+<!--l. 769--><p class="indent" > Il releva les yeux de son croquis pour observer ses compagnons. Sam
+semblait toujours aussi déterminée. Farl aussi, mais un peu moins,
+probablement le fait d’avoir vu de près les araknes l’avait un peu refroidi.
+<br
+class="newline" />— Et si on tombe sur un dangereux mage qui élève ce genre de créature, on
+fait quoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>? demanda Zach.<br
+class="newline" />— On improvise<span class="frenchb-thinspace"> </span>? proposa Uhr.<br
+class="newline" />— C’est vrai que ça serait bête d’être arrivés jusque là pour faire demi-tour
+maintenant, ajouta Sam.
+
+
+<!--l. 774--><p class="indent" > Zach ne semblait toujours pas très enthousiaste, mais il sembla
+acquiescer à la remarque de Sam.<br
+class="newline" />— Tu n’as pas l’habitude de voir des mages, n’est-ce pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>? lui demanda-t-il.<br
+class="newline" />Il haussa les épaules en terminant de se sécher.<br
+class="newline" />— C’est à dire... La seule que j’aie recontrée c’est Sélène. Mais ça ne
+compte pas, elle est gentille, elle...<br
+class="newline" />Elle est surtout vraisemblablement jolie et sait faire tourner les têtes et les
+cœurs, compléta mentalement Uhr. <br
+class="newline" />— C’est une guérisseuse, comme l’était Septim, avant de se mettre à
+étudier la métamorphose. L’un des meilleurs... et un de ses professeurs.<br
+class="newline" />Zach haussa les épaules à nouveau, puis se tourna vers la petite marmite à
+l’entrée de la tente et en souleva le couvercle.<br
+class="newline" />— Tout ça m’a donné très faim... On peut manger<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Pareil, enchaîna Farl, qui n’avait pas l’air mécontent non plus de changer
+de sujet.
+<!--l. 784--><p class="indent" > C’était peut-être idiot de chercher à le provoquer sur le sujet, après
+tout, pensa-t-il en se servant une part de soupe bien chaude. Si ladite Sélène
+l’a aveuglé ou charmé pour se couvrir ou couvrir ses complices, ce pauvre
+Zach n’y est probablement pour rien.
+<!--l. 786--><p class="noindent" ><span
+class="ecti-1095">Sam</span>
+<!--l. 788--><p class="indent" > La pluie avait cessé au milieu de la nuit, et la météo s’annonçait plutôt
+agréable. Ils prirent le temps de faire sécher leurs affaires et de se préparer.
+C’est peu après un repas rapide à midi qu’ils traversèrent le gué, et
+s’approchèrent de l’endroit où, d’après Zach et Farl, les créatures s’étaient
+réfugiées. Le paysage était un peu moins arboré, et plus rocheux. Comme le
+disait leur guide, ils étaient proches des monts Guéralek, et c’était peu
+surprenant. C’est seulement une vingtaine de minutes après la rivière qu’ils
+durent mettre pied à terre.
+<!--l. 791--><p class="indent" > — Je crois que les chevaux vont avoir du mal à aller par ici, dit Uhr en
+montrant le chemin qui s’ouvrait à eux.<br
+class="newline" />L’amas rocheux devant eux n’était pas très pentu, et eux n’auraient
+probablement aucun mal à le gravir, mais avec toutes ces irrégularités et
+pierres qui ne tenaient qu’à la mousse qui poussait dessus, les chevaux
+
+
+risquaient de se blesser sérieusement. Ils les attachèrent près d’un arbre, et
+commencèrent leur ascension.
+<!--l. 794--><p class="indent" > Sam ne regrettait décidément pas son pantalon. Même si quelques
+villageois l’avaient regardée de travers au village, pour monter à cheval
+c’était infiniment plus confortable, et marcher dans ce chaos avec une robe
+longue aurait vraiment été un enfer...<br
+class="newline" />— Regardez, sur la gauche<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
+class="newline" />Elle releva la tête. Uhr, qui marchait devant elle, montrait du doigt un
+renfoncement rocheux important.<br
+class="newline" />— Ça ressemble à une grotte. On va voir<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Tous les trois opinèrent, et le suivirent.
+<!--l. 800--><p class="indent" > C’était une sorte de large grotte, peu profonde et très éclairée,
+partiellement encombrée de végétation poussant dans de nombreuses
+fissures. Ils repérèrent rapidement, à l’entrée d’une des failles, quelques
+filaments collants qui ne ressemblaient pas à des toiles d’araignées
+ordinaires. Comme le fit remarquer Uhr, les araknes ne laissant quasiment
+aucune trace au sol, il fallait bien se fier à un indice ou un autre.
+<!--l. 802--><p class="indent" > Farl et Zach sortirent du renfoncement, et ayant repéré un petit filet
+d’eau qui tombait en cascade non loin de là, commencèrent à le
+détourner pour qu’il pénètre dans la faille. La tâche n’était pas
+facile et demandait quasiment d’escalader pour atteindre l’eau. Uhr
+et elle, se sentant peu utiles dans ce genre d’acrobaties, se mirent
+à fouiller la grotte un peu plus méthodiquement. Au bout d’une
+dizaine de minutes, son compagnon lui désigna un pan de roche
+cachée derrière un buisson. Couverte en partie de mousse, et bien
+dissimulée derrière les broussailles, se trouvait une sorte de dalle de
+pierre, qui semblait fermer, de l’intérieur, une ouverture dans la
+paroi.
+<!--l. 804--><p class="noindent" ><span
+class="ecti-1095">Zach</span>
+<!--l. 806--><p class="noindent" >— Farl, Zach, venez voir<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
+class="newline" />Le petit filet d’eau commençait à couler doucement dans la grotte, mais le
+débit était trop peu important pour vraiment inonder la faille. Au
+mieux, cela ferait peut-être une flaque pour gêner ces sales bêtes.
+
+
+Il fit un signe de tête à Farl et tous deux redescendirent dans la
+grotte.
