+<!--l. 131--><p class="indent" > En sortant, elle croisa la servante en question, et lorsqu’elle lui expliqua
+où elle allait, la jeune femme lui adressa un regard à la fois complice et
+envieux. C’est vrai que le jeune et élégant paladin avait déclenché de
+nombreux sourires admiratifs parmi le personnel féminin, et elle connaissait
+plus d’un homme qui en aurait abondamment profité. Irdann ne semblait
+pas les voir, ou peut-être était-il suffisamment malin pour tirer parti de la
+situation en toute discrétion, qui sait<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
+<!--l. 133--><p class="indent" > Zach, lui, aurait été du genre à en profiter, c’est sûr. D’ailleurs, depuis le
+temps qu’il était guide, combien de voyageuses avaient fini dans ses bras<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Et
+dire que vis-à-vis d’elle il n’osait pas assumer grand-chose... Quel idiot,
+vraiment. Il était bien courageux quand il fallait affronter des bandits ou
+des monstres, mais devant elle...
+<!--l. 135--><p class="indent" > Elle secoua la tête. Comment pouvait-elle médire de lui comme cela,
+alors que d’après la lettre adressée à Irdann, il était gravement blessé<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Et
+blessé comment, à quel point, pourquoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Et s’il ne tenait pas le coup jusqu’à
+ce qu’elle arrive<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle chassa aussitôt cette pensée terrible, et frappa à la
+porte de la chambre d’Irdann.<br
+class="newline" />— Ah, tu es là. Tu as tout ce qu’il faut<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Elle montra sa sacoche en entrant dans la pièce.<br
+class="newline" />— J’ai là dedans tout un tas de remèdes, et une robe de servante.<br
+class="newline" />— Personne ne t’a posé de questions dessus<span class="frenchb-thinspace"> </span>? demanda-t-il en fronçant les
+
+
+sourcils.<br
+class="newline" />— Les serviteurs sont vraisemblablement bien plus intéressés par les ragots
+que par ça, répondit-elle en souriant.
+<!--l. 142--><p class="indent" > Elle commença à se préparer, tandis qu’Irdann, le dos tourné, lui
+donnait quelques instructions.<br
+class="newline" />— Tu reconnaîtras Uhr facilement. C’est un grand gaillard, au teint pâle,
+aux cheveux châtains bouclés et à la carrure impressionnante.<br
+class="newline" />— Ce n’est pas courant, comme nom... d’où vient-il<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Il est originaire des plaines barbares. Mais ne te fie pas à son air de brute
+épaisse, il est aussi stupide que Silwë ou Aldariel sont inoffensives... si tu
+vois que je veux dire.<br
+class="newline" />— J’imagine oui. Il n’est pas censé avoir des « compagnons »<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Aucune idée de qui il peut s’agir. Tout dépend de la raison pour laquelle
+il est ici.<br
+class="newline" />— Il est censé t’attendre, ou attendre de tes nouvelles. Si je dis que je viens
+de ta part il devrait me faire confiance non<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Probable. Je ne sais pas jusqu’à quel point, mais je suppose qu’il te
+laissera au moins t’occuper de Zach...<br
+class="newline" />— Mais j’espère bien<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Sinon pourquoi en aurait-il parlé dans sa lettre<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Je pensais plutôt au fait qu’il ne sait pas qui tu es et ce dont tu es
+capable...<br
+class="newline" />— C’est vrai. Peut-être que Zach pourra parler en ma faveur<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Enfin, s’il est
+conscient...<br
+class="newline" />Irdann haussa les épaules, toujours tourné vers le mur.<br
+class="newline" />— Sinon, il te faudra le convaincre. Puisque je suppose que tu n’as pas
+l’intention de tout lui expliquer.<br
+class="newline" />— Évidemment que non. Ça va pas la tête<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Pense alors à trouver une explication, si ton moribond se met à sauter de
+son lit après quelques minutes de soin.<br
+class="newline" />— ... En effet.<br
+class="newline" />— Dans tous les cas, garde en tête le fait qu’il vient de la capitale. Tu dois
+le savoir encore mieux que moi, les mages soigneurs y ont pignon sur rue,
+et même lui a déjà eu affaire à eux... Il sait parfaitement ce que
+c’est.<br
+class="newline" />— Tu peux te retourner.
