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Sélène -

Tenant à la main un bougeoir, elle s’avança dans l’immense pièce, -éclairée uniquement par quelques fentes de lumière sur les murs, et la lueur -de sa bougie. La jeune fille portait une longue robe de couleur crème, aux -longues manches et lacée sur le devant, avec des liserés dorés. Ses cheveux +

Tenant à la main un bougeoir, elle s’avança dans l’immense pièce, +éclairée uniquement par quelques fentes de lumière sur les murs et la lueur +de sa bougie. Elle portait une longue robe de couleur crème, aux longues +manches et lacée sur le devant, avec des liserés dorés. Ses cheveux longs étaient soigneusement attachés en deux nattes, entrelacées de rubans. -

Elle sourit. Sa gouvernante ne supportait ni la poussière, ni les -araignées, voire parfois les rats, qu’on trouvait ici ; et Sélène était ravie de -s’en débarrasser pour quelques heures. Les greniers du château n’avaient pas -été rangés ou nettoyés depuis des générations, et on y trouvait de tout, - - -vieilles armes, tableaux, ustensiles divers, ... Tout ce qui n’avait pas été -considéré comme ayant suffisamment de valeur pour être stocké dans la -salle du trésor. -

Et il y avait des livres. Des tas de livres, oubliés et délaissés. +

Elle sourit. Sa gouvernante ne supportait ni la poussière, ni les +araignées, ni les rats qu’on y trouvait parfois ; et Sélène était ravie de s’en +débarrasser pour quelques heures. Les greniers du château n’avaient pas été +rangés ou nettoyés depuis des générations, et on y trouvait de tout, vieilles +armes, tableaux, ustensiles divers, ... tout ce qui n’avait pas été considéré +comme ayant suffisamment de valeur pour être stocké dans la salle du +trésor. +

Et il y avait des livres. Des tas de livres, oubliés et délaissés. Comment pouvaient-ils ignorer ainsi leur valeur ? Son père était assez occupé avec les affaires du fief dont il était le seigneur. Ses deux parents avaient fait en sorte qu’elle soit éduquée comme une @@ -54,21 +71,22 @@ retenu sa passion pour la lecture, se disant qu’au fond, en lisant, elle n’abîmerait pas ses mains délicates au travail, et ne noircirait pas son teint pâle au soleil. Et puis, elle aurait de la conversation avec son futur époux. -

Elle soupira. Elle savait que ses parents espéraient la marier, plus tard, à +

Elle soupira. Elle savait que ses parents espéraient la marier, plus tard, à un riche seigneur voisin, pour gagner leur soutien et protection, et cette idée ne l’enchantait guère. Mais que pouvait-elle faire d’autre ? S’évader dans ces vieux livres, et rêver, seule, dans ce grenier poussiéreux. Elle avait quatorze ans, et cela faisait presque un an qu’elle venait régulièrement lire ici. -

Elle était arrivée devant l’une des vieilles armoires à moitié rongées par -les termites. Le dernier livre qu’elle avait lu parlait de plantes médicinales – -qu’elle ne connaissait que de nom et de description, le livre étant dépourvu +

Elle était arrivée devant l’une des vieilles armoires à moitié rongées par +les termites. Le dernier livre qu’elle avait lu parlait de plantes médicinales +–qu’elle ne connaissait que de nom et de description, le livre étant dépourvu d’images–, celui d’avant était un journal de bord d’un grand tacticien militaire, celui d’encore avant racontait une histoire de chevalerie, et le -précédent était un récit historique d’une grande bataille entre les elfes... -Il y avait de tout, dans le désordre. Elle lisait tout, s’intéressait à -tout. -

Alors qu’elle faisait un inventaire des livres déjà lus, l’étagère de + + +précédent était un récit historique d’une grande bataille entre les elfes... Il y +avait de tout, dans le désordre. +

Alors qu’elle faisait un inventaire des livres déjà lus, l’étagère de l’armoire qui les maintenait s’effondra brusquement. Elle sursauta et la flamme de la bougie vacilla. Si l’armoire s’était écrasée sur elle... Mais à part un tas de livres par terre, rien de grave ne s’était passé. C’est @@ -76,34 +94,33 @@ alors qu’elle aper livres quelques secondes plus tôt, un panneau de bois, comme si l’armoire avait été réparée. Elle posa la bougie par terre, et tendit la main. En fait, ce panneau avait été rajouté... pour cacher quelque - - chose ? -

Le cœur battant, elle chercha à soulever le panneau de bois, et après +

Le cœur battant, elle chercha à soulever le panneau de bois, et après quelques minutes d’effort, y parvint. Derrière, il y avait un autre livre. Plus grand, avec une reliure en cuir très épais, et aux feuilles encore plus jaunies que les autres. Tremblante, elle le saisit, et s’assit à côté de la bougie pour l’ouvrir. L’écriture, très ancienne, était difficile à déchiffrer, mais elle parvint à lire les quelques premières pages. La peur la saisit. C’était un livre de magie ! -

La magie était une chose très dangereuse, disait-on. Les sorciers, pour la -pratiquer, concluaient des pactes en vendant leur âme à des divinités -maléfiques, pour obtenir le pouvoir. Ils étaient chassés, torturés et brûlés -vifs. Un frisson la traversa. Ranger ce livre maudit ? Le brûler ? Le -ramener à ses parents ? ... Le lire ? -

Y avait-il un risque à simplement le lire ? Avait-elle déjà perdu son +

La magie était une chose très dangereuse, disait-on. Les sorciers, +pour la pratiquer, concluaient de terribles pactes en vendant leur +âme à des divinités maléfiques. Pour s’en protéger, on les chassait, +les torturait et parfois, on les brûlait vifs. Un frisson la traversa. +Ranger ce livre maudit ? Le brûler ? Le ramener à ses parents ? ... Le +lire ? +

Y avait-il un risque à simplement le lire ? Avait-elle déjà perdu son âme en l’ouvrant ? Si c’était le cas, peut-être était-ce déjà trop tard... -

Elle regarda autour d’elle, vérifiant une fois de plus qu’elle était seule, et +

Elle regarda autour d’elle, vérifiant une fois de plus qu’elle était seule, et avec un sentiment d’excitation coupable, se mit à lire. -

Silwë -

La flèche venait de rater une fois de plus sa cible. Elle soupira.

La flèche venait de rater une fois de plus sa cible. Elle soupira.
— Encore raté...
— Un peu moins que la dernière fois, pourtant. Tu n’es pas si loin !
Elle regarda son frère, qui s’entraînait à côté. Il aimait la railler à -chaque fois qu’elle s’entraînait – avec un succès toujours mitigé – à +chaque fois qu’elle s’entraînait –avec un succès toujours mitigé– à l’arc.
— Ouais, bien sûr. Avec un peu de chance, je pourrai tuer l’ennemi qui se marre à cinq mètres, tu veux dire ?
Elle pivota vers lui, tendant son arc et armant une fl un petit air de défi.
— Méfie-toi, je pourrais le confondre avec toi !
Elle lâcha la flèche imaginaire, qu’il fit mine d’esquiver de manière - - spectaculaire. Puis elle prit son arc à une extrémité, et lui fit faire un grand arc de cercle pour empêcher son frère d’avancer vers elle. Sur le retour, il utilisa le sien pour bloquer son mouvement et tenta de passer sous sa garde. @@ -130,23 +145,25 @@ class="newline" />— On s’entra class="newline" />— Je vois ça. Silwë, tu peux venir avec nous s’il te plaît ?
Surprise, la jeune elfe leva les yeux. Sa mère était accompagné d’un homme qu’elle ne connaissait pas. Il portait la longue tunique vert foncé, le -pantalon blanc et les bottes habituellement réservés aux soldats – c’était -également le cas de sa mère – mais les broderies dorées indiquaient qu’il +pantalon blanc et les bottes habituellement réservés aux soldats –c’était +également le cas de sa mère– mais les broderies dorées indiquaient qu’il s’agissait vraisemblablement de quelqu’un d’important. Elle nota qu’à sa ceinture pendait une longue épée, comme celles qu’utilisent les humains, enfin c’était ce qu’on lui avait dit. Elle n’en avait jamais vue en vrai jusqu’alors. L’homme sembla noter son regard supris, et lui adressa un sourire bienveillant. Ses longs cheveux blancs et son air sage semblaient témoigner d’un âge avancé et d’une grande + + sagesse. -

Lui et sa mère la menèrent, d’échelle de corde en passerelle, près du +

Lui et sa mère la menèrent, d’échelle de corde en passerelle, près du palais du roi, dans un bâtiment de taille moyenne, puis dans ce qui ressemblait à une salle d’entraînement.
— Ta mère m’a dit que tu voulais devenir soldat, comme elle ?
— Oui. Mais je ne suis pas douée à l’arc... répondit-elle timidement.
Il lui sourit, et jeta un œil à sa mère, à quelques pas de là.
— Il est de toutes façons difficile d’être aussi bonne archère qu’elle. Mais -peut-être serais tu plus à l’aise avec autre chose ?
 ?
Il la regarda intensément pendant quelques secondes, comme s’il l’évaluait.
— Quel âge as-tu ?
Elle prit l’arme, la soupesa, et h class="newline" />— Essayer, comment ?
— Comme ça.
L’homme avait saisi une seconde épée en bois, et s’était précipité sur elle. -Surprise, fit un pas de côté, et tenta de dévier l’épée d’un coup de la sienne. -Même en bois, l’épée était un peu lourde... L’homme attaqua de nouveau, -elle fléchit légèrement les genoux et plaça son épée pour tenter d’enchaisser -un choc qui ne vint pas... L’homme s’était arrêté à quelques centimètres -d’elle...
— Pas mal. Je pense que c’est bon.
— Qu’est-ce que vous voulez dire ?
Il s’assit, et fit signe à la jeune fille et à sa mère de faire de même.
Sa mère continua, alors qu’elle rougissait.
— Malgré cela, tu sais te battre et as l’air d’y prendre de l’intérêt. C’est + + pourquoi j’en ai parlé autour de moi...
Elle souriait. Depuis le temps qu’elle était dans le groupe d’archers d’élite de la garde royale, elle connaissait beaucoup de monde. Le vieil homme @@ -180,21 +199,19 @@ reprit en souriant.
— À partir de maintenant, tu viendras t’entraîner régulièrement à l’épée, ici. Cela te convient-t-il ?
Elle leva les yeux vers lui et hocha la tête. -

Uhr -

Les trois adolescents couraient dans la plaine. Ils étaient pieds nus, -vêtus de pagnes grossiers en cuir, et avaient chacun, glissée dans une -ceinture, une épée plus ou moins rouillée, qui semblait avoir subi de - - -nombreux coups. Leurs cheveux bouclés étaient sales et en bataille, -et bien qu’ils ne soient pas aussi grands et forts que les barbares -adultes de leur clan, leur musculature aurait pu impressioner plus d’un +

Les trois adolescents couraient dans la plaine. Ils étaient pieds nus, vêtus +de pagnes grossiers en cuir, et avaient chacun, glissée dans une ceinture, une +épée plus ou moins rouillée, qui semblait avoir subi de nombreux +coups. Leurs cheveux bouclés étaient sales et en bataille, et bien +qu’ils ne soient pas aussi grands et forts que les barbares adultes +de leur clan, leur musculature aurait pu impressionner plus d’un citadin. -

Uhr, le plus jeune, était en tête. Lorsqu’ils arrivèrent au sommet de la +

Uhr, le plus jeune, était en tête. Lorsqu’ils arrivèrent au sommet de la petite colline, il leur fit signe de s’arrêter.
— Là, regardez !
Devant eux s’étalait un troupeau d’aurochs sauvages, qui broutait +class="newline" />Devant eux s’étalait un troupeau d’aurochs sauvages, qui broutaient paisiblement.
— Pourquoi tu t’arrêtes ? demanda sa sœur en lui donnant un coup de poing dans les côtes.
— On peut juste attaquer. Tu r va !
Les deux jeunes gens tirèrent leurs épées, et commencèrent à dévaler la colline en direction des aurochs. -

Uhr haussa les épaules. Il savait qu’il réfléchissait un peu trop et ne +

Uhr haussa les épaules. Il savait qu’il réfléchissait un peu trop et ne tapait pas assez. Pourtant l’autre jour son hésitation à attaquer un fauve à dents longues des plaines –pire, une mère protégeant ses petits– leur avaient probablement sauvé la vie. Mais il n’avait pas besoin de se poser autant de questions. Manger, boire, s’entraîner au combat, chasser, combattre, son quotidien était pourtant simple, et laissait peu de place à la réflexion. + + Alors pourquoi ? Quel destin facétieux, quel dieu blagueur avait décidé de lui donner ce que sa famille considérait comme le pire des -défaut ? Il réalisa qu’il était encore en train de se poser une question +défauts ? Il réalisa qu’il était encore en train de se poser une question inutile, dégaina son épée, et courut à la suite de son frère et de sa sœur. -

Irdann -

Cela faisait quelques heures qu’ils marchaient ensemble en silence. Le +

Cela faisait quelques heures qu’ils marchaient ensemble en silence. Le prêtre qui l’accompagnait semblait de bonne humeur, mais il n’osait pas le questionner. Il n’avait que onze ans, après tout, et s’il était fils de duc, il savait qu’il ne fallait pas fâcher un prêtre de la déesse. On disait que leurs pouvoirs étaient grands, et qu’ils pouvaient –entre autres– foudroyer - - quelqu’un sur place en une parole. -

L’homme en question, qui devait avoir une quarantaine d’années, portait +

L’homme en question, qui devait avoir une quarantaine d’années, portait une robe gris clair, munie d’une capuche qu’il avait laissée dans son dos. Un pendentif d’or ornait sa poitrine, et une épée pendait à sa ceinture de cuir. Il marchait en s’aidant d’un long bâton de bois et portait sur le dos un large sac en cuir, visiblement rempli. -

— Hm... prêtre Khil ?

— Hm... prêtre Khil ?
Le prêtre considéra un instant le jeune garçon, vêtu d’une tunique rouge, d’un pantalon brun, et d’une paire de bottes en cuir épais. Une longue épée, presque aussi grande que lui, était attachée dans son dos. Il lui @@ -256,9 +273,7 @@ ensuite son class="newline" />— Vas-y, attaque-moi.
Irdann hésita un instant. Mais après tout, c’était lui qui lui avait demandé, n’est-ce pas ? -

Il fléchit légèrement les genoux, et affermissant sa prise à deux mains - - +

Il fléchit légèrement les genoux, et affermissant sa prise à deux mains sur le bâton, porta un premier coup, que Khil para habilement. Puis il saisit son arme de fortune d’un bras, et porta plusieurs coups latéraux que son adversaire dévia du plat de sa lame. Il parut surpris.
— Ne les tant que c’est pour la bonne cause. Et qui sait, changer d’arme rapidement pourrait être un atout en combat, non ?
Il leva les yeux, et osa sourire timidement.
— Vous avez eu à combattre contre des vrais adversaires ?
— Vous avez déjà combattu des vrais adversaires ?
Il lui fit un clin d’œil.
— Oui. Depuis que je suis prêtre, j’ai beaucoup voyagé, et j’ai vécu de nombreuses aventures... -

Irdann regarda à nouveau le prêtre. La robe qu’il portait dissimulait +

Irdann regarda à nouveau le prêtre. La robe qu’il portait dissimulait assez efficacement une certaine carrure, et son rythme de marche montrait son endurance. Le bâton de marche était-il là pour faire semblant d’être inoffensif ? Il devait être redoutable sur un champ @@ -299,53 +314,143 @@ class="newline" />— Je ne sais pas. Tu es le premier depuis longtemps, mon verrons bien.
Il lui sourit, et ils se remirent en route. Le chemin était long jusqu’à la capitale. -

Sélène +

Debout devant elle, ils tremblaient de tous leurs membres. Surprise ? +Colère ? Peur ? Incrédulité ? Panique ? Probablement un peu de tout +cela. Le grenier dans lequel elle les avait amenés était dans un sale état, +mais c’était le seul endroit où elle pouvait pratiquer la magie sans être vue +ou entendue... +

Suivant pas à pas les conseils du livre, elle avait découvert qu’elle avait +un certain don pour cela. Avec de la persévérance, elle avait réussi à +lancer son premier sort, paraît-il le plus simple, une boule de feu, et +elle avait manqué de brûler la bibliothèque. Le livre disait aussi +qu’il était très difficile de contrôler sa propre énergie magique... De +nombreuses traces noires couvraient désormais les murs et le sol +du grenier, et un certain nombre de vieux meubles en bois avaient +brûlé. +

À ses pieds, deux ou trois vieilles planches finissaient de se consumer en +crépitant. Ses parents n’avaient pas bougé, toujours sous le choc après sa + + +démonstration spectaculaire.
— Ce n’est pas possible...
— Notre propre fille, une sorcière...
Elle se tenait entre eux et la porte du grenier. Elle ne cherchait pas +particulièrement à les empêcher de sortir, mais elle voulait qu’ils l’écoutent +avant.
— Arrêtez avec vos histoires. Les sorciers ne sont pas maléfiques, en tous +cas pas tous. Vous ne croyez quand même pas à toutes ces histoires de +démons ?
— Ils avouent tout de même...
Elle secoua la tête d’un air rageur.
— Avec les tortures qu’on leur inflige ? N’importe qui avouerait n’importe +quoi. Ne soyez pas idiots.
Elle disait ces mots en essayant de s’en persuader elle-même. Il y avait +quand même des légendes et récits parlants de sorciers maudits... Mais +peut-être n’était-ce pas le cas de tous ?
— Regardez-moi. Suis-je devenue un monstre en apprenant un peu de +magie ? +

Ils l’observèrent un moment. Elle n’avait pas vraiment changé ces +dernières années, à part un peu grandi, mais ce n’était vraisemblablement +pas une histoire de magie. Pourtant... ils avaient la sensation que leur +fille leur échappait, qu’elle n’était pas la jeune fille qu’ils auraient +voulu qu’elle soit, qu’elle ne pensait pas comme ils auraient voulu +qu’elle pense. Peut-être était-ce juste cela, être une sorcière ? Ne +pas être celle que les autres attendaient ? Était-ce maléfique pour +autant ? +

Elle soupira, et interrompant leurs pensées, fit apparaître lentement une +seconde boule de feu dans sa main gauche. Ses parents firent un pas en +arrière, effrayés.
— Écoutez, si vous comptez me dénoncer, je lance cette boule de feu par la +fenêtre. Toute la ville la verra et vous serez aussi embêtés que moi vis-à-vis +de votre peuple.
La boule de feu grandissait, se nourrissant de sa colère et de sa frustration. +Elle sentait sa chaleur de plus en plus intense, alors que la panique +grandissait dans les yeux de ses parents. Elle tourna la tête vers la flamme. + + +Reprendre le contrôle, ne pas la laisser grandir trop, respirer...
— Mais si vous me laissez tranquille avec ma magie, alors personne à part +vous ne le saura.
La taille de la flamme diminua lentement, à mesure qu’elle se calmait.
— Si vous me laissez étudier la magie comme je le souhaite, je ferai tout +pour garder sauf l’honneur de la famille. Je ferai tout ce que vous voudrez. +J’épouserai qui vous voudrez. S’il vous plaît...
Un silence passa, durant lequel ils semblèrent considérer cette idée.
— Aaaïe !
La boule de feu, même après avoir considérablement décru en taille et en +énergie, avait fini par se poser sur sa main. Elle secoua son bras en se +mordant les lèvres. Son père fit un pas en avant, et lui parla d’une voix +–presque– apaisée.
— Montre ton bras ?
Sa main et son poignets étaient rouges, et des cloques commençaient à se +former.
— Je peux... m’en occuper.
Elle se concentra, malgré la douleur vive. Il y avait cet autre sort qu’elle +avait appris. Un sort pour soigner... Il était, d’après le livre, plus complexe +que celui du feu, et elle avait beaucoup moins d’occasions de le pratiquer. +Mais les quelques fois où elle avait essayé, le résultat n’avait pas été si +mauvais. Elle prit une grande inspiration et ouvrit les yeux. La douleur avait +considérablement diminué, et les cloques avaient disparu, même si +la peau restait un peu rouge et sensible. Elle lâcha un soupir de +soulagement.
— Vous voyez, la magie peut être bénéfique, aussi.
Son père observa tour à tour sa main, son visage, et celui de son épouse, qui +semblait réfléchir, un peu en retrait. Celle-ci finit par s’approcher +également.
— J’ai peut-être une idée... +

Farl -

Farl prit une grande inspiration et commença son ascension. Le +

Farl prit une grande inspiration et commença son ascension. Le bâtiment était ancien, et très haut, et les interstices entre les pierres formaient d’excellentes prises pour ses mains et ses pieds. Patiemment, + + silencieusement, il gravit les étages. Vêtu de sombre de la tête aux pieds, il était quasiment invisible dans la nuit. Ce n’était pas la première fois qu’il -s’adonnait à ce genre de sport, Ni la dernière d’ailleurs. À condition de ne +s’adonnait à ce genre de sport, ni la dernière d’ailleurs. À condition de ne pas tomber. Écartant cette pensée, il se remémora ces dernières années, si bien remplies... -

Il était né dans une famille très pauvre de la capitale, et avait -été laissé plus ou moins à l’abandon, sa pauvre mère n’ayant pas -les moyens de le nourrir. Il vivotait, de petits vols et de mendicité. -Il était très doué, et avec sa petite taille et sa rapidité, il arrivait -toujours à échapper aux ennuis. Mais un jour, il avait fini par se -faire prendre. À sa grande surprise, l’homme qui l’avait saisi la main -dans le sac ne l’avait pas dénoncé. À la place, cet étrange homme, +

Il était né dans une famille très pauvre de la capitale, et avait été laissé +plus ou moins à l’abandon, sa pauvre mère n’ayant pas les moyens de +le nourrir. Il vivotait de chapardages et de mendicité. Il était très +doué, et avec sa petite taille et sa rapidité, il arrivait toujours à +échapper aux ennuis. Mais un jour, il avait fini par se faire prendre. +À sa grande surprise, l’homme qui l’avait saisi la main dans le sac +ne l’avait pas dénoncé. À la place, cet étrange personnage, grand, mince et aux cheveux blancs s’était présenté comme un assassin professionnel, et lui avait proposé de devenir son apprenti. Il avait alors sept ans. -

Depuis – il esquissa un sourire à l’évocation de ce souvenir –, sa vie avait +

Depuis –il esquissa un sourire à l’évocation de ce souvenir–, sa vie avait radicalement changé. Déjà parce qu’il était logé, nourri et habillé -par son maître, mais surtout parce qu’il passait ses journées – et -surtout ses nuits – à apprendre les ficelles du métier. Déplacement -furtif, combat avec une ou deux dagues, utilisation des divers dards -et stylets de contact ou de lancer, poisons et antidotes, et ce soir, +par son maître, mais surtout parce qu’il passait ses journées –et +surtout ses nuits– à apprendre les ficelles du métier. Déplacement +furtif, combat avec une ou deux dagues, utilisation des divers dards et +stylets de contact ou de lancer, poisons et antidotes, et comme ce soir, escalade. La ville était devenue un grand terrain d’entraînement et de jeu. -

Arrivé au troisième étage du bâtiment, il regarda discrètement si - - +

Arrivé au troisième étage du bâtiment, il regarda discrètement si quelqu’un se trouvait à la fenêtre, et constatant que non, il s’assit sur le rebord pour souffler quelques instants. Il aperçut, en bas, quelques passants – fêtards, malfaiteurs, gardes ? – marcher dans la rue sans le voir. Il n’était qu’une ombre parmi les ombres de la nuit. -

Il prit une grande inspiration et se releva. Ses doigts trouvèrent +

Il prit une grande inspiration et se releva. Ses doigts trouvèrent naturellement une nouvelle prise sur le mur, et il reprit son ascension. L’escalade de ce bâtiment n’était pas particulièrement difficile, avec toutes ces pierres moyennement ajustées, mais restait longue et répétitive. Il commençait à sentir la fatigue dans ses avant-bras. Il parvint au cinquième étage, à partir duquel les briques étaient plus serrées. Il ne lui en restait + + qu’un à grimper, et sur le toit, la gouttière ferait un point d’attache parfait. Il sortit de son petit sac à dos en cuir une corde et un grappin, qu’il lança avec habileté jusqu’au rebord du toit. Après avoir vérifié la solidité de son attache, il grimpa lestement jusqu’au sommet du bâtiment. -

Assis sur le faîte du toit, son maître l’attendait en souriant. +

Assis sur le faîte du toit, son maître l’attendait en souriant. Était-il monté par l’escalier ? Avait-il escaladé ? Plus rien ne le suprenait venant de lui de toutes façons. Il regarda une montre à gousset.
— Il ne te manque pas grand chose pour valider ta formation. Une première mission.
Farl le regarda, les yeux brillants. -

Zach -

— Bon, allez, on fait une pause ?

— Bon, allez, on fait une pause ?
À ces mots bénis, Zach se releva avec un soupir de soulagement, ruisselant de sueur. Il avait arrêté de compter les bûches qu’il lui restait à fendre et - - celles qu’il avait déjà débitées. Il se tourna vers ses deux frères, qui, comme lui, posèrent leur hache, et se dirigèrent vers l’ombre fraîche et accueillante d’un arbre. L’aîné des garçons sortit alors un petit pichet de vin, qu’il @@ -382,18 +485,18 @@ class="newline" />— Parce que c’est avec lui que la fille du cordonn l’autre soir.
— C’est avec son petit air d’elfe, ça plaît aux filles. Mais ça n’aide pas à couper du bois. -

Zach sourit et haussa les épaules, puis reprit une gorgée rafraîchissante, +

Zach sourit et haussa les épaules, puis reprit une gorgée rafraîchissante, se remémorant la soirée de la veille. -

C’est vrai qu’il était un peu plus petit et nettement plus frêle que ses +

C’est vrai qu’il était un peu plus petit et nettement plus frêle que ses deux frères, et leur ressemblait très peu. Tous deux étaient grands, roux, aux épaules très larges, travaillées par toutes ces années à couper des -arbres, comme leur père. Et pour cause ! Zach, savait qu’il avait été trouvé -bébé sur le pas de la porte de cette famille de bûcherons. Ils l’avaient +arbres, comme leur père. Et pour cause ! On l’avait trouvé, bébé, sur le pas +d’une porte du village. Un couple de bûcherons du village l’avaient alors adopté et élevé comme leur propre fils, mais ils ignoraient tout de ses véritables origines. Il se demandait parfois ce qu’aurait été sa vie s’il n’avait pas été déposé là, mais ne regrettait pas le moins du monde celle qu’il vivait. -

Alors qu’ils s’apprêtaient à se remettre au travail, ils aperçurent un +

Alors qu’ils s’apprêtaient à se remettre au travail, ils aperçurent un carosse, richement décoré, escorté par trois soldats à cheval. Les soldats portaient l’enseigne de leur seigneur, sire Assem, et se dirigaient vers la forêt. Apercevant les trois adolescents, tous trois vêtus d’une simple @@ -404,40 +507,39 @@ class="newline" />— Bonsoir jeunes gens. Nous cherchons un endroit o nous et la damoiselle que nous escortons.
Ils firent un geste de la tête vers le carosse, dont les épais rideaux de velours masquaient l’intérieur.
— Vous pouvez vous rendre à la taverne du village, où vous trouverez de -quoi souper et dormir.
— Vous pouvez vous rendre à l’auberge du Renard Vif, au milieu du village, +où vous trouverez de quoi souper et dormir.
— Merci. L’un d’entre vous peut-il nous y conduire ? -

Zach se porta volontaire, et guida le convoi jusque dans le bourg. En +

Zach se porta volontaire, et guida le convoi jusque dans le bourg. En chemin, l’un des soldats l’interrogea :
— Dis moi, mon garçon, nous cherchons quelqu’un pour nous guider à +class="newline" />— Dis-moi, mon garçon, nous cherchons quelqu’un pour nous guider à travers la forêt, demain. Sais-tu si quelqu’un peut le faire ? -

Il réfléchit quelques instants.
— Il n’y a personne qui fasse ce métier en ville. En revanche, beaucoup de -jeunes du village, dont mes frères et moi, connaissons très bien cette -forêt.

Il réfléchit quelques instants.
— Il n’y a pas de guide disponible. Mais Beaucoup de jeunes du village, +dont mes frères et moi, connaissons très bien cette forêt.
— Vous êtes les enfants du bûcheron, c’est ça ?
— Oui.
— Quel âge as-tu ?
— Seize ans.
— Tu me sembles assez grand pour cette tâche. Qu’en dis-tu ? -

Zach se sentit flatté de cette confiance, et hésita presque à accepter. -Était-il à la hauteur ? Puis à la réflexion, il ne voyait pas d’autre guide -possible. Il était, de ses frères, celui qui connaissait réellement le -mieux la forêt, puisqu’il y passait une bonne partie de son temps -libre.

Zach se sentit flatté de cette confiance, et hésita presque à accepter. +Était-il à la hauteur ? Puis à la réflexion, il ne voyait pas qui d’autre. Il +était, de ses frères, celui qui connaissait réellement le mieux la forêt, +puisqu’il y passait une bonne partie de son temps libre.
— D’accord. -

Aldariel -

— Oui, Aldariel, tu voulais me voir ?
La jeune elfe fit quelques pas dans la salle du trône. Frêle, vêtue d’une robe -mi-longue blanche, pieds nus, un diadème argenté retenant ses longs -cheveux noirs emmêlés. Cet endroit était si impressionnant. Et son père -avait l’air si imposant quand il était assis sur son trône ! Et elle se sentait -toujours si petite face à lui dans ces conditions... Sentant sa gène, et - - -constatant qu’il était seul avec elle, il éclata de rire et vint prendre la petite -fille de dix ans dans ses bras.

— Oui, Aldariel, tu voulais me voir ?
La jeune elfe fit quelques pas dans la salle du trône. Elle était petite et +frêle, vêtue d’une robe mi-longue blanche, pieds nus, un diadème +argenté retenant ses longs cheveux noirs emmêlés. Cet endroit était si +impressionnant. Et son père avait l’air si imposant quand il était assis sur +son trône ! Et elle se sentait toujours si petite face à lui dans ces +conditions... Sentant sa gène, et constatant qu’il était seul avec elle, +il éclata de rire et vint prendre la petite fille de dix ans dans ses +bras.
— Papa, je voudrais apprendre à me battre.
Il fronça les sourcils.
— Pourquoi ? Il y a bien plus intéressant à faire, pourtant ! Quelque chose @@ -453,9 +555,9 @@ class="newline" />Il r politique du clan, ce qui en compliquait nettement la gestion, tout en créant certaines tensions entre eux. Finalement, il valait peut-être mieux qu’elle s’entraîne au combat. De toutes façons, elle ne verrait probablement aucun -champ de bataille de sa vie – ou alors que de loin –, du moins il l’espérait, -que risquait-il ?
— Papa, n’es-tu pas toi même un excellent archer ?
 ?
— Papa, n’es-tu pas toi-même un excellent archer ?
Il soupira.
— C’est vrai. Du moins, c’était vrai jusqu’à il n’y a pas si longtemps... J’allais même disputer des tournois chez les humains.
 : une des meilleures archères de mon escouade d’élite.
Le visage d’Aldariel s’illumina. -

Samantha -

La grande salle du temple était immense, et tous les habitants du temple +

La grande salle du temple était immense, et tous les habitants du temple –prêtres et prêtresses, novices, et même les serviteurs– y étaient présents. Il y avait même un grand nombre de fidèles venus de la ville. Elle ne l’avait - - jamais vu aussi pleine. Ils étaient tous là pour elle... C’était excitant, et presque un peu effrayant. -

Le prêtre devant elle se mit à réciter les paroles rituelles d’intronisation. +

Le prêtre devant elle se mit à réciter les paroles rituelles d’intronisation. Dix-sept ans, et elle était intronisée Grande Prêtresse... Déjà ! Mais cette ascension n’avait pas été sans embûches. Lorsqu’elle avait huit ans, ses parents –de modestes marchands– avaient été tués lors d’un raid barbare. @@ -484,13 +584,15 @@ survivants de son village, d de plus à nourrir, l’avaient confiée à un prêtre itinérant de Melna, qui avait emmené la pauvre orpheline au temple de la ville la plus proche. -

Une fois la douleur et les difficultés d’adaptation passées, Samantha +

Une fois la douleur et les difficultés d’adaptation passées, Samantha + + avait révélé une forte connexion avec la déesse, et avait souhaité devenir prêtresse, puis grande prêtresse. Elle avait, petit à petit, appris les enchantements sacrés les plus difficiles, maîtrisé les secrets divins les plus cachés, et surtout écarté avec subtilité toutes les concurrentes. -

Et elle avait réussi. Elle se tenait droite, dans la lumière qui tombait de +

Et elle avait réussi. Elle se tenait droite, dans la lumière qui tombait de la large ouverture du toit, au centre de la salle. Elle portait, pour la première fois, la tenue des grandes prêtresses. Sa robe était longue, d’un rouge vif, sans manches, aux larges bordures dorées, et mettait très bien @@ -498,31 +600,70 @@ rouge vif, sans manches, aux larges bordures dor collier d’or couvrant jusque ses épaules, ainsi que plusieurs bracelets, aux poignets, bras et chevilles. Elle était fière de tout ce chemin accompli. -

Le prêtre avait terminé son incantation, et s’écarta en se tournant vers +

Le prêtre avait terminé son incantation, et s’écarta en se tournant vers elle. Les quelques murmures qu’elle avait entendus de la foule se turent. C’était son tour. Elle prit une grande inspiration, et fixa le sol, sous ses pieds nus. Sous l’ouverture du toit, là où elle se trouvait, le marbre du temple s’arrêtait pour laisser place à un large cercle de terre meuble. Elle rejeta ses longs cheveux en arrière, ferma les yeux et entonna une douce mélopée. -

Sous les yeux émerveillés du public, une pousse sortit de la terre, +

Sous les yeux émerveillés du public, une pousse sortit de la terre, puis se mit à grandir, lentement. Samantha leva lentement les bras, - - et fit quelques mouvements, les yeux toujours clos, comme si elle guidait les jeunes branches vers la lumière. Lorsque l’arbre l’eut dépassée de plusieurs têtes, elle s’arrêta et ouvrit enfin les yeux pour le regarder. -

Un tonnerre d’applaudissement retentit. Cet enchantement, un des plus +

Un tonnerre d’applaudissement retentit. Cet enchantement, un des plus difficiles à maîtriser, devait être réalisé sous les yeux des témoins pour être intronisée officiellement en tant que grande prêtresse... Et elle avait réussi, avec brio. Elle poussa un soupir de soulagement. Le prêtre s’avança, tenant entre les mains un cercle d’or qu’il déposa sur sa tête. Les applaudissements redoublèrent. -

Elle était désormais Samantha, grande prêtresse de Melna. +

Elle était désormais Samantha, grande prêtresse de Melna. + + +

Zach +

— Là-bas, je vois l’orée !
Les soldats laissèrent échapper une exclamation de joie. Après quatre jours +dans la forêt, ils n’étaient pas mécontents de retrouver la civilisation. De +son côté, Zach, installé à côté du cocher, rêvassait. Il se demandait bien qui +était l’occupante du carosse, qu’il n’avait pas le droit de voir, en théorie. En +pratique, la damoiselle ayant tout de même besoin de sortir de temps en +temps, il avait pu entr’apercevoir, à plusieurs reprises, une silhouette de +petite taille, couverte de la tête aux pieds d’un long manteau bleu marine +richement orné. +

— Hé, gamin !
Sortant de sa rêverie, il tourna la tête vers le soldat, qui lui adressa un +grand sourire.
— Tu as fait du bon boulot en nous guidant jusque là. Tu auras bien gagné +ta paie !
Il rougit légèrement.
— Merci.
— Ton chemin parallèle pour éviter le sentier embourbé était le bienvenu... +Nous aurions perdu beaucoup de temps à nous traverser cette partie avec le +carosse !
Il haussa les épaules en souriant.
— Nous allons parfois livrer du bois par là, et ce n’est pas la première fois +que ce chemin est inondé...
Le cocher, à côté de lui, lui donna un coup de coude.
— Tu sais que dans la région, il y a des gens qui en font leur boulot ?
— Dans mon village, il y a le vieux Tom. Enfin, il y avait, parce que cela +fait longtemps qu’il est un peu trop âgé pour ça.
Il lui fit un clin d’œil.
— Tu devrais aller le voir, et y réfléchir. Tu y serais meilleur que bûcheron, +à mon avis.
Il allait répondre, lorsqu’un des soldats lui adressa la parole.
— On approche de midi. Il y a une taverne, dans le village où on +arrive ?
— Oui. Sur la grand’rue, vous ne pouvez pas la rater.
— Allez, gamin, viens boire un verre avant de repartir. Je te l’offre. Tu l’as + + +bien mérité !