+<!--l. 809--><p class="noindent" >— Qu’est-ce que c’est<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Une porte, ou juste un rocher qui y ressemble<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
+demanda Farl.<br
+class="newline" />— On dirait, répondit Uhr.<br
+class="newline" />— Ça pourrait peut-être être naturel... Tu en penses quoi, Zach<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
+<br
+class="newline" />Il ne répondit pas et examina le buisson et la mousse que le soldat avaient
+dégagés. La mousse poussait partout sur la paroi rocheuse, tout comme ce
+genre d’arbuste. Il désigna ses racines.<br
+class="newline" />— Soit il y a peu de terre dans cette grotte, soit tu es vraiment plus fort que
+je ne l’imaginais, Uhr. D’habitude, ce genre de plante enfonce ses racines
+jusque dans les plus petites failles de la roche, et ça ne s’arrache pas si
+facilement.<br
+class="newline" />— Je vais me vexer, fais attention, reprit Uhr en souriant. Mais c’est vrai
+que c’est curieux. Comme si cet arbuste avait été planté ou replanté exprès
+ici...<br
+class="newline" />Zach haussa les épaules et se releva.<br
+class="newline" />— C’est tout à fait probable. Il y a quelques mois, un an tout au
+plus.<br
+class="newline" />— Cela ne répond pas à une question essentielle, ajouta Sam. Si ceci est une
+porte, comment s’ouvre-t-elle<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
+<!--l. 819--><p class="indent" > Il n’y avait ni poignée, ni serrure à l’étrange porte, et aucun mécanisme
+n’était visible sur les parois alentours.<br
+class="newline" />— Soit c’est un accès qui a été condamné, soit elle ne s’ouvre que de
+l’intérieur. Il semble que ce pan de rocher est appuyé de ce côté, proposa
+Farl.<br
+class="newline" />— Ce qui signifie, dans les deux cas, qu’il y a un autre accès, compléta
+Uhr.<br
+class="newline" />— Se pourrait-il que ce panneau soit déplacé par magie<span class="frenchb-thinspace"> </span>? suggéra
+Sam.<br
+class="newline" />— Ah ça, c’est vous les experts en magie, pas moi, répondit Zach. Ce qui
+m’inquiète, c’est plutôt ce qu’on va trouver derrière, si on arrive à
+l’ouvrir.<br
+class="newline" />— Tu as vraiment envie de voir ce qu’il y a derrière cette porte<span class="frenchb-thinspace"> </span>? lui
+
+
+demanda Uhr en souriant. Pas peur des mages ou d’autres créatures
+démoniaques<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Maintenant qu’on est arrivés jusque là, ce serait dommage de s’arrêter
+non<span class="frenchb-thinspace"> </span>? répondit-il en souriant à son tour.
+<!--l. 827--><p class="indent" > Pendant ce temps, Farl s’était approché de la dalle pour l’observer de
+plus près.<br
+class="newline" />— Je ne sais pas quel est le poids de cette chose, mais même si nous avions
+une dizaine d’hommes, il n’y a aucune prise pour l’attraper<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
+class="newline" />— On dirait qu’il y a un léger jour si on gratte la terre au sol, ajouta Sam
+qui s’était agenouillée.<br
+class="newline" />— Ça ne nous aide pas beaucoup, rétorqua Farl. Si la dalle n’était pas trop
+grosse, on pourrait peut-être utiliser un levier, mais...<br
+class="newline" />— Nous non, mais avec un peu d’aide divine...
+<!--l. 833--><p class="indent" > Samantha se tourna vers Zach et le dévisagea un moment. Puis elle se
+tourna vers Uhr en le pointant du doigt.<br
+class="newline" />— Je n’avais pas pensé à... lui. <br
+class="newline" />— Tu pensais à quoi de précis, Sam<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Elle le fixa d’un air gêné et répondit à mi-voix à son compagnon.<br
+class="newline" />— Je ne peux pas lui montrer... certaines choses.<br
+class="newline" />— Tu pensais à utiliser... mais comment<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ça peut marcher<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Je crois que le pouvoir est assez puissant, en tous cas il paraît que
+certains l’ont réussi, mais je n’ai jamais essayé.<br
+class="newline" />Uhr hocha la tête.<br
+class="newline" />— Ça vaudrait le coup d’essayer...
+<!--l. 843--><p class="indent" > Ils parlaient d’une voix relativement faible, mais il ne pouvait
+s’empêcher de les entendre. Qu’est-ce qu’ils cherchaient encore à cacher<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il
+jeta un regard à Farl, toujours accroupi au pied de la porte, mais qui avait
+lui aussi écouté le dialogue d’Uhr et Farl. Il regarda dans sa direction, puis
+vers les deux autres et se leva.<br
+class="newline" />— Si tu veux, Sam, on peut aller faire autre chose avec Zach. Par exemple,
+chercher le reste de notre équipement, ou...<br
+class="newline" />— Non, ça ira, coupa-t-elle d’un air excédé. De toutes façons, autant qu’il
+sache, mais je te préviens Zach...<br
+class="newline" />Elle fit quelques pas vers lui.<br
+class="newline" />— Tu as peut-être l’habitude qu’on te dise de garder le secret n’est-ce
+pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Il hocha la tête sans répondre. Ce n’était pas comme s’il avait tendance à
+tout raconter même en temps normal...<br
+class="newline" />— Essaie de ne pas oublier cette promesse-là, alors. Parce que cette fois,
+ce n’est pas les gens que nous pourchassons qui en voudront à ta
+peau.
+<!--l. 851--><p class="noindent" ><span
+class="ecti-1095">Uhr</span>
+<!--l. 853--><p class="indent" > Il eut presque pitié du pauvre Zach qui n’avait pas mérité ces menaces,
+en plus de tout ce qu’il avait dû encaisser depuis le début du voyage.
+Mais Sam avait l’air un peu calmée, c’était déjà ça. Si elle voulait
+utiliser un enchantement divin, c’était peut-être mieux... Quoique.
+<br
+class="newline" />— Tu as besoin de quelque chose<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Trouvez-moi quelques glands en bon état, et essayez de dégager quelques
+buissons pour avoir le maximum de lumière au pied de la porte. Et si vous
+pouvez trouver de la meilleure terre, humide et riche, c’est encore mieux.
+<br
+class="newline" />Ils s’éloignèrent et mirent peu de temps à préparer tout ce qu’elle
+demandait. Puis, à sa demande, ils s’éloignèrent tous les trois.
+<!--l. 858--><p class="noindent" >— Tu l’as déjà vue à l’œuvre, Uhr<span class="frenchb-thinspace"> </span>? lui demanda Farl.<br
+class="newline" />— Non. Elle ne l’a jamais fait devant moi.<br
+class="newline" />Zach les regarda en fronçant les sourcils.<br
+class="newline" />— Est-elle une magicienne<span class="frenchb-thinspace"> </span>? demanda-t-il.<br
+class="newline" />Il sourit.<br
+class="newline" />— Elle est mieux que ça. Ou peut-être pire, ça dépend du point de vue. Tu
+vas voir.<br
+class="newline" />— On peut regarder<span class="frenchb-thinspace"> </span>? demanda-t-il inquiet.<br
+class="newline" />— Oui. Elle a dit que ça ne posait pas de problèmes, mais qu’on ne la
+dérange pas. Et ne t’inquiète pas pour les menaces qu’elle a proférées à ton
+encontre, en général elle ne foudroie pas les gens, ce n’est pas très
+discret.
+<!--l. 867--><p class="indent" > Tous trois se perchèrent sur un rocher en contrebas. Ils pouvaient voir
+
+
+l’entrée de la grotte, et Sam qui s’affairait au pied de l’ouverture. Puis, elle
+se redressa, et resta quelques secondes immobile, les yeux fermés. Enfin, elle
+entama une douce mélopée, tout en se déplaçant lentement. La lumière du
+soleil qui arrivait maintenant au pied de la dalle se mit à briller plus
+fort, comme lorsqu’un rideau couvrant une fenêtre s’écarte, laissant
+pleinement entrer la clarté du jour. Et aux pieds de Sam, dans la
+terre fraîchement retournée, une pousse, puis deux commençèrent à
+sortir.
+<!--l. 869--><p class="indent" > Sous leurs yeux ébahis, les arbrisseaux se mirent à pousser, sous
+la dalle de pierre. Elle avait commencé à chanter plus fort, et les
+plantes semblaient suivre les accents de son chant, mais bientôt un
+bruit sourd couvrit sa voix. Lentement, doucement, les racines et les
+branches qui s’affermissaient poussaient, soulevant la dalle sur un
+côté. Après un temps qu’il n’aurait pas su mesurer, le pan de pierre
+perdit son équilibre, bascula vers l’arrière, et s’écrasa dans un grand
+fracas.
