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"content": "<p>Pour un sommet sur les réfugiés qui devait se concentrer sur des <em>«mesures opérationnelles immédiates»</em> dans les Balkans, la réunion, dimanche à Bruxelles, de 11 chefs d’Etat et de gouvernement, dont 8 Européens, a été agitée. Dès leur arrivée, Viktor Orbán (Hongrie) et Aléxis Tsípras (Grèce) se sont jeté des anathèmes. Le Premier ministre grec a dénoncé l’attitude <em>«not in my backyard»</em> (pas de ça chez moi) de certains Etats européens, alors que son pays est montré du doigt par d’autres dirigeants, dont Orbán : ils reprochent à la Grèce de ne pas suffisamment contrôler ses frontières avec la Turquie et ne pas montrer assez de zèle dans l’enregistrement des demandeurs d’asile.</p>\n<p>Le sommet, convoqué par la Commission européenne, sur suggestion de l’Allemagne, aura au moins permis à ces 11 Etats – Autriche, Bulgarie, Croatie, Allemagne, Grèce, Hongrie, Roumanie, Slovénie côté européen, et 3 pays «non UE», Albanie, Macédoine et Serbie – de discuter ensemble.</p>\n<h3>400 policiers européens en Slovénie</h3>\n<p>L’objectif, rappelé par Angela Merkel, était de trouver une <em>«réponse coordonnée»</em> à la crise des réfugiés. Quelques mesures ont été annoncées : 100 000 places d’accueil seront créées, dont 50 000 en Grèce, et le reste le long de la route des Balkans. 400 officiers de police de pays européens partiront en Slovénie, actuellement submergée, pour aider au contrôle des frontières. Frontex, l’agence européenne de surveillance des frontières, s’impliquera aux frontières gréco-macédonienne et gréco-albanaise pour des contrôles et identifications.</p>\n<p>Ce sommet est intervenu dans un contexte de fortes tensions, marqué par des fermetures de frontières bloquant les réfugiés dans des zones tampon. Ces obstacles ont été partiellement levés ces derniers jours, les autorités tentant d’organiser un «corridor» informel vers l’Allemagne, qui pourtant durcit sa politique d’accueil et souhaite désormais ralentir le flux. Mais la situation des réfugiés est catastrophique. L’ONG Human Rights Watch craint que des réfugiés ne meurent dans les Balkans. Des groupes de centaines, voire de milliers de personnes, bloqués près des postes-frontières, se retrouvent dans des conditions humanitaires intenables.</p>\n<p>Depuis mi-septembre, 250 000 personnes ont traversé les Balkans. En une semaine, la Slovénie a vu 60 000 réfugiés fouler le sol de son territoire. Dimanche, 15 000 personnes ont transité en Slovénie.</p>\n<h3>Des zones tampon</h3>\n<p>L’enjeu principal du sommet, aux yeux de nombreux Etats de l’Union européenne, était aussi que les pays des Balkans <em>«prennent leur part»</em> face à la crise : qu’ils accueillent et enregistrent davantage de réfugiés. Ces Etats craignent que l’Autriche ou l’Allemagne ne ferment leurs frontières et fassent de leurs pays des <em>«zones tampon»</em>, comme s’en inquiétait Boyko Borissov, Premier ministre bulgare.</p>\n<p><em>« Aujourd’hui, plusieurs Etats du nord de l’Europe veulent que l’on enregistre les migrants puis que l’on détermine leur éligibilité au statut de réfugié,</em> explique Marc Pierini, du think tank Carnegie Europe. <em>La difficulté, c’est que les gens sont en mouvement. Pour le faire, il faut se poser quelque part. La crainte des pays intermédiaires, donc ceux des Balkans, est qu’on enregistre ces personnes sur leur territoire et qu’ils soient contraints de rester sur leur sol. Donc les pays des Balkans ne sont pas désireux d’accueillir ces réfugiés et ces derniers veulent avancer.»</em></p>\n<p>Le sommet a élaboré quelques principes. L’idée générale est de rendre effective la «logique de hotspot» : un enregistrement des demandeurs d’asile à leur point d’entrée dans l’Union européenne, suivi de l’expulsion de ceux qui ne correspondraient pas aux critères de la Convention de Genève, et la répartition des autres, via le mécanisme de relocalisation.</p>\n<p>Dans ce cadre, l’enregistrement des demandeurs d’asile est un élément clé. <em>«Pas d’enregistrement, pas de droit»</em>, a prévenu le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, dimanche soir. Les Etats ont tenu à rappeler que les migrants qui refusent de demander l’asile à la frontière peuvent se voir refuser l’entrée dans un pays.</p>\n<p>Et les Etats <em>«décourageront les mouvements de réfugiés»</em> de frontière en frontière. La politique consistant à laisser passer les migrants vers un autre pays est officiellement jugée <em>«inacceptable»</em>.</p>\n<h3>Se jeter dans la gueule du loup</h3>\n<p>Voilà pour la théorie. En pratique, la relocalisation ne devrait concerner que 160 000 réfugiés en deux ans, alors que près de 700 000 personnes sont arrivées en Europe depuis le début de l’année. De plus, les Etats ne jouent pas le jeu. La semaine passée, seules 854 places de relocalisation avaient été proposées.</p>\n<p>Dans ce contexte, il est probable que les Etats des Balkans ne s’impliqueront pas outre mesure dans les solutions proposées, craignant de devoir «garder» les réfugiés alors que l’Union européenne tarde à mettre en œuvre leur répartition.</p>\n<p>Quant aux réfugiés, ils préfèrent traverser les frontières par eux-mêmes, plutôt que de se jeter dans ces «hotspots», considérés comme la gueule du loup.</p>\n<a itemprop=\"name\" href=\"http://www.liberation.fr/auteur/15743-cedric-vallet\">Cédric Vallet</a>",