+
+
+<!--l. 161--><p class="indent" > Elle avait enfilé une robe à bretelles marron foncé par dessus une
+chemise de lin blanche –du moins qui avait été blanche à un moment donné.
+À ses pieds, elle avait mis les bottines qu’elle avait gardées après son
+escapade dans la forêt, et qui allaient très bien avec son déguisement. Pour
+parfaire le tout, et en guise de manteau, elle avait couvert sa tête et ses
+épaules d’un long châle de laine grise.<br
+class="newline" />— Alors<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Impeccable, répondit-il en souriant.<br
+class="newline" />— Bon, je vais me mettre en route... Je pense que c’est le bon moment,
+dit-elle en réajustant sa sacoche.<br
+class="newline" />Irdann la raccompagna jusqu’à la porte.<br
+class="newline" />— Promets-moi de ne prendre aucun risque, lui murmura-t-il. S’il t’arrivait
+quelque chose, je ne me le pardonnerais jamais...
+<!--l. 168--><p class="noindent" ><span
+class="ecti-1095">Uhr</span>
+<!--l. 170--><p class="indent" > Le soir était tombé, et Uhr s’était mis en route à travers la campagne.
+Sa monture avançait calmement sur le soleil qui se couchait. Il avait choisi
+de partir en avance, afin de pouvoir prendre son temps. Après leur course
+effrénée dans la forêt, les pauvres bêtes avaient besoin d’être ménagées. Et
+puis, la « mission » qu’on lui avait confiée n’était pas à la minute
+près...
+<!--l. 172--><p class="indent" > Luros, c’était le nom du garde, avait donné rendez-vous à sa fiancée au
+bal de son village, qui avait lieu ce soir. Malheureusement, un de ses
+collègues s’étant blessé, il avait dû le remplacer au pied levé pour sa ronde
+de la soirée. À Uhr la charge de transmettre, via une lettre, les excuses à la
+damoiselle en question. Il avait connu plus dangereux comme mission, à
+moins que la jeune paysanne ne prenne très mal la nouvelle et ne s’énerve
+sur lui<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
+<!--l. 174--><p class="indent" > Il déplorait son absence au chevet de Zach, surtout si Irdann devait venir
+le voir ce soir, mais il faisait confiance à Sam et Farl pour gérer efficacement
+la situation. Ces derniers s’étaient relayés durant la journée pour se
+renseigner sur les différentes entrées et sorties du château, ainsi que
+du personnel, pour savoir d’où viendrait leur ami, et si possible lui
+faciliter la tâche. Mais il ignorait si ces recherches avaient porté leurs
+
+
+fruits.
+<!--l. 176--><p class="indent" > Après un tournant sur le sentier, il arriva en vue du village. Des
+lumières de lampions, visibles dans la nuit tombée, et des bribes de musique
+lui confirmèrent qu’il était au bon endroit. Il mit pied à terre en arrivant
+sur la place, et après avoir attaché et pris soin de sa monture, il se dirigea, à
+travers l’animation, vers un comptoir installé sur quelques tréteaux. Il
+commença par commander une bière, puis s’adressa au jeune homme qui
+servait les boissons.<br
+class="newline" />— Excusez-moi, vous ne connaîtriez pas une damoiselle du nom de
+Lysielle<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— C’est moi, répondit une voix derrière lui.
+<!--l. 180--><p class="indent" > Il se retourna vers celle qui venait de lui parler. C’était une jeune femme
+aux longs cheveux noirs, au regard noisette et à l’air décidé. Elle était
+accoudée au comptoir avec un verre, elle aussi.<br
+class="newline" />— Qu’est-ce que vous voulez<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Je viens de la part de votre fiancé, Luros.<br
+class="newline" />— Qu’est-ce qu’il a, il ne peut pas venir lui-même<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Vu l’expression de la damoiselle, il allait devoir sortir l’outil diplomatie.<br
+class="newline" />— Hélas, il a dû remplacer en urgence un de ses compagnons, qui s’est
+blessé au service de son seigneur, expliqua-t-il en s’inclinant.<br
+class="newline" />En vérité, lui avait dit le jeune garde, le compagnon en question s’était
+blessé à l’épaule en chutant de cheval à cause d’une étrivière trop
+vieille qui avait lâché. Mais c’était beaucoup moins intéressant à
+raconter.<br
+class="newline" />— Quoi, s’énerva Lysielle, vous voulez dire qu’il est de service ce soir et
+qu’il ne viendra pas du tout<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Malheureusement, non. Il m’a demandé de vous faire parvenir cette
+lettre, ajouta Uhr en lui tendant la missive.