+<!--l. 871--><p class="noindent" ><span
+class="ecti-1095">Zach</span>
+<!--l. 873--><p class="indent" > Il resta quelques instants abasourdi, figé, le regard fixé sur l’ouverture et
+la poussière qui s’en dégageait.<br
+class="newline" />— C’est l’œuvre d’un dieu ça... murmura-t-il.<br
+class="newline" />— De la déesse Melna, lui répondit Uhr à côté de lui. Mais tu sais...<br
+class="newline" />Il posa une main sur son épaule.<br
+class="newline" />— Il ne faut pas croire tout ce qu’on dit sur les prêtresses.<br
+class="newline" />— Ah<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— La réalité est bien au-delà, ajouta-t-il en souriant. Allez viens, elle nous
+appelle.
+<!--l. 881--><p class="indent" > Il suivit Uhr et Farl qui s’étaient élancés vers l’entrée du trou. Il avait
+l’impression de commencer à comprendre beaucoup de choses sur Sam, mais
+il ne savait toujours pas s’il devait se réjouir ou s’inquiéter de la
+situation. Il n’avait de toutes façons pas vraiment le temps d’y réfléchir
+longuement, mieux valait profiter du fait qu’elle soit de son côté... pour le
+moment.
+<!--l. 883--><p class="indent" > Sam s’était assise à côté de l’ouverture, les yeux mi-clos, quelques
+
+
+gouttes de sueur ruisselant le long de son front. Les trois hommes restèrent
+silencieux quelques instants devant les deux petits chênes qui avaient, en
+poussant, soulevé la dalle de pierre. Celle-ci gisait, fracturée à de nombreux
+endroits, sur le sol à l’intérieur de ce qui semblait être une autre grotte.
+L’obscurité qui y régnait, en contraste avec la luminosité ambiante, ne
+permettait pas de voir l’intérieur, aussi Zach fit-il quelques pas à
+l’intérieur.
+<!--l. 886--><p class="noindent" ><span
+class="ecti-1095">Farl</span>
+<!--l. 888--><p class="noindent" >— Tu y vois quelque chose, Zach<span class="frenchb-thinspace"> </span>? demanda Farl.<br
+class="newline" />— C’est un couloir taillé dans la roche, répondit-il. Il a l’air de monter puis
+part légèrement sur la droite après une vingtaine de mètres... Prenez de
+quoi y voir et venez.<br
+class="newline" />— Il a de bons yeux, notre guide, dis donc, murmura Uhr à son
+intention.<br
+class="newline" />— Je t’expliquerai. Rejoignons-le vite.
+<!--l. 893--><p class="indent" > Farl et Uhr entrèrent à leur tour, munis d’une petite lanterne. Le sol,
+plat et quasiment dénué de mousses ou de poussières, indiquait clairement
+que ce couloir avait été emprunté récemment. Zach, à peine visible dans le
+faible rayon d’action de la lanterne, les avait précédés jusqu’au fameux
+coude.<br
+class="newline" />— Tu crois que c’est prudent d’aller au bout de ce couloir<span class="frenchb-thinspace"> </span>? lui demanda-t-il.<br
+class="newline" />Pour toute réponse, le guide dégaina son épée en haussant les épaules.<br
+class="newline" />— Ce n’est pas comme si on pouvait espérer être discrets...<br
+class="newline" />Il avança un peu plus loin dans l’obscurité. Uhr fit de même et courut dans
+le couloir à sa rencontre. Il s’apprêtait à faire de même lorsqu’il
+entendit des exclamations et beaucoup trop de bruits de pas pour
+deux personnes. Il glissa la lanière de la lanterne à son poignet et
+dégaina d’une seule pensée ses couteaux tout en s’élançant à leur
+suite.
+<!--l. 899--><p class="indent" > Passé ce léger tournant, le couloir continuait encore sur une trentaine de
+mètres, puis il s’ouvrait de nouveau sur le jour, si ses yeux ne le trompaient
+pas. De cette extrémité, couraient vers eux trois silhouettes, s’ajoutant aux
+deux hommes qui se trouvaient à portée d’épée de Zach et Uhr. Des cris
+
+
+indistincts lui parvenaient.<br
+class="newline" />— Des intrus<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
+class="newline" />— Ils sont armés<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
+class="newline" />— Ne les laissez pas s’enfuir<span class="frenchb-thinspace"> </span>! <br
+class="newline" />— Mais d’où viennent-ils<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
+<!--l. 905--><p class="indent" > Ses deux amis occupaient toute la largeur du couloir, et il pouvait
+difficilement leur prêter main-forte. Il rangea rapidement ses lames, inutiles,
+et sortit une dague de lancer. Mais viser correctement risquait d’être
+compliqué...<br
+class="newline" />— Farl<span class="frenchb-thinspace"> </span>! cria Uhr entre deux coups d’épée. Repli<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
+class="newline" />Il connaissait trop bien son compagnon pour douter de la pertinence de son
+ordre. Il sortit de l’une de ses poches de sa tunique une fumigène, qu’il
+lança à leurs pieds en criant.<br
+class="newline" />— Attention<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
+class="newline" />Un nuage opaque obscurcit brusquement la lumière venant de l’autre
+extrémité. Il vit volte-face et courut vers l’entrée, où Sam s’était relevée en
+entendant le bruit et scrutait le tunnel d’un air inquiet.<br
+class="newline" />— Aux chevaux<span class="frenchb-thinspace"> </span>! lui cria-t-il.
+<!--l. 912--><p class="indent" > Juste avant de bondir dans la lumière extérieure, Farl jeta un œil
+derrière lui. Uhr courait, sortant du nuage de poussière, tirant par
+le bras un Zach qui se couvrait les yeux de la main. Il n’avait pas
+eu le temps de le prévenir de l’effet de la fumigène évidemment...
+Il rejoignit en quelques bonds Sam, et ils se plaquèrent contre un
+rocher en contrebas pour reprendre leur souffle en attendant les deux
+autres.
+<!--l. 914--><p class="indent" > Au même instant, Uhr jaillit hors du tunnel, sautant par dessus les
+arbustes, et traînant toujours Zach qui semblait péniblement reprendre ses
+esprits, mais qui heureusement suivait son compagnon sans poser de
+questions. À peine quelques secondes derrière eux, leurs adversaires sortirent
+eux aussi.
+<!--l. 916--><p class="indent" > Sur le seuil de la grotte, deux silhouettes. La première était celle d’un
+homme d’une haute stature, une épée longue à la main. La seconde était
+celle d’une femme aux cheveux courts, protégée par une épaisse armure de
+cuir noir et qui tenait un bâton à la main. Ses yeux se mirent soudain à
+
+
+luire et la lumière sembla se concentrer autour de son bâton. Farl
+concentra sa prise sur sa dague, regrettant qu’il n’ait pas décidé de
+l’empoisonner...<br
+class="newline" />— Attention<span class="frenchb-thinspace"> </span>! hurla Sam.