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 ? @@ -553,12 +692,14 @@ permettait d’ pensaient-ils briser sa volonté rapidement –il était plus jeune et moins costaud que beaucoup de ses compagnons–, et dans ce cas tant pis pour eux. -

Le cinquième jour, l’expédition sembla rejoignit camp nettement plus +

Le cinquième jour, l’expédition rejoignit un camp nettement plus + + important. Il avait du mal à compter, mais il semblait y avoir plus d’ennemis qu’il n’avait de doigts et de doigts de pieds. Peut-être autant qu’il y avait de doigts et de doigts de pieds sur tous les membres de son clan. Il -entr’aperçut même celui que ses ennemis appelaient le « roi », le chef de ce -grand clan barbare. +entr’aperçut même celui que ses ennemis appelaient le « roi Kourhk », le +chef de ce grand clan barbare.

Leur petit groupe rejoignit d’autres prisonniers, enchaînés eux aussi, dans un grand enclos. Ils étaient encore mieux gardés que pendant le trajet, et il se découragea un peu. Comment avait-il une chance de s’enfuir à @@ -568,8 +709,8 @@ ensuite parce que ce n’ bâton en plus.

Une fois seul, il observa l’objet qui était rentré dans son pied nu. Il s’agissait d’un clou, enfin, d’un morceau de métal pointu vaguement muni -d’une tête, dont le clan ennemi s’était servi pour assembler les rondins de -bois en barricade autour des prisonniers. Le métal était très dur... Il avait +d’une tête, qui avait vraisemblablement servi à assembler les rondins de bois +en barricade autour des prisonniers. Le métal était très dur... Il avait peut-être une chance de s’en tirer, en fait.

Farl @@ -578,23 +719,23 @@ de noir, comme de coutume, avec une l tunique pour le protéger en cas de combat, et avait vérifié plusieurs fois son équipement. Dagues, stylets, dards empoisonnés à diverses substances, tout était bon. Les lames étaient toutes peintes en noir, ne laissant que la pointe - - et le tranchant brillants, afin d’éviter tout reflet inutile. Il avait laissé un peu en retrait, dans une cachette, son sac à dos, contenant de quoi survivre, ainsi qu’un assortiment de poisons et antidotes. Il vérifia encore une fois le fonctionnement de chaque accessoire, ainsi que des fourreaux de poignet, qui lui permettaient de dégainer aussi vite que sa pensée. Il était prêt. -

Devant lui, s’étendait le campement du roi Bloupy. Combien +

Devant lui, s’étendait le campement du roi Kourhk. Combien étaient-ils ? Plusieurs centaines probablement. Certes, comme lui avait expliqué son maître, ce n’était pas si inquiétant aux yeux du pays, mais si le problème pouvait être réglé plus simplement qu’en envoyant une + + armée...

Il passa les quelques heures avant la nuit complète à observer les allées et venues des barbares. Il observa notamment dans un coin, un enclos ou -semblaient se débattre des prisonniers, visiblement d’une tribu rivale. Il -nota cette information, cela pourrait faire une diversion efficace au +semblaient se débattre des prisonniers, visiblement d’une ou deux tribus +rivales. Il nota cette information, cela pourrait faire une diversion efficace au besoin.

Il parvint à deviner que les quatre tentes au centre du campement, visiblement bien gardées, devaient abriter des chefs ou sous-chefs de clan. @@ -614,18 +755,18 @@ class="ecti-1095">Uhr

Libre, il était libre. Enfin, presque. Il lui fallait encore s’échapper de l’enclos, esquiver les gardes ou s’en débarrasser, et gagner le petit bois à côté. Là, il avait de bonnes chances de pouvoir conserver - - sa liberté, et peut-être, revenir se venger... Mais pas tout de suite. Quand il en aurait les moyens. De plus, s’il n’était plus attaché au sol, ses mains étaient toujours liées, et ses mouvements étaient donc limités. -

Cachant le maillon ouvert, il attendit que le garde soit relevé et que le +

Cachant le maillon ouvert, il attendit que la garde soit relevée et que le calme soit revenu. Puis, tenant le reste de la chaîne dans ses mains pour éviter de faire du bruit, et profitant d’un instant où la lune se cachait derrière un nuage complice, il escalada doucement la palissade. Le garde regardait dans une autre direction. Encore une dizaine de mètres et tout serait bon... Il marchait avec toutes les précautions possibles. Pourtant, ce + + ne fut pas suffisant. Était-ce son pas ? Ses chaînes ? Son souffle ? Un hasard ? Toujours est-il que le garde se retourna à ce moment là, et après un quart de seconde de surprise, ouvrit la bouche pour crier @@ -637,21 +778,20 @@ balustrade. Tout s’ bruit n’avait filtré. Uhr était impressionné, et effrayé aussi. Ami ou ennemi ?

La silhouette lui fit signe de ne pas faire de bruit, et lui désigna le petit -bois. Décidant que, de toutes façons, il verrait ça plus tard, il se hâta vers le -petit bois, où l’étranger le rejoignit rapidement, sans faire le moindre -bruit.
— Qui es-tu ? Lui demanda-t-il.
— Je suis Uhr un guerrier du clan Bhasthon. Nous avons tous été tués ou +bois. S’il restait sur place, il serait repéré à un moment où à un autre. Il +n’avait donc pas grand chose à perdre à suivre le mystérieux inconnu. Il se +hâta vers le petit bois, où l’étranger le rejoignit rapidement, sans faire le +moindre bruit.
— Qui es-tu ? lui demanda-t-il.
— Je suis Uhr, un guerrier du clan Bhasthon. Nous avons tous été tués ou fait prisonniers. J’ai réussi à me libérer. Et toi, qui es-tu ?
Il montra à la silhouette, toujours aussi sombre, ses chaînes.
— Mon nom est Farl. Je suis envoyé pour assassiner le roi Bloupy. Je +class="newline" />— Mon nom est Farl. Je suis envoyé pour assassiner le roi Kourhk. Je suppose que tu aimerais te venger, non ? Peut-être pouvons-nous nous entraider ?
Uhr se demanda un instant comment un homme aussi petit et frêle pouvait se charger de cette tâche. Puis la vision de l’assassinat du garde lui revint en mémoire, et il hocha la tête. De toutes façons, ce gars était dangereux, - - mieux valait être de son côté. Et puis n’importe quel côté valait mieux que celui de son ennemi.
— J’ai pu observer. Dans les quatre tentes qui sont là-bas, le roi dort dans @@ -671,11 +811,10 @@ class="newline" />— Comment as-tu vu tout class="newline" />— Cela fait plusieurs jours que je les observe. Je voulais me venger, mais seul, comment faire...

Le jeune homme le regarda longuement, sans dire un mot.
— Donne moi tes poignets.
— Donne-moi tes poignets.
Il obéit, et l’étranger utilisa son outil pour ouvrir silencieusement et rapidement les chaînes qui le retenaient.
— Maintenant, il va y avoir moyen de mettre cette vengeance en -pratique. +class="newline" />— Maintenant, nous avons moyen de mettre cette vengeance en pratique.

Il lui sourit, et Uhr lui rendit son sourire. Ami.

Farl @@ -684,11 +823,11 @@ si diff vengeance qu’il savait illusoire. Et sa patience pour ouvrir ses chaînes... Sans compter qu’avec les informations qu’il avait, il allait enfin pouvoir mettre en place l’assassinat. Et peut-être même plus. Il réfléchit quelques -instants, alors que le barbare jouait avec ses chaines défaites, savourant sa +instants, alors que le barbare jouait avec ses chaînes défaites, savourant sa liberté.
— Bon, voilà ce que nous allons faire.
Il dessina sur le sol, de la pointe de sa dague, un vague plan du campement. -Le barbare fronça les sourcils, jeta un oeil vers le camp, puis vers le plan, et +Le barbare fronça les sourcils, jeta un œil vers le camp, puis vers le plan, et sembla comprendre.
— Je vais m’occuper de neutraliser les deux gardes du roi. Tu vas pouvoir entrer dans la tente du roi, je te laisse le plaisir de l’assassiner, je crois que @@ -697,6 +836,8 @@ temps, je vais aller lib côté.
— Mais on va être découverts, ils vont donner l’alerte, non ?
— Oui, évidemment. Mais la panique qui va se créer va nous aider à nous + + enfuir.
— Si on a le temps, tu crois qu’on peut libérer les autres ?
— Éventuellement, on verra. Ça te va ? @@ -718,10 +859,8 @@ entra.

Une faible lueur venant d’une lampe blafarde éclairait l’intérieur de la tente. Divers objets, plus ou moins précieux semblaient traîner dans un coin. Sur un lit fait de paille recouverte de tissus précieux –un luxe pour des -standarts barbares–, dormaient deux silhouettes. Celui qu’il reconnut -immédiatement comme le roi, avec sa silhouette et sa couronne, et une - - +standards barbares–, dormaient deux silhouettes. Celui qu’il reconnut +immédiatement comme le roi, avec sa carrure et sa couronne, et une jeune fille aux cheveux blonds emmêlés, entièrement nue. Il hésita quelques instants. Devait-il la tuer aussi ? Elle portait des traces de coups sur les bras et le dos. Vraisemblablement, on ne lui avait pas @@ -733,9 +872,11 @@ sursaut, et se mit l’oreille.
— Toi, pas un mot, pas un bruit. Sinon...
Elle vit la lame ensanglantée s’approcher de sa gorge, puis aperçut du coin + + de l’œil le roi assassiné. Peur ou plaisir de vengeance ? Les deux ? Toujours est-il qu’elle se calma rapidement. Il la lâcha, tout en la surveillant. -Elle le fixant avec méfiance et crainte, se demandant à qui elle avait +Elle le fixait avec méfiance et crainte, se demandant à qui elle avait affaire... Mais après tout, c’était une barbare, tout comme lui, et elle avait dû en voir d’autres. Elle se leva sans un bruit, et pointa du doigt un tas d’objets divers. On y trouvait notamment les affaires du @@ -743,7 +884,7 @@ roi.

Il hocha la tête, et se saisit d’une belle épée, ornée de quelques pierres. Si d’habitude il trouvait ces fioritures inutiles, il devait admettre que l’arme était d’excellente facture et les coups sur la lame montraient qu’elle avait -servi maintes fois. Il la glissa dans sa ceinture. Il y avait aussi des bijoux, +servi plus d’une fois. Il la glissa dans sa ceinture. Il y avait aussi des bijoux, avec des motifs divers et des formes variées. Des trophées de guerre, probablement. Chez les barbares, quand un bijou n’était pas une preuve d’un ennemi vaincu, c’était au pire une monnaie d’échange, leur aspect @@ -756,8 +897,6 @@ roi et se rua au dehors, son class="ecti-1095">Farl

Quatre chefs barbares étaient enfermés dans la tente. Malgré leurs chaînes, ils étaient impressionnants. Ils étaient grands, particulièrement - - musclés et portaient de longues cicatrices. Ces trois hommes et cette femme avaient dans le regard une telle fierté et une telle colère d’être ainsi réduits à l’état d’esclaves qu’il s’était demandé un instant s’il n’était pas encore @@ -769,6 +908,8 @@ entendit un cri

— Aleeeerte !
Les quatre chefs bondirent sur leurs pieds, et ramassant des armes, sortirent rapidement en lui adressant un signe de reconnaissance. + +

Dehors, il n’eut aucun mal à se fondre à nouveau dans la nuit, surtout avec l’agitation qui démarrait. Les quatre combattants se retrouvèrent nez à nez avec d’autres guerriers, et se défendirent farouchement. Dans la cohue, il @@ -780,7 +921,7 @@ le suivre. Il fallait faire vite avant que tout le campement ne soit en par les cris. Il n’eut aucun mal à disparaître dans l’ombre d’une tente, mais pas Uhr, à qui ils adressèrent un regard inquisiteur. Il hésita quelques instants à le laisser et à filer vers les prisonniers, mais c’était le laisser courir -à sa perte, et eut des remors. Même s’il était armé, il était tout de même +à sa perte, et eut des remords. Même s’il était armé, il était tout de même plus petit que ses adversaires, et seul face à cinq... Il s’accroupit et s’apprêta à bondir à sa défense.

À sa grande surprise, au lieu de brandir son épée, le jeune barbare @@ -791,8 +932,6 @@ class="newline" />Les gardes se ru longuement à la présence d’Uhr, ni à son butin.

Ils se mirent à courir, et rapidement, arrivèrent près de l’enclos des prisonniers. Il y avait deux gardes en alerte devant la barrière qui servait de - - porte.
— Farl, va les libérer pendant que j’occupe ceux-là.
Il hocha la tête, et contournant l’entrée, il escalada lestement la palissade et @@ -805,6 +944,8 @@ imm retenaient plusieurs personnes à la fois, et étaient peu difficiles à crocheter, ainsi la tâche allait très vite. Les premiers hommes et femmes libérés saisirent leur chaînes, les enroulèrent dans leurs poings et se ruèrent vers + + l’entrée de l’enclos en hurlant de rage. Il ne voyait pas ce qui s’y passait, mais à l’agitation qu’il devinait, il semblait que les deux gardes avaient été rejoints par des renforts. @@ -827,8 +968,6 @@ class="newline" />Il lui rendit son sourire.
— Ça marche.

Uhr - -

Ils se mirent à courir en direction de la forêt. L’agitation causée par les prisonniers qui se rebellaient et la mort du roi avait détourné suffisamment l’attention, et ils atteignirent sans encombre l’abri des @@ -841,6 +980,8 @@ class="newline" />L’ class="newline" />— Comme tu peux le constater, ça n’a pas été inutile !
— Bah, on y dit aussi qu’il faut être grand et large pour être un bon combattant. Et toi, tu es petit, tout frêle, et tu en as tué beaucoup, très + + efficacement ce soir.
— Merci.

Ils restèrent un instant silencieux, le temps de reprendre leur @@ -864,8 +1005,6 @@ class="newline" />Il n’avait pas os ville, celle dont il avait entendu parler plus jeune... Elle était parfois décrite comme un endroit fantastique, où la nourriture et le luxe coulaient à flots, et où on pouvait revendre des trophées et acheter des - - armes. Et parfois méprisée, car les gens qui y vivaient –humains ou autres races humaines– étaient moins costauds et ne savaient pas se battre comme il faut. Et il s’y passait des choses très compliquées @@ -877,6 +1016,8 @@ class="ecti-1095">Farl signe en souriant, et se hâta de le rejoindre. Il portait une tunique grise sans manches et un pantalon de toile sombre tenu par une ceinture de cuir. Il avait l’air d’un habitant tout à fait normal de la capitale, hors sa + + musculature imposante.

Depuis leur rencontre improbable dans les plaines barbares, il avait énormément changé. Il avait profité de l’argent de la vente des bracelets @@ -892,83 +1033,99 @@ et peu de r taverne.

Et malgré leurs différences, tous deux étaient rapidement devenus aussi inséparables que deux frères. -

— Farl ! Mais... que fais-tu habillé comme cela ?
Il sourit. Il avait troqué les vêtements sobres qu’il portait la journée -contre une tunique orange vif à manches longues, et un pantalon -rouge.
— Je t’avais déjà parlé que je ne souhaitais pas être assassin toute ma -vie...
— Oui. Et donc ?
— J’ai décidé de devenir ménestrel.
Il éclata de rire.

Il s’installa à sa table, et ils commandèrent des boissons. Son ami était +radieux, il y avait probablement quelque chose de nouveau dans sa +vie.
— Quelles nouvelles, Uhr ?
— Je vais changer de métier.
— Encore ?
Il lui sourit.
— J’ai décidé de m’engager dans la garde de la capitale. Tenir une épée me +manque trop, décidément...
— Sérieusement ?
— Oui. Je suis allé voir, avant hier, la guilde des troubadours et -ménest
Farl sourit. — Non, mais ils ont été impressionné par mes talents -acrobatiques, et ils pensent que je peux faire un très bon jongleur.
— Hé bien, ça promet ! Mais es-tu sûr de laisser tomber pour de bon la vie -de la nuit ?
Il haussa les épaules.
— Je pense, oui.
Uhr l’observa d’un air critique. Mais il savait que son ami n’avait pas besoin -de deviner, sous ses vêtements, quelques accessoires d’assassin dont il avait -du mal à se séparer pour comprendre qu’il n’était pas sûr du tout, en fait. Il -avait longuement hésité avant de prendre cette décision, et ne savait -toujours pas si il allait la tenir. Son ami parut comprendre, et lui fit un clin -d’œil.
— Bah, tu verras bien, n’est-ce pas ?
Ils burent quelques gorgées en silence, puis Uhr reprit la parole.
— D’ailleurs, moi aussi je vais changer de boulot d’ici peu.
Farl haussa les sourcils.
— Ah ?
— Je pense que je vais m’engager dans la garde de la capitale. Tenir une -épée me manque un peu trop...
— La garde a une certaine réputation, non ? Il n’est pas difficile d’y +class="newline" />— Hé oui !
— La garde a une bonne réputation, ce n’est pas trop compliqué d’y entrer ?
— Certaines unités, oui. Mais je vais m’engager en simple soldat, et on -verra après. -

Il hocha la tête et prit une gorgée supplémentaire. Tout cela était -prometteur. -

— Il y a des unités d’élite, qu’il est difficile d’intégrer. Mais il y a de la +place pour y être simple soldat, et après, qui sait...
Il lui sourit.
— C’est vrai que tu pourrais bien t’en sortir.
— J’espère en tous cas ! Ça promet d’être intéressant. Et toi, comment va +ton boulot ? + + +

Il prit un moment pour boire une gorgée de bière. Il ne savait pas +comment aborder le sujet.
— Hé bien... moi aussi, j’hésite à changer de métier.
Uhr eut un regard surpris.
— Vraiment ? Pourtant, tu avais l’air de te plaire dans celui d’assassin...
— Oui, je m’y plaisais... Mais...
— Le fait de tuer te gène ?
— Plutôt celui de tuer froidement, sans envie, de n’être qu’une lame bien +payée.
Son ami réfléchit un moment avant de répondre.
— Tu sais, en tant que soldat de la garde, je vais me poser un jour ou +l’autre les mêmes questions... en moins bien payé, par contre.
Uhr lui donna une pichenette sur l’épaule. Il répondit par un sourire.
— Et ton maître assassin, il ne va pas apprécier, non ?
— Oh, ça, ça va. En fait c’est plus ou moins lui qui m’en a parlé en +premier. Il m’expliquait qu’un bon assassin devait avoir un métier +relativement normal à côté, pour lui servir de couverture. Il m’a parlé de +quelques cas d’assassins qui avaient progressivement choisi leur seconde vie +à leur première. Il ne parlait pas d’eux en traîtres. Je me demande s’il +se doute de mes sentiments, en fait... Peut-être a-t-il évoqué cela +exprès ? +

Il marqua une pause.
— La question est, que vas-tu faire à la place ?
— Je ne sais pas encore. C’est bien le problème.
Uhr sourit, et termina sa chope.
— Tu trouveras bien quelque chose qui te plaît.
Il lui rendit son sourire, et termina la sienne à son tour. Il trouverait bien, +oui... +

+[
+
+

+ + +

Irdann -

Enfin, il avait le droit de sortir du temple ! À la fois émerveillé et +

Enfin, il avait le droit de sortir du temple ! À la fois émerveillé et surpris, il observait les gens autour de lui. Ce n’est pas qu’il n’avait vu personne dans le temple, mais l’attitude des gens y était fort différente. Par crainte et respect de la déesse, ils y gardaient une attitude posée, presque - - soumise. Dehors, il les voyait rire et pleurer, s’aimer et se détester, bref, être humains. Sans compter qu’il n’avait jamais vu la capitale, qui était très différente du château du duc son père, au moins dans ses souvenirs d’enfant. -

La rue qu’il suivait était si animée, malgré l’heure très matinale, qu’il +

La rue qu’il suivait était si animée, malgré l’heure très matinale, qu’il regrettait de voir la distance le séparant du poste de garde diminuer. Allons, il aurait d’autres occasions de voir la ville, se dit-il. Il avait rendez-vous avec maître Ernest, qui devait lui enseigner l’art de l’épée. Il existait beaucoup -de maîtres d’armes, mais Khil, le prêtre qui s’occupait de son éducation -et lui avait appris les bases du combat, avait senti les capacités de -son élève, et avait décidé de l’envoyer chez le meilleur épéiste qui -soit. -

Il était arrivé devant le poste de garde. Il prit une grande inspiration, et +de maîtres d’armes, mais Khil avait décidé de l’envoyer chez le meilleur +épéiste qui soit. +

Il était arrivé devant le poste de garde. Il prit une grande inspiration, et s’adressa au garde qui en gardait l’entrée.
— Excusez-moi, je dois voir maître Ernest.
L’homme l’observa quelques instants. Irdann portait une longue tunique blanche, avec dans un écusson le symbole de sa déesse, le tout sur un pantalon de lin gris clair. Des sandales en cuir complétaient sa tenue, ainsi -qu’une ceinture de laquelle pendait une épée assez ouvragée.
— C’est vous le novice du temple de Melna ? Il vous attend. Venez. -

Irdann suivit le garde à l’intérieur. Un homme d’une quarantaine +

Irdann suivit le garde à l’intérieur. Un homme d’une quarantaine d’années, habillé en soldat, discutait tout en lisant une lettre avec un -archer, mince, aux cheveux longs, et aux oreilles pointes. Un elfe ! -C’était la première fois qu’il en voyait un. On lui avait dit qu’on -croiserait toutes sortes de types dans la capitale, il aurait pu s’y -attendre. L’archer était vêtu d’une tunique verte, d’un pantalon blanc -et d’une cape vert foncé, tous dans un tissu qui semblait très fin. -L’homme sourit à l’elfe, alors qu’il entendit quelques morceaux de -conversation.
 ! C’était la +première fois qu’il en voyait un. On lui avait dit qu’on croiserait +toutes sortes de types dans la capitale, il aurait pu s’y attendre. +L’archer était vêtu d’une tunique verte, d’un pantalon blanc et d’une +cape vert foncé, tous dans un tissu qui semblait très fin. L’homme +souriait.
— ...mon grand-père fut son maître d’escrime. À mon tour d’instruire son élève ! Vous pouvez lui dire de me l’envoyer dès que possible.
L’elfe hocha la tête et sourit en retour, à l’instant où l’homme aperçut + + Irdann.
— Ah, excusez-moi un instant.
Le garde qui l’accompagnait le présenta.
 ! Et puis, autres, cela le changerait. Fini le fils du duc, fini l’apprenti paladin. Le maître se tourna vers l’elfe, qui attendait en retrait.
— La règle sera la même pour tous les élèves, bien entendu.
L’archer hocha la tête en souriant, et quitta la pièce. Un autre élève comme -lui ? Un elfe ? Ça aussi, c’était nouveau et excitant. Il savait qu’il y avait -des elfes qui vivaient dans la capitale, et il en avait vu un ou deux dans le -temple de Melna. Mais il n’en avait jamais vraiment rencontré... Il se -demanda combien d’élèves avait ce maître, et lesquels. Il laissa le garde le -guider hors de la pièce. -

L’archer hocha la tête et quitta la pièce. Un autre élève comme +lui ? Un elfe ? Ça aussi, c’était nouveau et excitant. Il savait qu’il y +avait des elfes qui vivaient dans la capitale, et il en avait vu un ou +deux dans le temple de Melna. Mais il n’en avait jamais vraiment +rencontré... +

Tout en se laissant guider hors de la pièce, Il se demanda combien +d’élèves avait ce maître, et lesquels. +

Uhr -

Six lits alignés, un coffre en bois brut sous chacun d’eux. Dans un coin, +

Six lits alignés, un coffre en bois brut sous chacun d’eux. Dans un coin, une petite porte vers ce qui ressemblait à une salle de bains assez simple. Sur un des côtés, un large rideau, qui pouvait potentiellement couper la pièce en deux, derrière lequel se situaient deux autres lits, semblables aux -autres. Aucune décoration sur les murs, et une petite fenêtre apportait -un peu de lumière dans ce qui n’était qu’un dortoir pour gardes, +autres. Il n’y avait aucune décoration sur les murs, et une petite fenêtre +apportait un peu de lumière dans ce qui n’était qu’un dortoir pour gardes, semblable à celui qu’il avait connu pendant un an, lorsqu’il s’était engagé. -

Il choisit un lit qui avait l’air inoccupé, et posa les quelques possessions +

Il choisit un lit qui avait l’air inoccupé, et posa les quelques possessions qu’il avait dans le coffre. Puis il s’assit, pensif. Il avait réussi ! Maître -Ernest l’avait jugé digne de suivre son entraînement à l’épée, et d’intégrer -cette unité d’élite. Non seulement le boulot serait beaucoup mieux payé -qu’en tant que soldat de base, mais l’expérience serait sûrement très -enrichissante. Et il allait apprendre de nouvelles techniques de combat... Il -avait entendu dire que dans cette section, on trouvait beaucoup d’épéistes -qui venaient de loin et repartaient après avoir suivi son enseignement. Et -lui ? Resterait-il à la garde toute sa vie ? -

Ses pensées furent interrompues par l’entrée d’un jeune homme, l’air un +Ernest l’avait jugé digne de suivre son entraînement à l’épée, et d’intégrer +cette unité d’élite. Non seulement le boulot serait beaucoup mieux payé +qu’en tant que soldat de base, mais l’expérience serait sûrement +très enrichissante. Un collègue garde l’avait un peu renseigné sur +les différentes recrues de cette section. Des profils très variés, dont +beaucoup venaient de loin, et avaient prévu de repartir après avoir +suivi son enseignement. Il se demandait si lui y resterait toute sa +vie... +

Ses pensées furent interrompues par l’entrée d’un jeune homme, l’air un peu timide. Il portait une tenue de prêtre, ou ce qui y ressemblait, et avait sous le bras son uniforme de garde. Comme lui, il sembla estimer la pièce, puis désigna le lit à côté du sien.
— Celui-ci est libre ?
— Je crois oui. Tu es une nouvelle recrue ?
— Oui. Je m’appelle Irdann. -

Il lui tendit une poignée de main, que le dénommé Irdann serra. Le soir -allait tomber bientôt, et les autres gardes allaient rentrer sous peu, ils -allaient probablement dîner ensemble. Il restait une petite heure à tuer. La -tenue de novice l’intriguait.

Il lui tendit une poignée de main, que le dénommé Irdann serra. Le +soir allait tomber bientôt, et les autres gardes allaient rentrer sous +peu, ils allaient probablement dîner ensemble. La tenue de novice +l’intriguait.
— Tu viens d’un temple ?
— Oui, je suis apprenti paladin.
— Oui, je suis apprenti paladin. Et toi ?
Il hocha la tête. Le premier, mais vraisemblablement pas le dernier, songeait-il, des profils surprenants qu’il risquait de rencontrer ici. Combien y en aurait-il ?
— Je suis Uhr. J’étais un simple soldat jusqu’à hier, et j’ai enfin eu le droit d’intégrer cette unité et de suivre l’apprentissage de maître Ernest. -

Le jeune homme lui sourit et posa un petit sac sur le lit à côté +

Le jeune homme lui sourit et posa un petit sac sur le lit à côté du sien. Il remarqua son épée, ornée de gravures délicates et d’un blason.
— D’où te vient cette arme ?
— J’imagine, oui. Sais-tu qu’il y en a à la garde ?
— J’ai entendu parler d’un elfe qui arrive dans quelques jours...
Il hocha la tête. Un collègue garde lui avait donné à l’avance une liste des -éléments de cette unité. L’avantage de connaître déjà en partie la place. -
Il hocha la tête. Le collègue lui en avait parlé.
— Une elfe. Il y a aussi un nain.
Irdann parut surpris.
— Une elfe ? Une femme ?
Irdann le regarda quelques instants, et lui sourit.
— De toutes façons, ça ne change pas grand chose. Nous sommes désormais soldats, au même rang, n’est-ce pas ?
Soulagé de constater qu’il ne comptait pas insister sur le sujet, il lui rendit -son sourire. -

Du bruit se fit soudain entendre dans le couloir, et les autres recrues, en -tenue de soldat entrèrent dans le dortoir. -

Du bruit se fit soudain entendre dans le couloir, et les autres recrues, en +tenue de soldat entrèrent dans le dortoir. +

Silwë -

La ville humaine était si grande et impressionnante... Des centaines, -voire peut-être des milliers, de maisons faites de pierre et de bois, -construites à même le sol. Entre ces maisons, des rues pavées de pierre, -et bien peu d’arbres... Et il y avait tant d’humains ! Certes, elle -s’attendait à en voir, mais ici, il n’était même pas possible de les -éviter, tellement ils étaient nombreux, dans la rue, aux fenêtre des -maisons, dans des boutiques qui regorgeaient de produits humains -originaux... Ils les regardaient, elle et l’archer qui l’accompagnait, d’un air -curieux. Elle se rapprocha de lui, un peu inquiète. Ce qu’on disait sur -les humains n’était pas toujours très rassurant. Il sembla sentir sa -crainte.
— Ne t’inquiète pas. Maître Ernest est quelqu’un de très bien. Et -il y a parmi ses élèves toutes sortes de gens très différents. Nous -arrivons. +

C’était la première fois qu’elle voyait une grande ville humaine. Des +centaines, voire peut-être des milliers, de maisons faites de pierre et de bois, +construites à même le sol. Entre ces maisons, des rues pavées de pierre, et +bien peu d’arbres... Et il y avait tant d’humains ! D’accord, c’était idiot, +elle s’attendait à en voir ; mais ici, il n’était même pas possible de les +éviter, tellement ils étaient nombreux, dans la rue, aux fenêtres des +maisons, dans des boutiques qui étalaient leurs produits... Ils les +observaient, elle et l’archer qui l’accompagnait, d’un air curieux. Elle se +rapprocha de lui, un peu inquiète. Ce qu’on disait sur les humains n’était +pas toujours très rassurant.
— Hé, ne panique pas. Les humains ne sont pas méchants. Et maître +Ernest est quelqu’un de très bien. D’ailleurs, nous arrivons.

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— Merci, class="newline" />— J’ai besoin de toi pour une mission importante.
Il releva la tête, surpris.
— Mon nom est Samantha, et je vis dans ce temple que tu vois, près de la - - ville de Touryre.
Elle désigna le temple au centre de la plaine.
— J’y suis la grande prêtresse, mais j’y vis enfermée. Le personnel du @@ -1149,11 +1302,11 @@ class="newline" />L’avantage d’ questions sur ce qu’elle faisait dans le temple. L’inconvénient, c’est qu’on ne la laissait pas sortir et qu’elle était surveillée tout le temps... Ah quelle malchance elle avait eu de se retrouver prêtresse dans ce + + trou perdu ! Elle avait discuté avec un prêtre venu de la capitale. Il avait pu quitter son temple, et partir à l’aventure. Cela l’avait fait rêver. Mais comment sortir du temple ? Ils étaient si bornés, si - - butés... impossible de leur faire comprendre... Elle avait essayé, en vain.

Elle suivit la jeune novice, munie d’une bougie, qui la ramenait à sa @@ -1184,12 +1337,12 @@ droit, et intelligent. Il pouvait r combien de temps ? Il pouvait mettre des jours, voire des semaines à arriver... Cette attente allait être longue et insupportable, mais peut-être y avait-il la liberté à la clé. Peut-être. + +

Uhr

Uhr appréciait les moments où il patrouillait dans la rue avec Irdann et Silwë. Ils formaient un trio à la fois très disparate et redoutablement - - efficace. Visuellement, ils incarnaient respectivement la force brute, l’intelligence posée, et la subtilité. Cela les faisait sourire de savoir qu’en réalité, la petite elfe à l’air fragile était tout autant capable que les autres @@ -1207,8 +1360,8 @@ class="newline" />— Raconte ?< class="newline" />— J’ai vu une grande prêtresse de Melna, qui me demandait de l’aide pour la sortir de son temple.
— Et c’est la première fois que tu rêves de grandes prêtresses ? Pourtant, -tu as dû en voir beaucoup durant ton enfance, non ? Questionna Silwë -
 ? questionna +Silwë.
— Oui mais... là j’ai l’impression que... c’était différent. Elle était extrêmement nette, ainsi que le décor derrière elle.
— Les prêtres de Melna ont-ils la capacité d’envoyer des rêves ?
— D’apr souhaite qu’on vienne l’enlever... de façon spectaculaire.
Alors que Silwë ouvrait des yeux incrédules, Uhr réfléchissait.
— Une prêtresse à enlever... de façon spectaculaire... hm. Tu veux bien tout -nous raconter en détails ? -

Alors qu’Irdann racontait tous les tenants de son rêve, Uhr se prit à -sourire.
— Tu as une idée en tête, c’est ça ? Demanda Irdann.
— Une petite. On se retrouve le soir au bar habituel, je vous explique tout +nous raconter en détail ? -ça.