+<!--l. 190--><p class="indent" > La jeune paysanne prit la lettre en fronçant les sourcils, et la parcourut
+des yeux. Un petit sourire et un léger rougissement apparurent sur son
+visage à la fin de la lecture. Puis elle se renfrogna.<br
+class="newline" />— J’espère, avança-t-il prudemment, que vous lui pardonnerez.<br
+class="newline" />— Oh, lui, il passera un sale quart d’heure quand je le verrai<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
+class="newline" />— Votre fiancé ne fait que son devoir. Il ne va pas laisser son seigneur sans
+
+
+protection, tempéra Uhr.<br
+class="newline" />— Justement, le seigneur a plein d’argent<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Pourquoi n’engage-t-il pas
+quelques gardes en plus<span class="frenchb-thinspace"> </span>? tempêta-t-elle.<br
+class="newline" />— Je ne doute pas que s’il vous engageait comme garde, le sieur Assem et sa
+famille seraient plus qu’en sécurité.<br
+class="newline" />Lysielle marqua un moment de surprise, puis voyant l’air amusé de son
+interlocuteur, éclata de rire. Elle glissa alors la lettre dans son corsage, et
+reprit, sans transition.<br
+class="newline" />— Bon, c’est pas tout ça, mais j’étais venue danser, et je me retrouve sans
+cavalier. Vous venez<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Et sans lui laisser le temps de répondre, elle l’entraîna vers la piste de
+danse.
+<!--l. 200--><p class="noindent" >— Vous savez, avoua-t-il humblement après une première danse, je ne
+connais pas du tout les danses de cette région.<br
+class="newline" />— Ah<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Pour quelqu’un qui apprend sur le tas, vous vous en sortez pas mal,
+répondit-elle en souriant. Mieux que cet idiot de Firor, qui pourtant est
+censé les connaître.<br
+class="newline" />— Qui est ce garçon<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Elle leva les yeux au ciel. <br
+class="newline" />— Le fils du charpentier, mon voisin. Il me tourne autour depuis six mois,
+même s’il sait que je suis fiancée à Luros. J’ai beau l’envoyer balader à
+chaque fois, il insiste... C’est lui, là-bas.<br
+class="newline" />Il aperçut le jeune homme, fin et élégant, aux cheveux noirs, qui discutait
+avec le vendeur de boissons.<br
+class="newline" />— Je vois. Cela vous arrange donc bien que je danse avec vous, n’est-ce
+pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Elle répondit par un sourire.<br
+class="newline" />— J’avoue, je prends toutes les excuses pour l’éviter. Et comme je doute
+qu’il cherche à faire concurrence à votre carrure... dit-elle sur un ton amusé.
+Mais je ne vais pas vous retenir...<br
+class="newline" />— Je peux rester à danser un peu, finalement, l’ambiance est sympathique,
+répondit-il en souriant.<br
+class="newline" />Après tout la compagnie de Lysielle était agréable, la bière plutôt bonne, et
+il était peu probable qu’il rentre à temps s’il se passait quelque chose, alors
+autant en profiter.
+
+
+<!--l. 212--><p class="indent" > Ils s’arrêtèrent après la danse suivante, pour terminer leur verre.<br
+class="newline" />— Cette danse-là était plus difficile, j’ai eu un peu de mal à suivre<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
+class="newline" />— J’avoue. D’où venez-vous, pour ne pas connaître la région et ses
+traditions<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— De la capitale, avoua-t-il.<br
+class="newline" />Après tout, que risquait-il à lui dire<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Ha<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Je l’aurais juré, répondit Lysielle en riant. J’étais presque sûre
+d’avoir reconnu votre accent. Vous y faites quoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Je suis soldat de la garde.<br
+class="newline" />— Comme Luros<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ça ne m’étonne pas vue votre stature.<br
+class="newline" />— Hé oui. Et je connais bien les problèmes liés à son travail... <br
+class="newline" />— Et vous n’avez pas une fiancée que ça énerve parfois<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Euh... Nous faisons avec, répondit Uhr évasivement.<br
+class="newline" />La paysanne termina son verre d’un trait.<br
+class="newline" />— J’espère d’ailleurs qu’elle ne m’en veut pas trop de vous retenir. Vous
+devriez peut-être rentrer...<br
+class="newline" />— C’est vrai. Mais je vous remercie pour cette soirée, je me suis bien
+amusé.<br
+class="newline" />— C’est moi qui vous remercie. Dites quand même à cet andouille de
+Luros... que je l’attends à notre point de rendez-vous habituel demain soir
+pour qu’il s’excuse en personne. Et cette fois, il n’a pas intérêt à se
+défiler<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
+class="newline" />— Je n’y manquerai pas, dit-il en s’inclinant.