+<!--l. 919--><p class="noindent" ><span
+class="ecti-1095">Uhr</span>
+<!--l. 921--><p class="indent" > Uhr tourna la tête en entendant le cri de Sam, pour voir un jet de
+lumière orangé et blanc jaillir depuis l’entrée de la grotte, dans leur
+direction. Il eut à peine le temps de lâcher le bras de Zach pour sauter sur le
+côté gauche. Celui-ci, qui entretemps avait récupéré l’usage de ses yeux,
+s’écarta sur la droite, mais pas assez vite.
+<!--l. 923--><p class="indent" > Le trait incandescent toucha Zach au milieu du dos, dans un
+horrible bruit de cuir et de chair brûlés. Celui-ci poussa un cri et tomba
+à genoux. Le trait de lumière ondulait toujours autour d’eux, tel
+un fouet de lumière brûlante. Uhr se retourna, saisit Zach d’une
+main, le chargea sur son épaule et tout en reculant, plaça son épée
+entre eux et l’étrange serpent de lumière, prêt à parer un éventuel
+coup.
+<!--l. 925--><p class="indent" > Le filament de lumière s’enroula brusquement autour de l’épée, et le
+métal de la lame devint rouge. Uhr recula –encore quelques mètres et il
+serait derrière un rocher– alors que le « fouet » s’élançait de nouveau en
+l’air. La chaleur transmise à son arme commençait à lui chauffer la main,
+malgré la protection de la poignée de son épée. Quand bien même il
+arriverait à parer un troisième coup, il ne pourrait probablement plus tenir
+son arme...
+<!--l. 927--><p class="indent" > Mais le troisième coup ne vint pas. À la place, la lanceuse de sort poussa
+un cri et s’effondra, soutenue par l’homme qui était à ses côtés. Il était
+difficile de bien distinguer à cette distance, mais il lui semblait voir un petit
+objet métallique planté dans son cou, laissé découvert par son épaisse
+armure. Farl.
+<!--l. 929--><p class="indent" > Il rejoignit rapidement Sam, qui avait dévalé le massif montagneux.
+Semblant sortir du décor, comme à son habitude, le jeune ménestrel
+assassin se mit à courir à ses côtés.
+
+
+<!--l. 931--><p class="noindent" ><span
+class="ecti-1095">Sam</span>
+<!--l. 933--><p class="indent" > Sam ne comprenait pas vraiment tout ce qui s’était passé, sauf une
+chose bien claire, c’était qu’il fallait fuir. Elle ne perdit pas de temps en
+questions, et arrivée la première, elle se hâta de détacher tous les chevaux
+et de monter en selle. Farl et Uhr la suivaient de près, soutenant Zach, qui
+semblait à demi-conscient, le visage crispé par la douleur. Au moins il est
+vivant, pensa-t-elle avec un frisson.<br
+class="newline" />— Tu vas pouvoir monter à cheval<span class="frenchb-thinspace"> </span>? lui demanda Farl.<br
+class="newline" />— Je pense que ça ira... répondit-il faiblement.
+<!--l. 937--><p class="indent" > Uhr le hissa sur sa monture, puis les deux hommes montèrent en
+selle.<br
+class="newline" />— Je crois qu’ils ont lancé quelqu’un à notre poursuite, ne traînons pas,
+cria Farl.<br
+class="newline" />— Allez vite vers le gué, je vous couvre, répondit-elle tranquillement.
+<!--l. 941--><p class="indent" > Elle ferma les yeux un instant. Juste un petit brouillard, une petite
+brume locale pour couvrir leur fuite... elle venait d’invoquer un charme
+extrêmement puissant, mais si elle pouvait avoir encore un tout petit peu de
+grâce divine pour ça...
+<!--l. 943--><p class="indent" > Elle pouvait entendre le bruit du galop des chevaux, et déjà, des cris de
+rage puis de surprise venant de l’autre direction. Elle ouvrit les yeux, et ne
+vit que du blanc à quelques mètres autour d’elle. Elle eut un sourire satisait
+et lança sa monture au galop pour rejoindre les autres. Un peu plus et
+elle-même les perdait de vue...
+<!--l. 945--><p class="noindent" ><span
+class="ecti-1095">Farl</span>
+<!--l. 947--><p class="indent" > Il fermait la marche avec Sam. Il était difficile de savoir si on les
+poursuivait avec le bruit du galop des chevaux, mais quelques cris au loin ne
+lui donnaient pas beaucoup d’espoirs. Pourtant, si leurs poursuivants avaient
+des chevaux, il leur faudrait probablement un peu de temps pour les faire
+passer par le passage et descendre le massif... à moins qu’ils n’aient une
+autre solution<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
+<!--l. 949--><p class="indent" > Devant lui, Zach s’était courbé sur sa monture, qui ralentissait. Sam
+le vit, et lui fit un signe. Elle accéléra, et arrivée à la hauteur du
+
+
+blessé, lui murmura quelque chose et attrapa ses rênes. Guidant son
+cheval d’une main et celui de Zach de l’autre, elle leur fit aisément
+rattraper leur retard. C’est vrai que Sam avait appris l’équitation avec
+Uhr, qui était un des meilleurs cavaliers qu’il connaissait... et c’était
+heureux.
+<!--l. 951--><p class="indent" > Après une course effrénée qui lui sembla durer un siècle, Uhr leur fit
+signe de ralentir. Ils étaient sortis du brouillard depuis bien longtemps, et ils
+n’entendaient que les bruits de la forêt autour d’eux.<br
+class="newline" />— Inutile de tuer les chevaux. On va continuer plus lentement, en cherchant
+plutôt à masquer nos traces.<br
+class="newline" />— On retourne en ville<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Ils ne vont pas nous y trouver<span class="frenchb-thinspace"> </span>? s’inquiéta
+Sam.<br
+class="newline" />— Si. Mais il sera plus compliqué de nous trouver ou d’agir là-bas qu’au
+milieu de la forêt.
+<!--l. 956--><p class="indent" > Ils se remirent en route au pas. Ils coupèrent d’abord tout droit en
+direction du village d’où venait Zach, puis changèrent plusieurs fois de
+direction pour brouiller les pistes. Ils marchèrent ensuite dans un petit
+ruisseau pendant un moment. L’eau glacée rafraîchissait les jarrets brûlants
+des chevaux, tout en ne laissant aucune trace derrière eux. Malgré toutes
+ces précautions, Farl passa le reste du trajet à surveiller le moindre bruit
+suspect derrière lui.
+<!--l. 958--><p class="indent" > Le soir arriva, rien ne s’était passé. Zach était de plus en plus pâle et
+s’était contenté, durant le trajet, d’enrouler la crinière de son cheval dans
+ses mains pour ne pas tomber. Il fallut le soutenir pour qu’il ne s’effondre
+pas en descendant.<br
+class="newline" />— On mange un morceau et on souffle quatre ou cinq heures pas plus,
+ordonna Uhr en sortant du matériel des sacoches.<br
+class="newline" />— N’est-ce pas risqué de s’arrêter quand même<span class="frenchb-thinspace"> </span>? interrogea Sam.<br
+class="newline" />— Les chevaux sont épuisés, inutile de les tuer, nous en avons besoin pour
+continuer demain, répondit-il en secouant la tête.<br
+class="newline" />— On va monter la garde je suppose<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Pas de feu<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— C’est ça. Essayez quand même de dormir un peu, ça ne serait pas inutile.
