X-Git-Url: https://git.immae.eu/?a=blobdiff_plain;f=html%2Faventuriers.html;h=8bd04f0449315098648df258604eb72fb146fa45;hb=4e88231e34e22f4bf7b32ee255b0219b346d4b22;hp=1442b12ce8ab8e96d94748a17aeb73e3ad789760;hpb=f4b3f5cb9ec991fd3832eb8eb107334e6099996d;p=perso%2FDenise%2Faventuriers.git diff --git a/html/aventuriers.html b/html/aventuriers.html index 1442b12..8bd04f0 100644 --- a/html/aventuriers.html +++ b/html/aventuriers.html @@ -7,7 +7,7 @@ - +
@@ -5578,9 +5578,141 @@ de table. Son p ambiance, lui donna un coup de coude en lui demandant comment « il s’en sortait » avec les deux elfes, tout en lui adressant un clin d’œil peu discret. Pris de court, il avait répondu qu’il ne se passait rien, mais il n’était pas sûr -de l’avoir convaincu. Un peu plus loin, Aldariel et Silwë avaient échangé un -regard gêné, tandis qu’Irdann et Sélène avaient difficilement contenu un fou -rire. +de l’avoir convaincu. Aldariel et Silwë, qui avaient entendu, avaient échangé +un regard gêné, tandis qu’Irdann et Sélène avaient difficilement contenu un +fou rire. +Mais c’était probablement le seul « incident » qu’il pourrait +déplorer. Il y avait pire. Par contre, au moment d’aller se coucher, ses +parents avaient rappelé que la petite chaumière ne comportait que +deux chambres. Ils avaient insisté pour que les deux « nobles » +prennent la meilleure des deux, la leur, proposant aux trois autres +la chambre originellement prévue pour leurs enfants. Eux-mêmes +dormiraient dans une paillasse au grenier. Il aurait bien suggéré un +autre arrangement, mais il doutait fort que ses parents le laissent +faire. +
Il fit quelques pas dans la pièce, qui l’avait abrité pendant toute
+son enfance. Elle n’avait pas tellement changé depuis, si ce n’est
+qu’elle paraissait vide sans ses trois frères et sa sœur. Trois lits sur les
+cinq avaient été faits. Il s’assit et posa son sac sur celui qui avait
+été le sien pendant toutes ces années. Il commençait à retirer ses
+bottes et son armure lorsque Silwë entra, une bougie à la main.
+Constatant qu’il n’y avait que lui, elle l’éteignit et la posa sur une table à
+côté.
— Ce n’est pas comme si nous en avions besoin... Mais je n’ai pas osé
+refuser.
Elle déposa son sac et celui d’Aldariel, puis vint s’asseoir à son tour sur un
+lit avec un sourire de satisfaction.
— On a beau dire, les matelas humains sont quand même confortables.
— Et c’est une elfe qui dit ça ?
Elle marqua une pause dans le démêlage de ses longs cheveux pour lui
+lancer un regard qu’elle aurait probablement voulu meurtrier. Constatant
+son échec, elle esquissa un sourire.
— Tiens, j’y pense, d’où te vient une telle réputation ?
— Euh, de quoi tu parles ?
C’est le moment que choisit Aldariel pour entrer à son tour dans la chambre
+–ou peut-être avait-elle attendu ce moment pour se manifester ? Elle
+s’installa à son tour et sourit.
— À propos de la remarque de ton père, tout à l’heure, tu sais bien.
+
Il soupira. Il faillit répondre que son père avait juste un peu bu, puis il +hésita à répliquer que tout cela venait de toutes façons des rumeurs qui +couraient sur les elfes. Mais il savait bien qu’elles ne se contenteraient pas de +ces esquives maladroites. Les quatre yeux bleus qui le fixaient dans +l’obscurité lui donnaient l’impression de le clouer au mur derrière lui. Il +abdiqua. +
Il finit d’ôter sa tunique et s’allongea, préférant regarder le plafond.
— Quand j’étais adolescent, j’avais pas mal de succès auprès des filles, c’est
+vrai. Le petit air d’elfe marchait plutôt bien auprès de certaines... Donc,
+j’avoue, je n’ai pas volé ma réputation. Après...
Il marqua une pause. Elle écoutaient toujours.
— Après j’ai commencé à être un guide et à passer mon temps à
+traverser la forêt. Ce n’est pas tout à fait le genre de boulot qui accorde
+du temps pour « ce » genre de choses... Et puis qui voudrait d’un
+mari à moitié sauvage, qui dort plus souvent sur le sol que dans
+un lit, et qu’on ne voit jamais ? Certes, je rencontre beaucoup de
+gens très différents, et j’ai bien eu des... occasions. Mais au final...
+
Il soupira.
— ... Au final, je vis seul. Ma fiancée, c’est la forêt. Ma seule vraie
+compagne, fidèle et sincère, c’est mon épée.