+<!--l. 229--><p class="indent" > Il se dirigea vers sa monture, qui somnolait tranquillement en attendant
+son retour. La jeune paysanne l’avait suivi tout en discutant.<br
+class="newline" />— Vous avez l’air de regarder autour de vous, chercheriez-vous quelque
+chose ou quelqu’un<span class="frenchb-thinspace"> </span>? lui demanda Uhr.<br
+class="newline" />— Non... Enfin oui... Je me demandais où était passé Firor.<br
+class="newline" />Il eut un petit sourire tout en détachant son cheval.<br
+class="newline" />— Oh, je crois que je l’ai vu rentrer chez lui, avec un certain mal de
+crâne.<br
+class="newline" />— Sérieusement<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Oui, je me demande bien ce qui a pu lui arriver sur la piste de
+danse...<br
+class="newline" />Elle éclata de rire.<br
+class="newline" />— Haha... Bien vu. Vous êtes vraiment un homme plein de ressources...
+<!--l. 239--><p class="indent" > Il monta en selle et se mit en route en lui lançant un geste du bras et un
+clin d’œil.
+<!--l. 241--><p class="noindent" ><span
+class="ecti-1095">S</span><span
+class="ecti-1095">él</span><span
+class="ecti-1095">ène</span>
+<!--l. 243--><p class="indent" > Elle fit quelques pas dans la ruelle quasi déserte. Personne n’avait prêté
+attention à elle dans les cuisines et les couloirs du château. Une tenue de
+servante, c’était une tenue de femme invisible, c’était la tenue faite par
+essence pour se faire oublier, ou plutôt la tenue que tout le monde avait
+appris à oublier.
+<!--l. 245--><p class="indent" > Elle prit quelques grandes inspirations dans la fraîcheur du début de la
+nuit. Maintenant, plus grand chose ne la séparait de Zach... Elle regarda
+quelques instants autour d’elle afin de se repérer, et s’engagea dans une
+direction. Elle avait un peu étudié le plan avec Irdann, mais de nuit, c’était
+plus compliqué.
+<!--l. 247--><p class="indent" > Soudain, un choc mou la projeta à terre.<br
+class="newline" />— Oh, je suis vraiment confus, je ne vous avais pas vue...<br
+class="newline" />Assise par terre, sur les pavés déjà humides par la rosée nocturne, elle
+reprit ses esprit. Devant elle, un homme se releva et lui tendit la
+main.<br
+class="newline" />— Vraiment, je vous prie de m’excuser... J’espère que vous n’êtes pas
+blessée<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
+class="newline" />— Ça va, merci, dit-elle en acceptant la main tendue.<br
+class="newline" />Elle se releva, et rajusta son châle sur la tête, et vérifia que rien dans sa
+sacoche n’était abîmé par le choc. Heureusement, elle avait connu pire...
+L’homme était toujours là. Elle le distinguait mal dans l’obscurité, mais il
+avait l’air vraiment gêné et désolé.<br
+class="newline" />— Puisque vous êtes là, vous pourriez peut-être m’aider<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Je cherche la rue
+des Sabots Fendus.<br
+class="newline" />— Oui, je sais où elle est. Il faut prendre cette rue, puis aller à gauche...
+commença-t-il en montrant les directions. Mais attendez, s’interrompit-il. Je
+me rends moi-même sur la rue du Petit Homme, qui est juste à côté, je
+peux donc vous montrer directement. Acceptez-vous<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Il avait vraiment l’air anxieux de se faire pardonner, et puis, si ça pouvait
+
+
+lui éviter de chercher son chemin...<br
+class="newline" />— D’accord.<br
+class="newline" />Elle se mit à marcher à ses côtés, non sans une certaine méfiance.