+Comment va Zach<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
+<!--l. 965--><p class="indent" > Farl, de son côté, avait aidé le guide à s’asseoir et avait commencé à
+
+
+dégager son dos. La brûlure formait un trait courbe partant de son flanc
+gauche vers le milieu du dos, dessinant un arc qui s’enroulait. Il parvint à
+dénouer son armure de cuir, sérieusement noircie, mais il dut déchirer sa
+tunique pour dégager la plaie.<br
+class="newline" />— Pas terrible, répondit-il. Tu peux faire quelque chose<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
+<!--l. 968--><p class="indent" > Ils nettoyèrent la blessure avec ce qu’ils avaient, mais Uhr, qui avait
+appris à recoudre les plaies ouvertes et poser des attelles, ne pouvait rien
+pour une telle brûlure. Il se contenta d’appliquer un baume et un bandage
+pour le protéger. Puis ils mangèrent leurs quelques provisions tout en
+faisant le point.<br
+class="newline" />— Si tout se passe bien, nous devrions sortir de la forêt demain en début de
+matinée, commença Uhr.<br
+class="newline" />— Et ensuite, que fait-on<span class="frenchb-thinspace"> </span>? On ne peut pas laisser Zach dans cet état, ajouta
+Farl. C’est à cause de nous qu’il est comme ça...<br
+class="newline" />Il lança un regard à son compagnon. Il avait réussi à manger un peu, et
+s’était allongé sur le ventre, pâle mais conscient.<br
+class="newline" />— Les médecins sont-ils bons, dans ce pays<span class="frenchb-thinspace"> </span>? demanda Sam.<br
+class="newline" />— Tu veux vraiment montrer une brûlure comme celle-ci à un médecin<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Il
+faudrait lui expliquer d’où elle vient...<br
+class="newline" />— Et je doute qu’il puisse faire des miracles de toutes façons, coupa Uhr.
+Ce qu’il lui faut, si on ne veut pas que cette blessure mette des semaines,
+voire des mois, à guérir, c’est un mage soigneur.<br
+class="newline" />— Il n’y a qu’à la capitale qu’on peut trouver ça, et le trajet est beaucoup
+trop long, non<span class="frenchb-thinspace"> </span>? ajouta Farl.<br
+class="newline" />— Cela ferait d’une pierre deux coups<span class="frenchb-nbsp"> </span>: il faut absolument qu’on
+rapporte au capitaine Mazrok tout ce que nous avons vu, fit remarquer
+Uhr.<br
+class="newline" />— Tu n’y penses pas... Le trajet est long, dangereux, et pénible pour un
+blessé... D’autant plus dangereux avec tout ce que nous avons à raconter,
+objecta Farl.<br
+class="newline" />— Que veux-tu faire d’autre<span class="frenchb-thinspace"> </span>? demanda Sam, un peu énervée. Trouve donc
+un soigneur efficace dans la région<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
+class="newline" />— Il y a Sélène...
+<!--l. 981--><p class="indent" > Ils se retournèrent vers Zach, qui avait ouvert les yeux et s’était redressé
+sur son coude en grimaçant.<br
+class="newline" />— Tiens, tu as tout suivi<span class="frenchb-thinspace"> </span>? lui demanda Farl.<br
+class="newline" />Il hocha la tête. Il était toujours aussi pâle. Les trois autres échangèrent un
+regard, puis se tournèrent à nouveau vers lui.<br
+class="newline" />— Où est-elle<span class="frenchb-thinspace"> </span>? demanda Farl.<br
+class="newline" />— Elle est partie avec le paladin, Irdann. Au château de son père, le
+seigneur Assem. Je ne sais pas si elle y est toujours... Elle devait partir pour
+le fameux tournoi, ou peut-être pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Je ne sais plus...<br
+class="newline" />— Mais peut-on lui faire vraiment confiance<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Si elle est de mèche avec nos
+adversaires, c’est se jeter droit dans leurs griffes...<br
+class="newline" />— Je suis prêt à prendre le risque, au point où j’en suis, coupa Zach. Et n’y
+allez pas avec moi, inutile de risquer de vous compromettre.<br
+class="newline" />Sam regarda alternativement le blessé et Farl puis leva les yeux au ciel. Soit
+Zach était vraiment mal au point, soit il était vraiment accro à cette fille...
+Peut-être les deux.<br
+class="newline" />— C’est bien beau, répliqua Sam, mais tu ne vas pas aller frapper à la
+porte du château du seigneur, « Bonjour, je suis un de vos fidèles
+sujets et je suis blessé. Pouvez-vous laisser votre fille magicienne me
+soigner<span class="frenchb-thinspace"> </span>? ».<br
+class="newline" />Zach soupira et s’apprêta à répondre. Mais Uhr l’en empêcha.<br
+class="newline" />— J’ai une meilleure idée dans un premier temps, sans prendre de risque ni
+pour nous ni pour Zach<span class="frenchb-nbsp"> </span>: tenter de contacter Irdann. Il a côtoyé Sélène
+pendant un petit moment, et si besoin il pourra peut-être nous mettre
+en contact avec elle. Au pire, il nous conseillera, il connaît bien
+le coin, et il est le fils d’un des seigneurs les plus puissants de la
+région. Et personne ici ne doute de sa loyauté envers nous, n’est-ce
+pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Ils hochèrent la tête. C’était probablement l’idée la plus raisonnable pour le
+moment... Il ne put s’empêcher de remarquer une légère moue de la part du
+blessé. Était-ce la douleur ou un doute<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
+<!--l. 994--><p class="indent" > Farl se porta volontaire pour la première garde. Alors que Sam et
+Uhr s’étaient endormis, épuisés, Zach ne semblait pas trouver le
+sommeil.<br
+class="newline" />— Ça va<span class="frenchb-thinspace"> </span>? lui demanda-t-il.<br
+class="newline" />— J’ai connu mieux, murmura-t-il.<br
+class="newline" />— Je suis vraiment désolé... J’aurais dû réagir plus vite, et t’éviter ce coup
+
+
+en lançant mon arme plus tôt...<br
+class="newline" />— Peut-être... ou peut-être qu’elle t’aurait vu et t’aurait visé à ma
+place<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
+<!--l. 1000--><p class="indent" > Ils se turent quelques instants.<br
+class="newline" />— Tu peux être persuadé d’une chose, Zach, nous ne sommes pas du genre
+à abandonner nos compagnons. Nous allons faire tout ce que nous pouvons
+pour que tu sois sur pied au plus vite, et en sécurité. Essaie de dormir
+quelques heurs déjà...<br
+class="newline" />— Difficile...
+<!--l. 1004--><p class="indent" > Farl se leva, fouilla dans les sacoches et en sortit un petit sachet de
+poudre, qu’il dilua dans un peu d’eau dans le fond d’une gourde.<br
+class="newline" />— Bois ça. Ça te fera dormir et calmera ta douleur pour un temps.<br
+class="newline" />— Euh, c’est quoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Un poison d’assassin<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Parfois, les assassins ont besoin de neutraliser quelqu’un en le gardant
+vivant, répondit-il en souriant.<br
+class="newline" />— Hm... Je ne sais pas si ça doit me rassurer ou m’inquiéter.