+
Il se tut. Pourquoi n’avait-il pas tout à fait l’impression de dire la
+vérité ? Le visage de Sélène était encore présent dans son esprit. Mais
+n’était-elle pas, finalement, qu’une de ces « occasions » comme les autres ?
+Qu’il avait plus ou moins –à tort ou à raison– laissée passer. L’oublierait-il
+aussi facilement que les autres ? Comme si elle semblait saisir le fil de ses
+pensées, Aldariel s’approcha et posa doucement une main sur son
+épaule.
— Je me suis moquée de toi, cet après-midi. Mais je n’imaginais pas à quel
+point les différences de classe sociale pouvaient être un tel obstacle dans des
+
+
+relations entre humains. Toutes ces choses sont tellement plus simples chez
+nous...
Il ne répondit pas. Peut-être qu’elle avait raison, mais peut-être aussi que la
+situation était nettement plus simple quand on était une princesse. Et une
+princesse comme Aldariel, qui aurait fait renoncer au célibat une armée de
+prêtres ascètes. Tout devait lui tomber au creux de la main, les hommes
+comme le reste.
+
— À ce propos, Alda, comment va la blessure d’Irdann ?
Et il fallait qu’elle parle du paladin, là, maintenant... Il faillit lui rétorquer
+que ce n’était pas la peine de retourner le couteau dans la plaie, quand il
+sentit, à la façon dont Aldariel lâcha son épaule, que la remarque ne
+lui était pas destinée. Mais alors pas du tout. — Oh, plutôt bien.
+Rien de crucial n’a été touché, je suis sûre qu’il se remettra très
+vite.
— C’est plutôt une bonne nouvelle.
Il aurait bien aimé voir ce qu’il y avait sur le visage de la jeune princesse,
+mais elle s’était tournée vers Silwë. Il repassa la scène de bataille, et la
+suite, dans sa tête, remarquant alors ce que ses yeux avaient enregistré
+sans le voir. Le sourire amusé de Silwë sembla confirmer ce qu’il
+pensait.
— D’ailleurs, qu’est-ce que tu m’as dit, un peu plus tôt aujourd’hui ? Qu’à
+ma place, tu n’aurais pas hésité ?
Elle se retourna brusquement vers lui, les sourcils froncés.
— Qu’est-ce que tu veux dire ?
Il regarda le plafond, sans pouvoir retenir un sourire.
— À ton avis ?
+
Aldariel semblait à la fois choquée et en colère. Silwë s’était glissée sous
+les draps et s’était tue. Soit elle était épuisée et voulait dormir, soit elle lui
+laissait volontairement le champ libre. Après tout, c’était bien son tour de
+se venger...
— Non, je n’aurais pas hésité à ta place. Et ?
Il avait connu des attaques verbales plus difficiles à contrer. Son sourire
+s’élargit.
— Et face au « noble paladin aux airs de prince charmant », ça compte
+comme une hésitation ?
Elle marqua une pause, surprise.
— Mais... qu’est-ce que tu imagines ? C’est un humain. Un elfe, je ne dirais
+pas, mais c’est un humain !
Belle tentative d’esquive, mais ratée. À moins que... sa surprise semblait
+sincère. C’était encore plus drôle en fait.
— C’est ça. Et moi, je sors d’où, alors, si elfes et humains ne sont pas
+compatibles ?
Elle répliqua aussitôt, pointant son doigt dans sa direction.
— Biologiquement compatibles, oui. Ça ne prouve pas grand chose pour le
+reste. Tu as dit toi même que tu ne savais rien d’eux, non ?
Il devait admettre que la contre-attaque tenait plutôt bien la route. De plus,
+il risquait de se laisser entraîner sur un terrain plutôt glissant. Il lui restait
+une botte secrète. À son tour, il pointa son doigt dans sa direction, venant
+effleurer le sien en souriant. Il lui chuchota.
— Pourtant, j’ai bien l’impression que Silwë, elle, ne s’arrête pas à ce genre
+de détail.
— Quoi ? Qu’est-ce que tu en sais ?
Son attaque avait donc touché. Il ne fallait pas baisser sa garde maintenant.
+
— Elle a passé cinq ans chez les humains. Je pense qu’elle a dû avoir un
+certain succès auprès d’eux. Tu lui poseras la question...
Cherchant désespérément un peu de soutien, Aldariel se tourna vers son
+amie, qui s’était visiblement endormie. Tout du moins, elle faisait
+suffisamment bien semblant. Il l’en remercia intérieurement.
— ...sinon tu te rappelleras sa réaction quand, un soir, autour d’un bivouac
+improvisé dans des circonstances peu engageantes, nous avions évoqué la
+question.
Quelle chance il avait eu de retenir ce détail pourtant insignifiant, malgré la
+situation qui ne s’y prêtait guère... Ils étaient plus à un cheveu de
+s’entretuer que de jouer à ce jeu-là.
+
Elle lui lança un dernier regard assassin, qu’il fit mine de ne pas +remarquer. Mais il avait du mal à se retenir de sourire. Elle soupira, +remonta ses draps sur ses épaules et ferma les yeux.