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Le Premier ministre grec a dénoncé l’attitude <em>«not in my backyard»</em> (pas de ça chez moi) de certains Etats européens, alors que son pays est montré du doigt par d’autres dirigeants, dont Orbán : ils reprochent à la Grèce de ne pas suffisamment contrôler ses frontières avec la Turquie et ne pas montrer assez de zèle dans l’enregistrement des demandeurs d’asile.</p>\n<p>Le sommet, convoqué par la Commission européenne, sur suggestion de l’Allemagne, aura au moins permis à ces 11 Etats – Autriche, Bulgarie, Croatie, Allemagne, Grèce, Hongrie, Roumanie, Slovénie côté européen, et 3 pays «non UE», Albanie, Macédoine et Serbie – de discuter ensemble.</p>\n<h3>400 policiers européens en Slovénie</h3>\n<p>L’objectif, rappelé par Angela Merkel, était de trouver une <em>«réponse coordonnée»</em> à la crise des réfugiés. Quelques mesures ont été annoncées : 100 000 places d’accueil seront créées, dont 50 000 en Grèce, et le reste le long de la route des Balkans. 400 officiers de police de pays européens partiront en Slovénie, actuellement submergée, pour aider au contrôle des frontières. Frontex, l’agence européenne de surveillance des frontières, s’impliquera aux frontières gréco-macédonienne et gréco-albanaise pour des contrôles et identifications.</p>\n<p>Ce sommet est intervenu dans un contexte de fortes tensions, marqué par des fermetures de frontières bloquant les réfugiés dans des zones tampon. Ces obstacles ont été partiellement levés ces derniers jours, les autorités tentant d’organiser un «corridor» informel vers l’Allemagne, qui pourtant durcit sa politique d’accueil et souhaite désormais ralentir le flux. Mais la situation des réfugiés est catastrophique. L’ONG Human Rights Watch craint que des réfugiés ne meurent dans les Balkans. Des groupes de centaines, voire de milliers de personnes, bloqués près des postes-frontières, se retrouvent dans des conditions humanitaires intenables.</p>\n<p>Depuis mi-septembre, 250 000 personnes ont traversé les Balkans. En une semaine, la Slovénie a vu 60 000 réfugiés fouler le sol de son territoire. Dimanche, 15 000 personnes ont transité en Slovénie.</p>\n<h3>Des zones tampon</h3>\n<p>L’enjeu principal du sommet, aux yeux de nombreux Etats de l’Union européenne, était aussi que les pays des Balkans <em>«prennent leur part»</em> face à la crise : qu’ils accueillent et enregistrent davantage de réfugiés. Ces Etats craignent que l’Autriche ou l’Allemagne ne ferment leurs frontières et fassent de leurs pays des <em>«zones tampon»</em>, comme s’en inquiétait Boyko Borissov, Premier ministre bulgare.</p>\n<p><em>« Aujourd’hui, plusieurs Etats du nord de l’Europe veulent que l’on enregistre les migrants puis que l’on détermine leur éligibilité au statut de réfugié,</em> explique Marc Pierini, du think tank Carnegie Europe. <em>La difficulté, c’est que les gens sont en mouvement. Pour le faire, il faut se poser quelque part. La crainte des pays intermédiaires, donc ceux des Balkans, est qu’on enregistre ces personnes sur leur territoire et qu’ils soient contraints de rester sur leur sol. Donc les pays des Balkans ne sont pas désireux d’accueillir ces réfugiés et ces derniers veulent avancer.»</em></p>\n<p>Le sommet a élaboré quelques principes. L’idée générale est de rendre effective la «logique de hotspot» : un enregistrement des demandeurs d’asile à leur point d’entrée dans l’Union européenne, suivi de l’expulsion de ceux qui ne correspondraient pas aux critères de la Convention de Genève, et la répartition des autres, via le mécanisme de relocalisation.</p>\n<p>Dans ce cadre, l’enregistrement des demandeurs d’asile est un élément clé. <em>«Pas d’enregistrement, pas de droit»</em>, a prévenu le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, dimanche soir. Les Etats ont tenu à rappeler que les migrants qui refusent de demander l’asile à la frontière peuvent se voir refuser l’entrée dans un pays.</p>\n<p>Et les Etats <em>«décourageront les mouvements de réfugiés»</em> de frontière en frontière. La politique consistant à laisser passer les migrants vers un autre pays est officiellement jugée <em>«inacceptable»</em>.</p>\n<h3>Se jeter dans la gueule du loup</h3>\n<p>Voilà pour la théorie. En pratique, la relocalisation ne devrait concerner que 160 000 réfugiés en deux ans, alors que près de 700 000 personnes sont arrivées en Europe depuis le début de l’année. De plus, les Etats ne jouent pas le jeu. La semaine passée, seules 854 places de relocalisation avaient été proposées.</p>\n<p>Dans ce contexte, il est probable que les Etats des Balkans ne s’impliqueront pas outre mesure dans les solutions proposées, craignant de devoir «garder» les réfugiés alors que l’Union européenne tarde à mettre en œuvre leur répartition.</p>\n<p>Quant aux réfugiés, ils préfèrent traverser les frontières par eux-mêmes, plutôt que de se jeter dans ces «hotspots», considérés comme la gueule du loup.</p>\n<a itemprop=\"name\" href=\"http://www.liberation.fr/auteur/15743-cedric-vallet\">Cédric Vallet</a>",
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