+<!--l. 1010--><p class="indent" > Il but néanmoins le contenu de la gourde, et quelques minutes plus tard,
+tout le camp hormis Farl dormait profondément.
+ <center class="par-math-display" >
+<img
+src="aventuriers11x.png" alt="[
+" class="par-math-display" ></center>
+<!--l. 3--><p class="nopar" >
+<!--l. 5--><p class="noindent" ><span
+class="ecti-1095">Uhr</span>
+<!--l. 7--><p class="noindent" >— Le sieur Irdann est encore ici, mais non il ne vous est pas possible de le
+voir, indiqua le garde avec fermeté.<br
+class="newline" />— Mais pourquoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>? demanda Uhr.<br
+class="newline" />— Il ne reçoit pas de visiteurs. De plus, il est en grands préparatifs de
+départ et ne souhaite pas être dérangé.<br
+class="newline" />— De départ pour où<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Le garde se mit à rire.<br
+class="newline" />— Comment, vous ne savez pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Dame Sélène et lui partent demain, à
+
+
+l’aube, pour le duché De Vane. Il fait partie de son escorte... <br
+class="newline" />— Je vous en prie, je dois absolument lui parler<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Dites-lui mon nom, et il me
+fera entrer...<br
+class="newline" />L’homme secoua la tête.<br
+class="newline" />— Je respecte les ordres de mes maîtres.<br
+class="newline" />— Ne peut-on pas s’arranger<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Vous ne devez pas être très bien payé, à
+garder l’entrée du château.<br
+class="newline" />— Je suis loyal à mon seigneur, et je ne mange pas de ce pain-là,
+monsieur.<br
+class="newline" />— Vous faites bien. Pardonnez moi. Au revoir et bonne garde.
+<!--l. 20--><p class="indent" > Uhr soupira et lui tourna le dos. Pour une fois qu’il regrettait d’avoir
+affaire à un garde vraiment honnête... Il ne pouvait pas lui en vouloir. Il fit
+demi-tour, réfléchissant à comment contacter Irdann avant qu’il ne quitte la
+région. Ou peut-être pouvait-il lui parler en chemin<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Sam lui avait dit
+qu’elle ne pouvait plus invoquer d’enchantement puissant avant quelques
+jours, et son prochain rêve était de toutes façons destiné à informer le
+capitaine de leurs aventures...
+<!--l. 22--><p class="noindent" >— Attendez<span class="frenchb-thinspace"> </span>!<br
+class="newline" />Il se retourna en entendant la voix du garde.<br
+class="newline" />— Si vous tenez vraiment à contacter le sieur Irdann, et s’il est vraiment
+votre ami...<br
+class="newline" />— Oui<span class="frenchb-thinspace"> </span>? <br
+class="newline" />— Je peux peut-être lui faire parvenir un mot de votre part.<br
+class="newline" />— Vraiment<span class="frenchb-thinspace"> </span>? demanda Uhr, avec une lueur d’espoir dans les yeux.<br
+class="newline" />— Je ne crois pas que ce soit défendu. Mais ce ne sera pas avant trois
+heures, quand je suis relevé de ma garde.<br
+class="newline" />— Ce serait formidable, comment vous en remercier<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Hé bien, puisque vous le dites, dit le garde avec un air un peu gêné,
+j’aimerais que vous me rendiez un petit service en échange.<br
+class="newline" />Uhr se rapprocha de lui. Le même garde qui ne « mangeait pas de ce
+pain-là » il y a quelques instants... Comme s’il devinait sa pensée, l’homme
+éclata de rire.<br
+class="newline" />— Ha, qu’allez-vous imaginer<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Je vous ai dit que j’étais loyal à mon maître.
+Absolument rien d’illégal, d’immoral ou de dangereux<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Êtes-vous libre ce
+soir<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
+
+
+<!--l. 34--><p class="noindent" ><span
+class="ecti-1095">Irdann</span>
+<!--l. 43--><p class="indent" > <span
+class="ecti-1095">Cher Irdann,</span>
+<!--l. 43--><p class="indent" > <span
+class="ecti-1095">J’esp</span><span
+class="ecti-1095">ère que cette lettre va te parvenir </span><span
+class="ecti-1095">à temps.</span>
+<!--l. 43--><p class="indent" > <span
+class="ecti-1095">Je suis en ville actuellement, avec quelques compagnons. Il est trop long</span>
+<span
+class="ecti-1095">et dangereux de t’expliquer sur ce papier pourquoi et comment, toujours</span>
+<span
+class="ecti-1095">est-il que nous avons besoin de ton conseil et </span><span
+class="ecti-1095">éventuellement de ton secours.</span>
+<span
+class="ecti-1095">Un de nos compagnons, un jeune guide de la r</span><span
+class="ecti-1095">égion que tu sembles</span>
+<span
+class="ecti-1095">conna</span><span
+class="ecti-1095">ître, est gravement bless</span><span
+class="ecti-1095">é. Peux tu nous trouver, ce soir, </span><span
+class="ecti-1095">à l’auberge du</span>
+<span
+class="ecti-1095">Taureau </span><span
+class="ecti-1095">à une corne</span><span class="frenchb-thinspace"> </span><span
+class="ecti-1095">? Que tu viennes toi ou que tu envoies quelqu’un de</span>
+<span
+class="ecti-1095">confiance, il est imp</span><span
+class="ecti-1095">ératif que tout cela se fasse dans la plus grande</span>
+<span
+class="ecti-1095">discr</span><span
+class="ecti-1095">étion. Je t’expliquerai.</span>
+ <div class="flushright"
+>
+<!--l. 43--><p class="noindent" >
+ <span
+class="ecti-1095">Ton ami,</span><br />
+<span
+class="ecti-1095">Uhr </span></div>
+<!--l. 45--><p class="indent" > Assis sur le lit de la chambre –petite mais confortable– qui lui
+avait été attribué, il relisait la lettre, qu’un de ses gardes lui avait
+apporté il y a une heure, essayant de comprendre. Que faisait Uhr
+ici<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Quelles étaient ces histoires qui demandaient de la discrétion<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
+Le bruit de quelqu’un frappant à la porte l’interrompit dans ses
+pensées.<br
+class="newline" />— Irdann<span class="frenchb-thinspace"> </span>? demanda la voix de Sélène.<br
+class="newline" />Il courut lui ouvrir. La jeune femme entra dans la pièce, vêtue d’une longue
+robe violette. Ses manches amples s’arrêtaient aux coudes, par dessus
+d’autres manches crème aux bordures dorées. Le bas était fendu sur les
+côtés, s’ouvrant sur un long jupon de couleur crème, et une ceinture
+ouvragée soulignait sa taille.<br
+class="newline" />— Tu voulais me voir<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Pour toute réponse, il lui tendit le morceau de papier, tout en fermant
+soigneusement la porte derrière lui.