Alors qu’Irdann racontait tous les tenants de son rêve, Uhr se prit à +sourire.
— Tu as une idée en tête, c’est ça ? demanda Irdann.
— Une petite. On se retrouve ce soir à la taverne habituelle, je vous +explique tout ça.
— On ne sait même pas si c’est un vrai rêve ou un message...
— Pour ça, proposa Irdann, tu peux toujours aller voir le temple de Melna ce soir, et leur demander si la dénommée Samantha existe bien, et est bien @@ -1259,12 +1412,12 @@ barbare venu de nulle part, p à mains nues, enlevant la belle prêtresse et s’enfuyant sur son cheval blanc ?
Elle le regarda un instant, légèrement incrédule. Il avait le physique de + + l’emploi, c’était évident, mais de là à réussir une telle tâche... Elle jeta un œil à Irdann à côté, qui fronça les sourcils. Voyant leur air surpris, Uhr éclata de rire.
— C’est ce que les prêtres et les habitants verront, évidemment. Il va - - falloir mettre en scène tout cela, et on ne sera pas trop de trois, croyez-moi.
Il prit une grande inspiration et se pencha vers l’avant de la table, abaissant @@ -1296,12 +1449,12 @@ supporter la pauvre b class="newline" />— La grande prêtresse ne peut-elle pas l’immuniser elle-même ? Après tout, elle souhaite qu’on l’enlève, si j’ai bien compris...
— Oui, à condition qu’elle puisse coopérer activement, et de plus c’est un + + risque qu’on la voit l’aider...
Uhr avait écouté le morceau de conversation, en réfléchissant. Il reprit la parole.
— Hé, vous m’avez donné une très bonne idée. Dans la fuite, il faut que - - vous deux preniez ma place et celle de la prêtresse, d’une façon ou d’une autre.
— En supposant je puisse me faire passer pour toi, effectivement, ça @@ -1333,19 +1486,19 @@ class="newline" />Elle secoua la t class="newline" />— Dans une forêt, oui, je peux circuler à peu près partout sans être vue. Mais dans un temple, c’est plus compliqué...
— Ne vous inquiétez pas, je connais quelqu’un qui peut nous aider pour + + ça.
— Il faut se procurer des costumes de barbare, et un de grande prêtresse aussi, mais ça ne doit pas être très compliqué.
— Surtout qu’il n’est pas nécessaire que les doublures aient un costume - - parfait, il suffit que ça soit à peu près ressemblant de loin. Vous ne vous approcherez pas des prêtres de toutes façons.
Irdann, qui semblait un peu gêné, fit part d’une remarque.
— Tout de même, j’aurais quelques scrupules à te voir tuer tous ces gens du temple de Melna...
— C’est pour ça qu’on va essayer au maximum de les assommer, et de -s’enfuir rapidement. Pour ça, les droguer peut-être une solution.
— S’enfuir d’un temple endormi, ce n’est pas très héroïque, non ?
— Il faudra ajuster pour qu’ils soient juste assez sonnés pour être peu résistants. Mais les prêtres pourront quand même invoquer des @@ -1370,6 +1523,8 @@ moins efficaces sans s’en rendre compte&nb class="newline" />Uhr sourit.
— Je connais quelqu’un qui peut nous fournir ça, ne vous inquiétez pas. + +

Silwë soupira.
— Qui sont ces gens dont tu nous parles qui peuvent nous aider ? Ou...
— Je vais vous pr capable de s’introduire dans n’importe quel bâtiment, et spécialiste en poisons.
— Un assassin ?
— Mieux encore. Disons... Un ménestrel. Je reviens, ne bougez pas.
— Mieux encore. Disons... un ménestrel. Je reviens, ne bougez pas.
Il se leva et se faufila dans la foule dense. Irdann et Silwë se regardèrent en haussant les sourcils.

— J’apporte une nouvelle assiette demanda la gérante.
— Oui, merci !
— Tant qu’à y être, amenez-en quatre, ajouta Uhr. + +

Il lui avait déjà parlé de ses compagnons de la garde, mais c’était la première fois qu’il les rencontrait. Ils étaient habillés, tout comme Uhr, en soldats –d’une tunique brune et cotte de maille–, mais ils étaient aussi surprenants que différents. - -

Le dénommé Irdann, l’apprenti paladin, était un grand brun, aux cheveux mi-longs, plutôt mince, à moins que ce ne soit le contraste avec Uhr qui lui donnait cet effet-là. Beaucoup d’hommes avaient l’air frêles à côté, -en fait. L’autre compagnon était une elfe aux longs cheveux clairs, nommée -Silwë. S’il ne connaissait pas la réputation de la garde et de maître -Ernest, il se serait sérieusement demandé ce qu’elle y faisait. Ils lui -sourirent et il s’assit à côté d’eux, pendant que Uhr lui détailla leur -plan. +en fait. L’autre compagnon était une petite elfe, aux yeux bleus et aux longs +cheveux clairs, nommée Silwë. S’il ne connaissait pas la réputation de la +garde et de maître Ernest, il se serait sérieusement demandé ce qu’elle y +faisait. Ils lui sourirent et il s’assit à côté d’eux, pendant que Uhr lui +détailla leur plan.

Les yeux ronds, il fixait les trois soldats à tour de rôle.
— Mais... c’est complètement insensé votre histoire.
Ils hochèrent la tête.
— Bien s class="newline" />Il vit ses interlocuteurs se détendre et lui sourire à leur tour.
— Bon, plus sérieusement, je peux me procurer un poison léger qui rend légèrement apathique. Par contre, il en faudra une bonne quantité, et ça -peut prendre un petit moment. Je peux aussi trouver quelques fumigènes, -très pratiques pour se cacher. Et côté infiltration, vous pouvez compter sur +peut prendre un petit moment. Je peux aussi trouver quelques artifices, très +pratiques pour se cacher. Et côté infiltration, vous pouvez compter sur moi.
Il sourit devant leur regard incrédule. Il était toujours vêtu de sa tunique orange décorée, plus adaptée à une scène de spectacle qu’à une mission @@ -1441,23 +1596,21 @@ class="newline" />— Je vous expliquerai tout cela en d raconter. Faites-moi confiance pour le moment.
Ils terminèrent leurs plats et se levèrent.
— Il se fait tard, il nous faut rentrer. On se retrouve demain pour mettre au + + point les détails ?
— Quand partirons-nous ?
— Si maître Ernest nous accorde un congé rapidement, on peut partir d’ici une dizaine de jours... le temps de tout préparer. Il faut compter le trajet - - aussi.
Ils opinèrent, puis quittèrent la taverne après avoir payé la gérante.

Farl rentra seul, son compagnon l’ayant quitté nettement plus tôt. Avait-il eu raison d’embarquer dans cette histoire ? Ils n’y gagneraient -aucune gloire, puisqu’ils resteraient incognito... Peu d’argent, même s’ils -avaient convenu que, dans la mesure du possible, ils piocheraient dans les -réserves du temple pour au moins amortir le coût du trajet. Juste -une histoire folle... Il savait qu’il n’était pas des plus doués pour -écrire de belles sagas épiques digne d’un grand troubadour, mais -cette histoire le mériterait amplement. Peut-être pourrait-il se faire -aider ? +aucune gloire, puisqu’ils resteraient incognito... Peu d’argent, sauf s’ils +volaient de l’or au temple... Juste une histoire folle... Il savait qu’il n’était +pas des plus doués pour écrire de belles sagas épiques digne d’un grand +troubadour, mais cette histoire le mériterait amplement. Peut-être +pourrait-il se faire aider ?

Il ne savait quasiment rien des deux compagnons de Uhr... Que valaient-ils ? S’ils étaient élèves de maître Ernest, ils étaient probablement des virtuoses de l’épée, mais cela ne serait pas suffisant. Mais il avait @@ -1469,9 +1622,668 @@ avait quelque chose entre l’elfe et le jeune paladin, qui semblaient tr familiers l’un envers l’autre. Ils l’étaient aussi avec Uhr, en fait, et cette question était stupide, il verrait assez rapidement de toutes façons. +

Irdann +

Irdann et Farl s’avançaient dans les rues de Touryre, se dirigeant vers le +temple. Ils avaient tous les deux revêtu des vêtements sobres, et se +fondaient assez bien dans la population, même si un léger accent révélait +qu’ils n’étaient pas de la région. Ils avaient mis une bonne semaine à venir +de Talecombe, même à cheval. +

Il avait suggéré d’aller rencontrer la prêtresse de jour, en sachant qu’elle +le reconnaîtrait probablement. Farl avait décidé de l’accompagner, en en +profitant pour repérer la configuration du temple. Les deux autres avaient + + +préféré rester discrets. Si le visage de Uhr devait rester caché jusqu’à +l’enlèvement, celui de Silwë pouvait susciter une certaine curiosité –les elfes +étant peu courants dans cette région– dont ils pouvaient se passer. Ils +étaient donc tous deux restés en dehors de la ville, à installer un +campement discret dans la forêt. +

Il avait d’ailleurs remarqué la façon dont le ménestrel regardait Silwë. +Oh, il n’était pas le premier, c’était certain. La petite elfe, avec ses yeux +bleus et son air innocent –malgré l’uniforme de soldat– attirait les regards. +Mais à voir sa réaction, peut-être serait-il le premier à obtenir une réponse +positive... Enfin, le premier à sa connaissance, corrigea-t-il mentalement. Et +depuis qu’elle était arrivée à la capitale. Après tout, qui sait ce qu’elle avait +connu avant, chez les elfes sylvains ? +

— Irdann ? On arrive au temple !
Il secoua la tête et sortit de sa rêverie. Le grand bâtiment s’étendait devant +eux. Exactement comme dans son rêve... Il adressa un petit hochement de +tête à Farl, et ils gravirent lentement les marches qui menaient à +l’entrée. +

Samantha +

Elle avait hâte que l’après-midi se termine. La journée avait été +épuisante. Dans trois jours avait lieu l’anniversaire de son intronisation, et +le personnel du temple était en effervescence. À cela s’ajoutait une +file incessante de fidèles, venus offrir des cadeaux, demander des +conseils à la déesse, ou quémander son pardon. Il était rare qu’elle +ait besoin d’invoquer de réels enchantements, souvent un sourire +encourageant et quelques paroles redonnaient confiance à la plupart des +villageois. +

Les deux derniers visiteurs –qu’elle n’avait jamais vus en ville, mais +celle-ci était grande– s’avancèrent et s’agenouillèrent, conformément aux +usages. Pourtant, lorsque l’un d’eux releva la tête pour lui adresser les +paroles habituelles, elle eut un sursaut de surprise. C’était comme si elle le +connaissait sans l’avoir jamais vu... Se pouvait-il... +

Elle s’avança vers lui. En approchant sa main de son visage, elle ferma +les yeux. Elle reconnut immédiatement son aura. C’était lui ! Le fameux + + +apprenti paladin qu’elle avait imploré de venir...
— Irdann ? murmura-t-elle.
Le jeune homme lui sourit, et répondit à voix basse.
— Je suis venu à votre demande, Grande Prêtresse. Avec des compagnons.
Elle jeta un œil au second jeune homme, plus petit, qui sous ses airs +sages, semblait étudier avec intérêt les lieux. Il n’y avait personne qui +puisse les entendre maintenant, mais d’autres prêtres et prêtresses +circulaient régulièrement autour d’eux, et la grande salle du temple +ne se prêtait guère à une longue discussion, encore moins discrète. +
— Vous avez... préparé quelque chose ?
— Nous aimerions vous en parler plus longuement. Mon compagnon Farl ici +présent peut s’introduire discrètement dans le temple, cette nuit. Où et +quand peut-il vous trouver seule ?
Elle releva la tête, observant le dénommé Farl, surprise. Après un instant de +silence, elle répondit, plus bas encore.
— Vers minuit. Dans la partie nord du temple, où sont mes appartements. +J’allumerai une bougie à la fenêtre quand je serai seule. +

Puis elle fit quelques pas en arrière. Ils se relevèrent et la saluèrent +respectueusement, et sortirent. En les observant quitter la grande salle du +temple, elle sentait son cœur battre. Il était arrivé... et non seulement il +avait une idée, mais en plus il n’était pas seul ! Qui étaient ces fameux +compagnons ? +

Farl +

La silhouette sombre, quasi-invisible dans la nuit, escalada lestement le +mur du temple. Arrivé à son sommet, elle s’arrêta pour observer la +cour intérieure. Le bâtiment était calme, et de l’une des fenêtres, au +rez-de-chaussée, on voyait vaciller la lueur d’une bougie. Farl observa +silencieusement les alentours, et après avoir constaté qu’il n’y avait +personne, désescalada le mur et s’approcha de la fenêtre. +

La prêtresse était assise à son lit, vêtue d’une longue tunique blanche, +seule. Elle semblait attendre quelque chose. Sans un bruit, il sauta à +l’intérieur. + + +

Elle sursauta, et retint un cri.
— N’ayez pas peur, c’est moi, Farl ! murmura-t-il.
Elle reprit son souffle en l’observant. Il avait revêtu la tenue gris sombre des +gens de la nuit, mais elle n’eut aucun mal à reconnaître le jeune homme qui +accompagnait Irdann.
— Personne ne vous a vu ?
— Non, rassurez-vous.
Elle jeta un regard aux alentours, comme pour vérifier que personne n’avait +été alerté par son arrivée. Puis elle hocha la tête.
— Alors, qui êtes-vous ? Et qui vous accompagne ? Que prévoyez-vous de +faire ? +

Il commença ses explications. Samantha l’écouta attentivement, en +l’interrompant de temps en temps pour poser une question pratique. À la fin, +elle s’était assise, le regard dans le vide.
— C’est... insensé. J’étais presque résignée à renoncer à un enlèvement +spectaculaire, et me contenter d’une évasion discrète... Mais tel que vous +le préparez, c’est possible. Et je vais pouvoir vous aider de mon +mieux.
Elle rejeta ses cheveux en arrière et se leva.
— Tout d’abord, commença-t-elle, je ne suis pas sûre qu’il soit nécessaire de +droguer les prêtres. Dans trois jours, c’est l’anniversaire de mon +intronisation, et le vin coulera à flots. Le soir, tout le personnel sera +passablement ivre. Par contre, tu peux utiliser un tel statagème pour +droguer leurs chevaux.
— Les prêtres de Melna ont des chevaux ? Ce n’était pas prévu...
— Oui, et nul doute qu’ils les enfourcheront pour partir à notre poursuite. +Mais il est relativement simple d’introduire un produit dans leur abreuvoir. +Tu sauras préparer ce qu’il faut ?
— Je pense, même si je ne connais pas la quantité exacte pour un cheval... +j’improviserai.
— Très bien.
Elle se mit à marcher dans la chambre, l’air décidé.
— Je vais surtout pouvoir vous aider avec des enchantements. Ça tombe +bien, lors de ce jour spécial, ils seront plus puissants encore. Le premier +visera à protéger le barbare des coups blessants. Pour cela, il suffira que je + + +le touche... Cela ne devrait pas poser de problèmes. Un autre servira à +couvrir notre fuite.
Farl hocha la tête.
— Trois jours, c’est peu mais c’est tout à fait envisageable. Je vous apporte +la drogue demain, à la même heure. D’autres recommandations ?
Elle réfléchit quelques instants.
— Méfiez-vous de Feyne. C’est mon second, il est très intelligent et assez +puissant. Vous le reconnaîtrez au pendentif brillant qu’il porte, insigne de +son rang. D’ailleurs, puisque j’y pense...
Elle se leva et alla chercher, dans une jarre, un sac de toile, de taille +moyenne, visiblement lourd.
— Je m’étais dit qu’un soldat apprenti-paladin ne roulait pas nécessairement +sur l’or, alors peut-être que ça amortira vos frais.
Il ouvrit le sac qu’elle lui tendit. Il était rempli de pièces d’or.
— En effet... Pourquoi ne pas nous en avoir parlé plus tôt ?
Elle sourit et lui fit un clin d’œil.
— Je préférais ne pas voir arriver un héros uniquement attiré par l’appât +du gain. +

Il lui sourit en retour, prit le sac et sortit silencieusement. +

Samantha +

Le grand jour était arrivé. La fête était grandiose, le temple rempli de +chants, de louanges et de victuailles. Elle avait enchanté le public en faisant +fleurir devant tous l’arbre qui poussait au centre de la grande salle. Le jour +touchait à sa fin, et les rayons du soleil couchant, entrant par la porte du +temple, donnaient une teinte orangée, presque enflammée, aux statues qui +entouraient la pièce. +

Tout à coup, elle entendit quelques cris de surprise, venus de dehors, et +le bruit d’un cheval lancé en plein galop. Elle se redressa, et prit le même +air surpris que ses compagnons. Le bruit de sabots frappant le marbre +s’approcha, jusqu’à ce qu’à la surprise et la peur générale, un cavalier +surgisse dans la grande salle. +

Elle avait beau s’y attendre, il fallait reconnaître qu’il était +impressionnant. L’homme qui descendit alors de cheval était grand, musclé, + + +vêtu d’un long pagne de cuir et de solides bottes. Quelques bracelets +rudimentaires en cuivre ornaient ses bras, et il faisait tournoyer dans les airs +une épée presque aussi grande que lui, comme s’il s’agissait d’une +brindille. +

Quelques prêtres, un peu moins abasourdis que les autres, tentèrent de +s’interposer. Il les envoya bouler d’un coup de poing ou de pommeau +d’épée, puis courut vers elle. C’était le moment de jouer le grand +jeu... +

À l’instant où il allait l’attraper, elle poussa un grand cri de terreur, et fit +mine de s’évanouir dans ses bras. +

Uhr +

Au moment où la prêtresse tomba dans ses bras, il sentit immédiatement +une douce chaleur l’envahir. Comme si le soleil réchauffait sa peau. Il eut +même l’impression que celle-ci brillait de reflets d’or, mais peut-être était-ce +une illusion due au crépuscule, et à l’huile qu’il s’était mise sur le +corps pour paraître plus impressionnant –huile au final bien inutile, +car la transpiration aurait eu le même effet. La bénédiction de la +déesse... +

Il poussa un grand cri de rage, mit la jeune femme sur son épaule, +enfourcha sa monture, et se rua vers l’entrée de la salle. Les prêtres s’étaient +ressaisis, plusieurs avaient empoigné une épée et certains semblaient en +train d’invoquer des enchantements. +

Les prêtres étaient-ils vraiment ivres, ou étaient-ils si peu doués que +cela au combat ? L’enchantement de protection de la grande prêtresse +était-il si efficace ? Le sentiment d’être un héros de légende lui donnait-il +des ailes ? Ou peut-être un peu de tout cela à la fois ? Toujours est-il qu’il +n’eut aucun mal à parer les coups d’épée et à les rendre. Il mit ainsi hors +combat sept ou huit hommes, à coups de poings et d’épée, avant d’arriver +en bas des escaliers. +

C’est alors qu’il sentit un frémissement, venant de la prêtresse, toujours +sur son épaule. Elle semblait... chanter. Ou invoquer ? Il ne réfléchit pas +plus et lança sa monture à toute vitesse dans les rues de la ville, faisant + + +mouliner son épée pour faire dégager, de peur, les quelques passants qui +risquaient de se mettre sur son chemin. +

Alors que le soleil était en train de disparaître et que l’obscurité +tombait sur l’entrée de la ville, un brouillard se leva, aussi soudain que +dense.
— Voilà. Avec ça, ils vont avoir plus de mal à nous suivre...
Il sursauta presque. La jeune prêtresse s’était redressée, et le regardait en +souriant. +

Farl +

Tapis à l’entrée de la forêt, dans une cachette soigneusement aménagée +par leurs soins, Farl, Silwë et Irdann attendaient l’arrivée d’Uhr. Il vérifia +une dernière fois ses artifices qui leur permettrait de faire l’« échange » +efficacement, même si l’arrivée du brouillard divin simplifierait grandement +ces opérations. +

Irdann s’était vêtu, comme Uhr, d’un pagne et de bottes, et même s’il +n’avait pas la carrure du jeune barbare, il était plutôt crédible de loin. Silwë +avait enfilé une longue robe rouge et or, que lui avait fourni auparavant la +prêtresse, et qui l’aurait beaucoup mieux mise en valeur si elle avait été à sa +taille. Tous deux avaient néanmoins gardé leurs épées, et s’apprêtaient à +enfourcher leur monture. +

Dans quelques minutes, ils allaient débouler, et il faudrait faire vite. Il +ajusta le foulard qui couvrait son nez et son visage, et vérifia le tas +d’herbes exotiques à ses pieds. Des herbes dont la fumée brouillaient les +sens... +

Après un petit moment qui lui parut durer une éternité, il entendit enfin +le grand cri de rage d’Uhr, ainsi que le galop de son cheval. Le signal ! +Rapidement, il mit le feu aux herbes et à l’instant où la monture épuisée +passa devant lui, il agita un tissu pour diriger la fumée vers l’entrée du +chemin. +

Uhr mit rapidement pied à terre, suivi de la prêtresse, et tous deux +descendirent avec leur cheval dans le fossé, endroit parfait pour être +invisible depuis le sentier, et surtout, pour masquer les sons. À l’abri derrière + + +le brouillard, la nuit et la fumée des herbes, ils entendirent passer des +chevaux au galop, sans s’arrêter. Ils poussèrent tous les trois un léger soupir +de soulagement.
— Vous allez bien ? Vous êtes blessés ? murmura Farl.
— Quelques entailles, rien de critique.
— Mais je ne suis pas sûre qu’ils s’en sortent seuls. Même un peu ivres, ils +sont tout de même six. On devrait peut-être aller les aider...
C’était la voix de la prêtresse. Il soupira et hocha la tête.
— Allez vous mettre à l’abri et vous reposer. Je vais les suivre. +

Irdann +

La nuit était à peine tombée, mais la forêt était déjà très sombre, sans +compter le brouillard. Heureusement que Silwë, devant lui, tenait +les rênes et avait l’air de savoir à peu près où aller... Il tourna la +tête. Les silhouettes des prêtres à cheval étaient lointaines, mais +présentes.
— Nous avons une bonne avance, et ils nous suivent. Ils n’ont pas vu le +changement apparemment. Tout va bien pour le moment.
Irdann savait qu’il disait cela à moitié pour se rassurer lui-même.
— C’est étrange qu’ils n’aient pas encore essayé de nous foudroyer ? +demanda-t-elle.
— Je suppose qu’ils ont peur de blesser leur grande prêtresse. Cela ne veut +pas dire qu’ils n’essaieront pas plus tard... +

Ils se turent pendant quelques instants, se concentrant sur la route. Il +avaient beau être tous deux de bons cavaliers, il n’était pas très confortable +d’être à deux sur le dos nu d’un cheval. Petit à petit, le brouillard avait +diminué, peut-être que les prêtres l’avaient fait se dissiper en partie ? Ou +bien l’enchantement de la prêtresse était-il limité dans l’espace ou +le temps... Un doute lui parvint, qu’il finit par émettre à hautre +voix.
— Est-ce que mes oreilles me trompent, ou ils se rapprochent ?
Silwë tourna la tête pour regarder derrière eux. Ce qu’il pouvait lire de son +visage dans l’obscurité n’était pas particulièrement rassurant.
— J’ai peur que tu aies raison. Il va falloir trouver un autre moyen de les +semer, notre monture va fatiguer rapidement.
Il hocha la tête. Quelque chose lui revenait à l’esprit.
— Lorsque nous avons traversé une partie de la forêt, tu m’avais montré +une rivière et un pont un peu vieux...
— Exact. Précise ton idée ?
— Tu penses qu’avec quelques bons coups d’épée dans les cordes et les +vieux morceaux de bois, il s’effondrerait ?
Son amie resta tournée vers la route quelques instants, sans rien +dire. Puis brusquement, elle fit tourner à gauche leur monture, si +bien qu’il dut presque s’accrocher à sa taille pour ne pas tomber. Le +pauvre cheval tentait désormais de courir de son mieux dans les +broussailles.
— On va rejoindre le sentier qui mène au pont. Pas d’inquiétude pour la +vitesse, ils seront aussi ralentis que nous, s’ils nous suivent. Si tu suis le +sentier après le pont, tu débouches en dehors de la forêt, je ne sais plus +trop ce qu’il y a mais tu devrais retrouver ton chemin sans trop de +soucis.
— Hé, tu vas me laisser saboter ce pont et tu seras mieux pour galoper dans +la nuit !
Elle secoua la tête.
— Tu es meilleur cavalier que moi, Irdann. Je peux voir les cordes à couper +dans la nuit, et s’il faut se cacher dans la forêt, je me débrouille mieux +que toi. Ils te trouveraient trop facilement s’ils se mettaient à te +chercher...
Il soupira. Elle n’avait pas tort. Sauf que...
— Même avec une longue robe rouge et or ?
Elle marqua une pause.
— Effectivement. Tiens-moi ça deux secondes.
Il tendit le bras et saisit les rênes qu’elle lui tendit dans sa main +gauche, tandis qu’à sa grande surprise, elle ôtait sa robe, qu’elle lui +tendit.
— Problème réglé. Et en agitant ça vaguement dans la nuit, ils croiront que +je suis toujours avec toi.
Elle rajusta sa ceinture et son épée par dessus la tunique courte qui lui +restait.
— Nous revoilà sur le sentier. Le pont est là-bas, tu le vois ?
— Bonne chance...
— Tu en auras besoin aussi ! +

La jeune elfe sauta du cheval et disparut dans un épais buisson. +

Silwë +

Elle se rappela à cet instant pourquoi il ne fallait pas sauter d’un +cheval au galop –même quand ce cheval, épuisé, ne courait plus +très vite. Avec le peu de vêtements qu’elle portait, elle se retrouvait +couverte de coupures, de bleus et d’égratignures. Mais rien de grave, +heureusement. +

Elle n’avait que peu de temps. Aussi vite qu’elle le put, elle se glissa sous +le pont et dégaina son épée, tout en essayant désespérément de reprendre +son souffle. Les cordes qui le tenaient étaient certes vieilles, mais épaisses et +de bonne qualité. Et en réalité, une épée, même bien affûtée, n’est pas le +meilleur des outils pour trancher une corde humide sur laquelle a poussé de +la mousse et du lierre. +

Le galop des chevaux des prêtres se rappochaient. Elle n’avait pas tout à +fait terminé...
— Désolée, Irdann, mais il va falloir que tu te débrouilles, murmura-t-elle. +

Elle prit une grande inspiration et plongea dans l’eau. +

Le courant aidant, elle refit surface une vingtaine de mètres plus loin, à +l’abri des joncs. Les deux cavaliers en tête étaient en train de franchir le +pont quand les cordes usées par les coups d’épées finirent par céder. Dans +un grand fracas de craquement, de cris et de hennissements, le pont +s’effondra. +

Un silence suivit, dans lequel elle commença à s’éloigner doucement et +silencieusement de la rivière, tout en essayant de limiter le bruit que ses +vêtements et cheveux faisaient en dégoulinant. Fort heureusement, les +prêtres semblaient assez occupés à leurs affaires. L’un des cavaliers avait +réussi à franchir de justesse la rivière. Le second était tombé, avec son +cheval, dans l’eau, et ses compagnons l’aidaient à en sortir. La rivière ne +faisait que quelques mètres de large et n’était pas très profonde, mais aucun +des chevaux épuisés n’avait très envie de se mouiller. Malgré cela, les + + +prêtres tentèrent de faire traverser le cours d’eau à leurs montures, avec +plus ou moins de succès.
— Prends de l’avance, et essaie de les rattraper ! cria l’un d’eux au +chanceux qui les attendait de l’autre côté.
Le prêtre hocha la tête et se lança à la poursuite d’Irdann. +

Irdann +

Silwë avait réussi... Il n’avait pas vraiment vu ce qui s’était passé, mais +il avait entendu le bruit du pont se fracassant, et le son obsédant du galop +de ses poursuivants avaient cessé. Il avait maintenant mis une distance +suffisante avec eux. Il soupira, mit sa monture épuisée au pas, et +l’accompagna, pied à terre. Avaient-ils abandonné pour de bon ? Il valait +mieux continuer à s’éloigner. +

Il n’avait pas vraiment regardé où il allait, mais il était peut-être temps. +Il n’y avait plus de brouillard, et les arbres étaient suffisamment espacés +maintenant pour qu’il arrive à distinguer son chemin à la lumière de la lune. +À sa droite, s’élevait une haute falaise, interdisant toute sortie par là, mais +un vieux sentier la longeait. S’il s’éloignait encore un peu de la rivière, il +serait enfin invisible, à l’abri... +

Alors qu’il commençait un peu à se rassurer, le bruit d’un galop tant +redouté parvint à ses oreilles. Oh non. Ils ne laisseraient donc jamais +tomber ? Il soupira, se remit en selle –ou plutôt à cru– et repartit, malgré +les protestations de sa monture. Tournant la tête, il remarqua alors que son +poursuivant était seul. Pourquoi ? Il n’eut pas le temps de réfléchir à cette +question qu’il déboucha brusquement dans une clairière à l’extrémité +de laquelle se trouvait... la falaise. Il pouvait essayer de chercher +un chemin vers la gauche, mais ne risquait-il pas de tomber encore +sur un cul-de-sac ? Et son cheval était vraiment épuisé. Il allait +falloir trouver une autre solution. Une cachette, peut-être ? Ou bien +escalader la falaise ? Ça allait être compliqué avec un cheval... Il mit +mied à terre, et, plus par habitude qu’autre chose, dégaina son épée. +Combattre le prêtre ? Cette idée ne l’enchentait guère, mais avait-il le +choix ? Son regard tomba alors sur la robe aux bordures d’or de la +prêtresse, qui se reflétaient dans la lueur de la lune, et resta une seconde + + +figé, réfléchissant. Cela pouvait peut-être marcher... Il tourna la +tête. Le prêtre n’était pas tout près, son cheval devait être fatigué +lui aussi. Il avait tout juste le temps. Un sourire se dessina sur son +visage. +

Silwë +

Se cacher dans la forêt était-il un don vraiment spécifique aux elfes +sylvains ? Les cinq prêtres restants faisaient un tel bruit, en essayant de +faire traverser leurs montures réticentes, que ce n’était pas bien difficile. Et +même sans cela, une forêt n’était jamais silencieuse, de jour ou de nuit. +Ce n’était pas pourtant si compliqué de faire moins de bruit que +ça... +

— Dépêchez vous, il faut aller aider Odal ! ordonna l’un d’eux, qui semblait +visiblement en charge.
— Pas la peine de crier si fort, Feyne. Et je crois que mon cheval +boîte.
Le dénommé Feyne soupira. Un autre prêtre hocha sa tête encapuchonnée. +La pauvre bête était celle qui était tombée dans la rivière quand le +pont s’était effondrée. De plus, elle tremblait encore plus que les +autres.
— Alors venez m’aider à faire traverser celui-là ! Vite ! +

Se cacher était d’autant plus efficace qu’ils ne cherchaient personne en +particulier. Elle aurait presque pu passer à côté et leur demander l’heure +qu’ils n’auraient pas fait attention à elle. Elle prit une seconde pour +imaginer cette scène totalement absurde dans sa tête, et ramena ses +bras contre son corps. Elle commençait à avoir froid, dans la nuit, +avec sa tunique trempée collée contre son corps. Elle avait bougé +pour s’éloigner d’eux, mais ce n’était pas suffisant pour lui tenir +chaud... +

— Là bas, on dirait qu’il est de retour !
Un prêtre montrait du doigt la silhouette d’Odal, qui revenait au galop en +leur faisant un geste. Arrivé à une dizaine de mètres de ses compagnons, +celui-ci désigna du doigt la direction d’où il revenait.
— Ils se sont arrêtés dans une clairière, au pied de la falaise. La prêtresse + + +est seule, je pense qu’il y a un piège...
Silwë fronça les sourcils. Cette voix sonnait étrange à ses oreilles. Et elle +n’était pas la seule à réagir comme ça. Brusquement, Feyne murmura +quelques mots et tendit un bras vers lui. +

Un éclair bleu d’une lueur aveuglante jaillit du ciel sombre, et se +dirigea droit vers Odal. Elle plaqua ses mains sur sa bouche pour +ne pas crier, et manqua de tomber de sa branche. Juste au dessus +de l’homme, l’éclair se sépara en deux, puis en quatre, et ainsi de +suite, et finit par contourner entièrement le prêtre et sa monture, +comme si une sphère invisible l’avait protégé. Il lui sembla que même +les insectes et animaux se turent pendant les quelques instants qui +suivirent. +

— Mais tu es fou, pourquoi tu as cherché à le foudroyer ? questionna un +des prêtres à côté de Feyne.
Celui-ci haussa les épaules.
— J’ai eu un doute... De toutes façons, il est immunisé, non ? Allez, en +route.
— Mais nous sommes deux à n’avoir pas pu faire traverser nos montures !
— Alors restez ici et soyez sur vos gardes ! +

Feyne et les deux autres qui avaient traversé enfourchèrent leurs chevaux +et se lancèrent à la suite dudit Odal. Silwë, toujours sur son arbre, les +regarda s’éloigner en réfléchissant. Il avait eu un doute sur son identité, au +point de tenter de le foudroyer... Puis elle reconcentra son attention sur les +deux prêtres restants, qui discutaient tout en attachant leurs chevaux à une +branche voisine.
— Il est fou, Feyne, ou quoi ?
— Bah, il a cru que c’était quelqu’un d’autre. Il a trop bu je te +dis.
— Parle pour toi, tu empestes le vin !
Le prêtre haussa les épaules.
— Toi aussi. Tiens, tu n’aurais pas une lampe ? Il fait de plus en plus +sombre, je n’aime pas ça...
L’autre fouilla ses poches.
— Non, par contre j’ai des allumettes. On peut allumer un petit + + +feu. +

Une petite flamme à la lueur aveuglante apparut bientôt au pied du +pont.
— Au moins, on voit quelque chose, maintenant ! dit l’un des prêtres avec +un sourire satisfait.
Silwë serra les dents. Non seulement, avec cette lumière, elle perdait son +avantage, mais en plus à cause du contraste, elle distinguait moins +bien les ombres alentours. Et en plus, ce petit feu, qui avait l’air de +l’appeler de sa chaleur douce, lui rappelait encore à quel point elle avait +froid.
— Et si quelqu’un arrive, nous le verrons arriver de loin, renchérit +l’autre.
— Tu crois qu’on craint quelque chose ?
Le prêtre haussa les épaules, et se leva, droit dans la direction de Silwë. +Celle-ci sentit son sang se glacer autant que ses doigts. Il ne pouvait tout de +même pas l’avoir vue, si ? Elle serra dans sa main la poignée de son épée. +S’il fallait en venir là... +

L’homme s’approcha de l’arbre dans lequel elle se tenait, sans lui jeter le +moindre regard. Il releva sa robe et se soulagea contre le tronc. Elle +laissa échapper un léger soupir de soulagement. Il revint ensuite vers +son compagnon. Celui-ci s’était assis et observait les environs, peu +rassuré.
— Tu crains vraiment que quelqu’un n’arrive ? lui demanda-t-il..
— Bah, si le barbare n’est plus dans la clairière... Tu ne veux pas aller jeter +un œil aux alentours ?
— Je suis peut-être assez sobre pour invoquer un enchantement de +détection, si ça peut te rassurer... +