+<!--l. 259--><p class="indent" > En marchant dans les ruelles, la lumière venant de diverses maisons et
+enseignes éclairait son étrange compagnon. Il était plutôt jeune, vêtu d’une
+tunique gris foncé, à manches longues, et d’un pantalon noir par dessus des
+bottes de cuir. Il lui adressait de temps en temps un léger sourire, qui ne la
+mettait pas très à l’aise. Elle se contentait de vérifier autour d’elle, le
+chemin semblait le bon, mais pouvait-elle en être sûre<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Pouvait-il être en
+train de l’égarer dans les rues de la ville<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Était-elle stupide de se méfier
+autant<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
+<!--l. 261--><p class="noindent" >— Pardonnez-moi encore une fois, mais que faites-vous seule à cette heure
+dans les rues de la ville<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Je rends visite à un oncle de passage, improvisa-t-elle.<br
+class="newline" />— Il loge à l’auberge du Taureau à une corne<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Elle sursauta presque.<br
+class="newline" />— Euh oui, pourquoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Il sourit.<br
+class="newline" />— C’est la seule de cette rue, alors j’avais de bonnes chances de deviner...
+<br
+class="newline" />— Certes.<br
+class="newline" />— Vous n’êtes pas d’ici<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Je ne connais pas bien cette partie de la ville, répondit-elle
+précipitamment.<br
+class="newline" />Ses questions commençaient à la mettre mal à l’aise, pourvu qu’ils arrivent
+vite à destination et qu’elle soit tranquille...<br
+class="newline" />— Ne craignez-vous pas de faire de mauvaises rencontres en vous déplaçant
+seule à cette heure<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Elle fronça les sourcils et se retourna vers lui. Il y avait un sourire
+inquiétant sur ses lèvres, et elle regretta soudain de l’avoir accompagné. —
+Mais ne vous inquiétez pas, reprit-il en se rapprochant d’elle et en baissant
+légèrement le ton, vous ne craignez rien en ma compagnie, dame
+Sélène.
+<!--l. 275--><p class="indent" > Elle se figea de stupeur, comme si on lui avait asséné un coup de poing
+
+
+dans le ventre.<br
+class="newline" />— De quoi parlez-vous<span class="frenchb-thinspace"> </span>? répondit-elle d’une voix faible.<br
+class="newline" />Il sourit.<br
+class="newline" />— Quoi, cela ne vous rassure pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Son hésitation l’avait de toutes façons déjà trahie. Autant l’affronter
+franchement... elle se planta face à lui.<br
+class="newline" />— À quoi jouez vous<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Disons que je voulais être sûr, répondit-il avec un clin d’œil. Mais
+rassurez-vous, votre identité restera entre nous.<br
+class="newline" />Il fit quelques pas, l’incitant à le suivre, mais elle ne bougea pas. Constatant
+qu’elle restait sur place, il s’arrêta à son tour.
+<!--l. 284--><p class="indent" > Sélène tremblait, à la fois de rage et de peur, et quelques gouttes de
+sueur froide perlaient sur son front.<br
+class="newline" />— Qui êtes-vous<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Comment savez-vous qui je suis<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Je suis un ami d’Irdann.<br
+class="newline" />— Hmm... Et d’Uhr<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Tout à fait. J’en déduis donc que vous avez lu son message.<br
+class="newline" />Elle hocha la tête. Ainsi, c’était l’un des fameux « compagnons » décrits
+dans le mot.<br
+class="newline" />— Cela ne répond pas à ma seconde question, reprit-elle après un court
+silence.<br
+class="newline" />— À vrai dire, j’attendais de voir arriver Irdann. J’ai été un peu
+surpris de ne pas le voir, et lorsque je t’ai vue passer, je me suis
+demandé...<br
+class="newline" />— Je suis si reconnaissable<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Pas tant que ça, pour quelqu’un qui n’y prête pas attention. Mais on
+voit peu de femmes seules dans les rues, tu avais une allure un peu
+inhabituelle, et tu semblais chercher ton chemin... Je ne m’y suis pas
+trompé.<br
+class="newline" />Elle fit une moue. Elle se remettait tout juste de sa surprise, mais n’était
+toujours pas très rassuré par son interlocuteur.<br
+class="newline" />— Pourquoi avoir joué tout ce jeu<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Je n’étais pas tout à fait sûr... Pardon pour cette frayeur.<br
+class="newline" />Elle fronça les sourcils.<br
+class="newline" />— Mon nom est Farl. Par ailleurs, ce que j’ai dit est sincère, et je ne pense