt bien la route. De plus,
+il risquait de se laisser entraîner sur un terrain plutôt glissant. Il lui restait
+une botte secrète. À son tour, il pointa son doigt dans sa direction, venant
+effleurer le sien en souriant. Il lui chuchota.<br
+class="newline" />— Pourtant, j’ai bien l’impression que Silwë, elle, ne s’arrête pas à ce genre
+de détail.<br
+class="newline" />— Quoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Qu’est-ce que tu en sais<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Son attaque avait donc touché. Il ne fallait pas baisser sa garde maintenant.
+<br
+class="newline" />— Elle a passé cinq ans chez les humains. Je pense qu’elle a dû avoir un
+certain succès auprès d’eux. Tu lui poseras la question...<br
+class="newline" />Cherchant désespérément un peu de soutien, Aldariel se tourna vers son
+amie, qui s’était visiblement endormie. Tout du moins, elle faisait
+suffisamment bien semblant. Il l’en remercia intérieurement.<br
+class="newline" />— ...sinon tu te rappelleras sa réaction quand, un soir, tu avais évoqué la
+question.<br
+class="newline" />Quelle chance il avait eu de retenir ce détail pourtant insignifiant, malgré la
+situation qui ne s’y prêtait guère... Ils étaient plus à un cheveu de
+s’entretuer que de jouer à ce jeu-là.
+<!--l. 709--><p class="indent" > Elle lui lança un dernier regard assassin, qu’il fit mine de ne pas
+remarquer. Mais il avait du mal à se retenir de sourire. Elle soupira,
+remonta ses draps sur ses épaules et ferma les yeux.
+<!--l. 711--><p class="noindent" ><span
+class="ecti-1095">Irdann</span>
+<!--l. 713--><p class="indent" > Il referma la porte de la petite chambre et posa le bougeoir sur la table
+de chevet.<br
+class="newline" />— Hé bien<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Je m’attendais à ce que nos noms soient respectés, mais à ce
+point...<br
+class="newline" />Sélène sourit.<br
+class="newline" />— C’est vrai que c’était presque un peu trop... Et encore, personne ne leur
+a dit qu’Aldariel était la fille du roi des elfes.<br
+class="newline" />— Les pauvres. Déjà que voir des elfes pour la première fois de leur vie
+était un choc...<br
+class="newline" />Elle fit quelques pas dans la pièce, puis son sourire se figea.<br
+class="newline" />— Ah. Il y a un petit problème technique. Il n’y a qu’un lit.<br
+class="newline" />— Effectivement. En même temps, c’est assez logique, c’est leur
+chambre...<br
+class="newline" />— Tu crois qu’ils pensent qu’on...<br
+class="newline" />Il haussa les épaules. Il n’avait pas tellement envie de décevoir leurs hôtes et
+surtout, de leur demander du travail en plus alors qu’ils se donnaient déjà
+tellement de mal pour eux.<br
+class="newline" />— Bah, ne t’inquiète pas, je dormirai par terre. J’ai connu pire, tu
+sais<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
+class="newline" />— Moi non plus ça ne me dérangerait pas de dormir par terre. Ça fait
+presque une semaine que je fais ça<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Et en plus, toi, tu es blessé.<br
+class="newline" />— Ah mais ça n’a rien à voir<span class="frenchb-thinspace"> </span>!
+<!--l. 727--><p class="indent" > Ils se regardèrent en silence pendant quelques instants. Il lui aurait bien
+répondu qu’elle était une dame et c’était une histoire de code d’honneur,
+mais il doutait de l’efficacité de cet argument. Il n’avait pas affaire à une
+noble dame comme les autres, ça, il avait bien saisi. Ce fut finalement elle
+qui prit une décision.<br
+class="newline" />— Bon écoute, on ne va quand même pas dormir tous les deux par
+terre, ce serait vraiment stupide. Il y a de la place pour deux sur ce
+matelas. Chacun son côté, chacun sa couverture, ça te va comme
+compromis<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— À condition que tu prennes quand même les draps prévus pour ça. Et
+moi je prends une couverture de voyage.<br
+class="newline" />Elle sourit en lui donnant un petit coup de coude.<br
+class="newline" />— Vendu<span class="frenchb-thinspace"> </span>!