+<!--l. 51--><p class="indent" > Sélène lut la lettre une première fois en fronçant les sourcils.<br
+class="newline" />— Je ne comprends pas pourquoi tu me montres tout ça... Je ne connais pas
+
+
+ce Uhr et...<br
+class="newline" />Elle s’interrompit et relut un passage.<br
+class="newline" />— Attends, qu’est-ce qu’il veut dire par « un jeune guide de la région que tu
+sembles connaître »<span class="frenchb-thinspace"> </span>? De qui parle-t-il<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Il parle probablement de Zach... Je ne vois pas quel autre jeune guide je
+suis censé connaître dans le coin.<br
+class="newline" />— Le message dit qu’il est blessé<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Comment<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Et qui est ce Uhr à la
+fin<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Uhr est un ami que j’ai rencontré à la capitale, lorsque j’étais à la garde
+du palais, avec Silwë entre autres.<br
+class="newline" />— Mais que fait-il ici<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Qu’a-t-il à voir avec Zach<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Ça, je l’ignore. La dernière fois que je l’ai vu, il était toujours à la
+garde, il avait même obtenu une promotion intéressante, et il s’était
+installé en ville avec sa... femme, qui est fleuriste. Je ne sais pas ce
+qu’il peut être venu faire dans la région. Quand au rapport avec
+Zach...<br
+class="newline" />Il espérait qu’elle ne remarque pas son hésitation, mais vraisemblablement
+Sélène se préoccupait peu de ces détails pour l’instant. Il reprit.<br
+class="newline" />— ... Comme toi, d’autres gens peuvent avoir besoin d’un guide,
+non<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Sélène haussa les épaules et attendit quelques instants avant de répondre.
+Comme si elle se rappelait soudainement la raison initiale pour laquelle elle
+s’était mise en contact avec Zach.<br
+class="newline" />— Admettons. Que fait-on alors<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Si je n’avais pas entièrement confiance en Uhr, je dirais que c’est un
+piège plutôt mal monté.<br
+class="newline" />Elle fronça les sourcils.<br
+class="newline" />— Tu es sûr que c’est lui, au moins<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Oui. Je reconnais son écriture, et sa façon assez inimitable de signer. De
+plus, la description que m’en a fait le garde qui m’a apportée ce message
+correspond.<br
+class="newline" />— Tu veux y aller alors<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Évidemment. Je ne sais pas encore comment, par contre.<br
+class="newline" />— Et tu feras quoi une fois auprès de lui<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Je verrai, je suppose. Pourquoi, demanda-t-il, tu vois autre chose<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
+
+
+<!--l. 73--><p class="indent" > Sélène fit quelque pas et le fixa droit dans les yeux.<br
+class="newline" />— Je peux y aller à ta place.<br
+class="newline" />— Quoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Il se tut quelques instants, surpris. Elle en profita pour continuer.<br
+class="newline" />— Le mot ne précise-t-il pas que tu peux envoyer quelqu’un de confiance à
+ta place<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Et puis tu ne peux pas faire grand chose pour Zach, s’il est
+vraiment blessé. Moi oui.<br
+class="newline" />— Tu marques un point, admit-il.<br
+class="newline" />Elle afficha un petit sourire de victoire et s’assit sur une chaise en face de
+lui.<br
+class="newline" />— Mais... cela reste très risqué. Tu comptes utiliser ta... magie pour l’aider<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
+objecta-t-il.<br
+class="newline" />Il avait malgré lui prononcé le mot « magie » un peu plus bas que les
+autres, comme s’il craignait que malgré l’épaisseur des murs, on puisse
+l’entendre.<br
+class="newline" />— C’est mon problème. D’abord je n’ai pas que mes sorts, ensuite Zach
+connaît déjà mon secret.<br
+class="newline" />— Et si c’était un piège<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Ce n’est pas toi qui disais que tu étais sûr de l’origine de la lettre<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Je fais confiance à Uhr, y compris pour assurer ta sécurité s’il le faut,
+mais si quelqu’un t’attendait sur le chemin<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Si ce quelqu’un s’attend à te voir toi, cela peut le contrarier de ne pas
+te voir arriver. Voire mieux, il peut ne même pas faire attention à
+moi...
+<!--l. 88--><p class="indent" > Il fit une moue en s’asseyant sur le lit.<br
+class="newline" />— Il reste le « comment ». Comment tu comptes sortir incognito du
+château, comment tu vas te rendre là-bas, ...<br
+class="newline" />Elle savait qu’elle était en train, petit à petit de le convaincre. Elle
+sourit.<br
+class="newline" />— Ça, c’est la partie facile.<br
+class="newline" />— Vraiment, demanda-t-il en fronçant les sourcils.<br
+class="newline" />Elle se leva.<br
+class="newline" />— Allons Irdann, comme moi, tu as grandi dans ce genre de place forte
+n’est-ce pas<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Conçue à la base pour résister à une armée d’assaillants...<br
+class="newline" />— Oui, c’est bien la raison pour laquelle il est à la fois difficile d’y entrer et
+
+
+d’en sortir. <br
+class="newline" />— Mais ne me dis pas que, au château du duc De Vane, il n’y a pas, quelque
+part, un souterrain qui, en temps de guerre, permettait de se sauver si tout
+espoir était perdu...<br
+class="newline" />— Si, admit-il. De mémoire, mon père l’avait fait murer parce qu’il
+était devenu inutile en cette période de paix, et qu’il menaçait de
+s’effondrer.<br
+class="newline" />En fait, maintenant qu’il y réfléchissait, il était bien possible qu’il ne
+s’agisse que de la version officielle... Sélène reprit, interrompant ses
+réflexions.<br
+class="newline" />— Ici, une partie de ce passage a été réhabilitée, et une sortie a été
+aménagée en ville pour que les serviteurs puissent faire facilement des allers
+et retours au gré des besoins.<br
+class="newline" />— Et cette sortie est gardée<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Un seul garde, qui ne peut pas connaître tout le personnel, et qui ne
+saura pas que c’est moi évidemment.<br
+class="newline" />— Tu en es sûre<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Elle haussa les épaules.<br
+class="newline" />— J’ai été absente durant plusieurs années, et mon visage a été un peu
+oublié. Et habillée en sage servante qui sort visiter sa mère en ville, je doute
+qu’on me pose beaucoup de questions.<br
+class="newline" />— Laisse-moi t’accompagner, au moins. Je peux aussi m’habiller de manière
+modeste, et assurer ta sécurité.<br
+class="newline" />— Ce serait l’idéal, en effet.<br
+class="newline" />— Il reste à voir comment nous allons masquer notre absence. Y a-t-il des
+serviteurs en qui tu as suffisamment confiance<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Elle fit la moue.<br
+class="newline" />— Pas trop, justement, puisque je suis restée éloignée trop longtemps...
+<br
+class="newline" />Elle fit quelques pas dans la pièce en réfléchissant.<br
+class="newline" />— En fait, le seul moyen que je voie, c’est que tu couvres mon absence, et
+donc que tu restes ici.<br
+class="newline" />— Pardon<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Je n’ai qu’à faire croire que je suis avec toi, ici. Ta chambre n’est pas très
+loin des cuisines, d’où je pourrai facilement rejoindre la sortie sans être
+
+
+remarquée.<br
+class="newline" />Irdann rougit soudainement.<br
+class="newline" />— Mais tout le monde va croire que nous...<br
+class="newline" />Elle pouffa de rire.<br
+class="newline" />— Tout le monde en est déjà persuadé, ça ne changera pas grand chose.