Un enchantement de détection... Voilà autre chose. Ces enchantements +marchaient-ils même quand le prêtre était un peu ivre ? Détectaient-ils les +elfes ? Elle avala sa salive. Si oui, leur permettrait-ils de la localiser +précisément ? Quelle serait leur réaction s’ils tombaient sur une elfe +trempée et peu vêtue ? +

Farl + + +

Les suivre, les suivre... Plus facile à dire qu’à faire. Heureusement, même +s’il ne voyait pas très bien, le bruit que faisaient les prêtres à cheval +était facile à suivre. Il allait à pied, à moitié en courant, à moitié en +marchant, une monture aurait été bien évidemment hors de question. Les +prêtres n’avaient visiblement pas abandonné, il les entendait galoper +encore. Ivres, certes, mais c’est peut-être justement ça qui les avait fait +se lancer dans une poursuite en pleine nuit. À ce rythme, il ne les +rattraperait jamais, même en prenant des raccourcis à travers les +broussailles... +

Soudain, il entendit un grand fracas et des cris. Que se passait-il ? Il ne +pouvait s’empêcher de trembler pour Silwë et Irdann. Surtout Silwë, petite +et frêle... Il interrompit aussitôt ses pensées. Elle avait une épée, comme +Irdann, et les rares fois où il l’avait vue s’entraîner avec ses compagnons, +elle savait très bien s’en servir. À mesure qu’il se rapprochait, il lui sembla +que le bruit ne s’éloignait plus. Était-ce bon ou mauvais signe ? Il n’était +plus très loin lorsqu’il aperçut l’éclair illuminer le ciel d’une lueur +bleutée. Il frissonna. Ce n’était clairement pas bon signe. Il se mit à +courir. +

Une lueur était apparue, au loin. Il s’approcha avec précautions. C’était +un feu, et deux prêtres s’y affairaient. Leurs chevaux étaient attachés un +peu plus loin. Derrière eux se trouvait le pont sur la rivière, ou plutôt ce +qu’il en restait. Que s’était-il passé ? Et où étaient les autres prêtres, et ses +compagnons ? Il s’approcha encore, en essayant de ne pas faire de +bruit. +

Les prêtres n’avaient pas l’air particulièrement rassurés. L’un d’eux +s’était mis à genoux, et semblait prier. Il avança lentement, avec +précautions. En ville, c’était différent. Il n’y avait pas des branches et +feuilles par terre pour trahir ses pas, et puis l’invisibilité dans une cité +consistait, la plupart du temps, à être juste assez visible et audible pour que +personne n’ait envie de faire attention à lui. +

Soudain, le prêtre à genoux se redressa brusquement, dégainant son +épée de sa ceinture, paniqué.
— Quatre hommes !
— Quoi, sursauta l’autre. Il y a quatre hommes autour de nous ?
Farl se figea. Quatre hommes ? Comment avait-il vu les yeux fermés ? Et +où ?
— Euh non, quatre en nous comptant. Cela veut dire qu’il y en a deux qui +nous menaçent !
— Tu es sûr de toi ? Tu as bu. Si ça se trouve, tu as juste senti la présence +des chevaux.
Il haussa les épaules, hésitant.
— Je ne pense pas... Je n’ai jamais entendu dire que cet enchantement +pouvait faire ça... +

Un enchantement... Et deux hommes présents... Sauf si l’ivresse le faisait +« sentir » double, c’est qu’il y avait quelqu’un d’autre. Où ? Et qui ? En +tous cas, à la réaction des prêtres, ce n’était pas un de leurs amis... Reste à +savoir si c’était un des siens. +

Le petit feu de camp apportait un éclairage raisonnable, mais laissait +tout de même des zones d’ombre. Il sortit de sa tunique deux dards de +lancer, imprégnés d’un somnifère très puissant, et s’approcha encore. À +cette distance, il devrait pouvoir les toucher... s’avancer plus le ferait repérer +de toutes façons. Il prit une grande inspiration et lança les deux projectiles +aussi vite et précisément que possible. +

En l’espace de quelques secondes, les deux hommes s’étaient effondrés. Il +poussa un soupir de soulagement, et s’avança dans la lumière pour +récupérer ses armes. Personne aux alentours, parfait. Soudain, il entendit un +bruit dans son dos. +

C’était Silwë. Elle n’avait plus la robe rouge, mais une simple tunique +courte beige, sans manches, trempée comme ses cheveux. Des éraflures +couvraient son épaule et son bras droit. +

Silwë +

Farl s’était retourné brusquement, et elle ne put s’empêcher de noter +avec un léger frisson qu’il tenait dans ses mains deux couteaux à la lame +noire, qui étaient apparus encore plus vite qu’il n’avait bougé. Il resta figé +quelques instants, immobile, à la fixer.
— C’est moi...
Le son de sa voix sembla le réveiller. Il se redressa et désigna le feu et ce qui + + +restait du pont.
— Qu’est-ce qui s’est passé ? Pourquoi es-tu trempée et... ?
— J’ai saboté le pont pour donner de l’avance à Irdann, coupa-t-elle. Je suis +restée cachée ici. Quelques prêtres ont malgré tout traversé, il a peut-être +besoin d’aide... Elle fit une pause, puis désigna les deux hommes +endormis.
— Merci, au fait.
Il esquissa un léger sourire, puis se figea en même temps qu’elle. Des +bruits de sabot... Ils échangèrent un regard, et sans avoir besoin +de se concerter, se jetèrent hors du sentier et s’aplatirent dans un +buisson. +

Les mystérieux sabots passèrent du galop au trot, puis au pas, et +s’arrêtèrent à une quinzaine de mètres du pont. Le bruit d’un cavalier +mettant pied à terre se fit entendre. Qui était-ce ? Elle se redressa +doucement, fit signe à Farl de ne pas bouger, et s’approcha. +

C’était un prêtre, qui s’avançait prudemment, en regardant aux +alentours, l’épée dégainée. Sa capuche était tombée, et elle le reconnut +immédiatement. +

Irdann +

— Irdann !
C’était la voix de Silwë. Soulagé, il la vit émerger des sous-bois, suivie +bientôt de Farl. Il poussa un soupir de soulagement.
— La déesse soit louée, vous êtes tous les deux vivants !
— Qu’est-ce que tu fais là ? Habillé en prêtre ? Qu’est-ce qui s’est passé +là-bas ? demanda-t-elle.
— Je vous expliquerai plus tard. C’est le moment de s’éclipser, ils ne vont +pas tarder à revenir.
Ils s’éloignèrent rapidement, en courant, se relayant sur le cheval. +

Une demi-heure de marche et de course plus tard, ils retrouvèrent +Uhr et la prêtresse. Ils avaient préparé les autres chevaux, rangé +soigneusement le camp et effacé au mieux leurs traces. Leur visage marqua +une certaine surprise en apercevant les tenues de Silwë et Irdann, +mais attendirent qu’ils soient tous les cinq à cheval pour poser leurs + + +questions. +

Il leur raconta alors qu’une fois au pied de la falaise, il avait laissé la +robe de la prêtresse attachée à une branche, et lorsque le prêtre s’était +avancé pour regarder ce qui se passait, il l’avait assommé et pris sa +tunique. Dans le noir, avec la capuche, les prêtres n’avaient pas fait +attention...
— L’un d’eux, si. Il a même essayé de te foudroyer, interrompit +Silwë.
— Oui. Heureusement, le fait d’avoir échoué l’a suffisamment convaincu...
— Et que s’est-il passé ensuite ?
— Je les ai laissés me distancer, prétextant que mon cheval était épuisé, ce +qui n’était pas tout à fait faux. Je me suis éloigné le plus possible +d’eux, et après être sûr qu’ils ne m’avaient pas suivi, j’ai fait le tour +pour aller voir ce que tu devenais... Les deux autres prêtres, ils sont +morts ?
— Non, je suis arrivé à ce moment là, et je les ai endormis, précisa +Farl.
— Et qu’est-ce que les prêtres ont trouvé, dans la fameuse clairière ? +demanda Uhr.
Irdann sourit.
— Oh, leur compagnon, assommé et avec la robe rouge et or sur la +tête...
Ses compagnons sourirent à leur tour. +

Samantha +

Elle avait un peu de mal à réaliser tout ce qui s’était passé ce +soir. Mais elle était libre, et ils étaient tous les cinq en route. Après +quelques heures de route, ils s’arrêtèrent enfin et s’installèrent dans une +maison isolée et en ruines, qu’ils avaient apparemment repérée à +l’aller. +

Quels étaient leurs noms, déjà ? Il y avait Uhr, le « barbare ». Sans +son pagne, il avait l’air beaucoup moins brutal, même si sa silhouette restait +impressionnante. Il y avait bien sûr le jeune apprenti paladin, qui avait +lui aussi revêtu des vêtements plus discrets que ceux du prêtre, + + +qui s’occupait pour le moment des chevaux épuisés. Il y avait la +jeune elfe, Silwë. Pour le moment, elle se réchauffait de son bain +forcé, enveloppée dans une couverture. Et le dernier de ces quatre +compagnons insolites, Farl. Celui qui semblait être une sorte de voleur ou +d’espion, était occupé à nettoyer les multiples coupures qu’avait subi la +jeune femme en sautant de sa monture, avec une certaine délicatesse, +nota-t-elle. +

— Je pense que le mieux est de dormir un peu, à présent. Nous sommes +assez loin de Touryre, non ?
Irdann était revenu s’asseoir près des autres, et avait pris une couverture. +Uhr hocha la tête.
— J’espère. Qu’en pensez-vous Samantha ?
— Je n’ai pas regardé, mais il me semble que nous avons parcouru une +bonne distance. Que comptez-vous faire à présent ?
— Cela ne dépend pas que de moi, répondit Uhr. Que voulez-vous faire, +vous ?
Elle haussa les épaules. Elle avait certes un peu réfléchi à la question, +mais ne se faisait pas tant d’illusions que cela sur la réussite de son +enlèvement.
— J’espérais me cacher quelque part pendant un moment, je pense que la +capitale est un bon endroit pour être discret, non ?
Uhr sourit.
— Je peux vous confirmer que c’est effectivement le meilleur endroit pour se +faire oublier et commencer une nouvelle vie. +

Elle le regarda quelques instants, incrédule. Il poursuivit.
— Je suis né dans les plaines barbares, et je vis à Talecombe depuis de +nombreuses années. Je suis à la garde de la ville, tout comme Irdann et +Silwë... +

Elle les écouta, tour à tour, raconter leurs passés aussi étonnants que +variés. Uhr, effectivement ancien barbare aux mille petits boulots ; Irdann +le fils du duc, apprenti paladin ; Silwë, future soldat d’élite elfe, tous les +trois apprentis d’un maître épéiste renommé, maître Ernest. Et Farl, +enfant de la rue, devenu assassin puis ménestrel. +

Tout en s’enroulant dans sa couverture, elle se demandait ce qu’il allait + + +advenir de ces quatre étrange personnages... Quelque chose lui disait qu’elle +n’était pas au bout de ses surprises.

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public, composé d’une diligence et de quelques soldats, qui lui aurait permis de rentrer chez elle seule. Elle en avait assez d’être escortée des gardes de son château, qui ne lui laissaient absolument aucun champ libre, et elle avait - - eu bien assez de mal à convaincre ses parents de la laisser se débrouiller seule. La première partie du trajet s’était passée sans aucun problème, elle -avait même fait quelques rencontres intéressantes, et avaient rendu les +avait même fait quelques rencontres intéressantes, qui avaient rendu les journées moins longues.

Elle soupira. On était en milieu d’après-midi, et il fallait bien qu’elle fasse quelque chose. Elle poussa la porte de la seule auberge du village, et @@ -1540,6 +2350,8 @@ fa instant d’hésitation. Cet endroit ressemblait plus à un abri précaire qu’à une maison. Une partie d’elle-même sembla presque soulagée de ne voir aucune lumière à l’intérieur. Elle s’approcha néanmoins de la porte, et + + s’apprêta à y frapper.

— Vous cherchez quelqu’un ?
Surprise, elle se retourna vivement. Elle n’avait pas entendu l’homme @@ -1560,7 +2372,7 @@ Peut- class="newline" />— Alors ?
— Vous voulez traverser à pied ? Cela va durer six à sept jours.
— Ça ne m’effraie pas.
— Vue la saison, il faudra marcher hors des sentiers battus, pour +class="newline" />— Vu la saison, il faudra marcher hors des sentiers battus, pour éviter les attaques. Donc il n’y aura pas d’auberge ou de refuge sur le chemin, on devra dormir à la belle étoile. Le couvert sera spartiate aussi.
 ?
Il lui tendit la main. Elle frappa dans la sienne.
— Marché conclu. Appelez-moi Sélène. - -

Zach

Le soir, sur sa paillasse, Zach réfléchissait. Il avait déjà accomagné des @@ -1611,9 +2421,11 @@ les nobles aimaient faisait leur valeur. Était-elle vraiment sans prétention, ou avait-elle quelque chose de louche à cacher ?

À l’aube, elle était là, prête. Habillée comme la veille, aux bottines près, + + avec un manteau brun, et munie d’un sac en cuir en bandoulière, en -apparence bien rempli. Lui avait ajouté à sa tenue son armure et ses -brassards de cuir, et avait lui aussi une besace chargée et une cape, gris +apparence bien rempli. Lui-même avait revêtu une armure et des brassards +de cuir, et avait également pris une besace chargée et une cape, gris foncé.

Il hocha la tête, lui tendit une gourde et une couverture, qu’elle mit dans son sac sans dire un mot, et ils se mirent en route. @@ -1626,8 +2438,6 @@ rythme de marche tr prenait chaque branche, fougère, buisson, racine, comme si la forêt entière avait décidé de l’empêcher d’avancer. Lui était tellement à l’aise qu’il semblait que ces mêmes obstacles s’effaçaient devant lui. Sur une - - racine particulièrement vicieuse, elle s’étala de tout son long dans des branchages. Zach, qui marchait devant sans la regarder, s’arrêta pourtant instantanément, et se retourna. Pourvu qu’il évite une remarque @@ -1649,6 +2459,8 @@ class="newline" />— Oui peut- class="newline" />Elle ôta ses bottes et ses chaussettes et retint un gémissement. C’était encore pire que ce à quoi elle s’attendait.
— Allez tremper vos pieds dans le ruisseau juste là, pendant que je sors de + + quoi manger.
Le ton s’était adouci. Venait-elle de passer une sorte de test ? Ou avait-il pitié, finalement ? Elle releva les yeux et son regard croisa le sien le temps @@ -1663,8 +2475,6 @@ remarqua aussi tr tout court. Non seulement elle s’était mise à boiter, mais son souffle était de plus en plus court et son visage de plus en plus rouge. Il maintint le rythme jusqu’au soir, et quand les ombres s’allongèrent, il la sentit à bout. - - Ayant repéré un endroit convenable, il s’arrêta et se tourna vers elle.
— Reposez-vous ici, je vais chercher de quoi faire un feu.
Il semblait presque gentil avec elle, maintenant. Pitié ou sympathie ? Son sourire semblait plutôt franc.
— Enroulez vous dans votre couverture, je vais baisser le feu pour la +class="newline" />— Enroulez-vous dans votre couverture, je vais baisser le feu pour la nuit.
— Vous ne dormez pas ?
— Ce coin de forêt est assez calme, et j’ai vérifié les alentours. Il n’y a pas de gros soucis, donc je dormirai aussi. Et ne vous en faites pas, ajouta-t-il en + + voyant son air inquiet, je dors souvent seul en forêt et je sais me réveiller si quelque chose d’anormal se passe.

Elle sortit la couverture, s’enveloppa dedans, posa sa tête sur sa besace @@ -1738,8 +2550,6 @@ s’assurer qu’il ne d suivait à peu près son rythme, sans se plaindre, et sa compagnie n’était pas désagréable. Ces cinq ou six jours de traversée ne s’annonçaient pas si mal. Il écarta aussitôt une idée idiote qui lui traversa l’esprit. Non, pas - - avec une noble. Surtout sa cliente. Ç’aurait été une paysanne, ou une servante, il se serait peut-être posé la question, mais avec une damoiselle de haut rang, c’était le meilleur moyen de s’attirer les pires @@ -1761,6 +2571,8 @@ crois aller chercher de quoi faire un feu. Avec un peu de chance, il trouverait peut-être du petit gibier, et ils feraient un bon repas, pour changer. Ils pouvaient se permettre de prendre un peu de temps, car ils avaient bien + + avancé. Ce n’était pas parce qu’il avait une réputation de sauvage qu’il ne savait pas apprécier quelques bons moments.

Son sang se glaça soudain lorsqu’il entendit un cri. C’était sa voix. Si @@ -1776,8 +2588,6 @@ class="ecti-1095"> vision les deux hommes. Leurs vêtements étaient sales et un peu déchirés, ils étaient armés l’un d’un gourdin et l’autre d’une vieille épée. Ne pas paniquer. À l’université de magie, elle s’était entraînée à combattre - - physiquement, en utilisant son bâton de magicienne comme d’une arme lorsqu’elle ne voulait ou ne pouvait pas utiliser la magie. Elle n’avait trouvé à la place qu’une branche cassée, lourde et peu pratique à manier ; mais @@ -1799,6 +2609,8 @@ branche sur le c pas.

Alors qu’il allait l’atteindre, il s’effondra brusquement, à ses pieds. Elle n’eut pas le temps de comprendre ce qui se passait lorsqu’une main se + + posa sur son épaule. Cette fois, elle ne put retenir un cri de panique. Maintenant sa prise à deux mains sur son arme de fortune, ramenant les bras vers elle, elle donna un grand coup dans son dos, de toutes ses @@ -1810,10 +2622,7 @@ sur ses c aussi sale glissé rapidement dans sa ceinture. Elle regarda alors autour d’elle. Les deux hommes gisaient à terre. Elle lâcha la branche, en tremblant. Il lui prit délicatement la main.
— Viens, il ne faut pas traîner ici. D’autres pourraient venir.
- - +class="newline" />— Viens, il ne faut pas traîner ici. D’autres pourraient venir.

Zach ramassa leurs deux sacs, les passa en bandoulière, et l’emmena au pas de course. Elle le suivit sans réfléchir.

Combien de temps s’était passé lorsqu’elle reprit un peu ses esprits ? @@ -1836,6 +2645,8 @@ l chercha –en vain– de quoi se raccrocher à la paroi. Par réflexe, son autre main s’aggrippa encore plus fort à celle de Zach, en laissant échapper un léger cri. Sa chute, qui lui parut durer une éternité, s’arrêta + + une quarantaine de centimètres plus bas, retenue par cette main salvatrice.
— Tout va bien. Reprends tes appuis, tranquillement. Attrape la racine, au @@ -1847,9 +2658,7 @@ class="newline" />— C’est presque fini.

Quelques mètres plus loin, la paroi se fit carrément verticale et lisse. Zach désigna un buisson au dessus de sa tête.
— C’est ici. Par contre, tu vas devoir lâcher ma main quelques instants.
Ell vit sa silhouette escalader lestement les derniers mètres et disparut - - +class="newline" />Elle vit sa silhouette escalader lestement les derniers mètres et disparaître dans le buisson sombre. Puis ce buisson s’écarta légèrement, laissant entrevoir une grande faille dans laquelle il se tenait assis. Il se mit à plat ventre au bord, et tendit son bras. Elle le saisit, et il la hissa jusqu’à @@ -1874,8 +2683,7 @@ grotte, lentement,
— Mais comment fais-tu pour t’y retrouver dans cette obscurité ? Et pour ne pas te prendre la paroi ? Je ne vois absolument rien...
— Je connais cette grotte comme ma poche. Ça aide.
+class="newline" />— Je connais cette grotte comme ma poche. Ça aide.

Elle l’entendit revenir et s’asseoir face à elle. Il prit doucement sa main et y déposa la gourde qu’il venait de remplir. L’eau était délicieusement glacée. Puis il fit de même avec un morceau de pain. Qu’il connaisse sa @@ -1906,6 +2714,8 @@ C’est ma faute, j’aurais d un cas isolé, mais dans le doute...
— Tu emmènes souvent des gens dans cette cachette ?
— Non. Tu es la première. + +

Zach

Il la vit terminer de manger avec un air pensif. Les brigands, la fuite, @@ -1918,8 +2728,6 @@ sur la temp class="newline" />— Il fait froid dans cette grotte.
Il se rappela qu’elle ne voyait rien, contrairement à lui. Cela devait être extrêment gênant pour elle, de se sentir observée sans pouvoir observer en - - retour.
— On ne peut pas faire de feu, et l’humidité n’aide pas. Installe-toi sur le lit, vers le fond, et couvre-toi le plus possible. Enfin, lit... le tas de bruyère. @@ -1943,6 +2751,8 @@ class="newline" />— Bon d’accord. Mais tu as int sinon...
— Compris !
Il n’avait pas forcément envie d’entendre la liste des supplices qu’elle + + prévoyait de lui faire subir s’il avait le malheur de laisser traîner une main au mauvais endroit. De plus, son ton presque menaçant lui donnait l’impression qu’elle allait mieux. Et pour être honnête avec lui-même, sans @@ -1956,8 +2766,6 @@ class="ecti-1095"> class="ecti-1095">ène

Zach sentait la transpiration et le cuir de son armure –qu’il n’avait même pas enlevée–, mais elle réalisa subitement qu’elle-même ne devait pas - - sentir bien meilleur. Elle ne l’aurait pas admis tout haut, mais elle était soulagée de l’avoir près de lui. Non seulement il lui tenait chaud, mais sa présence, son souffle calme, même cette odeur la rassurait. Elle avait un peu @@ -1981,6 +2789,8 @@ class="newline" />Elle sourit.
— Ah, ça ! J’en ai discuté avec la tenancière de la taverne. Elle a été ravie d’échanger mes jolies chaussures contre une paire de bottines à elle. Même si elle m’a répété plusieurs fois que c’était une mauvaise idée de partir avec + + toi.
Il se mit à rire.
— Ça ne m’étonne pas de ma sœur ça.
 ?

Zach -

Il n’avait pas besoin d’entendre ses question ou ses interrogations. Son +

Il n’avait pas besoin d’entendre ses questions ou ses interrogations. Son corps à côté du sien semblait lui crier qu’il se moquait d’elle. Pourtant elle -ne disait rien... N’osait pas poser la question ? Il soupira. Au point où il en -était...
 ? Il soupira. +Au point où il en était...
— J’ai été abandonné bébé, sur le pas d’une porte. Les gens qui vivaient là, des bûcherons, m’ont recueilli et élevé comme si j’étais le leur. Mais effectivement, j’admets qu’il n’y a pas vraiment d’air de @@ -2051,6 +2861,8 @@ ils ont l’infravision, c’est- corps et les objets. Ce qui revient grosso-modo à voir dans le noir. Les loups-garous, eux, ont l’odorat tellement développé qu’ils ont une aussi bonne perception de leur environnement que s’ils avaient les yeux ouverts en + + pleine lumière. Il reste les vampires, qui comme certains magiciens, ont une vision nocturne parfaite grâce à leurs pouvoirs magiques. Ce qui n’a pas l’air d’être ton cas. @@ -2063,9 +2875,7 @@ risquait de la braquer. Or, il apprenait tout de m intéressantes... Ce fut elle qui reprit.
— Après, il y a aussi des gens, des humains je veux dire, qui naissent avec une vision nocturne comme ça, sans explications, ni origines spécifiques. - - -C’est plutôt rare cela dit. Vue ta silhouette, il est plus probable que tu aies +C’est plutôt rare cela dit. Vu ta silhouette, il est plus probable que tu aies des antécédents elfiques.
Elle avait ça d’un ton tout à fait neutre. Sans la moindre condescendance ou animosité.

Zach se demanda d’où elle tenait cet avis assez ouvert, pour quelqu’un qui semblait venir du même coin que lui. Peut-être des lectures ? Ou... dans ce qu’elle n’avait pas dit ? Il avait voyagé avec beaucoup de gens, au cours -de sa carrière ; certains étaient particulièrement virulents vis à vis des +de sa carrière ; certains étaient particulièrement virulents vis-à-vis des autres races humaines, d’autres n’en avaient rien à faire, d’autres les admiraient et les enviaient... Surtout les elfes, soi-disants plus beaux, plus agiles, plus sages, plus tout un tas de choses... Il se gardait en @@ -2088,6 +2898,8 @@ trop voyager, cela ne lui avait pas laiss Pouvait-il lui-même avoir du sang elfique ? C’était une question qu’il n’avait jamais envisagé sérieusement jusqu’alors. Mais Sélène semblait bien connaître le domaine... et ça, il était sûr que ce n’était pas du + + bluff.

Il entendit sa respiration et son pouls se ralentir. Elle s’était endormie. Bercé par ce rythme régulier et la chaleur de son corps à côté du sien, il ne @@ -2101,8 +2913,6 @@ class="ecti-1095"> travers le buisson masquant son entrée. Elle pouvait enfin voir à quoi ressemblait cette fameuse cachette. Elle était plus petite que ce qu’elle s’était imaginé : allongée sur le lit de bruyère, elle touchait le mur froid de - - sa main droite alors que l’entrée n’était qu’à quelques mètres à sa gauche. Elle s’assit sur le matelas, finalement pas si inconfortable que cela. @@ -2126,19 +2936,18 @@ class="newline" />— Oui, class="newline" />Elle chercha tout d’abord à ne pas le regarder, puis constata qu’il ne semblait nullement gêné d’être torse nu devant elle. Elle remarqua alors une marque rouge, longue d’une dizaine de centimètres, sur son épaule + + gauche.
— Qu’est-ce que tu as là ? Tu t’es blessé ?
Il regarda son épaule.
— Ah, ça... Je me suis pris un mauvais coup, il y a dix jours. Rien de grave.
— Fais voir ?
+class="newline" />— Fais voir ?

Zach

Sélène s’approcha, s’accroupit près de lui, et lui saisit le bras. Elle examina la coupure d’un air critique. Certes, ce n’était pas un coup si - - anodin... Même s’il avait déjà connu pire. Et la blessure était en bonne voie de cicatrisation.
— Tu n’avais pas pu recoudre ?
 ? Quelles autres surprises l’attendait avec cette étrange voyageuse ? Il réalisa alors qu’il s’était mis à la tutoyer depuis la veille au soir. Elle aussi. S’en était-elle rendu compte ? Ça n’avait pas eu - - l’air de la choquer... -

+[
+ +

+

Aldariel -

Elle entra dans la salle du trône. Cette salle était toujours aussi +

Elle entra dans la salle du trône. Cette salle était toujours aussi magnifiquement décorée, mais l’impressionnait bien moins qu’avant, et son air était décidé.
— Ah, Aldariel. J’ai réfléchi à ce que tu m’as dit.
Aldariel ouvrit des yeux ronds d’incrédulité.
— Sérieusement ?
— Je l’ai observé de mes propres yeux, crois-moi. Ce n’est pas le cas dans - - toutes les contrées humaines, évidemment, mais dans le fief du duc De Vane, c’est le cas.
— Tu penses que c’est vraiment dangereux ?
 ?
— Je te présente Silwë, une guerrière qui nous revient de chez les humains. -

Une jeune femme entra. Elle était habillée comme les soldats elfes, +

Une jeune femme entra. Elle était habillée comme les soldats elfes, d’une tunique mi-longue verte, d’un pantalon blanc, et des bottes. Ses cheveux étaient tressés derrière son dos. À son côté pendait un fourreau ouvragé. Elle posa un genou en terre face au roi et à la @@ -2242,18 +3052,16 @@ class="newline" />Il sourit.
— Oui. J’ai envoyé un oiseau portant le message au duc, l’invitant à vous accueillir toutes les deux.
Aldariel retint un cri de joie. -

Silwë -

Silwë était debout face à une table où s’étalait une carte, dans un salon +

Silwë était debout face à une table où s’étalait une carte, dans un salon du palais. Elle réfléchissait à cette nouvelle aventure. Elle ne s’attendait pas à une telle responsabilité, à peine rentrée chez elle ! C’était un grand honneur et une grande confiance, car le roi lui confiait rien de moins - - que sa fille. Elle doutait presque de ses capacités à mener une telle mission... -

Elle connaissait indirectement la princesse. Sa mère avait été son +

Elle connaissait indirectement la princesse. Sa mère avait été son professeur particulier de tir à l’arc, et elle lui avait décrit une jeune femme à la fois déterminée et douée, mais aussi simple et sans complexes. Qu’en était-il en réalité ? Que serait le trajet avec elle ? Allait-elle devoir jouer @@ -2263,14 +3071,16 @@ savait-elle se d chaque pas ? En tous cas, elle avait eu l’air vraiment heureuse de partir à l’aventure. Pouvait-elle l’en blâmer ? Elle-même l’avait été aussi... -

C’est alors que la princesse entra. Elle avait troqué sa longue robe contre +

C’est alors que la princesse entra. Elle avait troqué sa longue robe contre une plus courte, vert très pâle, et un pantalon blanc. Des bottes avaient remplacé ses jolies sandales, et elle n’avait gardé pour bijou que son fin diadème. Elle portait son arc et un carquois en bandoulière, et une dague à la ceinture. Son avant-bras gauche était protégé par un bracelet d’archerie, + + en cuir, décoré de quelques motifs argentés. Au moins elle semblait équipée correctement. -

Elle s’apprêta à s’incliner devant elle, mais Aldariel lui fit signe de +

Elle s’apprêta à s’incliner devant elle, mais Aldariel lui fit signe de s’abstenir. Elle s’approcha de la table.
— Quel est notre trajet ?
Silwë lui montra la carte étalée sur la table.
La jeune princesse prit un air d class="newline" />— Non, désolée. Cela ferait un détour de plusieurs jours, et nous n’avons pas tellement le temps...
— C’est dommage... On m’a dit que cette ville est très belle. N’est-ce pas là - - que tu as vécu ?
Silwë sourit. Elle serait bien aussi passée par la capitale, voir certaines personnes qui y vivent.
— D’apr d’ailleurs que notre venue puisse changer –un petit peu– les choses... Mais nous verrons bien. Je ne connais pas cette région non plus, pour tout vous dire. -

Elle laissa la jeune princesse observer la carte, pendant qu’elle vérifiait - - +

Elle laissa la jeune princesse observer la carte, pendant qu’elle vérifiait son équipement. Elle enfila par dessus sa tunique une armure légère en cuir, qu’elle avait faite faire chez les humains, ajustée à sa taille. Sans manches, elle ne couvrait que le buste et descendait à mi-cuisse, fendue sur les côté. @@ -2342,6 +3148,8 @@ princesse ?
— J’ai entendu dire que vous étiez une bonne soigneuse ?
La jeune princesse sourit.
— En effet. Je pensais d’ailleurs emmener quelques baumes et de quoi + + panser des blessures. Penses-tu que ça puisse être utile ?
Elle poussa un soupir de soulagement.
— Oui, tout à fait.
— Appelle-moi par mon prénom, et dis-moi tu. S’il-te-plaît.
Silwë se redressa, suprise et soulagée en même temps.
— D’accord. -

Aldariel -

Aldariel examinait la chambre avec intérêt. Une petite pièce, avec deux +

Aldariel examinait la chambre avec intérêt. Une petite pièce, avec deux lits humains et deux tables de chevet, une vieille armoire en bois, et dans un angle de la pièce, un petit miroir et un baquet vide posé sur une meuble. Une fenêtre de petite taille laissait entrer les dernières lueurs du soir. Elle voulait poser des questions sur tout, mais Silwë n’était pas encore - - montée. -

Trois jours qu’elle étaient parties. Elles avaient quitté la forêt en début +

Trois jours qu’elle étaient parties. Elles avaient quitté la forêt en début d’après-midi, et étaient arrivées dans un premier village humain. Un peu effrayée, elle n’avait pas quitté sa compagne –qui semblait très à l’aise– d’une semelle. Les gens les avaient regardées avec curiosité et bienveillance, @@ -2372,17 +3178,18 @@ nouvelle surprise. Sa compagne l’avait d elle-même avait eu un peu de mal avec ces nouveaux goûts et odeurs. Il paraît qu’on s’y faisait rapidement... Difficile à croire, mais elle verrait bien. -

À cet instant, Silwë entra dans la pièce.