+<!--l. 733--><p class="indent" > Ils s’installèrent rapidement, puis éteignirent la bougie, ce qui plongea la
+pièce dans l’obscurité. Il était épuisé, et il devait reconnaître que ce
+
+
+compromis avait du bon. Le matelas était vraiment confortable. Pourtant, le
+sommeil ne venait pas. Trop de choses s’étaient passées dans cette journée...
+À commencer par Sélène. La jeune femme qu’il devait chercher était
+saine et sauve, et plutôt bien entourée... Elle n’avait pas eu l’air si
+heureuse que cela de le voir arriver. Quelle relation l’unissait à son
+« guide », d’ailleurs<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Leurs regards étaient tout de même assez
+éloquents...
+<!--l. 735--><p class="indent" > Il avait beau avoir quitté assez tôt le palais de son père et l’ambiance
+des cours, il connaissait assez bien la façon les mariages étaient conclus. Il
+s’agissait bien souvent d’un enjeu complexe d’alliances entre seigneurs et de
+cessions de terres, quand il ne s’agissait pas de guerres, toujours est-il qu’on
+ne laissait pas beaucoup de choix aux jeunes nobles. Bien sûr, on
+essayait généralement de faire en sorte qu’ils s’apprécient au moins un
+peu, et puis ils étaient bien souvent éduqués et conditionnés pour
+aimer les gens de leur rang... mais au final, ce n’était pas eux qui
+décidaient sur ce plan-là. Certains s’en accomodaient plutôt bien, d’autres
+trouvaient leur bonheur ailleurs que dans les bras de celui ou de celle
+qui leur était désigné. Bien sûr, rien de tout cela n’était officiel,
+mais une oreille attentive et innocente pouvait entendre bien des
+choses...
+<!--l. 737--><p class="indent" > Il avait tendance à considérer que ce genre d’histoire ne le regardait pas.
+Après tout, entre un mari à la capitale, et ses parents ici, elle avait bien
+droit à un peu de liberté entre deux... Il se mit à penser qu’il avait de la
+chance d’être un paladin. Personne n’allait le forcer à se marier contre son
+gré, et il était vraiment libre... Certes, il devait rendre des services au nom
+de la déesse, mais à côté d’avoir toujours quelqu’un sur le dos, ce n’était
+pas grand chose.
+<!--l. 739--><p class="noindent" >— Irdann<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Elle ne dormait donc pas non plus<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Oui<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Je suppose qu’on repart demain... ça va aller ta blessure<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Je pense, oui. Aldariel s’en est très bien occupé. Mais c’est surtout une
+chance que personne d’autre n’ait été blessé.<br
+class="newline" />Il eu l’impression qu’elle frissonnait.<br
+class="newline" />— Je n’ose pas imaginer ce qui se serait passé si les autres n’étaient pas
+venus à notre secours...<br
+class="newline" />C’était malheureusement facile à deviner. Il aurait été tué, et elle
+faite prisonnière. Et encore, prisonnière, c’était dans le meilleur des
+cas...<br
+class="newline" />— Tu veux vraiment savoir<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Ça va, je me passerai des détails, merci.<br
+class="newline" />— Je me moque, mais sérieusement, nous aurions dû insister pour qu’ils
+restent avec nous au moins jusqu’à la sortie de la forêt.<br
+class="newline" />— Peut-être... et peut-être pas en fait. En arrivant un peu après, ils ont pu
+bénéficier d’un effet de surprise...<br
+class="newline" />Pour quelqu’un qui n’avait connu que le confort des châteaux, elle avait une
+sacré tête froide. Elle n’avait pas l’air trop choquée par tout ce qui s’était
+passé, ce qui était plutôt impressionnant. Et puisqu’elle semblait plutôt
+encline à lui en parler, il allait pouvoir lui demander...<br
+class="newline" />— C’est possible. J’y pense, il y a quelque chose que je n’ai pas tout à fait
+compris dans ce combat.<br
+class="newline" />— Ah<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— les brigands étaient occupés avec moi, et tu étais relativement
+tranquille... Puis il y en a un qui s’est approché de toi, je t’ai vue
+t’effondrer... enfin je crois. Et puis l’instant d’après, c’est lui qui était
+effondré à tes pieds. Je n’ai pas l’impression que Zach soit arrivé si
+tôt...<br
+class="newline" />Elle marqua une seconde de silence, mais lorsqu’elle répondit, il aurait juré
+qu’elle souriait.