+En plus, c’est l’excuse parfaite pour refuser qu’on ouvre la porte,
+non<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Certes...<br
+class="newline" />— Bon, le repas de ce soir ne va pas tarder à être servi, on se retrouve ici
+après<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Tu veux y aller ce soir<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— On doit partir demain, ça va être compliqué de trouver une excuse pour
+rester un jour de plus...<br
+class="newline" />— Tu auras le temps de trouver des vêtements adaptés<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Je me débrouille, ne t’inquiète pas.
+<!--l. 125--><p class="indent" > Lorsqu’elle fut sortie, Irdann resta quelques instants seul à réfléchir, un
+peu abasourdi par la tournure qu’avaient pris les événements. Il
+n’aurait peut-être pas dû montrer la lettre à Sélène après tout... Mais
+il reconnaissait qu’en effet, s’il fallait soigner un blessé, elle était
+probablement la plus compétente. Surtout s’il s’agissait de Zach... Mais tout
+de même, et même si elle avait su montrer qu’elle avait plus de sang-froid et
+de ressources que beaucoup d’autres jeunes femmes, il ne pouvait
+s’empêcher de craindre pour sa sécurité. Si au moins il pouvait lui donner
+un moyen de défense... Mais il n’avait que ses épées, et qu’en ferait-elle de
+toutes façons<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
+<!--l. 127--><p class="noindent" ><span
+class="ecti-1095">S</span><span
+class="ecti-1095">él</span><span
+class="ecti-1095">ène</span>
+<!--l. 129--><p class="indent" > Sélène quitta sa chambre une vingtaines de minutes après le dîner. Elle
+avait emprunté quelques vêtements à sa femme de chambre, qui logeait
+juste à côté. Si elle lui ramenait le lendemain, celle-ci ne s’en rendrait
+probablement même pas compte... Au pire elle inventerait une excuse
+quelconque.
+<!--l. 131--><p class="indent" > En sortant, elle croisa la servante en question, et lorsqu’elle lui expliqua
+où elle allait, la jeune femme lui adressa un regard à la fois complice et
+
+
+envieux. C’est vrai que le jeune et élégant paladin avait déclenché de
+nombreux sourires admiratifs parmi le personnel féminin, et elle connaissait
+plus d’un homme qui en aurait abondamment profité. Irdann ne semblait
+pas les voir, ou peut-être était-il suffisamment malin pour tirer parti de la
+situation en toute discrétion, qui sait<span class="frenchb-thinspace"> </span>?
+<!--l. 133--><p class="indent" > Zach, lui, aurait été du genre à en profiter, c’est sûr. D’ailleurs, depuis le
+temps qu’il était guide, combien de voyageuses avaient fini dans ses bras<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Et
+dire que vis-à-vis d’elle il n’osait pas assumer grand-chose... Quel idiot,
+vraiment. Il était bien courageux quand il fallait affronter des bandits ou
+des monstres, mais devant elle...
+<!--l. 135--><p class="indent" > Elle secoua la tête. Comment pouvait-elle médire de lui comme cela,
+alors que d’après la lettre adressée à Irdann, il était gravement blessé<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Et
+blessé comment, à quel point, pourquoi<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Et s’il ne tenait pas le coup jusqu’à
+ce qu’elle arrive<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Elle chassa aussitôt cette pensée terrible, et frappa à la
+porte de la chambre d’Irdann.<br
+class="newline" />— Ah, tu es là. Tu as tout ce qu’il faut<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />Elle montra sa sacoche en entrant dans la pièce.<br
+class="newline" />— J’ai là dedans tout un tas de remèdes, et une robe de servante.<br
+class="newline" />— Personne ne t’a posé de questions dessus<span class="frenchb-thinspace"> </span>? demanda-t-il en fronçant les
+sourcils.<br
+class="newline" />— Les serviteurs sont vraisemblablement bien plus intéressés par les ragots
+que par ça, répondit-elle en souriant.
+<!--l. 142--><p class="indent" > Elle commença à se préparer, tandis qu’Irdann, le dos tourné, lui
+donnait quelques instructions.<br
+class="newline" />— Tu reconnaîtras Uhr facilement. C’est un grand gaillard, au teint pâle,
+aux cheveux châtains bouclés et à la carrure impressionnante.<br
+class="newline" />— Ce n’est pas courant, comme nom... d’où vient-il<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Il est originaire des plaines barbares. Mais ne te fie pas à son air de brute
+épaisse, il est aussi stupide que Silwë ou Aldariel sont inoffensives... si tu
+vois que je veux dire.<br
+class="newline" />— J’imagine oui. Il n’est pas censé avoir des « compagnons »<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Aucune idée de qui il peut s’agir. Tout dépend de la raison pour laquelle
+il est ici.<br
+class="newline" />— Il est censé t’attendre, ou attendre de tes nouvelles. Si je dis que je viens
+
+
+de ta part il devrait me faire confiance non<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Probable. Je ne sais pas jusqu’à quel point, mais je suppose qu’il te
+laissera au moins t’occuper de Zach...<br
+class="newline" />— Mais j’espère bien<span class="frenchb-thinspace"> </span>! Sinon pourquoi en aurait-il parlé dans sa lettre<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Je pensais plutôt au fait qu’il ne sait pas qui tu es et ce dont tu es
+capable...<br
+class="newline" />— C’est vrai. Peut-être que Zach pourra parler en ma faveur<span class="frenchb-thinspace"> </span>? Enfin, s’il est
+conscient...<br
+class="newline" />Irdann haussa les épaules, toujours tourné vers le mur.<br
+class="newline" />— Sinon, il te faudra le convaincre. Puisque je suppose que tu n’as pas
+l’intention de tout lui expliquer.<br
+class="newline" />— Évidemment que non. Ça va pas la tête<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Pense alors à trouver une explication, si ton moribond se met à sauter de
+son lit après quelques minutes de soin.<br
+class="newline" />— ... En effet.<br
+class="newline" />— Dans tous les cas, garde en tête le fait qu’il vient de la capitale. Tu dois
+le savoir encore mieux que moi, les mages soigneurs y ont pignon sur rue,
+et même lui a déjà eu affaire à eux... Il sait parfaitement ce que
+c’est.<br
+class="newline" />— Tu peux te retourner.
+<!--l. 161--><p class="indent" > Elle avait enfilé une robe à bretelles marron foncé par dessus une
+chemise de lin blanche –du moins qui avait été blanche à un moment donné.
+À ses pieds, elle avait mis les bottines qu’elle avait gardées après son
+escapade dans la forêt, et qui allaient très bien avec son déguisement. Pour
+parfaire le tout, et en guise de manteau, elle avait couvert sa tête et ses
+épaules d’un long châle de laine grise.<br
+class="newline" />— Alors<span class="frenchb-thinspace"> </span>?<br
+class="newline" />— Impeccable, répondit-il en souriant.<br
+class="newline" />— Bon, je vais me mettre en route... Je pense que c’est le bon moment,
+dit-elle en réajustant sa sacoche.<br
+class="newline" />Irdann la raccompagna jusqu’à la porte.<br
+class="newline" />— Promets-moi de ne prendre aucun risque, lui murmura-t-il. S’il t’arrivait
+quelque chose, je ne me le pardonnerais jamais...
+<!--l. 168--><p class="noindent" ><span
+class="ecti-1095">Uhr</span>