À cet instant, Silwë entra dans la pièce.
— Désolée, quelques détails à régler avec le gérant... Tu n’es pas encore couchée ?
— J’avoue que... ces lits m’intriguent...
Elle sourit.
— Si tu ne te sens pas à l’aise, tu peux toujours t’enrouler dans ta + + couverture elfique. Les couvertures humaines ont besoin d’être plus épaisses pour être aussi chaudes, c’est pourquoi leur aspect est plus grossier. Mais -elles sont très bien !
-

Sans attendre sa réponse, Silwë se déshabilla et se glissa rapidement +elles sont très bien ! +

Sans attendre sa réponse, Silwë se déshabilla et se glissa rapidement entre les draps. Un peu hésitante, elle l’imita. Ce n’était pas aussi inconfortable qu’à première vue, finalement.
— Pourquoi y a-t-il une bougie sur la table de chevet ?
— Je me suis dit la m extraordinaires, alors... Peut-être cette difficulté les pousse à trouver des solutions ? C’est incroyable ce que les humains peuvent être plein de ressources et d’idées, parfois... -

Aldariel fixa le plafond de la chambre pendant un moment. Elle se - - +

Aldariel fixa le plafond de la chambre pendant un moment. Elle se remémora les regards surpris des villageois en les voyant arriver. Beaucoup leur avaient souri. Mais certains les avaient regardées en fronçant les sourcils. Un homme s’était éloigné à la table la plus loin d’elles lorsqu’elles @@ -2431,17 +3236,15 @@ nous aiment pas, ils nous respectent en g de nos armes, ou de crainte de créer des ennuis diplomatiques, ou simplement parce qu’ils n’ont pas envie de s’en mêler. Donc pas d’inquiétude. -

Les humains étaient décidément surprenants. Il y avait d’autres - - +

Les humains étaient décidément surprenants. Il y avait d’autres questions qu’elle voulait poser. Et les autres races ? Les nains, par exemple, en avait-elle croisé ? Mais elle entendit à sa respiration qu’elle s’était endormie. Tant pis, elle aurait tout le temps de lui demander dans les jours qui viennent. -

Silwë -

La forêt, enfin ! Elle avait beau être habituée à vivre chez les humains, +

La forêt, enfin ! Elle avait beau être habituée à vivre chez les humains, elle appréciait être au calme en forêt. Aldariel semblait elle aussi de nouveau à son aise, bien qu’elle se soit accoutumée très rapidement. Elle avait même mangé avec appétit la nourriture humaine de la taverne de ce @@ -2449,13 +3252,15 @@ matin. Mais ne plus sentir tous ces regards curieux, plus ou moins bienveillants, était reposant. De plus, la compagnie d’Aldariel était vraiment agréable, et elle avait de plus en plus la sensation de voyager avec une amie et non une princesse. -

C’est vers le début de l’après-midi qu’elles entendirent un bruit +

C’est vers le début de l’après-midi qu’elles entendirent un bruit inhabituel. Des cris, des bruits métalliques et de chevaux. Elles hésitèrent, puis la curiosité étant plus forte, décidèrent de s’approcher prudemment. À cet endroit, la végétation était très dense et les arbres très proches les uns + + des autres, ce qui leur permit d’arriver de façon très discrète. Quelques minutes plus tard, la scène s’étalait sous leurs yeux. -

Sur un sentier, deux carosses tirés par des chevaux, dont un richement +

Sur un sentier, deux carosses tirés par des chevaux, dont un richement décoré, étaient arrêtés sur la route. Une dizaine de soldats à cheval –certains avaient mis pied à terre– les défendaient contre un groupe de pillards qui les avait pris en embuscade. Silwë observa la scène pendant @@ -2465,14 +3270,12 @@ restait qu’un garde pour d tête effrayée, et fermer précipitamment le panneau de bois qui servait de fenêtre. Le soldat se défendait vaillamment contre trois brigands, mais difficilement. -

Aldariel n’était plus à côté d’elle. Elle avait lestement escaladé un arbre, +

Aldariel n’était plus à côté d’elle. Elle avait lestement escaladé un arbre, et préparait déjà une flèche pour son arc. Avant de viser, hésitante, elle lui jeta un regard interrogateur. Elle lui répondit en hochant la tête, et en dégainant silencieusement son épée. Puis elle avança vers le champ de - - bataille. -

Le trait fin et meurtrier, partant de l’arbre, toucha dans la nuque l’un +

Le trait fin et meurtrier, partant de l’arbre, toucha dans la nuque l’un des brigands, qui s’effondra. L’un des survivants, méfiant, fit signe à son comparse de rester face au garde pendant qu’il allait voir ce qui se passait dans cet arbre. Avançant dans les broussailles, et se @@ -2489,10 +3292,12 @@ carrure imposante de l’homme qui s’effondrait lentement, et disparut nouveau dans le buisson. Une seconde avant d’être parfaitement dissimulée, elle aperçut, sur sa droite, venant de l’autre carosse, un quatrième homme qui courait vers elle. Il l’aperçut, et ouvrit la + + bouche pour crier. Avant que le moindre son ne sorte de sa gorge, un second trait mortel, venant des arbres, toucha le brigand en plein dans l’œil. -

Elle rejoignit Aldariel dans l’arbre et lui sourit.

Elle rejoignit Aldariel dans l’arbre et lui sourit.
— Merci, c’était tout juste.
Reprenant son souffle, elle observa avec elle le champ de bataille. Le soldat seul et blessé reprenait ses esprits, et avait visiblement du mal à comprendre @@ -2504,11 +3309,9 @@ class="newline" />— C’est la premi class="newline" />— Oui...
Elle lui posa la main sur l’épaule, doucement.
— Allez viens, inutile de rester ici. On finirait par être vues. -

Aldariel - - -

Les deux jeunes femmes repartirent, par la voie des arbres dans un +

Les deux jeunes femmes repartirent, par la voie des arbres dans un premier temps, avant de continuer à pied. Elle avait agi d’instinct, sans trop réfléchir. Était-ce une bonne idée de s’impliquer dans un combat d’humains qui ne les concernait pas ? Pourtant son amie avait fait de même. @@ -2516,7 +3319,7 @@ Elles avaient failli laissé quelques flèches... y feraient-ils attention ? Et qui étaient ces gens dans les carosses ? Trop de questions se bousculaient dans son esprit. -

Elles s’arrêtèrent face à une large rivière, qu’elles longèrent jusqu’à +

Elles s’arrêtèrent face à une large rivière, qu’elles longèrent jusqu’à trouver un moyen simple de la traverser. Arrivant près de ce qui ressemblait à un gué, elle virent passer trois hommes, qui couraient eux aussi vers le cours d’eau. Ils les aperçurent avant qu’elles n’aient le temps de se cacher. @@ -2536,9 +3339,9 @@ class="newline" />Deux des hommes h prendre la menace au sérieux, et se mit à courir dans leur direction. Elle prit une grande inspiration, ajusta sa cible et lâcha les doigts. Il s’effondra à ses pieds, la poitrine transpercée d’une flèche. Silwë était restée en garde à -ses côté et n’avait pas bougé. Les deux autres brigands se regardèrent, et +ses côtés et n’avait pas bougé. Les deux autres brigands se regardèrent, et s’éloignèrent rapidement. -

— Bien joué, Alda.

— Bien joué, Alda.
Son amie était aller rechercher sa flèche dans le corps étendu par terre, puis était revenue près d’elle, et lui souriait. Il y avait du respect et de l’admiration dans son regard.
Silwë, qui s’avançait déjà dans l’eau, haussa les épaules.
— J’espère que non. Je ne pensais pas en croiser si tôt, tout de même... On va s’éloigner des sentiers humains, ça va aider je pense. -

Elles traversèrent rapidement la rivière, puis marchèrent encore un +

Elles traversèrent rapidement la rivière, puis marchèrent encore un moment, sans rien dire.
— Ça va, Aldariel ?
— Oui... Un peu de mal à réaliser, en fait.
Elle sourit.

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Cela faisait presque deux ans qu’elle s’était enfuie avec Uhr et ses amis, et les rumeurs qu’ils avaient entendues depuis étaient plutôt bonnes. Si tout le monde parlait de ce mystérieux enlèvement, l’histoire se - - modifiait petit à petit, et se ramifiait en de nombreuses versions toutes plus ou moins crédibles. Encore un peu, et à force d’entendre des récits différents, ils auraient oublié précisément qui ils étaient, elle et @@ -2613,8 +3414,6 @@ class="newline" />Samantha frissonna. Les disputes entre magiciens, prêtres, au moins n’étaient pas comme ça... Enfin, à bien y réfléchir, il y avait quand même des sacrées tensions parfois. Et puis, hm, son « enlèvement » ne s’était pas fait dans la délicatesse... - -

Elle prit un tabouret, s’assit à côté de lui et lui prit le bras.
— Sur quoi travaillaient ces magiciens, pour en venir aux mains comme ça ? Enfin, aux mains... façon de parler. Juste par curiosité.
— Je ne sais pas, visiblement oui. class="ecti-1095">Uhr

Elle ne disait rien, mais il voyait bien que le sujet l’interpellait. Depuis qu’il étaient revenus de Touryre, elle avait endossé le rôle + + d’une fleuriste, d’une jeune femme modèle de la cité –elle portait actuellement une jupe rouge sombre, un chemisier blanc et un petit corset noir–, mais il savait bien que derrière, elle brûlait d’envie de faire @@ -2664,6 +3465,8 @@ un peu curieux d’en savoir plus, mais ce n’
— Mais ça ne va pas être évident de se procurer de tels objets. Je te rappelle que je ne suis pas chargé de l’enquête, et leurs appartements sont + + sous scellés maintenant...
Elle lui sourit.
— Ne connais-tu pas quelqu’un qui pourrait y pénétrer discrètement ? @@ -2683,8 +3486,6 @@ ce jeu l avait une occasion, il s’efforçait de s’entraîner, discrètement, au maniement de ses armes, à l’escalade, et à être furtif. Même en tunique orange. Il n’était pas sûr de bien savoir pourquoi et dans quel but, - - d’ailleurs. Il appréciait énormément son travail de ménestrel, mais... il n’arrivait pas totalement à couper tous les ponts avec son ancienne vie. @@ -2698,9 +3499,11 @@ terrible incendie. Cet immeuble de trois avait failli finir totalement en ruine. Au dernier étage, les fenêtres avaient été scellées à l’aide de panneaux de bois. C’était là, dans l’appartement de feu le mage Mortag qu’il devait aller. Tout en constatant que cette -expression était d’assez mauvais goût vue la situation, il escalada -rapidement le mur, débloqua aisément un des panneaux de bois et se glissa -à l’intérieur. +expression était d’assez mauvais goût vu la situation, il escalada rapidement +le mur, débloqua aisément un des panneaux de bois et se glissa à + + +l’intérieur.

Il dut allumer une petite bougie de main pour y voir, tellement l’intérieur était sombre. Ah, s’il avait les yeux d’elfe de Silwë... Il secoua la tête. Ce n’était pas tellement le moment de penser à ça. Toute la @@ -2719,8 +3522,6 @@ surveill bois de l’autre demeure.

À l’intérieur, un salon propre, des affaires très bien rangées –pour quelqu’un qui n’avait pas forcément prévu de mourir ce soir là– et - - quelques décorations. Il ne fallait pas traîner. Il se saisit d’un bougeoir ouvragé qui semblait avoir été utilisé récemment, et courut rejoindre Samantha. @@ -2770,6 +3571,8 @@ ensuite.

Farl

De nouveau dans la chambre carbonisée, il prit bien soin de remettre la + + broche à sa place, et d’effacer toutes ses traces. Il avait fait de même chez Septim, tout était bon. Personne ne saurait qu’il était passé par là. @@ -2790,8 +3593,6 @@ de mur. Elle semblait l’examiner avec pr yeux plus fort, vraisemblablement pour y voir plus clair. Un bruit venant de l’extérieur la fit sursauter, et elle se retourna. Elle tenait un bâton de mage à la main, qu’elle avait dirigé contre le bruit, en - - tremblant légèrement. Pas très à l’aise visiblement... mais toujours aussi dangereuse.

Elle se mit à regarder aux alentours, effrayée. Si elle se mettait à fouiller @@ -2802,11 +3603,11 @@ class="newline" />Elle sursauta, et dirigea son regard lumineux dans sa directio la chambre, et se posa devant elle, en tentant d’avoir l’air le plus calme possible. Ne pas dégainer ses poignards. Ne pas avoir l’air –trop– menaçant...
— Qui êtes vous ? Que faites vous ici ?
— Qui êtes-vous ? Que faites vous ici ?
Elle semblait paniquée. Dans le même temps, des filaments aussi lumineux que ses yeux se mirent à voler autour d’elle, de son bâton, et se concentrer dans sa main. Un sort... Il frissonna et leva les mains.
— Calmez vous. Je doute que vous ayiez le droit d’être plus ici que moi. +class="newline" />— Calmez-vous. Je doute que vous ayiez le droit d’être plus ici que moi. Peut-on discuter calmement ?
Elle sembla marquer un instant d’hésitation. Dans sa main, les filaments lumineux commençaient à prendre la teinte bleutée d’une étoile de glace @@ -2824,11 +3625,9 @@ accident.
Elle hésita, puis l’étoile de glace diminua légèrement. Des filaments s’en échappèrent, comme si elle disparaissait peu à peu comme elle était apparue.
— Expliquez vous.
— Expliquez-vous.
Il eut du mal à retenir un soupir de soulagement.
— J’ai la certitude que Septim se fait passer pour mort, mais est - - vivant.
— Quoi ?
— Je veux bien tout vous expliquer, mais ne pensez-vous pas qu’on serait @@ -2878,12 +3677,14 @@ class="newline" />— Bravo. Allons regarder cela ailleurs, comme vous lR class="newline" />— Tout à fait. Je propose de venir chez les amis qui m’ont envoyé ici.
Elle eut un regard légèrement méfiant, puis finit par accepter. + +

Ils marchaient dans la rue, faiblement éclairée par quelques lampadaires. S’ils ne croisaient pas grand monde à cette heure tardive, les rares passants ne semblèrent pas leur prêter attention. Farl avait l’habitude de ce genre de situation : la tenue d’assassin était conçue pour disparaître aisément dans -les ombres, mais aussi pour apparaître tout à fait normale –le noir n’étant -pas si rare– en pleine lumière. La tenue discrète idéale en somme. N’étant +les ombres, mais aussi pour paraître tout à fait normale –le noir n’étant pas +si rare– en pleine lumière. La tenue discrète idéale en somme. N’étant plus ébloui par son regard magique, il pouvait désormais observer la magicienne. Grande, mince, aux longs cheveux noirs, vêtue d’une longue robe noire –pour le deuil, ou la discrétion ? Peut-être les deux, @@ -2895,9 +3696,215 @@ sans cacher son b glacé.

Uhr +

Mais que faisait Farl ? Il aurait dû être rentré depuis un moment déjà. +Ou était-ce seulement le temps qui lui paraissait si long ? Il soupira. Et s’il +lui arrivait quelque chose ? S’il était vu ? Le couvrir serait très +compliqué...
La tête posée sur son épaule, Samantha murmura.
— Tu dors ?
— Non. Je m’inquiète pour Farl.
Elle hocha la tête.
— Moi aussi, un peu. Mais tu sais, il est très doué...
— Je sais, mais... il a mis moins de temps la première fois non ? Il n’a +aucune raison d’être plus lent cette fois-ci... +

À ces mots, il entendit, non sans un certain soulagement, quatre +coups nets sur la porte d’entrée. La silhouette sombre et familière +de Farl se profila. Il sursauta lorsqu’il s’aperçut qu’il n’était pas +seul, et fut d’autant plus surpris de reconnaître la personne qui +l’accompagnait.
— Zanakielle ! Mais...
À son tour, elle marqua un instant de suprise.
— N’êtes-vous pas l’un des gardes qui sont venus cet après-midi ?
Il hocha la tête.
— En effet. Farl, peux-tu m’expliquer...
Le jeune homme sourit, ferma la porte et proposa un siège à la magicienne. +Puis raconta l’étrange rencontre qu’il avait faite sur les lieux de ce qu’il +fallait désormais appeler un crime. +

— J’avais aussi un doute quand à cette histoire d’accident. Mais je sais que +la douleur d’avoir perdu mon compagnon aurait pu me rendre folle... au +moins aux yeux des autres, et rendre mes soupçons absurdes. C’est pourquoi +je n’ai pas pensé à vous en parler. Et que je suis allée vérifier par +moi-même...
Elle fit une pause, et détourna le regard de la lumière de la bougie, +étouffant un sanglot. Il préféra ne pas relever, et prit la parole.
— Comme vous pouvez le constater, vous aviez hélas raison.
— Comment pouvez-vous être sûr que Septim est vivant ? +

Samantha +

Elle hésita quelques instants. Non seulement elle n’avait révélé à +personne son identité jusque là, mais en plus à une magicienne... +Traditionnellement, mages et prêtres s’entendaient toujours assez mal. +Chacun faisait ses miracles dans son coin, en gardant ses secrets. +

Mais l’heure n’était pas à ce genre de querelle.
— Je suis une prêtresse. Je possède ce genre de pouvoir, sous certaines +conditions, par exemple le fait d’avoir en main un objet appartenant à ma +cible. C’est pourquoi Farl était sur place, il est allé prendre puis remettre +ces objets.
La magicienne eut un mouvement de recul, et la considéra avec un mélange +de surprise et de dégoût. Après un instant de silence, son visage se radoucit +légèrement, et elle parut gênée.
— Excusez ma réaction. C’est idiot.
— Il n’y a pas de mal, la rassura-t-elle. Toujours est-il que j’ai la certitude +que Septim est vivant, contrairement à...
Elle s’interrompit. La magicienne s’était levée, et avait fait quelques pas, +leur cachant son visage. Samantha voyait bien que la pauvre femme était + + +terriblement éprouvée. Mais que pouvait-elle faire ?
— Et si nous revenions à ce que nous avons trouvé ?
Elle se retourna brusquement, et déposa des objets sur la table. Une liasse +de papiers, et un collier ouvragé. Le visage de Zanakielle était de +nouveau ferme et décidé, malgré ses yeux légèrement rouges. Tous +trois hochèrent la tête, préférant se concentrer sur cette nouvelle +tâche. +

Ils firent un premier tri rapide. Après avoir mis de côté le bijou –qui +n’était vraisemblablement qu’un objet de grande valeur mis à l’abri–, et un +certain nombre de documents administratifs importants, ils trouvèrent trois +ou quatre feuilles, écrites à la main, qui ressemblaient à des notes de +recherche. +

— Effectivement, il m’avait parlé de ça... Regardez. Ce document n’est pas +de sa main, c’est une lettre qu’on lui a transmise. Un rapport d’un garde +vivant dans un village près de la forêt de Sossirant. Il raconte une trouvaille +bizarre, le cadavre d’une créature inhabituelle, charriée par des débris de la +rivière.
Elle leur montra la lettre, où on pouvait lire la description d’un insecte de la +taille d’un gros chien. Mais lorsque le garde avait voulu la nettoyer pour +l’observer plus en détail, la carcasse s’était en partie dissoute. En dessous, +avec une autre écriture, que la magicienne identifia comme celle de Mortag, +une note : « araknes ? ».
— Qu’est-ce que cela ?
— Les araknes sont des créatures aujourd’hui disparues. Des sortes +d’araignées géantes... Ah, justement, les documents suivants en parlent ! +

Les pages suivantes étaient visiblement des notes prises à ce sujet. Ces +sortes d’araignées –elle eut un frisson à les imaginer, et elle remarqua que +les trois autres ne semblaient pas très joyeux à cette évocation non plus– +semblaient vivre originellement dans des grottes très sombres, ne +sortant que lorsqu’elles n’y trouvaient pas assez à manger, et encore, +seulement de nuit. Supportant mal la lumière et surtout l’eau pure, elles +n’existaient que sous les contrées très chaudes, où il ne pleuvait +quasiment jamais. Et même là-bas, jugées trop nuisibles, elles avaient été +chassées par les elfes noirs et les humains, et il n’en restait plus en + + +théorie. +

— Il y aurait donc de nouveau ces créatures dans la forêt ? Comment ?
— Il est très peu probable qu’elles soient apparues toutes seules, surtout +dans un environnement qui leur est hostile, ajouta Uhr.
— Oui, et s’il n’y avait que ça, pourquoi chercher à faire disparaître celui +qui travaille sur le sujet et ses documents ? ajouta Zanakielle.
Farl, qui avait somnolé, épuisé, en écoutant la conversation, se redressa +pour faire une remarque.
— La forêt de Sossirant est très grande, largement inexplorée il me semble, +il peut y avoir n’importe quoi, y compris des grottes assez grandes et +profondes pour y loger ces bestioles... non ? +

Ils firent une pause pour faire le point. Si Septim avait cherché à cacher +les découvertes de Mortag, c’est que quelqu’un était vraisemblablement en +train de les réintroduire au cœur de cette forêt. Et secrètement.
— Mais, interrompit Uhr, il faut trouver quel est son intérêt là-dedans. Il, +ou elle, ou eux, ne ferait pas ça pour le plaisir de voir réapparaître une +pauvre créature disparue.
— N’y a-t-il pas un moyen de les contrôler d’une façon ou d’une autre ? +proposa Samantha.
— Peut-être. Ce serait alors une arme puissante. Je me demande pourquoi +personne n’y a pensé plus tôt... il faudrait étudier la question, et ce n’est +pas ma spécialité. +

— D’un point de vue plus pratique, on fait quoi ? On dit quoi ?
Uhr regarda les trois autres.
— Si je dis tout ça à mes supérieurs, je suis en mauvaise posture...
— Soit on mène l’enquête de notre côté, soit on leur dit. Mais on ne peut +pas ne rien faire !
— Tu as raison, Samantha. Mais je crains que ce problème ne nous +dépasse.
La magicienne proposa alors :
— Je vais tout leur dire. Et je prendrai votre défense à tous les trois. Et si +jamais on vous cause des ennuis, je vous couvrirai et je trouverai un moyen +de vous envoyer enquêter. Il est hors de question que je reste sans rien +faire.
Elle s’était levée, décidée, presque en colère.
— Vous avez raison. Je ne pourrai pas garder ce secret indéfiniment, et +mieux vaut qu’ils l’apprennent tôt. Mais discutez-en directement avec le +capitaine Mazrok. Il décidera ensuite d’en informer les enquêteurs.
Elle hocha la tête.
— En attendant, je vous propose de recopier rapidement tout ce qu’il y a +sur ces documents. Puis, il faudra les redéposer à leur place...
Ils jetèrent un œil à Farl, qui poussa un soupir.
— Bah, ça ne sera que la troisième fois de la nuit... +

Ils hochèrent la tête et se mirent au travail. +

Uhr +

Le capitaine faisait les cent pas, très énervé.
— J’espère que tu es conscient de ce que tu as fait. De ce que vous avez +fait.
Il ne répondit pas, très mal à l’aise. La magicienne leur avait dit qu’elle irait +le voir pour leur raconter l’histoire, et prendre leur défense, mais à quel +point l’avait-elle fait ? Et même si elle avait fait de son mieux, ce n’était +pas elle qui était seule dans le bureau de Mazrok, ce n’était pas elle qui +risquait de perdre sa carrière... Il réalisa soudainement qu’elle avait perdu +pire, en fait, et cessa ses plaintes intérieures.
— J’avais bien quelques doutes sur cette histoire d’accident. J’avais engagé +une enquête à ce sujet... Même si j’admets que personne n’avait pensé à +faire appel à un prêtre.
Il n’avait rien à répondre qui puisse améliorer sa situation.
— Et aller fouiller dans des maisons sous scellés... Y récupérer des objets... +Tu te rends compte ?
Il baissa les yeux. Le capitaine laissait échapper sa colère tout haut, +comme souvent, mais il savait, pour l’avoir fréquenté, qu’il n’était pas +un homme injuste. Une fois le calme revenu, il ne lui appliquerait +pas une sanction disproportionnée. Sauf qu’objectivement, il savait +qu’il en avait mérité une... Même s’il n’était pas seul dans cette +histoire. +

Le capitaine Mazrok resta silencieux pendant quelques minutes, puis se + + +posta face à lui.
— Malgré cela, vous avez tous les quatre plus avancé dans l’enquête que +nous n’aurions fait en une semaine.
Il avait parlé d’une voix calme. Y avait-il un espoir ?
— Sauf que je suis très embêté. Officiellement, l’enquête n’en est pas là. +Officiellement, il s’agit toujours d’un accident.
Il se tut, et fit quelques pas, réfléchissant.
— Mais ces informations vont nous faire gagner un temps précieux, surtout +si l’assassin ne sait pas qu’il est identifié. Puisque tu es le seul au courant, +tu vas partir enquêter discrètement sur ce qui se passe dans cette +forêt.
Il leva les yeux vers lui. Il lui sembla qu’il attendait une réponse.
— Seul ?
— Tu peux emmener quelques personnes de confiance avec toi. Par exemple, +les amis qui t’ont aidé dans cette tâche ? Je couvrirai vos dépenses, bien +entendu.
— Euh, d’accord.
— De mon côté, je vais faire avancer l’enquête comme je pourrai, afin de +parvenir à la même conclusion officiellement. Mais tu auras pris de l’avance +en attendant, une avance précieuse.
Il hocha la tête. Non seulement il échappait au pire, mais l’idée d’une +mission importante n’était pas pour lui déplaire. Une mission avec +Samantha et Farl... s’ils acceptaient.
— Il y a cependant quelques points à régler. Le premier, c’est que j’aurais +besoin d’être en contact avec toi le plus efficacement possible, et bien +entendu discrètement. Que ce soit pour te tenir au courant de l’enquête, ou +que tu m’apprennes ce que tu trouves.
— J’ai peut-être une idée pour ce point, interrompit-il.
Le capitaine sembla surpris.
— Je t’écoute.
— Les prêtres possèdent un moyen de communiquer par la pensée. Si je +voyage avec une prêtresse, il m’est possible de vous tenir au courant de mon +avancée rapidement.
— Mh, c’est effectivement plutôt malin. Bien que je n’aie jamais +fait cela, je dois reconnaître que c’est une bonne idée. Soit. Tu vas + + +aller préparer ton départ, au plus vite. Je m’occupe d’autres détails +techniques. +

Alors qu’il tournait les talons et quittait la pièce, le capitaine le rappela +une dernière fois.
— Uhr ?
— Oui ?
— Je devrais être furieux pour ce que vous avez fait, mais je suis quand +même un peu fier. Ne me déçois pas pour la suite.
Un léger sourire marquait son visage.

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 ? Sa coupure à l’épaule gauche était complètement guérie, grâce à elle. Sans ça, il aurait probablement senti la blessure le tirailler plusieurs + + semaines... Elle lui rendit son sourire. La soirée s’annonçait plutôt bien.

Alors qu’il s’accroupissaient tous les deux pour préparer le feu –elle n’avait pas sa technique, mais elle apprenait vite–, elle aperçut, dans son - - dos, quatre disques rouges, brillants, dans l’ombre. Elle se redressa subitement.
— Zach ! Derrière toi...
+rassurant...

Zach

— Une arakne !
Du bout de son bâton, elle remua le cadavre de la bête, retenant un frisson d’horreur. Il remercia ses réflexes, sans lesquels... il ne préféra pas imaginer la suite.
— Elles attaquent rarement seules, il ne vaudrait mieux pas rester +class="newline" />— Elles attaquent rarement seules, il vaudrait mieux ne pas rester ici...
— Attention !
Deux autres créatures venaient de sortir du sous-bois. Il se plaça entre elles et Sélène, et sortit son couteau de sa botte. Deux adversaires humains, il - - avait déjà fait, mais deux bestioles comme ça...

La plus grosse des créatures bondit, et vint s’embrocher sur son épée et y resta. D’un geste ample, il dégagea le corps inerte de la bête de son arme @@ -2996,6 +4000,8 @@ class="ecti-1095">

— Assieds-toi.
Il obéit, en retenant difficilement une grimace de douleur. Elle examina la plaie. Deux ouvertures profondes et larges, les traces des mandibules de + + l’arakne. Heureusement, elle n’avait laissé aucun morceau, mais elle savait que ce n’était pas suffisant, car elles étaient venimeuses...
— Première étape, nettoyer ça. Après, je vais te donner quelque chose pour @@ -3030,6 +4036,8 @@ courant. De toutes fa choisir, il préférait mourir de la main de Sélène que par un poison lent...

Ses yeux brillèrent plus fort alors qu’elle s’approchait de lui. D’autres + + filaments de lumière semblaient voler, partant ou arrivant vers la pierre de son bâton. Certains semblaient converger vers sa main gauche, qui devenait de plus en plus lumineuse. Elle était magnifique ainsi. Magnifique et @@ -3041,8 +4049,6 @@ d étaient de nouveaux normaux. Quelques gouttes de sueur perlaient de son front. Elle le regardait intensément.

Tremblant, il posa sa main sur la sienne. Une partie de lui-même lui - - criait de s’enfuir pendant qu’il en était encore temps. Qu’il risquait de tomber sous son charme. Qu’elle était en train de l’ensorceler. Une autre voix, plus raisonnable, lui posait des milliers de questions. Les sorciers @@ -3066,6 +4072,8 @@ class="newline" />— Il y a des gens < class="newline" />À l’idée de devoir mourir de la main de ses pairs après avoir survécu aux araknes, Zach ne réfléchit pas longtemps. Il ramassa son épée, et bondit dans la direction des voix. + +

Aldariel

— Aldariel... C’est quoi ces horreurs ?

Elle recula encore de quelques pas, l’arc tendu. Plus d’autre arakne en vue. Elle se tourna alors vers son amie, agenouillée au sol, le visage crispé @@ -3087,7 +4093,7 @@ par la douleur.
— Sil !
L’épée avait si bien traversé la bête que son corps s’était enfoncé jusqu’à la garde, et que ses mandibules s’étaient plantées profondément dans son -poignet. S’asseyant à ses côté, et tout en surveillant les environs, Aldariel +poignet. S’asseyant à ses côtés, et tout en surveillant les environs, Aldariel commença par dégager avec précaution les pinces de l’arakne. Son avant-bras comportait deux entailles. L’une des mandibules avait été amortie par la bande de cuir qui entourait son poignet, l’autre @@ -3115,8 +4121,6 @@ Silw

Zach

Son adversaire était plus petit que lui, mais il parait ses coups avec - - précision. Il ne devait pas le sous-estimer. Sur le troisième coup qu’il lui porta, il sentit pourtant une certaine faiblesse dans la parade. Maintenant le contact de sa lame contre la sienne, il força son adversaire à écarter son @@ -3140,6 +4144,8 @@ souleva d’un coup de hanche et l’accompagna au sol. Sous le choc, le coupé, la jeune femme lâcha sa dague. Maintenant fermement son poignet droit par terre, il posa son genou contre sa poitrine pour l’empêcher de se relever. Elle cessa de chercher à se dégager lorsqu’il posa la lame de son + + épée à plat sur sa gorge.

C’était la première fois qu’il voyait une elfe de si près. Il l’observa avec curiosité. Ses cheveux fins étaient retenus par une longue tresse, et ses yeux @@ -3151,8 +4157,6 @@ beaucoup se porta vers son avant-bras. La blessure qui s’y trouvait rappelait beaucoup une autre qu’il avait subie il y a très peu de temps... Elle aussit s’était battue contre des araknes ? Le souvenir de la douleur - - associée lui donna des frissons, et il desserra très légèrement son étreinte.

Reprenant ses esprits, il appuya légèrement la lame contre sa @@ -3177,6 +4181,8 @@ de son ennemi. Le brigand qui la maintenait au sol l’observait avec une fascination inquiétante. Son arme était posée à plat sur sa gorge, signe qu’il n’avait –apparemment– pas l’intention de la tuer tout de suite. Peut-être comptait-il abuser d’elle avant ? Ce n’était guère + + mieux...
— Tu vas me dire qui tu es, ce que tu fais là, et pourquoi tu nous espionnes.

L’homme sembla hésiter. Si Aldariel décidait de le tuer, il avait de toutes façons le temps de l’égorger avant de mourir. De même, il - - pouvait choisir de la tuer elle, mais le payerait de sa vie. Il sembla choisir la solution raisonnable. Elle le vit éloigner lentement son épée de sa gorge, sans la quitter des yeux. Mais il ne l’avait pas encore @@ -3213,6 +4217,8 @@ class="ecti-1095">Zach sol. Son visage était tourné vers Sélène, mais son regard semblait focalisé, non pas sur la jeune femme, mais derrière...
— Les... ara... Il porta son regard dans sa direction, essayant de ne + + pas se faire aveugler par la lumière émise par la magicienne. Puis il hurla.
— Sélène, écarte-toi !
énorme arakne bondit à l’endroit où elle se tenait quelques secondes plus tôt, et y fut accueillie par une flèche droit dans un de ses yeux. La bête continua sa course et s’effondra, inerte, aux pieds de Zach, - - stupéfait. Une seconde créature, arrivant du même endroit, se dirigea droit vers elle. Avant de lui laisser le temps de réagir, elle reprit le contrôle de sa boule de feu –toujours suspendue dans les airs, là où elle @@ -3238,7 +4242,7 @@ d prisonnière, et se tenait debout, l’épée à la main. L’archère armait une nouvelle flèche, en observant les environs, tandis que l’autre elfe, blessée, se redressait avec difficultés.
— Je suggère qu’on règle nos différents plus tard, une fois à l’abri des +class="newline" />— Je suggère qu’on règle nos différends plus tard, une fois à l’abri des araknes, proposa-t-elle calmement. Il pourrait très bien y en avoir d’autres...
L’archère et Zach se fixèrent d’un air méfiant quelques instants, puis @@ -3262,8 +4266,6 @@ l’arme id tirer quasiment à bout portant. Elle se demandait ce que faisait la magicienne, dans son dos, mais elle ne pouvait pas s’en préoccuper maintenant. Elle lâcha un trait sur une autre créature, de justesse. - - Aurait-elle assez de flèches ? Ah, si Silwë était à leurs côtés pour combattre...

Comme répondant à sa pensée, elle vit la silhouette familière passer @@ -3299,8 +4301,6 @@ class="newline" />— Rien, elle a juste besoin de se reposer. Nous aussi de faut qu’on se mette à l’abri, rien ne nous dit qu’il ne va pas y avoir d’autres araknes.
— Elle avait dit... que ces bestioles ne supportaient pas l’eau pure, et qu’il - - fallait trouver une rivière. De mémoire, il y en a une dans cette direction.
Elle hocha la tête, tout en ramassant ses flèches aux alentours. Cela lui @@ -3322,9 +4322,11 @@ meilleure des postures pour toucher les cr Était-ce la rage d’être restée passive pendant toute une partie de l’action, blessée ? Le contrecoup de la douleur ? L’efficacité meurtrière qu’elle avait mise en œuvre, une fois guérie, était à la fois rassurante et inquiétante. -Rassurante parce qu’elle était à côté d’elle, son épée tirée, prête à +Rassurante parce qu’elle était à côté de lui, son épée tirée, prête à bondir sur le moindre danger les menaçant. Inquiétante, parce qu’elle -était à côté d’elle, son épée tirée... prête à bondir sur lui si l’envie + + +était à côté de lui, son épée tirée... prête à bondir sur lui si l’envie l’en prenait. Il savait qu’il n’aurait de toutes façons pas le temps de dégainer son épée, et aucun espoir de s’enfuir avec Sélène dans ses bras. @@ -3335,8 +4337,6 @@ autres, de l’avoir plaqu si... les deux elfes ne tenaient pas leur parole ? Il détestait se sentir ainsi, à la merci de ces deux inconnues. Mais avait-il le choix, de toutes façons ? Il était le seul assez fort pour pouvoir porter facilement - - Sélène. À bien y réfléchir, il n’aurait pas laissé quelqu’un d’autre le faire.