+<!--l. 757--><p class="noindent" ><span
+class="ecti-1095">S</span><span
+class="ecti-1095">él</span><span
+class="ecti-1095">ène</span>
+<!--l. 759--><p class="indent" > Lorsqu’elle termina son récit, il laissa passer un moment de silence. Que
+pouvait-il bien en penser<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Je ne m’attendais pas à ça, effectivement.<br
+class="newline" />Il semblait simplement surpris. Mais était-ce en bien ou en mal<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
+<br
+class="newline" />— Je n’avais simplement pas le choix, tu sais bien... Je pouvais bien
+attendre que tu viennes à mon secours, mais tu tenais déjà tête à trois
+hommes<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
+class="newline" />— Mais tu as bien fait de te défendre<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Soulagée, elle sourit –elle était
+soulagée également de noter qu’il ne voyait pas ses expressions dans le noir,
+lui– et répondit nettement plus spontanément.<br
+class="newline" />— Ça n’a pas l’air de te choquer, alors, de voir une femme prendre les armes
+pour défendre sa peau...<br
+class="newline" />— Je trouve dommage qu’il soit nécessaire d’avoir besoin d’une arme pour
+être en paix. Mais puisque cela semble être le cas, autant que tu en sois
+capable comme les autres.<br
+class="newline" />Elle l’entendit soupirer avant de reprendre.<br
+class="newline" />— Tu m’aurais dit ça il y a plusieurs années, effectivement j’aurais trouvé
+ça indécent, pas naturel, dangereux, inconvenant, et je ne sais quoi encore...
+J’ai été élevé dans un château selon les traditions séculaires que tu connais
+aussi bien que moi. Puis dans un temple, où le poids des rituels étaient bien
+présent... Ensuite, j’ai passé plusieurs années à la garde la capitale. Là-bas,
+je n’ai pas seulement appris l’art de l’épée, j’y ai compris qu’il n’y avait pas
+vraiment de différence entre les genres, ou les types d’humains. Peut-être
+que c’est ce que cherchait à me faire apprendre les prêtres en m’envoyant
+là... <br
+class="newline" />— Ils voulaient faire de toi un vrai paladin, juste et ouvert, et pas une
+simple épée bien entraînée à faire ce qu’on lui a appris...<br
+class="newline" />— Je ne sais pas si, finalement, je corresponds à leurs critères.
+<!--l. 772--><p class="indent" > Elle avait l’impression qu’il aurait volontiers précisé sa pensée. Qu’est-ce
+que cela pouvait cacher<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Était-ce simplement de la modestie, ou avait-il un
+« critère » particulier en tête<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle brûlait d’envie de le questionner, mais
+peut-être n’était-ce pas le moment. Elle tourna la tête vers lui en
+souriant.<br
+class="newline" />— Tu sais, moi non plus je ne corresponds pas aux critères d’une vraie
+« dame »... <br
+class="newline" />— Je vois ça. D’ailleurs, j’y pense, qui t’a appris cette technique<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il faut
+un sacré cran pour oser faire ce que tu as fait<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
+class="newline" />Elle sourit.<br
+class="newline" />— Personne... J’ai improvisé, dans le feu de l’action. Peut-être qu’à force de
+côtoyer des gens comme Zach, Aldariel, Silwë, et même toi, leur courage
+déteint sur moi...
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