Le son de l’eau qui coule se fit rapidement entendre, et la large rivière, @@ -3344,8 +4344,8 @@ calme, apparut sous leurs yeux.
— Nous y voici. Il n’y a plus qu’à traverser. Tu sauras nager avec elle ?
C’était la voix de l’archère, qui s’était tournée vers lui. Il hocha la tête, -même si l’idée de se jeter à l’eau avec tout son équipement, et la jeune -femme inanimée ne l’enchentait guère.
— On n’est pas obligés de traverser tout de suite, proposa la guerrière. On peut la longer jusqu’à trouver un gué. Il y a peu de chances que cette rivière se transforme en torrent d’ici là, et rien ne nous empêche de nous jeter à @@ -3360,6 +4360,8 @@ l’eau qu’ class="newline" />— Bien vu !
Il s’avança à sa suite. Soudain, alors qu’elle atteignait presque la rive opposée, l’elfe s’arrêta brusquement et se retourna vers lui, les sourcils + + froncés.
— Silwë... Tu ne m’avais pas dit que les humains voyaient très mal dans l’obscurité ?
— C’est une longue histoire, je vous explique après, promis. Est-ce qu’on peut se mettre en sûreté d’abord ?
L’archère, devant lui, hocha la tête, et se remit en marche. - -

— On peut peut-être s’arrêter là ?
Les deux elfes regardèrent les alentours, et hochèrent la tête. Ils étaient à une trentaine de mètres de la rivière. Il vit les deux jeunes femmes le jauger @@ -3397,6 +4397,8 @@ invit l’arc.
Zach allait demander s’il n’était pas dangereux pour deux femmes seules de faire ce long trajet. Puis il se souvint des traits de l’archère et de l’épée de + + la guerrière, et se ravisa. Cette dernière reprit.
— Pour répondre à ta question initiale, nous n’étions pas en train de vous espionner. Nous avons été attaquées par les araknes, et nous avons vu de la @@ -3409,8 +4411,6 @@ class="newline" />Il montra sa cuisse, et le tissu d dénommée Silwë, en face de lui, marquer un léger frisson. Lentement, elle défit la bande de cuir qui entourait son poignet droit. La peau était intacte, mais le cuir marquait de profondes entailles. Il soupira et - - continua.
— La magie fait très peur, dans nos contrées. Les magiciens sont pourchassés et brûlés vifs... Jusqu’à ce moment, j’ignorais qu’elle @@ -3434,6 +4434,8 @@ lasse au bout d’un moment.
Il la remercia d’un sourire, et mangea quelques bouchées de la galette. Elle avait un goût de miel, et effectivement, nourrissait bien malgré sa finesse. Sa compagne prit quelques morceaux de pain rassis, et fit la + + grimace.
— Excuse-moi, mais je n’ai pas encore l’habitude de la nourriture humaine...
— J’y ai appris le maniement de l’ pour mon expérience humaine, que j’ai eu l’honneur d’escorter notre princesse.
Elle adressa un sourire amusé à Aldariel. Elle était donc bien une princesse, - - comme elle lui avait annoncé –il eut un léger frisson– à la pointe de sa flèche... Il se demanda s’il devait la traiter en tant que telle. Son « garde du corps » ne semblait pas s’encombrer de protocole, mais @@ -3471,6 +4471,8 @@ plus mal. Maintenant qu’il avait enfin des elfes face savoir...
— Effectivement, j’ai la capacité de voir dans l’obscurité, mais j’ignore pourquoi. Je suis un enfant trouvé sur le pas d’une porte et adopté... Sélène + + pense que j’ai des antécédents elfiques.
Les deux jeunes femmes l’observèrent un moment. Puis se jetèrent un regard entendu. Aldariel se leva et vint s’asseoir à côté de lui, une main sur @@ -3506,6 +4508,8 @@ class="newline" />Silw class="newline" />— De ce que j’ai pu voir, il y a des humains grands, petits, forts, frêles, à la peau claire, sombre... Je ne me fierais pas à ta seule apparence pour en juger. Mais il faut reconnaître que ton teint mat, tes cheveux sombres, ta + + silhouette rappellent un peu un elfe noir. Avec la barbe en plus, et les oreilles pointues en moins.
— Tu penses qu’il est un... hybride ? Un demi-elfe ?
— Bon, je prends la première garde. Allez dormir.
— D’accord, je prendrai la suivante, ajouta-t-il.
— Je m’occuperai de la dernière. - -

Il commença à s’installer près de Sélène, qui à son grand soulagement, semblait toujours dormir paisiblement. Aldariel lui tendit ce qui ressemblait à un drap léger.

Un bien étrange personnage que ce Zach... Maintenant qu’elle y pensait, il avait bien un petit air d’elfe, si elle l’imaginait sans barbe. Mais était-ce important, finalement ? Il semblait plutôt sincère lorsqu’il avait @@ -3554,8 +4558,6 @@ diff ce cas, pourquoi aurait-il répondu sincèrement à ses questions sur sa vue ? Il aurait très bien pu prétendre voir un petit peu moins bien... - -

Il avait eu une attitude très... protectrice vis-à-vis de la magicienne. Prenait-il son travail très au sérieux, ou était-il réellement attaché à elle ? Si elle avait été sûre que le langage corporel des humains était le même que @@ -3579,6 +4581,8 @@ jamais rencontr n’était que des rumeurs ridicules entretenant une haine séculaire ? Elle se promit de demander à son amie, peut-être en avait-elle vu à la capitale, après tout ? Tiens, maintenant qu’elle y pensait, elle + + était persuadée d’avoir perçu une légère gêne de la part de Silwë lorsqu’elle avait parlé de relations hybrides. Était-ce un sujet tabou, là-bas ? Ou se pouvait-il que... ? Les humains étaient si différents @@ -3591,8 +4595,6 @@ class="newline" />— Que se passe-t-il  class="newline" />— Rien, c’est juste ton tour de veiller.
Il se leva, s’étira et ramassa son épée. Puis il lui tendit la couverture et s’éloigna rapidement pour trouver un point d’où surveiller le campement. - -

Allongée dans sa couverture –qui avait une odeur... d’humain ?–, elle mit quelques minutes à s’endormir, malgré la fatigue. Le calme était revenu sur le campement, et elle distinguait sa silhouette, debout, adossée à @@ -3615,6 +4617,8 @@ serait-il devenu sans elle... Que seraient-ils devenus, corrigea-t-il, si elle n’avait pas été là pour soigner les morsures mortelles de ces horreurs. Qu’est-ce qu’il lui avait pris de vouloir la serrer dans ses bras, tout à l’heure, juste après avoir été guéri ? Le contre-coup de la + + douleur ? La crainte de mourir qui s’était apaisée brutalement ? Le choc d’apprendre qu’elle possédait des pouvoirs hors du commun ? Le danger que ces mêmes pouvoirs représentaient ? Finalement, @@ -3627,8 +4631,6 @@ d’ailleurs ? Elles avaient l&# les elfes ayant la réputation d’avoir une grande longévité, ça ne voulait peut-être pas dire grand chose... Elles dormaient l’une contre l’autre. Pour le froid, ou y avait-il plus que de l’amitié entre elles ? Il - - ne connaissait les mœurs des elfes que de réputation, et on disait des choses bien étranges sur leur sujet... Il fit mentalement la liste de ces on-dits, tout en rayant intérieurement toutes les questions @@ -3652,6 +4654,8 @@ aim rien tenté contre lui lorsqu’ils fuyaient les araknes, et qu’il était désarmé et chargé, y compris après avoir traversé la rivière. Et elle devait la vie à Sélène. Mais elle ne lui devait pas grand-chose, à + + lui...

Quand à la « princesse »... qui ne souhaitait pas qu’on la traite en tant que telle. Que pouvait être le protocole, chez eux, d’ailleurs ? Comment @@ -3663,8 +4667,6 @@ efficace, rapide et pr entendu le son de son arc se détendre dans son dos. Fort heureusement, elle avait estimé que l’arakne était une meilleure cible que lui... Il frissonna. - -

Il y a quelques jours, il n’aurait jamais admis, ni même imaginé une seule seconde avoir peur d’une femme. Et pourtant, les trois qui étaient étendues sous ses yeux, toutes plus petites et plus fragiles que lui, @@ -3688,6 +4690,8 @@ class="newline" />— Oui. Rien class="newline" />Elle se leva, lui tendit sa couverture, s’équipa rapidement et s’éloigna.

Il fallait dormir. Faire confiance à la guerrière. Il prit une grande inspiration. Tout allait bien... La couverture de la guerrière était déjà + + chaude, et confortable. Il tourna la tête vers Sélène, étendue tout contre lui. Était-il dangereux de dormir si près d’une... sorcière ? De toutes façons, ce n’était pas la première fois, et il était toujours en un seul morceau, @@ -3699,15 +4703,13 @@ haine peur ?

La fatigue l’envahit à nouveau, interrompant ses pensées. Il ferma les yeux, et s’endormit à son tour. - -

Silwë

La nuit allait bientôt s’achever, sans qu’il se soit passé quoi que ce soit. C’était plutôt rassurant... Pas d’autre menace venant de la rivière. Pas de menace non plus de leurs compagnons d’infortune. La magicienne dormait -toujours, et à ses côté, Zach semblait s’être endormi. Il n’avait pas +toujours, et à ses côtés, Zach semblait s’être endormi. Il n’avait pas tenté de les attaquer, ou de les voler pendant leur sommeil... Elle se demandait s’il était vraiment un guide ou s’il était juste un brigand qui avait inventé cette histoire pour se couvrir. L’un n’empêchait pas @@ -3725,7 +4727,9 @@ l’avait menac l’épée de son guide, mais ça comptait quand même. Était-ce par simple opportunisme, sachant qu’il leur fallait un bras de plus pour combattre les araknes ? S’étaient-ils alliés à elles parce qu’ils se -savaient en danger seuls, et allaient ils se retourner contre elles une + + +savaient en danger seuls, et allaient-ils se retourner contre elles une fois la magicienne réveillée ? Elle secoua la tête. La nuit lui faisait imaginer les pires scénarios. Ils étaient vraisemblablement, comme elles, deux voyageurs supris par ces créatures, et avaient eu peur. @@ -3737,8 +4741,6 @@ avec une pas retrouvée immobilisée aussi facilement. Elle prendrait bien sa revanche, mais l’attaquer n’était pas forcément la meilleure façon de lui montrer ses bonnes intentions... d’autant qu’il semblait se méfier - - un peu d’elle. Et... aurait-elle le dessus, en fait ? Ce n’était pas clair...

— Bien dormi Elle sursauta et se retourna. L’autre elfe, la guerrière, était derrière elle, adossée à un arbre, l’épée à la main. Elle lui souriait.
Elle se leva, ramassa son bâton de magie, posé à côté d’elle. Devait-elle se + + méfier d’elle, ou pas ? La jeune elfe rangea son épée à sa ceinture –pour la rassurer peut-être ?– et lui fit signe de s’approcher.
— Laisse les autres dormir. Ils sont épuisés.
— C’est moi qui dois te remercier de toutes fa class="newline" />La guerrière lui montra son poignet, et sourit.

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Irdann été adoubé paladin de la déesse, et qu’il pouvait sillonner le pays, rendant divers services çà et là. Bien sûr, il savait qu’il ne ferait pas fortune ainsi, mais il était libre comme l’air et accueilli plutôt + + généreusement un peu partout. Que pouvait-il rêver de plus ? Peut-être un peu de compagnie. Oh non, il était loin du cliché du chevalier parcourant le pays avec sa Dame l’attendant dans son château, mais @@ -3806,16 +4812,14 @@ formation. Et ils avaient quitt maintenant !

Il avait fière allure avec son tabar blanc, orné d’un écusson argent à l’effigie de Melna. Dessous, un pantalon et une tunique gris clair, et une -cotte de mailles légère, ainsi que des solides gants de cuir. À sa ceinture, il +cotte de mailles légère, ainsi que de solides gants de cuir. À sa ceinture, il portait ses armes, flambant neuves, et sa tête était couverte d’un heaume ouvragé. Il avait quitté la forêt le matin même, et s’approchait du château du seigneur Assem, qui ferait une bonne étape pour la nuit. Peut-être - - -pouvait-il rester quelques jours pour se reposer, après la traversée épuisante -de cette forêt... Il avait promis à ses parents, qu’il n’avait pas vus depuis des -années, qu’il serait présent pour l’ouverture du grand tournoi de tir -à l’arc qui était organisé en leur domaine. Mais il avait le temps, +pourrait-il y rester quelques jours pour se reposer, après la traversée +épuisante de cette forêt... Il avait promis à ses parents, qu’il n’avait pas vus +depuis des années, qu’il serait présent pour l’ouverture du grand tournoi de +tir à l’arc qui était organisé en leur domaine. Mais il avait le temps, finalement.

— Sieur Irdann, c’est un honneur de vous accueillir ici !
Il posa respectueusement un genou à terre devant le seigneur et sa dame, @@ -3847,8 +4851,6 @@ tress crème, brodée d’or. Un air sage, convenable à une jeune fille de son rang.
— Elle devait nous rendre visite, seule car son époux est très occupé, et a - - préféré ne pas attendre le carosse et l’escorte de soldats que nous lui envoyions d’habitude. Mais elle devrait déjà être arrivée, depuis plusieurs jours déjà...
Irdann hésita un instant. Oui, il connaissait un moyen, puissant, complexe + + et dangereux, mais ne l’avait jamais mis en place jusqu’alors... Mais peut-être était-ce le moment où jamais. Et puis, une quête héroïque, digne d’un grand paladin... Cela serait excitant et enrichissant. Le regard inquiet @@ -3884,8 +4888,6 @@ noble paladin. demandé à n’être dérangé sous aucun prétexte. Puis il fit le tour de la pièce. Ça n’allait pas être simple, et il le savait. Ne connaissant pas personnellement la jeune femme, il lui fallait trouver un objet très - - personnel, auquel elle était attachée émotionnellement. Mais lequel ? Un vêtement ? Un bijou ? Un livre ? S’il devait invoquer l’enchantement de Melna sur chaque objet qui lui semblait convenir, il n’avait pas @@ -3907,11 +4909,13 @@ volume moyen et cach chercher ?

Il se leva et se mit à chercher. Au bout d’une vingtaine de minutes, il finit par trouver un paquet, enveloppé dans un tissu, coincé entre le matelas + + et le sommier. S’il était dissimulé ici, il y avait une bonne raison... Le cœur battant, il le sortit et le déballa précautionneusement.

C’était un grand livre, à la reliure en cuir ornée d’or, aux pages jaunies par le temps. Il l’ouvrit et en lut quelques lignes. C’était un livre de -sorcellerie... Il en eut sueurs froides. Il avait grandi en apprenant que la +sorcellerie... Il en eut des sueurs froides. Il avait grandi en apprenant que la magie, si elle ne venait pas des dieux, était très dangereuse. Son père faisait office d’avant-gardiste en considérant, au moins, les autres races humaines avec une certaine bienveillance. Mais la magie, il n’en n’était pas question. @@ -3920,8 +4924,6 @@ sortes d’ courante –il y avait même une université pour l’apprendre ! Le contraste avec cette région était si saisissant... À la garde, maître Ernest ne faisait même pas la différence entre les hommes et les femmes, alors - - qu’ici...

Il secoua la tête. Ce n’était pas le moment de faire revenir de vieux souvenirs, il avait autre chose à s’occuper. Ce livre était plus qu’interdit ici, @@ -3943,6 +4945,8 @@ concentrant, il pouvait elle se trouvait, ce qui lui permettrait de la retrouver, où qu’elle se trouve.

Il se leva, rangea précautionneusement le livre dans sa cachette d’origine + + et sortit de la chambre de la jeune femme. Il fit indiquer au seigneur qu’il se mettrait en route dès le lendemain, à l’aube, et partit se coucher, épuisé. @@ -3955,8 +4959,6 @@ de rythme le perturbaient. Cette acc demi-heure, était-elle due à un moment de peur ? Un effort physique immédiat ? Un émoi ? Un danger ? Tout s’était calmé rapidement... Impossible de savoir évidemment, mais cela donnait une sensation - - étrange, voire vraiment gênante. L’impression d’être dans l’intimité de quelqu’un, sans le voir ni l’entendre, juste à ses battements de cœur. @@ -3968,8 +4970,8 @@ sensations, quand bien m impassible. C’était une des raisons pour lesquelles cet enchantement était tenu secret...

De plus, il avait entendu lui aussi toutes les légendes de ces paladins -retrouvant leur bien-aimée. Sauf s’il en connaissait la face sombre. Celle qui -racontait que nombre d’entre eux, hantés, obsédés par ces battements +retrouvant leur bien-aimée. Sauf qu’il en connaissait la face sombre. Celle +qui racontait que nombre d’entre eux, hantés, obsédés par ces battements incessants, incapables de savoir ce qui arrivait à l’objet de leurs pensées tout en ayant la sensation d’en être si proches, avaient fini par perdre complètement la raison. @@ -3978,6 +4980,8 @@ aucun lien affectif avec la personne qu’il recherchait, sinon, le m l’attendait. Mais même malgré cela il était mal à l’aise. Il ouvrit les sacoches cavalières de sa monture, découpa un morceau de sa couverture dans laquelle il enveloppa la pierre, qu’il plaça au fond d’une des sacoches. + + Étouffées par le tissu, les pulsations ne lui étaient –enfin– plus perceptibles. Il poussa un soupir de soulagement. Il le sortirait dans quelques heures pour vérifier sa direction, c’était bien suffisant. Et dès qu’il aurait retrouvé @@ -3993,8 +4997,6 @@ faire route avec les deux elfes, qui s’ de voyage. Elles étaient aussi à l’aise en forêt que des poissons dans l’eau, plus encore que Zach. Aldariel, assise en face d’elle, lui avait parlé de recettes de potions à base de plantes, et Sélène avait été enthousiaste à - - l’idée de les partager.
— C’est une chance que tu aies ce petit chaudron avec toi.
Sélène sourit.
— Et encore, il faudra que je te montre certaines quR ici...
— Tu veux dire, dans votre forêt elfique ?
— Oui, il y a des plantes médicinales spécifiques à notre région... Ça te + + plaira !

Sélène ferma les yeux à demi, bercée par le léger bruit du mélange qui frémissait et l’odeur agréable qui s’en dégageait. Il faisait beau, @@ -4030,8 +5034,6 @@ faire. départ... Toutes les broderies du bas étaient sales ou abîmées à force de marcher dans la forêt, et une longue déchirure verticale remontait jusqu’à son genou gauche. Il y a une semaine, elle aurait trouvé ça presque - - indécent, mais à présent elle s’en moquait. Ses courbatures et ampoules du début s’étaient estompées, et elle suivait désormais quasiment sans effort le rythme de marche de Zach. Et elle avait découvert la @@ -4088,9 +5090,11 @@ boug class="newline" />— Tu étais blessée. Il n’y avait aucun challenge.
— Quoi ? Comment ça ?
Vexée, voire même furieuse, elle s’était levée, et le fixait, les bras croisés. Il + + avait peut-être un peu exagéré. En le voyant accentuer son sourire, et comprendre son jeu, elle soupira.
— Tu as gagné. Tu réussi à me faire lever.
— Tu as gagné. Tu as réussi à me faire lever.
Elle ramassa tranquillement son épée, et se retourna rapidement vers lui, son arme pointée, avec un léger sourire de défi.
— En garde ! @@ -4102,8 +5106,6 @@ pi quelques instants à se mesurer du regard. Zach tenait son épée, un peu plus courte que la sienne, à une main. Sa position de garde était impeccable. Il semblait hésiter à porter le premier coup. Était-il aussi sûr de lui - - qu’il en avait l’air, finalement ? Elle prit une grande inspiration et engagea un coup de taille, pour tester. Il le para avec efficacité et précision, et contre-attaqua immédiatement, d’un coup qu’elle @@ -4138,8 +5140,6 @@ difficult épée était mieux équilibrée, ou plus longue. Sa technique était juste irréprochable. Sur les trois échanges qui suivirent, il ne parvint à en gagner qu’un, de peu. - -

Leurs lames s’entrechoquèrent à nouveau, et glissèrent jusqu’à la garde. Il était tout proche d’elle. Des gouttes de sueur perlaient le long de ses tempes et des mèches de ses cheveux –toujours détachés– étaient collées sur @@ -4162,6 +5162,8 @@ r

Silwë + +

Elle était furieuse. Contre elle-même plus que contre Zach. De s’être fait avoir si facilement, et puis, il avait raison...
— Certes.

Elle s’était déjà entraînée à lutter, y compris contre des adversaires plus grands et forts qu’elle. Mais il était aussi très agile et rapide, plus qu’elle ne l’aurait imaginé... surtout qu’il ne commettrait évidemment pas @@ -4198,6 +5198,8 @@ la main et l’aida en arrière et fléchit légèrement les genoux. Alors qu’il s’avançait vers elle, elle fit un saut rapide de côté et le cueillit d’un coup de genou dans les côtes. Aïe. Il fit quelques pas sur le côté, le temps de + + reprendre son souffle, puis tenta à nouveau de s’approcher pour lui saisir un bras. Même saut latéral, mais cette fois il put anticiper et esquiver habilement le coup de pied qui le menaçait. Il retenta la @@ -4211,8 +5213,6 @@ et class="newline" />— Bien défendu, mais tu t’es fatiguée trop vite...
Elle ne répondit pas de suite, trop occupée à retrouver sa respiration. Puis elle se tendit soudainement. Au même instant, il lui sembla entendre un - - bruit inhabituel. Un cheval qui renâclait... Il recula rapidement dans un buisson proche, entraînant Silwë avec lui.
— Quelqu’un vient... pas un bruit, murmura-t-il dans son oreille.

Un frisson le parcourut. Il porta la main à sa ceinture, constatant avec horreur qu’il l’avait laissée, ainsi que son armure près de Sélène et d’Aldariel. Il tourna la tête vers Silwë, tout aussi démunie que lui. Et leurs @@ -4268,6 +5270,8 @@ la jeune femme en question... Et que faisait-elle en pleine for Prisonnière quelque part ? Comment l’en sortirait-il si c’était le cas ?

Il vérifia que sa monture était bien attachée, puis se dirigea résolument + + vers sa destination. Soudain, devant lui, une silhouette sortit des buissons si rapidement et silencieusement qu’il eut l’impression de la voir se matérialiser sous ses yeux. @@ -4282,8 +5286,6 @@ se pla class="newline" />— Je suis à la recherche de dame Sélène, et aucun obstacle ni aucun homme ne m’éloignera de ma route.
Elle frissonna. Il avait dégainé l’épée de la main gauche juste avant la main - - droite... Cela lui rappelait quelqu’un...
— Qu’est-ce que vous lui voulez ?
C’était idiot, elle le savait. Mais il fallait juste parler, pour gagner du temps. @@ -4305,6 +5307,8 @@ pour l’enlacer.

À cet instant, trois silhouettes surgirent devant ses yeux, à demi cachés par les cheveux en bataille de l’elfe. Son sourire se figea.

La première était celle d’un homme armé d’une épée courte, une + + seconde plus longue glissée dans sa ceinture. Son air menaçant et concentré disparut instantanément lorsqu’il l’aperçut, et il sembla si surpris qu’il manqua d’en lâcher son arme. La seconde silhouette @@ -4320,8 +5324,6 @@ compliqu class="ecti-1095">Sélène - -

Qu’avait-il dit déjà ? Que Silwë tenterait de... discuter pour leur laisser le temps d’arriver ? On ne pouvait nier son efficacité, l’homme ayant visiblement lâché ses armes. Mais elle ne s’attendait pas vraiment à ce genre @@ -4337,11 +5339,11 @@ puis fit un pas dans sa direction, et posa un genou elle.
— C’est vous ? Vous êtes saine et sauve ?
Elle recula d’un pas, méfiante, serrant toujours son bâton de marche. Zach -sembla reprendre ses esprit et sa prise sur son épée, et s’interposa entre +sembla reprendre ses esprits et sa prise sur son épée, et s’interposa entre eux.
— Qu’est-ce que vous me voulez ?
— Vos parents, le seigneur et la dame Assem se font un sang d’encre pour -vous. Ils m’ont donc envoyé vous retrouver. Ils craignaient que vous ne soyez +vous. Ils m’ont donc envoyé vous retrouver. Ils craignent que vous ne soyez morte, ou enlevée par des brigands...
Elle écarta le bras de Zach et se planta devant le chevalier.
— Comme vous pouvez le voir, je vais très bien, je suis parfaitement libre de @@ -4353,7 +5355,7 @@ jours...
Elle croisa les bras, vexée. Il n’avait pas besoin de révéler tout cela devant ses compagnons non plus...
— J’ai raté la diligence en arrivant dans un des villages. Alors j’ai engagé -un guide et protecteur, et je suis venue à pieds à travers la forêt. Vous +un guide et protecteur, et je suis venue à pied à travers la forêt. Vous pouvez donc les rassurer, je vais très bien.
Le paladin se releva et hocha la tête en souriant légèrement.
— La déesse soit louée, c’est le cas.
Le sourire qu’ils retourna vers elle à nouveau.
— Sélène, tu peux lui faire confiance autant qu’à moi. Je lui confierais ma vie sans aucune hésitation. -

Zach et Aldariel avaient baissé leurs garde, mais restaient figés, -observant l’homme. Elle se tourna vers lui, bien décidée à en apprendre +

Zach et Aldariel avaient baissé leur garde, mais restaient figés, observant +l’homme. Sélène se tourna vers lui, bien décidée à en apprendre plus.
— Que faisiez-vous chez mes parents ?
— J’ai été adoubé il y a quelques mois seulement, et je rentrais chez les + + miens, après de longues années d’absence. Mon retour devrait d’ailleurs coïncider avec l’ouverture d’un grand tournoi de tir à l’arc que mon père organise régulièrement. Comptiez-vous vous y rendre ?
— Mais... pourquoi n’ai-je jamais entendu parler de vous ?
— Dès l’âge de dix ans, j’ai été envoyé dans un temple de la capitale, pour - - y devenir un paladin. Je n’ai presque pas revu ma famille depuis, et ai conversé avec eux essentiellement par courrier.
Elle hocha la tête. Elle connaissait cette tradition d’envoyer les troisièmes @@ -4416,6 +5418,8 @@ elfes...
— ... elle se rend également au château du duc votre père, pour ce grand tournoi, accompagnée de son garde du corps, Silwë, que vous connaissez déjà visiblement. Nous les avons croisées sur notre chemin, et faisons route + + ensemble.
— Enchanté de faire votre connaissance, et je suis également soulagé de voir que dame Sélène est en sécurité avec vous. Je suis certain d’ailleurs que le @@ -4429,8 +5433,6 @@ class="ecti-1095">Irdann

La tension semblait s’être apaisée, même si le guide semblait encore très mal à l’aise.
— Je ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée... Les châteaux, les - - courbettes, ce n’est pas vraiment fait pour moi. Allez-y sans moi.
Sélène le regarda quelques instants. Puis elle reprit d’un ton ferme.
— Nous discuterons de cela plus tard. Allons d’abord nous restaurer et nous @@ -4452,6 +5454,8 @@ racontant bri guide, qui pourtant restait à l’écart et ne parlait que pour ajouter quelques précisions.

Ils finirent par convenir qu’elle partirait seule avec lui. Les elfes, qui + + seraient bien accueillis au château du duc, seraient probablement mal venus dans la seigneurie d’Assem, où ils risquaient d’être regardés de travers. Bien qu’ils y seraient fort bien traités, les deux jeunes femmes préféraient un @@ -4500,8 +5504,6 @@ pichenette sur le front.
— Et alors ? Ça change quoi ?
Elle bondit sur une branche un peu plus loin, un peu plus haut. Il soupira, et se hissa à son tour là où elle était assise quelques instants plus - - tôt.
— Et puis... Mais elle est mariée de toutes façons, la question ne se pose pas !
— H class="newline" />Elle le poussa brusquement du coude, il perdit l’équilibre et se rattrapa de justesse à une branche au dessus de sa tête.
— À ton avis, grand bêta, si elle ne te l’a pas dit, c’est qu’elle préférait que + + tu l’ignores... non ?
Il reposa ses pieds sur une branche près de celle de l’archère, et s’accouda sur une autre, face à elle. Il tenta de contenir la colère qui montait @@ -4558,6 +5562,8 @@ class="newline" />Il fit une moue.
— Je m’inquiète pour Sélène, c’est tout.
Elle eut un petit sourire et le rejoignit sur sa branche.
— Qu’est-ce qui t’inquiète ? Qu’il ne soit pas ce paladin loyal, courageux, + + fort aux airs de prince charmant qu’il semble être, et qu’elle soit en danger avec lui ? Ou... Est-ce que tu crains qu’il soit précisément un paladin loyal, courageux, fort, aux airs de prince charmant ?
— Euh...
Refusant sa main, elle bondit à nouveau sur sa branche, et profita de son élan pour le pousser à son tour. Déséquilibré, il se rattrapa des deux bras à la branche sur laquelle il se trouvait un peu plus tôt. Aldariel, - - toujours debout sur cette même branche, l’observait d’un air critique. Il effectua une traction rapide, et se rétablit rapidement. Elle hocha la tête.
Irdann

Il sentait que la jeune femme n’était pas très à l’aise avec lui. En même temps, il pouvait la comprendre... Sans Silwë pour parler en sa faveur, elle n’aurait probablement jamais accepté de venir avec lui, sans compter les - - difficultés à s’expliquer avec ses compagnons. La situation était étrange pour lui. Il avait tant entendu parler d’elle, mais sans jamais la voir. Il avait pensé à elle, senti son cœur battre dans sa main tant de @@ -4680,8 +5682,6 @@ class="newline" />— D’ailleurs... Est-ce que je peux vous demander q class="newline" />— Oui, bien sûr.
Elle soupira.
— Je ne sais pas monter à cheval, et je ne suis pas très à l’aise en selle. Et - - en plus, je crois qu’on fatigue inutilement votre monture, qui a déjà bien du mal à avancer dans cette végétation dense. Vous ne croyez pas qu’on serait tout aussi bien à pied ?
Il l’attrapa délicatement par la taille et la déposa au sol. Ils se remirent en route, marchant à côté de la jument, visiblement soulagée de n’avoir plus tout ce poids à porter.
— Qu’est-ce qui vous a fait préférer la traversée à pieds ?
— Qu’est-ce qui vous a fait préférer la traversée à pied ?
— Je devais prendre une diligence publique... mais je l’ai ratée. Je n’avais pas assez d’argent sur moi pour engager une escorte complète et des chevaux. Mais finalement, ce n’est pas désagréable, en fait.
Il désigna du doigt l’ouverture dans les arbres.
— Voilà la route, nous pourrons avancer plus rapidement. Ça tombe bien, le -soir tombe.
+soir tombe.

Sélène

La diversion de la route tombait à pic. Elle hésitait à aborder le sujet - - des araknes avec lui. Pourtant, ils devaient en parler à quelqu’un, prévenir... Mais qui, et comment ? Qui la croirait ? Il faudrait qu’elle explique aussi comment elle savait tout cela sur ces créatures, et ce qui s’était passé... @@ -4752,12 +5749,10 @@ armes. Cela fait aussi partie du jeu.
Il lui sourit, puis son sourire se figea soudain.

— Qu’est-ce que c’est que ça ?
Il lâcha la bride de la jument, qui sursauta. Un groupe d’hommes armés -arrivait en courant dans leur direction, armés. Elle se retourna vivement, -deux autres arrivaient dans leur dos. Elle retint un cri.
— Place-toi derrière moi.
En un clin d’œil, il avait dégainé ses armes, et s’était placé en garde, - - surveillant les deux groupes s’approchant. Elle recula entre lui et la jument, rageant de ne pouvoir l’aider. Elle n’avait même pas son bâton de marche pour se défendre... @@ -4780,6 +5775,8 @@ Silw essayer quelque chose. Elle posa son autre main contre sa poitrine, et poussant un léger gémissement, s’effondra. Elle n’avait pas besoin de jouer beaucoup, ses jambes tenaient à peine son poids de toutes + + façons...

Elle entendit Irdann crier son nom. Y avait-il un écho dans sa voix, ou avait-elle rêvé ? Les yeux fermés, elle sentit son bras s’approcher du sol, @@ -4791,10 +5788,8 @@ et d’ planta l’arme droit dans la poitrine de l’homme. Il eut un sursaut et tomba au sol, le visage marqué d’un mélange de surprise et de douleur. -

Elle n’eut pas le temps de de réfléchir plus à son geste. Irdann était - - -toujours en difficulté, et deux autres brigands s’approchait d’elle, l’arme +

Elle n’eut pas le temps de réfléchir plus à son geste. Irdann était +toujours en difficulté, et deux autres brigands s’approchaient d’elle, l’arme en avant. Cette fois, elle ne pourrait plus jouer le jeu de la jeune fille effarouchée... Elle tremblait, mais serra malgré tout le coutelas –couvert de sang– dans ses mains. Elle ne se laisserait pas tuer ou @@ -4816,6 +5811,8 @@ class="newline" />— S class="newline" />Il avait l’impression qu’il n’arriverait jamais jusqu’à elle. Dans le soir qui tombait, un dernier rayon de soleil se refléta sur une lame abandonnée au sol. La main de la jeune femme apparemment évanouie venait de se refermer + + sur la poignée... Il la vit soudainement se redresser, et poignarder de toutes ses forces son agresseur.

Il fut si surpris qu’il trébucha, et manqua de s’étaler par terre. Mais @@ -4827,8 +5824,6 @@ instant, il fut pr qui lui avait permis de se défendre. Ils échangèrent un regard, le temps d’une fraction de seconde, et il se plaça entre elle et l’autre brigand. - -

Irdann

— Sélène !

Soudain, une silhouette bondit depuis l’arbre au dessus de lui, en poussant un cri de rage, et atterrit à ses côtés. Une silhouette féminine qu’il @@ -4864,8 +5861,6 @@ class="newline" />— Besoin d’un coup de main— D’épée, plutôt.
Leurs adversaires semblèrent surpris une seconde de ce retournement de situation. Il reprit courage. Il n’était plus seul... Ils se placèrent dos à dos, - - et firent face aux brigands.
— Comme au bon vieux temps, Irdann ?
— Comme au bon vieux temps ! @@ -4888,6 +5883,8 @@ en travers de la selle, la poitrine transperc cherché à s’enfuir ? Il aperçut alors d’autres hommes au sol, le corps transpercé d’une ou plusieurs flèches. Combien d’adversaires avaient-ils dû affronter ? + +

— Vous venez ?
C’était la voix de l’archère. Il fit quelques pas dans sa direction, avec quelques difficultés. La lame d’un des brigands lui avait fait une belle @@ -4900,8 +5897,6 @@ manqu lorsqu’il s’agit d’une princesse à l’air innocent, délicat et fragile.
— Je vous en ai gardé un. - -

Aldariel

Elle était essoufflée, par la course comme par la bataille. Alors que Zach, @@ -4914,8 +5909,8 @@ cherch Zach ou de Silwë, la surprise et un arc aux flèches pointues avaient très bien fait l’affaire.

Ses compagnons s’approchèrent, méfiants. Le jeune paladin la regardait -avec une expression mêmant suprise, crainte et admiration. L’aurait-il prise -pour une idiote sans défenses ?
 ?
— Qu’est-ce que vous voulez de moi ?
C’était la voix de son prisonnier.
— Je connais bien les habitudes des gens comme toi. Normalement, vous @@ -4925,6 +5920,8 @@ class="newline" />L’homme tourna p question. Il avait pointé son épée sur lui, et lui fit signe de le lâcher. Elle hésita, puis obéit, sans détourner son arc de sa cible. Le prisonnier se redressa, et considéra ses adversaires, estimant ses chances. Apercevant + + enfin le visage de celle qui l’avait mis hors combat, il marqua la suprise, puis la peur.
— Je ne sais pas. Le chef a dit qu’il y aurait un paladin allant chercher une @@ -4935,10 +5932,1938 @@ retour sur le sentier.
— Qui vous a dit ça ? interrogea Irdann.
— Je ne sais pas. Il fallait demander au chef. On lui a donné l’info. Moi je ne sais rien ! Laissez-moi partir !
Tout en surveillant l’homme du coin de l’œil, les compagnons se -regardèrent. +class="newline" />Tout en surveillant l’homme du coin de l’œil, les compagnons se regardèrent. +Aldariel se pencha vers Irdann.
— Tu as parlé de ton expédition à beaucoup de monde autour de +toi ?
Il haussa les épaules.
— Non. Mais j’imagine que les rumeurs vont vite...
— C’est surtout étrange une telle expédition pour deux malheureux jeunes +gens, interrompit Zach, les sourcils froncés. Même riches.
— Laissons tomber, je crois que ce type ne sait rien de toutes façons, ajouta +Silwë. +

Après avoir vérifié que l’homme ne portait plus aucune arme, ils le +laissèrent partir, préférant ne pas s’encombrer d’un prisonnier. Il s’enfuit +sans demander son reste. +

Aldariel remarqua alors le genou ensanglanté du paladin. +

Irdann +

— Oh, tu es blessé ?
Il faillit répondre que ce n’était rien, mais la douleur manqua de le faire +trébucher. Il retint une grimace.
— On dirait.
— Assieds-toi, je vais regarder ça.
Il hésita quelques instants. La jeune princesse avait rangé ses armes, +s’était approchée, et le regardait avec douceur. Il jeta un œil à Silwë, +qui lui sourit. Un peu soulagé –si elle lui faisait confiance, il n’avait +rien à craindre–, il s’assit dos à un large tronc. Elle s’assit face à +lui.
— Silwë, tu peux aller chercher de quoi soigner dans mon sac ? Je l’ai +laissé, ainsi que les vôtres, dans cet arbre.
Alors que sa compagne s’éloignait, elle lui fit remonter son pantalon pour +mieux examiner sa blessure.
— Ils ne t’ont pas raté. Tu as pu continuer à combattre avec ça ?
Il haussa les épaules.
— Dans le feu de l’action, et quand on a sa vie en danger... Et puis je +n’avais pas tellement besoin de me déplacer.
— Je t’ai vu dans la bataille, de loin. Tu es impressionnant avec tes +épées !
— Merci. Mais je ne sais pas ce que je serais devenu si vous n’étiez pas +venus tous les trois à notre secours... Nous vous devons la vie. +

À cet instant, Silwë réapparut, tendant un sac de cuir fin à sa +compagne.
— Je vais récupérer tes flèches pendant que tu t’occupes de lui. Et après on +file au plus vite.
Elle s’éloigna de nouveau. Alors qu’Aldariel fouillait dans ses affaires à la +recherche d’il-ne-savait-quoi, il réalisa qu’avec toutes ces émotions il n’avait +pas pensé à Sélène. Alors qu’il était censé la protéger ! Comment avait-il +pu oublier ? Allait-elle bien ? La bataille avait dû être un choc pour elle... +Il tourna la tête, mais il faisait sombre, et il ne la voyait pas. La jeune elfe +lui sourit.
— Si c’est pour Sélène et Zach que tu t’inquiètes, rassure-toi, ils sont +quelques pas derrière toi, et ils vont très bien.
Soulagé, il laissa la jeune elfe s’occuper de son genou. +

Sélène +

Était-ce la peur qu’elle avait ressentie, le soulagement lié à la fin du +combat, ou une combinaison des deux ? Ils avaient regardé l’homme partir +avec méfiance, et l’instant d’après –ou longtemps après ?–, elle s’était +retrouvée dans les bras de Zach. Elle entendait les voix de leurs +compagnons, autour d’eux, ils n’étaient pas loin, mais elle n’y prêtait pas +attention.
— Tu vas bien ? Tu as été blessé ?
— Je n’ai rien, ça va.
Ils restèrent quelques instants silencieux, sans bouger.
— Merci d’être venu à mon secours. À notre secours.
— ... J’ai eu si peur quand je t’ai vue aux prises avec ce bandit.
— Moi aussi. Je ne pensais pas que j’y arriverais...
Il ne répondit pas, et ne bougea pas, la gardant contre lui. Il sentait la +sueur, le cuir de son armure, et le sang. Mais elle n’avait pas la moindre +envie d’en bouger. +

— Hm... désolée de vous interrompre, mais il faudrait qu’on bouge.
C’était la voix de Silwë. Ils se lâchèrent instantanément. Elle avait remis +son sac en bandoulière, et tenait la jument d’Irdann par la bride. Quelques +mètres plus loin, celui-ci s’approchait en boitant, tout en s’appuyant sur +Aldariel. Un bandage entourait son genou, et son pantalon montrait des +traces de sang. Elle eut honte de ne pas être allée l’aider, alors qu’il était +blessé. Mais à bien y réfléchir, la jeune elfe s’était occupée de sa plaie aussi +bien, voire mieux qu’elle. Il était évidemment hors de question qu’elle lui +montre ses pouvoirs... Au moins il allait bien, il souriait même, malgré sa +blessure. +

— En route. Il nous reste une heure de marche à peu près, et il fait déjà +nuit.
Ils rejoignirent rapidement le sentier. Irdann avait toujours des difficultés à +marcher, et ils durent insister pour qu’il monte sur le cheval.
— Je me sens mal à l’aise d’être à cheval si tu vas à pied...
Elle haussa les épaules en souriant.
— Ne sois pas bête. Tu es blessé, moi pas, et on ne doit pas traîner. Tant +pis pour le code d’honneur.
Il soupira, et finit par accepter l’aide de Zach pour monter sur le dos de sa +jument. +

— Où va-t-on, une fois sortis ?
— Il y a une auberge dans le village où on arrive. Vous pourrez y louer une +chambre sans problème, si on ne vous l’offre pas directement, vu votre rang +et votre nom.
Y avait-il une sorte de gêne lorsqu’il parlait de « leur nom » ? Ce n’était + + +peut-être pas le moment de le relever.
— Et vous trois, que ferez-vous ?
Zach haussa les épaules.
— Je connais ce village, c’est celui de mon enfance. S’il n’y a plus de +place à l’auberge, j’irai dormir chez mes parents, qui habitent une +petite maison en bordure de la forêt. Ça me changera de la terre +battue...
— Et nous, ajouta Silwë, nous nous contenterons sûrement d’un arbre ou de +cette terre battue. Nous ne sommes pas les bienvenues dans cette région, +n’est-ce pas ?
— Je préfère dormir par terre que d’avoir à craindre pour ma sécurité, +confirma Aldariel. +

Ils avancèrent encore un peu en silence, puis Zach se tourna vers le +groupe.
— Je peux toujours proposer à ma famille de nous héberger. Je ne pense +pas qu’ils hurleraient à la vue de deux elfes, et je suis sûr qu’on est en +sécurité chez eux.
Il marqua une pause, hésitant, puis se tourna vers elle et Irdann.
— Vous êtes également les bienvenus. Même si je comprendrais que vous +préfériez une taverne à une petite chaumière.
— Cela ne me dérange pas du tout, si cela va à Sélène, j’accepte volontiers. +Pour tout dire, je préfère aussi un lieu simple et sûr.
Cela voulait dire voir Zach un tout petit peu plus longtemps. Elle hocha la +tête en souriant.
— Tes parents sont ouverts sur la question des autres races humaines ?
Il lui sourit. Est-ce qu’il était content, lui aussi, de l’accompagner encore un +peu ?
— Bah, si ce n’était pas le cas, ils n’auraient pas décidé de m’adopter, avec +ma tête d’elfe.
Devant la tête suprise du paladin, il s’expliqua.
— Il semble que j’aie du sang d’elfe. Je n’en ai pas la certitude, puisqu’on +m’a trouvé sur le pas d’une porte, tout bébé. Les gens qui vivaient +là m’ont confié à celle qui allait être ma mère, qui venait d’avoir +son quatrième enfant, et qui avait assez de lait pour deux... Je ne +sais toujours pas si elle n’avait rien contre les elfes à l’époque, ou si + + +elle m’a d’abord adopté et a ensuite changé son point de vue sur la +question.
Zach semblait un peu plus à l’aise vis-à-vis du paladin. Ou était-ce une +impression ? Il n’aurait pas raconté cette histoire sinon, ou du moins plus +succintement. +

Silwë +

Ils étaient vivants, tous les cinq, et quasiment sans blessure. C’était déjà +beaucoup... Et ils allaient peut-être pouvoir passer la nuit au chaud. Tout +n’allait pas si mal... Elle tourna la tête vers ses compagnons. Irdann +discutait avec Sélène et Aldariel, qui marchaient à côté de la jument. Ils +avaient l’air de s’entendre plutôt bien, finalement. Zach marchait devant, +d’un pas décidé, en surveillant les alentours. Pourquoi avait-elle un mauvais +pressentiment ? Était-ce la nuit, la fatigue, les émotions ? Elle s’approcha +du guide, en frissonnant.
— Zach ?
Il tourna la tête vers elle. Il semblait d’assez bonne humeur.
— Tu en penses quoi, de ces brigands ? Tu disais que ce n’était pas normal +d’en voir autant et si près...
Son visage se ferma. Il se rapprocha d’elle, et lui parla à voix basse.
— Il n’est pas très surprenant de croiser des brigands dans cette forêt. +Surtout en ces temps difficiles, et lorsqu’un grand évènement est organisé, +faisant venir beaucoup de monde de loin, notamment des personnalités +riches et importantes. Mais si près des habitations, des brigands qui +attendaient précisément Sélène et Irdann...
— Ils sont, au moins de naissance, des nobles donc potentiellement des +personnalités importantes. Et si je comprends bien, un minimum connues de +nom.
— Oui...
Ah. Ce n’était peut-être pas le genre de phrase qui allait le mettre de bonne +humeur. Elle soupira.
— Je délire peut-être, je suis épuisée. J’étais juste inquiète. J’ai une +princesse à protéger, je te rappelle.
Elle lui adressa un clin d’œil. Il répondit par un coup de coude.
— Moi aussi j’ai pour mission d’escorter et de protéger une noble dame + + +jusqu’à la sortie de la forêt.
À son tour, elle lui lança un coup de coude.
— J’ai bien vu ta façon de la protéger.
— Je ne vois pas du tout de quoi tu veux parler.
Il semblait fixer attentivement l’horizon, mais il souriait. Puis soudainement, +il désigna du doigt une lueur au loin.
— Là-bas ! Tu vois cette chaumière, avec la lumière à la fenêtre ? Nous +arrivons !
La petite équipe poussa un soupir de soulagement. +

La maison, de taille moyenne, était la première en arrivant du sentier. +Elle était faite de pierre, recouverte en partie de lierre et visiblement vieille. +Une extension, partiellement en bois, semblait faire office de grange et +d’écurie. Plus loin, on voyait apparaître quelques autres habitations, et +encore derrière, la silhouette d’un village se découpait dans l’ombre. Zach +leur fit signe d’attendre.
— Je vais aller les prévenir, restez là quelques instants.
Il s’élança vers la porte. +

Sélène +

La porte s’ouvrit une nouvelle fois. La silhouette familière de Zach se +découpa dans la lumière, ainsi qu’une autre, plus massive.
— Entrez, messires. Soyez les bienvenus dans notre humble demeure. Mon +nom est Yzar, je suis le père de Zach.
L’homme s’avança vers eux, et s’inclina.
— Si vous me le permettez, seigneur, je vais m’occuper de votre cheval. +
Irdann lui tendit la bride de la jument, et s’appuya sur Zach venu l’aider. +Celui-ci lui fit un signe de tête. Hésitante, Sélène regarda ses compagnons, +puis se décida à entrer la première. +

Une petite femme ronde, au visage jovial et aux cheveux roux et gris +mélangés, l’accueillit d’une révérence un peu maladroite.
— Noble dame ! C’est un tel honneur de vous accueillir ici... J’espère que +notre pauvre logis vous conviendra.
La pièce comportait essentiellement une grande table en bois massif + + +entournée de deux chaises et deux bancs. Contre les murs, un grand coffre et +un buffet, tous deux anciens, donnaient à la pièce un aspect un peu austère +et rassurant à la fois. Un grand feu brûlait dans la cheminée, et une douce +odeur de légumes et de viande émanait de la pièce voisine. La pièce +était éclairée par plusieurs lampes à huile et chandelles, et semblait +assez accueillante malgré sa simplicité. Elle inclina la tête et lui +sourit.
— Merci, je pense que ce sera parfait.
Derrière, Zach et Irdann, l’un aidant toujours l’autre à marcher, passèrent +la porte à leur tour.
— J’espère que vous avez fait un bon voyage...
La femme se tourna vers Zach, et lui lança un regard qui aurait foudroyé +une armée.
— ... Et qu’il vous a traitée avec tous les honneurs dus à votre rang. +N’est-ce pas Zach ?
Il se figea. Sélène retint un sourire amusé, commençant une liste mentale +de tout ce qu’elle pourrait lui reprocher sur ce point. Il semblait +d’ailleurs éviter son regard. Elle se tourna à nouveau vers sa mère et +sourit.
— Il a été très correct, rassurez-vous.
Elle jeta un dernier coup d’œil suspicieux à son fils, puis se tourna vers le +paladin, qui avait toujours des difficultés à marcher.
— Bienvenue à vous, noble seigneur. Zach m’a dit que vous aviez été blessé +face des bandits. Votre blessure est-elle grave ?
— Vous êtes bien aimable, je vais bien, merci. +

Sélène se trouva une place sur un des bancs. Elle avait presque oublié ce +que c’était d’être traitée comme une princesse, et ce n’était pas +une perte à son sens. Mais elle ne souhaitait pas vexer cette femme +qui avait l’air de faire tous ces efforts de façon plutôt sincère –ça, +par contre, ça lui changeait des cours des châteaux. À l’instant où +Irdann fit de même à côté d’elle, Aldariel et Silwë entrèrent à leur +tour. +

La femme du bûcheron n’avait probablement jamais vu un elfe de sa vie, +alors deux en une fois, ça faisait beaucoup. Elle resta clouée quelques +instants, dévisageant les deux jeunes femmes d’un air incrédule. + + +Pourtant, Sélène trouvait qu’elles n’étaient pas si différentes que ça des +humaines. Le teint pâle, par exemple, était peut-être naturel chez les elfes +sylvains, mais de nombreuses jeunes femmes nobles cherchaient à +l’obtenir, avec plus ou moins de succès. Tout comme la silhouette +fine. Tout cela, et on pouvait y ajouter d’autres critères, comme la +tradition des cheveux longs, devait vraisemblablement entretenir, bien +malgré eux, l’image des elfes comme idéal de beauté. À moins que +ce canon de beauté n’ait été influencé, il y a bien longtemps, par +eux ? +

Alors qu’elle laissait ses pensées divaguer, les deux jeunes femmes +s’étaient assises, et le père de Zach venait d’entrer à son tour. Il jeta un œil +inquiet à la pile d’armes posées dans un coin de la pièce, les compta, tenta +d’attribuer mentalement une à chacun et fronça les sourcils en dévisageant +Silwë et Aldariel. Zach présenta rapidement les différents membres du +groupe, et ils commencèrent à manger. +

Après tout ce temps dans la forêt à manger du pain dur, de la viande et +du fromage séchés, parfois améliorés de quelques trouvailles, cette simple +soupe chaude de légumes dans laquelle flottaient quelques morceaux de +viande était un régal. La mère de Zach, du nom de Beolie, sembla ravie de +constater qu’ils mangeaient avec appétit tout ce qu’elle leur servait. Zach fit +un bref résumé de leur traversée, expliquant leur rencontre avec les deux +elfes, puis celle du paladin, et enfin l’attaque des brigands près du village. +Petit à petit, le bûcheron et son épouse se détendirent et osèrent poser +quelques questions.
— Excusez notre curiosité, mais c’est la première fois que nous voyons des +elfes. Que faites-vous dans la région ?
— Nous nous rendons au château du duc De Vane. Il organise un grand +tournoi de tir à l’arc, et j’ai été conviée à y participer. Silwë est mon garde +du corps.
Yzar se pencha pour observer Silwë, assise à côté de Zach, de l’autre côté. Il +considéra un instant son air frêle, puis son regard se porta sur Aldariel, en +face d’elle. Il ouvrit la bouche pour faire une remarque, mais son fils lui +envoya un coup de coude pour le faire taire.
— Crois-moi, tu n’as pas envie d’être du mauvais côté de son épée.
Leurs deux hôtes regardèrent un instant la jeune elfe se resservir, avec un + + +respect mêlé de crainte dans les yeux. Ah, ce qu’elle aimerait inspirer un tel +respect, non pas pour son rang, mais pour ses actes ! Ici, elle était coincée +avec le protocole, et ce titre de « dame ». N’importe quoi. Vivement qu’elle +rentre à la capitale, les rues sentaient peut-être mauvais parfois, mais au +moins on y respirait la liberté. +

Zach +

Le repas avançant, Zach fut soulagé de constater que l’ambiance +s’était petit à petit détendue. Si ses parents étaient toujours très +respectueux envers Sélène et Irdann, ils semblaient avoir compris que ces +nobles gens appréciaient la simplicité de leur accueil. Quand aux deux +elfes, une fois passé l’effet de curiosité mêlée de crainte, elles furent +traitées chaleureusement, presque comme si elles faisaient partie +de la famille. Sa mère insista même pour qu’Aldariel se resserve +plusieurs fois de la soupe, remarquant gentiment qu’elle était un peu +frêle. +

Il y eut tout de même un moment un peu gênant, lorsqu’ils se levèrent +de table. Son père, vraisemblablement enhardi par le vin et la bonne +ambiance, lui donna un coup de coude en lui demandant comment « il s’en +sortait » avec les deux elfes, tout en lui adressant un clin d’œil peu discret. +Pris de court, il avait répondu qu’il ne se passait rien, mais il n’était pas sûr +de l’avoir convaincu. Aldariel et Silwë, qui avaient entendu, avaient échangé +un regard gêné, tandis qu’Irdann et Sélène avaient difficilement contenu un +fou rire. +

Mais c’était probablement le seul « incident » qu’il pourrait déplorer. Il +y avait pire. Par contre, au moment d’aller se coucher, ses parents avaient +rappelé que la petite chaumière ne comportait que deux chambres. Ils +avaient insisté pour que les deux « nobles » prennent la meilleure des deux, +la leur, proposant aux trois autres la chambre qui hébergeait autrefois leurs +enfants. Eux-mêmes dormiraient dans une paillasse au grenier. Il aurait bien +suggéré un autre arrangement, mais il doutait fort que ses parents le +laissent faire. +

Il fit quelques pas dans la pièce, qui l’avait abrité pendant toute +son enfance. Elle n’avait pas tellement changé depuis, si ce n’est + + +qu’elle paraissait vide sans ses trois frères et sa sœur. Trois lits sur les +cinq avaient été faits. Il s’assit et posa son sac sur celui qui avait +été le sien pendant toutes ces années. Il commençait à retirer ses +bottes et son armure lorsque Silwë entra, une bougie à la main. +Constatant qu’il n’y avait que lui, elle l’éteignit et la posa sur une table à +côté.
— Ce n’est pas comme si nous en avions besoin... Mais je n’ai pas osé +refuser.
Elle déposa son sac et celui d’Aldariel, puis vint s’asseoir à son tour sur un +lit avec un sourire de satisfaction.
— On a beau dire, les matelas humains sont quand même confortables.
— Et c’est une elfe qui dit ça ?
Elle marqua une pause dans le démêlage de ses longs cheveux pour lui +lancer un regard qu’elle aurait probablement voulu meurtrier. Constatant +son échec, elle esquissa un sourire.
— Tiens, j’y pense, d’où te vient une telle réputation ?
— Euh, de quoi tu parles ?
C’est le moment que choisit Aldariel pour entrer à son tour dans la chambre +–ou peut-être avait-elle attendu ce moment pour se manifester ? Elle +s’installa à son tour et sourit.
— À propos de la remarque de ton père, tout à l’heure, tu sais bien. +

Il faillit répondre que son père avait juste un peu bu, puis il hésita à +répliquer que tout cela venait de toutes façons des rumeurs qui couraient +sur les elfes. Mais il savait bien qu’elles ne se contenteraient pas de +ces esquives maladroites. Les quatre yeux bleus qui le fixaient dans +l’obscurité lui donnaient l’impression de le clouer au mur derrière lui. Il +abdiqua. +

Il finit d’ôter sa tunique et s’allongea, préférant regarder le plafond.
— Quand j’étais adolescent, j’avais pas mal de succès auprès des filles, c’est +vrai. Le petit air d’elfe marchait plutôt bien auprès de certaines... Donc, +j’avoue, je n’ai pas volé ma réputation. Après...
Il marqua une pause. Elle écoutaient toujours.
— Après j’ai commencé à être un guide et à passer mon temps à +traverser la forêt. Ce n’est pas tout à fait le genre de boulot qui accorde +du temps pour « ce » genre de choses... Et puis qui voudrait d’un + + +mari à moitié sauvage, qui dort plus souvent sur le sol que dans +un lit, et qu’on ne voit jamais ? Certes, je rencontre beaucoup de +gens très différents, et j’ai bien eu des... occasions. Mais au final... +
Il soupira.
— ... Au final, je vis seul. Ma fiancée, c’est la forêt. Ma seule vraie +compagne, fidèle et sincère, c’est mon épée. +

Il se tut. Pourquoi n’avait-il pas tout à fait l’impression de dire la +vérité ? Le visage de Sélène était encore présent dans son esprit. Mais +n’était-elle pas, finalement, qu’une de ces « occasions » comme les autres ? +Qu’il avait plus ou moins –à tort ou à raison– laissée passer. L’oublierait-il +aussi facilement que les autres ? Comme si elle semblait saisir le fil de ses +pensées, Aldariel s’approcha et posa doucement une main sur son +épaule.
— Je me suis moquée de toi, cet après-midi. Mais je n’imaginais pas à quel +point les différences de classe sociale pouvaient être un tel obstacle dans des +relations entre humains. Toutes ces choses sont tellement plus simples chez +nous...
Il ne répondit pas. Peut-être qu’elle avait raison, mais peut-être aussi que la +situation était nettement plus simple quand on était une princesse. Et +surtout une princesse comme Aldariel... Tout devait lui tomber au creux de +la main, les hommes comme le reste. +

— À ce propos, Alda, comment va la blessure d’Irdann ?
Et il fallait qu’elle parle du paladin, là, maintenant... Il faillit lui +rétorquer que ce n’était pas la peine de retourner le couteau dans la +plaie, quand il sentit, à la façon dont Aldariel lâcha son épaule, +que la remarque ne lui était pas destinée. Mais alors pas du tout. +
— Oh, plutôt bien. Rien de crucial n’a été touché, je suis sûre qu’il se +remettra très vite.
— C’est plutôt une bonne nouvelle.
Il aurait bien aimé voir ce qu’il y avait sur le visage de la jeune princesse, +mais elle s’était tournée vers son amie. Il repassa dans sa tête la scène de +bataille et la suite, remarquant alors ce que ses yeux avaient enregistré +sans le voir. Le sourire amusé de Silwë sembla confirmer ce qu’il + + +pensait.
— D’ailleurs, qu’est-ce que tu m’as dit, un peu plus tôt aujourd’hui ? Qu’à +ma place, tu n’aurais pas hésité ?
Elle se retourna brusquement vers lui, les sourcils froncés.
— Qu’est-ce que tu veux dire ?
Il regarda le plafond, sans pouvoir retenir un sourire.
— À ton avis ? +

Aldariel semblait à la fois choquée et en colère. Silwë s’était glissée sous +les draps et s’était tue. Soit elle était épuisée et voulait dormir, soit elle lui +laissait volontairement le champ libre. Après tout, c’était bien son tour de +se venger...
— Non, je n’aurais pas hésité à ta place. Et ?
Il avait connu des attaques verbales plus difficiles à contrer. Son sourire +s’élargit.
— Et le « noble paladin aux airs de prince charmant », ça compte comme +une hésitation ?
Elle marqua une pause, surprise.
— Mais... qu’est-ce que tu imagines ? C’est un humain. Un elfe, je ne dirais +pas, mais c’est un humain !
Belle tentative d’esquive, mais ratée. À moins que... sa surprise semblait +sincère. C’était encore plus drôle en fait.
— C’est ça. Et moi, je sors d’où, alors, si elfes et humains ne sont pas +compatibles ?
Elle répliqua aussitôt, pointant son doigt dans sa direction.
— Biologiquement compatibles, oui. Ça ne prouve pas grand chose pour le +reste. Tu as dit toi même que tu ne savais rien d’eux, non ?
Il devait admettre que la contre-attaque tenait plutôt bien la route. De plus, +il risquait de se laisser entraîner sur un terrain plutôt glissant. Il lui restait +une botte secrète. À son tour, il pointa son doigt dans sa direction, venant +effleurer le sien en souriant. Il lui chuchota.
— Pourtant, j’ai bien l’impression que Silwë, elle, ne s’arrête pas à ce genre +de détail.
— Quoi ? Qu’est-ce que tu en sais ?
Son attaque avait donc touché. Il ne fallait pas baisser sa garde maintenant. +
— Elle a passé cinq ans chez les humains. Je pense qu’elle a dû avoir un +certain succès auprès d’eux. Tu lui poseras la question...
Cherchant désespérément un peu de soutien, Aldariel se tourna vers son +amie, qui s’était visiblement endormie. Tout du moins, elle faisait +suffisamment bien semblant. Il l’en remercia intérieurement.
— ...sinon tu te rappelleras sa réaction quand, un soir, tu avais évoqué la +question.
Quelle chance il avait eu de retenir ce détail pourtant insignifiant, malgré la +situation qui ne s’y prêtait guère... Ils étaient plus à un cheveu de +s’entretuer que de jouer à ce jeu-là. +

Elle lui lança un dernier regard assassin, qu’il fit mine de ne pas +remarquer. Mais il avait du mal à se retenir de sourire. Elle soupira, +remonta ses draps sur ses épaules et ferma les yeux. +

Irdann +

Il referma la porte de la petite chambre et posa le bougeoir sur la table +de chevet.
— Hé bien ! Je m’attendais à ce que nos noms soient respectés, mais à ce +point...
Sélène sourit.
— C’est vrai que c’était presque un peu trop... Et encore, personne ne leur +a dit qu’Aldariel était la fille du roi des elfes.
— Les pauvres. Déjà que voir des elfes pour la première fois de leur vie +était un choc...
Elle fit quelques pas dans la pièce, puis son sourire se figea.
— Ah. Il y a un petit problème technique. Il n’y a qu’un lit.
— Effectivement. En même temps, c’est assez logique, c’est leur +chambre...
— Tu crois qu’ils pensent qu’on...
Il haussa les épaules. Il n’avait pas tellement envie de décevoir leurs hôtes et +surtout, de leur demander du travail en plus alors qu’ils se donnaient déjà +tellement de mal pour eux.
— Bah, ne t’inquiète pas, je dormirai par terre. J’ai connu pire, tu +sais !
— Moi non plus ça ne me dérangerait pas de dormir par terre. Ça fait + + +presque une semaine que je fais ça ! Et en plus, toi, tu es blessé.
— Ah mais ça n’a rien à voir ! +

Ils se regardèrent en silence pendant quelques instants. Il lui aurait bien +répondu qu’elle était une dame et c’était une histoire de code d’honneur, +mais il doutait de l’efficacité de cet argument. Il n’avait pas affaire à une +noble dame comme les autres, ça, il avait bien saisi. Ce fut finalement elle +qui prit une décision.
— Bon écoute, on ne va quand même pas dormir tous les deux par +terre, ce serait vraiment stupide. Il y a de la place pour deux sur ce +matelas. Chacun son côté, chacun sa couverture, ça te va comme +compromis ?
— À condition que tu prennes quand même les draps prévus pour ça. Et +moi je prends une couverture de voyage.
Elle sourit en lui donnant un petit coup de coude.
— Vendu ! +

Ils s’installèrent rapidement, puis éteignirent la bougie, ce qui plongea la +pièce dans l’obscurité. Il était épuisé, et il devait reconnaître que ce +compromis avait du bon. Le matelas était vraiment confortable. Pourtant, le +sommeil ne venait pas. Trop de choses s’étaient passées dans cette journée... +À commencer par Sélène. La jeune femme qu’il devait chercher était +saine et sauve, et plutôt bien entourée... Elle n’avait pas eu l’air si +heureuse que cela de le voir arriver. Quelle relation l’unissait à son +« guide », d’ailleurs ? Leurs regards étaient tout de même assez +éloquents... +

Il avait beau avoir quitté assez tôt le palais de son père et l’ambiance +des cours, il connaissait assez bien la façon les mariages étaient conclus. Il +s’agissait bien souvent d’un enjeu complexe d’alliances entre seigneurs et de +cessions de terres, quand il ne s’agissait pas de guerres, toujours est-il qu’on +ne laissait pas beaucoup de choix aux jeunes nobles. Bien sûr, on +essayait généralement de faire en sorte qu’ils s’apprécient au moins un +peu, et puis ils étaient bien souvent éduqués et conditionnés pour +aimer les gens de leur rang... mais au final, ce n’était pas eux qui +décidaient sur ce plan-là. Certains s’en accomodaient plutôt bien, d’autres +trouvaient leur bonheur ailleurs que dans les bras de celui ou de celle + + +qui leur était désigné. Bien sûr, rien de tout cela n’était officiel, +mais une oreille attentive et innocente pouvait entendre bien des +choses... +

Il avait tendance à considérer que ce genre d’histoire ne le regardait pas. +Après tout, entre un mari à la capitale, et ses parents ici, elle avait bien +droit à un peu de liberté entre deux... Il se mit à penser qu’il avait de la +chance d’être un paladin. Personne n’allait le forcer à se marier contre son +gré, et il était vraiment libre... Certes, il devait rendre des services au nom +de la déesse, mais à côté d’avoir toujours quelqu’un sur le dos, ce n’était +pas grand chose. +

— Irdann ?
Elle ne dormait donc pas non plus ?
— Oui ?
— Je suppose qu’on repart demain... ça va aller ta blessure ?
— Je pense, oui. Aldariel s’en est très bien occupé. Mais c’est surtout une +chance que personne d’autre n’ait été blessé.
Il eu l’impression qu’elle frissonnait.
— Je n’ose pas imaginer ce qui se serait passé si les autres n’étaient pas +venus à notre secours...
C’était malheureusement facile à deviner. Il aurait été tué, et elle +faite prisonnière. Et encore, prisonnière, c’était dans le meilleur des +cas...
— Tu veux vraiment savoir ?
— Ça va, je me passerai des détails, merci.
— Je me moque, mais sérieusement, nous aurions dû insister pour qu’ils +restent avec nous au moins jusqu’à la sortie de la forêt.
— Peut-être... et peut-être pas en fait. En arrivant un peu après, ils ont pu +bénéficier d’un effet de surprise...
Pour quelqu’un qui n’avait connu que le confort des châteaux, elle avait une +sacré tête froide. Elle n’avait pas l’air trop choquée par tout ce qui s’était +passé, ce qui était plutôt impressionnant. Et puisqu’elle semblait plutôt +encline à lui en parler, il allait pouvoir lui demander...
— C’est possible. J’y pense, il y a quelque chose que je n’ai pas tout à fait +compris dans ce combat.
— Ah ?
— les brigands étaient occupés avec moi, et tu étais relativement +tranquille... Puis il y en a un qui s’est approché de toi, je t’ai vue +t’effondrer... enfin je crois. Et puis l’instant d’après, c’est lui qui était +effondré à tes pieds. Je n’ai pas l’impression que Zach soit arrivé si +tôt...
Elle marqua une seconde de silence, mais lorsqu’elle répondit, il aurait juré +qu’elle souriait. +

Sélène +

Lorsqu’elle termina son récit, il laissa passer un moment de silence. Que +pouvait-il bien en penser ?
— Je ne m’attendais pas à ça, effectivement.
Il semblait simplement surpris. Mais était-ce en bien ou en mal ? +
— Je n’avais simplement pas le choix, tu sais bien... Je pouvais bien +attendre que tu viennes à mon secours, mais tu tenais déjà tête à trois +hommes !
— Mais tu as bien fait de te défendre !
Soulagée, elle sourit –elle était soulagée également de noter qu’il ne voyait +pas ses expressions dans le noir, lui– et répondit nettement plus +spontanément.
— Ça n’a pas l’air de te choquer, alors, de voir une femme prendre les armes +pour défendre sa peau...
— Je trouve dommage qu’il soit nécessaire d’avoir besoin d’une arme pour +être en paix. Mais puisque cela semble être le cas, autant que tu en sois +capable comme les autres.
Elle l’entendit soupirer avant de reprendre.
— Tu m’aurais dit ça il y a plusieurs années, effectivement j’aurais trouvé +ça indécent, pas naturel, dangereux, inconvenant, et je ne sais quoi encore... +J’ai été élevé dans un château selon les traditions séculaires que tu connais +aussi bien que moi. Puis dans un temple, où le poids des rituels étaient bien +présent... Ensuite, j’ai passé plusieurs années à la garde la capitale. Là-bas, +je n’ai pas seulement appris l’art de l’épée, j’y ai compris qu’il n’y avait +pas vraiment de différence entre les genres, ou les types d’humains. +Peut-être que c’est ce que cherchait à me faire apprendre les prêtres en + + +m’envoyant là... Mais peut-être que c’était juste un effet secondaire. +
— Ils voulaient peut-être faire de toi un vrai paladin, juste et ouvert, et pas +une simple épée bien entraînée et obéissante...
— Je ne sais pas si, finalement, je corresponds à leurs critères... +

Elle avait l’impression qu’il aurait volontiers précisé sa pensée. Qu’est-ce +que cela pouvait cacher ? Était-ce simplement de la modestie, ou avait-il un +« critère » particulier en tête ? Elle brûlait d’envie de le questionner, mais +peut-être n’était-ce pas le moment. Elle tourna la tête vers lui en +souriant.
— Tu sais, moi non plus je ne corresponds pas aux critères d’une vraie +« dame ».
— Je vois ça. D’ailleurs, j’y pense, qui t’a appris cette technique ? Il faut +un sacré cran pour oser faire ce que tu as fait !
Elle sourit.
— Personne... J’ai improvisé, dans le feu de l’action. Je ne sais pas trop +comment. Je ne sais pas si c’est du courage ou de la folie, d’ailleurs. +Peut-être qu’à force de fréquenter des gens comme Zach, Aldariel, Silwë, et +même toi, ils déteignent sur moi...
— Leur folie ou leur courage ?
— Les deux ?
— Je dirais effectivement qu’il est à la fois courageux et fou de chercher à +traverser la forêt à pied, seulement accompagnée d’un guide.
Il était bien placé pour parler de prudence...
— Comme d’aller « secourir » une noble dame inconnue dans une forêt, +seul et sans escorte ? +

Il ne répondit pas.
— Je t’ai vexé ?
— Non... enfin, tu as raison. Nous sommes tous probablement un peu fous. +Et ça a failli nous coûter cher.
— Nous serons en sécurité, demain... Nous arriverons au château de mes +parents, n’est-ce pas ? +

Elle n’arrivait pas à dire cela sur un ton soulagé, même pas un ton +neutre. Arriver là-bas, c’était se dire que l’aventure se terminait, redevenir + + +une noble dame bien élevée, et surtout, ne plus voir Zach. Mais à quoi +bon se poser ce genre de question ? Elle avait su tout cela dès le +début. +

— Oui.
Il avait mis aussi du temps à répondre. Pourquoi ?
— Bonne nuit.
— Bonne nuit. +

Aldariel +

Lorsqu’Aldariel ouvrit les yeux, le jour était déjà levé depuis un +moment. À ses côtés, les lits de Zach et de Silwë étaient vides. Il faut dire +que ces lits humains étaient plutôt confortables, surtout comparés à la terre +battue de la forêt... Et après les évènements de la veille, une bonne nuit +n’était pas de trop. Elle se prépara rapidement, et se hâta de rejoindre les +éclats de voix qu’elle entendait du rez-de-chaussée. +

Installés autour de la grande table, en train d’avaler un petit déjeuner +solide, se trouvaient Silwë, Irdann et Beolie. Celle-ci était en train de +tendre un panier de victuailles à la guerrière, tout en l’abreuvant de +recommandations.
— ... Il ne vaut mieux pas chercher à aller dans les villages d’ici. Je vous ai +donc pris des provisions, cela devrait vous suffire pour la suite de votre +voyage. Restez à la campagne, voire dans la forêt, c’est même encore +mieux.
— Les elfes sont craints, par ici ? intervint Aldariel.
Beolie redressa la tête vers la nouvelle arrivante, et secoua la tête, tout en +lui préparant une assiette.
— Ça dépend des gens. Méfiez-vous des hommes surtout...
Elle s’interrompit pour déposer l’assiette généreusement garnie devant elle, +puis jeta un œil à Irdann, assis à côté d’elle.
— J’ai toute confiance en vous, messire paladin, et quant à Zach, je râle, +mais c’est un brave garçon. Mais ceux que vous pourrez croiser ne sont pas +comme ça...
Silwë lui sourit.
— Merci de vos conseils. Mais rassurez-vous, nous ne sommes pas désarmées + + +non plus. Tenez, voici pour les provisions.
Elle lui tendit une petite pile de pièces. +

C’est à cet instant que Sélène entra, coupant court au début de +protestation de principe de la part de Beolie.
— Bien le bonjour, dame Sélène. Avez-vous bien dormi ?
— Très bien, je vous remercie. Zach n’est pas là ? Il dort encore +peut-être ?
Elle secoua la tête.
— Il est parti, aux aurores, avec son père et d’autres hommes du village, +pour... « découvrir » ce qui s’est passé la nuit dernière. Ils ont découvert +les corps de brigands apparemment... +

Un silence passa. Chacun sembla se remémorer avec un léger frisson la +bataille de la nuit dernière. Puis Aldariel reprit la parole.
— Quelle est la... version « officielle » de cette histoire ?
— Je ne sais pas encore. Ils ont bien sûr promis de ne pas parler de vous +deux, dit-elle en désignant les deux elfes. Ile ne devraient plus tarder de +toutes façons. Vous partez bientôt ?
— Nous allons nous mettre en route dès que possible, n’est-ce pas +Sélène ?
Apercevant le regard de la jeune dame, Irdann s’empressa de compléter. — +... Mais il vaudrait mieux attendre le retour de Zach et de Yzar, pour savoir +à quoi s’en tenir.
Sélène hocha la tête, et Aldariel ne put retenir un léger sourire. +

Irdann +

Irdann et Sélène avaient traversé le village, tous les deux sur Kahrafe. +Leur passage avait d’ailleurs suscité quelques regards curieux et admiratifs. +Des rumeurs avaient couru sur l’attaque des brigands de la veille, mais +personne ne semblait évoquer la présence d’elfes. Par contre, certains, +apercevant les quelques déchirures sur la robe de la jeune femme et la +blessure au genou du paladin, en avaient tiré quelques conclusions. +Les regards posés sur lui semblaient de plus en plus respectueux et +impressionnés. Il se sentait un peu gêné de cette gloire qui n’était pas la +sienne, du moins pas totalement, mais Sélène le rassura en souriant. Plus les + + +gens inventaient des histoires héroïques, moins ils cherchaient la vérité, et +c’était peut-être mieux comme ça, dans ce cas précis, du moins. Et +puis, avait-elle ajouté, il n’avait pas totalement volé cette gloire non +plus. +

Ils étaient maintenant seuls, loin des habitations, et s’étaient arrêtés au +bord d’un ruisseau pour laisser souffler sa jument. À porter deux personnes, +elle se fatiguait vite, et lui-même ne pouvait se permettre de marcher sur +une longue distance. Mais qu’importe, ni lui ni Sélène ne semblaient +pressés. Celle-ci était assise dans l’herbe à côté de lui, en train de boire à +une gourde fraîchement remplie.
— Sélène ?
— Oui ?
— Maintenant que nous sommes seuls et loin du village, hem...
Il marqua une pause, et vérifia aux alentours, légèrement inquiet. Sélène le +regardait d’un air interrogateur.
— Il y a quelque chose que je voudrais savoir à ton sujet. Je comprendrais +que tu ne veuilles pas me répondre, mais...
Elle haussa les épaules et referma la gourde.
— Quelle question ?
Il prit une grande inspiration, et abaissa légèrement la voix.
— Avant que tu ne t’inquiète, je te dis tout de suite que je n’en ai parlé à +personne, ni à tes parents, ni à tes compagnons. Pas même à Silwë, en +qui pourtant j’ai entière confiance. Et je n’ai pas l’intention de le +faire.
Elle fronça les sourcils, et l’incita, d’un regard, à continuer.
— Quand j’étais chez toi, enfin, dans le château de tes parents, j’ai trouvé, +dans ta chambre, caché... un livre de magie. +

Sélène +

Elle resta figée quelques instants, d’horreur d’abord, puis de colère, et de +panique. Comment savait-il ? Comment l’avait-il trouvé ? Comment +avait-il osé fouiller dans sa chambre ? Qu’allait-elle faire ? S’enfuir ? Et +pour aller où ?
— S’il-te-plaît, calme-toi, je t’assure que je n’ai pas l’intention de révéler +cela à quiconque.
Il amena sa main près de son épaule, et se retint de la poser. Il avait +l’air sincère. Mais cela n’expliquait pas comment... Elle s’approcha +doucement de lui, et tout en gardant, autant que possible, un visage +neutre au cas où quelqu’un passerait par là, lui demanda à voix +basse :
— Comment as-tu trouvé cet objet ?
Il parut quelque peu soulagé qu’elle engage la conversation au lieu de +s’enfuir, ou de se mettre à lui jeter un sort –à quoi pouvait-il s’attendre +d’ailleurs ? Il avait l’air plutôt gêné...
— Hm... c’est quelque chose qui a à voir avec l’enchantement qui m’a +permis de te retrouver.
Elle marqua une seconde de silence avant de répondre.
— Soit. Je t’explique tout à une condition... Tu me dis aussi tout sur cet +enchantement.
Il parut choqué.
— Mais c’est un secret hautement gardé, je trahirais mon temple et la +déesse...
Elle secoua la tête.
— Le secret que tu as me concernant peut m’emmener au bûcher, je +suppose que tu le sais. Alors ?
Elle planta son regard dans le sien, bien décidée à ne pas céder. Il en savait +déjà beaucoup trop de toutes façons... +

Il soupira.
— D’accord. Pour te retrouver, j’ai dû enchanter une pierre, et pour cela je +devais avoir un objet auquel tu tenais...
Elle écouta, surprise, l’histoire de l’enchantement du cœur, et du livre qui +lui avait permis de l’invoquer.
— Et... cette pierre, qu’en as-tu fait ?
— Je l’ai toujours. Je pensais m’en débarrasser aussitôt que possible, par +exemple en la jetant au fond d’un lac. Mais je n’ai pas eu d’occasion, et puis +maintenant que tu sais...
Il se leva, et en boitant, s’approcha de sa jument. Il fouilla dans une +des sacoches cavalières, et en sortit une petite bourse de cuir, de +laquelle il sortit un caillou. Elle s’était attendue à une pierre ornée, +semi-précieuse, ou d’une forme particulière, et fut presque déçue de + + +constater qu’il s’agissait d’un simple petit morceau de grès, qui n’avait rien +de particulier et sur lequel on aurait pu marcher sans se rendre compte de +rien. +

Il la posa délicatement dans sa paume ouverte, et elle frissonna +lorsqu’elle sentit la pierre pulser légèrement. Au rythme de ses propres +battements de cœur...
— Je pense que le mieux est que tu la gardes, finalement. Tu décideras quoi +en faire.
— Y a-t-il un risque, pour moi ?
— Tu veux dire, que quelque chose t’arrive à cause de cet enchantement ? +Que je sache, rien ne peut t’arriver directement à cause de cette pierre. +Enfin...
Il prit une inspiration.
— Enfin, si on excepte le fait que quelqu’un ayant cette pierre peut toujours +te retrouver, savoir à quel moment tu mens, à quel moment tu as peur, à +quel moment tu dors...
Elle eut un frisson d’horreur, et sentit dans son corps et dans sa main son +pouls s’accélérer légèrement. La sensation était vraiment... étrange, et +effrayante en même temps. Elle hocha la tête et lui tendit la pierre, qu’il +enveloppa dans un morceau de tissu avant de la replacer soigneusement dans +la petite bourse de cuir, qu’il lui tendit.
— J’ai fait cela pour ne pas sentir les pulsations. Je te conseille de la mettre +en lieu sûr, ou de t’en débarrasser pour de bon, mais... fais comme tu le +souhaites. +

Elle regarda, fascinée, le petit sac de cuir, qui avait l’air parfaitement +anodin. Elle le glissa soigneusement dans son sac, et le fixa à une des +nombreuses lanières intérieures, qui servaient habituellement à y maintenir +les fioles de remèdes divers qu’elle transportait. Puis elle poussa un +soupir. +

Irdann +

— À mon tour de te donner quelques explications, si je ne me trompe.
Elle s’était tournée vers lui en souriant légèrement. Elle avait plutôt bien +encaissé cette histoire de pierre... Soit elle avait un tempérament en acier, + + +soit elle masquait bien ses émotions. Ou les deux ?
— Hé bien... par où commencer... Je suis effectivement une magicienne.
Il haussa un sourcil de surprise, mais fit bien attention à ne pas +avoir l’air menaçant. Elle lui raconta alors son enfance, le vieux livre +trouvé dans le grenier, ses premiers essais à la magie, et comment ses +parents avaient fait en sorte de l’envoyer à la capitale, en grand secret. +
— Mais... alors tu n’es pas vraiment mariée, en fait ?
Elle sourit.
— Non. Les Quayle sont une famille d’amis de ma mère qui vivent à la +capitale, et qui nous ont aidé, avec la complicité de quelques personnes de +l’université de magie, à monter cette histoire. Je ne les en remercierais +jamais assez...
— J’admets que c’est particulier comme histoire. Mais alors tu vis à la +capitale, seule ?
— Oui, dans une petite chambre de l’université. C’est moins luxueux que la +demeure d’un riche marchand, mais c’est tranquille.
— Et quelle magie tu apprends, là-bas ?
— Principalement la magie liée aux soins. Des blessés ou malades peuvent +venir de très loin pour se faire soigner par les meilleurs mages soigneurs, +et je compte bien en être dès que j’aurai fini mon apprentissage. +
— Tu ne connais que des sortilèges pour soigner ?
— C’est un peu plus complexe que cela, mais essentiellement. Oh, je +sais tout de même lancer des boules de feu, c’est un sort que j’ai +appris avant de venir à la capitale. Mais ce n’est pas si efficace que +cela et assez ridicule, en comparaison de ce que font les mages de +combat...
Il hocha la tête, alors que quelques images lui revenaient en tête.
— J’ai pu voir quelques démonstrations, c’est effectivement impressionnant. +

Ils laissèrent passer un silence, puis il se leva. Il était temps de repartir. +Alors qu’il s’approchait de Kahrafe, il sentit la main de Sélène se poser sur +son épaule.
— Attends. Montre-moi ton genou.
Il hésita.
— Tu veux... le soigner ? N’est-ce pas risqué ici ?
— Si je n’utilise pas mon bâton de magie, ce n’est pas trop visible. Même si +le sort sera moins efficace... Mais cela te soulagera. Rassieds-toi. +

Il obéit, peu rassuré. Mais risquait-il vraiment quelque chose +finalement ? Il la vit fermer les yeux et approcher sa main de sa blessure. Il +eut l’impression de voir quelques rais de lumière en sortir, mais peut-être +était-ce son imagination, ou des reflets du soleil. Dans le même temps, la +douleur qui cisaillait son genou depuis la veille, et qu’il s’efforçait d’ignorer, +s’estompa pour de bon. +

Elle ouvrit les yeux, et apercevant le soulagement marquer son visage, +elle sourit.
— Essaie de marcher ?
Il se leva et fit quelques pas, hésitant. La douleur qu’il avait crainte ne +revenait pas, même s’il sentait son genou encore fragile. Elle hocha la +tête.
— Voilà. Je ne peux pas faire mieux tout de suite, mais c’est déjà +bien.
Il lui sourit.
— Merci. +

+[
+
+

+

Uhr +

L’homme prit une gorgée de bière et fronça légèrement les sourcils.
— Où précisément ?
Uhr étala la carte de la foret de Sossirant, et désigna du doigt une zone, +assez éloignée des villes et des chemins tracés.
— Par ici.
Ragan, son interlocuteur, suivit des yeux la zone, puis replaça son regard +droit dans le sien.
— Écoutez, ce n’est pas mon genre de poser des questions à mes clients, +mais là, vous me surprenez. Je fais ce boulot depuis plus de vingt ans, et en +général, les gens veulent aller d’une ville à une autre. Pas au milieu de nulle +part.
Uhr haussa les épaules. Il ne comptait pas entrer dans les détails de sa +motivation.
— Pouvez-vous ou pas nous amener là-bas ?
Ragan secoua la tête.
— Non. Je ne connais pas ce coin, et je ne sais pas pour vous, mais je tiens +à ma peau.
Uhr jeta un œil à sa droite, où Farl et Samantha mangeaient tranquillement, +en attendant le résultat de ses négociations. Croisant leur regard, il secoua +légèrement la tête, et les vit prendre un air déçu. +

Le guide prit une autre gorgée, puis reprit.
— Après, si vous n’avez pas froid aux yeux, je connais peut-être l’homme +qu’il vous faut.
— Voulez-vous un autre verre ?
Uhr fit un geste à la tenancière, et il sourit.
— Merci. Il y a un autre guide, un petit jeunot, mais qui passe son temps en +forêt hors des sentiers battus, et il la connaît mieux que sa poche. S’il y a +un type qui connaît cet endroit, c’est lui. Est-ce qu’il acceptera de vous y +conduire, c’est autre chose...
— Savez-vous où je peux le trouver ?
— Il habite une petite maisonnette pas loin. Enfin, habite... il dort là quand +il est dans le coin. +

À cet instant, la tenancière, qui apportait deux nouvelles bières, crut bon +de s’insérer dans la conversation.
— Ragan, tu ne parlerais pas de Zach par hasard ?
— Si, justement. Tu l’as vu récemment ?
Elle posa les boissons sur la table.
— Vous ne le trouverez pas ici. Il est parti il y a trois jours, accompagner +quelqu’un qui allait dans la seigneurie d’Assem. Il est probablement quelque +part en forêt en ce moment.
— Croyez-vous qu’on puisse le rattraper ? demanda Uhr.
Le guide sourit.
— C’est envisageable. Vous avez un véhicule, n’est-ce pas ?
— Une voiture tirée par deux chevaux. Et nous sommes trois. Vous pouvez +nous emmener ?
— Cela dépend. Savez-vous vous défendre ?
Uhr désigna une grande épée à deux mains, dans un fourreau posé sur le +dossier de sa chaise.
— Ça suffira ? Ou pensez-vous qu’on ait besoin d’autres renforts ?
Le guide haussa un sourcil en estimant la taille de l’épée, puis son regard +se posa sur la stature imposante de son interlocuteur, et hocha la +tête.
— Si vous savez vous en servir correctement, ça devrait aller. Trouvez-moi +une monture et nous pouvons nous mettre en route. Enfin, si votre +femme et le petit gars qui sont avec vous n’ont pas peur d’être un +peu secoués. Je ne vous cache pas qu’on peut faire de mauvaises +rencontres...
Uhr sourit en regardant ses compagnons, qui s’étaient replongés dans leur +assiette.
— Il en faut plus que ça pour les secouer, rassurez-vous. +

Farl +

Le sentier était assez large pour y laisser passer la voiture, mais le sol en +terre battue était très inégal et de nombreux trous secouaient régulièrement +le véhicule. Après plusieurs jours, Farl trouvait qu’au final, il était plus +confortablement installé sur le siège du cocher qu’à l’intérieur. De +plus, les chevaux n’ayant pas besoin de beaucoup d’indications, il +pouvait sans soucis laisser les rênes sur ses genoux et s’exercer à +la jonglerie, sous les yeux surpris –au moins la première fois– de +Ragan. +

— Je n’aime pas trop ça, pour être franc.
Farl posa ses balles dans sa main gauche, et tourna la tête vers leur guide, +qui chevauchait devant.
— Qu’est-ce qu’il y a ?
— Je vous ai dit qu’on pouvait potentiellement rattraper Zach... Or on ne +va pas tarder à atteindre l’orée de la forêt, et je n’ai vu aucune trace de +lui.
— C’est si inquiétant que cela ?
Il haussa les épaules.
— Soit il a emprunté d’autres chemins que les habituels, ce qu’il fait plutôt +quand il est seul, soit il lui est arrivé quelque chose.
Il marqua un temps d’arrêt, puis continua.
— Il y a plus de brigands qu’avant. Il paraît que les dernières récoltes ont +été mauvaises dans la seigneurie d’Assem. Cela plus cette histoire de +tournoi je-ne-sais-plus-où, qui amène plein de nobliaux et bourgeois à +voyager...
— C’est vrai que nous avons été attaqués hier... Mais ils n’ont pas +insisté.
Ragan sourit.
— Nous avons eu de la chance là-dessus. Ils n’étaient que trois, en même +temps. Je ne sais pas ce qui les a le plus impressionnés, Uhr et son épée +presque aussi grande que lui, ou toi en train de jongler tranquillement avec +des couteaux sur le toit de la voiture ? Ils ne doivent pas voir ça tous les +jours...
Farl sourit à son tour sans répondre. Il prit une de ses balles et se mit à +jouer avec.
— Dites-moi, honnêtement, ces fameux couteaux... tu ne sais que jongler +avec ?
— Bah, s’il fallait me défendre, je saurais me débrouiller... +

Le guide laissa passer un silence pendant lequel il regarda le jeune +ménestrel, l’imaginant vraisemblablement en train de se « débrouiller » +avec plus de couteaux que ses mains pouvaient tenir face à des adversaires. +Il hocha la tête.
— Avec le bon entraînement, tu serais un vrai tueur...
Farl haussa les épaules en souriant, sans cesser de jouer avec sa balle. Il +n’avait pas tout à fait envie de s’étaler sur le sujet.
— Comment peut-on retrouver le fameux Zach, sinon ?
— Oh, si tout va bien, il sera probablement en train de prendre un verre à +la taverne du village. Ou chez ses parents, comme ça lui arrive de loger +quand il est dans le coin.
— Vous le connaissez bien ?
— Oui, il y a peu de guides qui connaissent la forêt de Sossirant. On se + + +connaît tous, il nous arrive régulièrement de voyager ensemble. +

Farl n’osa pas demander « Et si tout ne va pas bien ? ». Après tout, +était-ce la peine de s’inquiéter ? Il fallait juste espérer que cet homme soit +à la hauteur de sa réputation et puisse les guider. Et qu’ils trouvent quelque +chose là-bas... +

Zach +

Il y avait comme toujours cinq tables rectangulaires en bois massif, +entourées de bancs et de quelques tabourets, et la porte qui menait à la +cuisine avait encore la trace de brûlure qu’il avait toujours connu. La +lumière –à cette heure, essentiellement fournie par la grande cheminée sur le +côté et les plusieurs lampes suspendues sur les murs– et les odeurs n’avaient +pas changé non plus. Comme si rien ne s’était passé, et rien ne se passait +jamais à l’auberge du Renard Vif. +

Depuis qu’il avait laissé partir Sélène, le paladin et les deux elfes, il +avait erré dans le village sans trop savoir quoi faire. Le contraste entre +l’extraordinaire qu’il avait vécu dans les derniers jours et la routine paisible +qui régnait ici était tel qu’il se demandait presque s’il n’avait pas rêvé toute +cette aventure. +

Il adressa un geste au propriétaire, qui lui répondit par un sourire. +Le brave homme le connaissait depuis qu’il était un petit garçon, +et à part quelques rides et cheveux plus gris de plus, il n’avait pas +changé.
— Zach ! Ça fait un moment ! Viens te joindre à nous !
Il reconnut aussitôt Dacus, un autre guide et ami, installé à l’une des tables. +Il le rejoignit, et salua également deux hommes assis avec lui, habillés en +soldats. Ils lui expliquèrent qu’ils formaient la garde rapprochée d’un riche +seigneur, et qu’ils avaient engagé un guide pour faire lui faire traverser la +forêt avec sa suite.
— Encore quelqu’un qui se rend au tournoi du duc De Vane ? demanda +Zach.
— Oui, notre maître est un excellent archer. Mais comme beaucoup, il +vient au tournoi surtout pour se faire et entretenir des relations, +expliqua l’un des soldats. Après, il ne dédaignerait pas un trophée je + + +pense...
— Bah, c’est leur jeu, de toutes façons. Et puis, ça nous donne une occasion +de voir du pays, n’est-ce pas ? répondit son collègue.
— Si tant est qu’on n’y reste pas...
Le soldat montra alors son bras en écharpe.
— Oh. Vous avez été attaqués ?
Le guide et les deux soldats hochèrent la tête. Ils racontèrent alors un +affrontement particulièrement violent avec des bandits au milieu de la +forêt.
— J’ai bien cru que j’allais y rester, ajouta le soldat. Je me suis retrouvé à +un moment donné face à trois de ces hommes, et...
— Laisse tomber, c’est pas crédible, ton histoire, tu nous l’a déjà racontée, +interrompit son ami.
Le soldat blessé haussa les épaules et reprit tout de même, en abaissant la +voix légèrement.
— Personne ne me croit, évidemment. Mais j’ai vu certains de mes ennemis +tomber au sol, morts.
— C’était peut-être juste tes compagnons qui sont venus t’aider, que tu n’as +pas vus ? suggéra Zach.
— Aucun d’entre nous n’avait d’arc.
Il sortit de sa poche une flèche brisée qu’il posa sur la table.
— Et je suis sûr que notre maître n’a pas des flèches taillées comme +ça.
Zach fronça les sourcils et observa la pointe. Elle était fine et acérée... il +n’était pas spécialiste en archerie mais il lui semblait bien que les pointes de +flèche standard étaient moins travaillées. Du moins les flèches standard +humaines... Cela pouvait-il être une flèche d’elfe sylvain ? C’était +possible. Il regretta de ne pas avoir observé de plus près les armes +d’Aldariel. +

— Et toi, Zach, qu’est-ce que tu as fait pendant ce temps ?
Il releva la tête brusquement, sortant de sa rêverie. Les soldats avaient +rangé la mystérieuse flèche et s’était reportés sur leur assiette et leur +verre.
— Ah, moi ?
Il réfléchit quelques instants. Il ne pouvait pas tout à fait parler de Sélène... + + +Enfin si, rien de l’en empêchait, mais il y avait toute une partie qu’il ne +pouvait pas raconter... Et puis la rencontre avec les elfes. Quand bien même +on le croirait, on risquait de se méfier de lui, et de chercher peut-être des +ennuis aux deux jeunes femmes. Et tout ce qui s’était passé ensuite... Il +haussa les épaules.
— Une traversée sans histoire. +

Personne n’insista. Après tout, chacun était libre de raconter ce qu’il +voulait. Il suivit distraitement la suite de la conversation. Il y avait les +interrogations sur le fameux tournoi, et qui y viendrait. Il y avait des +nouvelles de la dernière née de Dacus, qui allait avoir deux ans la semaine +prochaine. Il y avait l’incendie qui s’était déclaré il y a un mois dans la +grange d’un des paysans, et que personne n’expliquait. Il y avait +la cuisine de la taverne, qui était décidément très bonne ce soir, +ou alors c’était parce que la nouvelle serveuse était jolie. Aidé par +le bon repas et le vin, il se laissa bercer par ces histoires, comme +si elles le ramenaient sur terre après une excursion dans une vie +différente. +

Puis, la porte sur l’extérieur s’ouvrit, et parmi les deux silhouettes qui +entrèrent, Zach reconnut immédiatement la première.
— Ragan, quelle bonne surprise ! s’exclama son voisin de droite. +

Samantha +

Ils étaient assis, elle et Uhr, sur le petit lit dans leur minuscule chambre. +Le gérant de la taverne leur avait dit qu’il n’avait plus d’autre chambre de +libre, avec tous ces étrangers de passage dans la région. Des tas de papiers +s’étalaient autour d’eux.
— Qu’as-tu tiré d’intéressant sur les... créatures qu’on cherche ? lui +demanda-t-elle.
— Au final peu de choses très précises. Les documents qu’on m’a donnés +sont très vieux, ce sont des récits de voyageurs, ou des traductions +imparfaites de natifs de la région, et il est difficile de faire la part entre +ce qui a été réellement observé et ce qui tient de la légende ou de +l’imagination... Rien sur leur taille, par exemple. Ou plutôt tout et son +contraire ! Heureusement qu’il y a les croquis et notes de Mortag, même si + + +ce n’est pas complet.
— D’où venaient-elles ?
— Des contrées du sud, où elles vivaient tapies dans des grottes à l’abri de +la lumière vive et de l’humidité. C’est un des points sur lequel les différents +témoignages semblent se recouper, et qui est bon à savoir. On ne sait pas +trop quand et comment elles ont disparu. Ici ils parlent d’une aide divine, +invoquée par des humains locaux, pour s’en débarrasser. Là d’une traque +intensive et sans fin pour les éliminer toutes. Dans celui-ci, les elfes noirs les +auraient domestiqués pour chasser les humains de la région, alors que dans +celui-là, ils les combattaient. Je ne suis pas sûr qu’on puisse se fier à +grand-chose... — Je ne savais pas que les elfes noirs vivaient ici aussi à +l’époque.
— Moi non plus. À vrai dire, il faut reconnaître que nous ne savons pas +grand chose d’eux. Cela ne fait qu’à peine un siècle qu’elfes et humains se +parlent, et encore. D’accord, nous avons croisé un ou deux elfes noirs à la +capitale, mais ce n’était peut-être pas bienvenu de l’aborder et lui +demander les archives détaillées de sa nation... Même Silwë, rappelle-toi. +Elle nous parlait de temps en temps de petits détails personnels de +la vie des elfes, mais n’a jamais dit grand chose de l’histoire des +sylvains. +

Samantha hocha la tête. Uhr reprit.
— Si on en revient à nos bestioles, il semble assez unanime qu’elles ont une +morsure extrêmement venimeuse. Une morsure tue un humain en une +dizaine d’heures, beaucoup moins pour un petit animal. Il semble que, du +coup, ces créatures s’acharnent rarement sur une cible une fois mordue, il +leur suffit d’attendre patiamment.
— Charmant programme.
— D’un point de vue très pragmatique, cela veut dire qu’il suffit d’avoir le +bon antidote. Farl a sélectionné plusieurs antipoisons basés sur diverses +morsures d’araignées connues, et si j’en crois certains de ces textes, ils +devraient fonctionner.
— Si tout va bien. +

Uhr ne répondit pas. Il se contenta de désigner la pile de feuilles qu’il y +avait sur les genoux de Sam.
— Et toi, qu’as-tu trouvé d’intéressant dans ces dossiers ?
Pas mécontente de changer de sujet, elle sortit un petit carnet sur lequel elle +avait résumé ses notes.
— Comme tu le sais, c’est un dossier avec des informations sur tout un +nombre de mages de la capitale, ayant potentiellement un lien avec Mortag +ou Septim. Et ça en fait des noms...
— C’est le capitaine Mazrok qui t’a donné ça ? Il a obtenu ça d’après ses +dossiers de la garde ?
— J’ai des doutes. Je pense qu’il est allé demandé au recteur de l’université +de magie. Il s’agit essentiellement de données administratives : nom, +adresse, origine, domaine de compétence, ... Mais il y a sur certaines fiches +quelques informations rajoutées à la hâte, d’une autre écriture : il a +peut-être cru bon de rajouter certains points intéressants. Pour nous aider, +peut-être ?
— Pourquoi cet excès de zèle ?
— Peut-être qu’il se méfie de certains mages. Peut-être qu’il veut se faire +bien voir du capitaine Mazrok. Peut-être qu’il a une autre raison, je n’en +sais rien. On ne va pas se plaindre.
— Et qu’as-tu tiré de tout cela ? +

Elle soupira et regarda son carnet.
— Septim est originaire de la région. Du comté de ToDo, qui n’est pas +très loin d’ailleurs. Fils de tailleur, il est parti à l’adolescence à la +capitale pour finir son apprentissage... Et a découvert une autre +voie.
— Original, un mage puissant venu d’un pays où on craint la magie...
— Il n’est pas le seul. J’en ai noté quatre autres comme ça. Il y a +la fameuse Zanakielle, notamment. Ainsi que trois autres mages : +Plimel, Tenedrinn et Sélène. La dernière de la liste est intéressante +aussi.
— Qu’est-ce qu’elle a de particulier ?
— Déjà, son domaine de magie –le soin– est proche de celui de Septim. +D’après une note ajoutée à la hâte, il était même un de ses professeurs. Et +il y a un détail cocasse, que j’ai noté au cas où : Sélène est la fille aînée du +seigneur Assem.
Uhr ouvrit grand les yeux de surprise.
— C’est bien la seigneurie sur lequel on se trouve ?
— Oui... Mais ce n’est pas ça qui me rend méfiante à son sujet. C’est +qu’apparemment, elle aurait quitté la capitale quelques jours avant +l’« incident ».
— Pour où ?
— On ne sait pas évidemment. Ou plutôt, je ne saurais pas si je +n’avais pas eu l’idée de bavarder avec la femme du propriétaire de +l’auberge.
— Comment pourrait-elle savoir ? demada Uhr, de plus en plus +incrédule.
Samantha sourit.
— On l’a vue ce matin, traverser le village, accompagnée d’un jeune et +mystérieux chevalier qui serait allé la secourir.
Il haussa les sourcils.
— Sérieusement ?
— Ce sont des rumeurs, qui valent ce qu’elle valent... +

Uhr se leva.
— Intéressant. Je ne sais pas si cela peut avoir un rapport avec notre +histoire, mais... J’entends du bruit en bas, la salle à manger doit être +pleine. D’après Ragan, nous avons de bonnes chances de croiser le +fameux Zach ici. Farl est peut-être même déjà en bas. Et puis j’ai +faim. +

Uhr +

Lorsqu’ils entrèrent dans la pièce, ils constatèrent qu’il y avait pas mal +d’animation dans la petite salle. À une grande table près de la cheminée +étaient attablés une petite dizaine d’hommes, à la conversation animée et +joyeuse.
— Allez, Farl, montre-nous.
C’était la voix de Ragan, au milieu des rires. Le jeune homme se leva de sa +chaise, en souriant, prit trois couverts en bois et se mit à jongler avec, sous +les applaudissements de son public improvisé. Ce Farl, il ne manquait pas +une occasion de se donner en spectacle, même –et surtout– improvisé. Ce +soir, il avait un certain succès, y compris auprès de la jeune serveuse qui +venait de lui apporter une assiette supplémentaire avec un grand +sourire. + + +

Il jeta un œil à Samantha, qui semblait avoir suivi son regard.
— Bah, laissons-le s’amuser. Qu’est-ce qu’il pourrait lui arriver de grave +après tout ?
Ils s’assirent à une petite table de libre et commandèrent à manger. Alors +qu’ils se demandaient comment ils allaient bien aborder le fameux guide, un +homme s’approcha de la table. +

— Je suis Zach. J’ai cru comprendre que vous me cherchiez ? +

L’homme était vêtu de façon semblable à ses compagnons. Pantalon de +toile et bottes de cuir solide, tunique de lin grise, usée et délavée de façon +non-uniforme, comme s’il portait régulièrement un autre vêtement sur son +torse. Il remarqua aussi l’usure caractéristique sur le côté gauche de sa +ceinture, celle que forme, avec le temps, un fourreau d’épée qui y pend +régulièrement. Pourtant, sa carrure état moins imposante que celle +Ragan et il paraissait nettement plus jeune. Sa réputation était-elle +surfaite ? +

— Effectivement. Asseyez-vous en face. Mon nom est Uhr, voici ma femme +Samantha. Nous cherchons quelqu’un pour nous emmener dans certaines +régions peu connues de la forêt de Sossirant. Il semble que vous soyiez le +seul à pouvoir le faire ?
Zach s’assit en souriant.
— Sans vouloir me vanter, il me semble que si je ne peux pas vous y +conduire, alors aucun humain ne le peut. Par quel moyen ? À pied ? +

Au fur et à mesure que la conversation s’engageait sur des détails +pratiques –prix, moyen de transoprt, matériel–, Uhr commençait à +avoir confiance. Il savait de quoi il parlait. Et après tout, ce ne sont +ni l’âge ni les gros bras qui font un bon guide. Il sembla un peu +hésitant quand à la venue potentielle de Samantha, mais un regard +foudroyant de celle-ci le convaincut rapidement. Lui même avait +vaguement essayé de la dissuader de venir jusque dans la forêt –elle +pourrait rester dans la ville et apprendre des choses–, mais vaguement +seulement. Il savait bien que lorsqu’elle avait décidé de faire quelque +chose, la déesse elle-même ne l’arrêterait pas. Alors quelqu’un comme +Zach... +

Il craignait un peu qu’il ne leur pose un peu trop de questions sur le but + + +de leur voyage –s’il prévoyait de lui en parler une fois la ville quittée, il ne +voulait pas détailler tout de suite–, mais s’il fronça légèrement les sourcils à +leur explication vague de recherche de ruines d’anciennes civilisations, il s’en +contenta. +

Lorsqu’Uhr pointa, sur la vieille carte du guide, les zones qu’il comptait +explorer, celui-ci commença par hocher la tête, puis se figea l’espace d’un +instant.
— Par contre, je n’emmène personne ici.
Uhr et Samantha le regardèrent, surpris, puis leur regard se porta à +nouveau sur la carte, sur la zone qu’Uhr pointait. Elle n’était pourtant pas +si éloignée que cela de la ville, même si elle semblait très peu fréquentée au +vu de l’absence de chemin qui la parcourait.
— Ailleurs si vous voulez, même là, ajouta-t-il en pointant une zone bien +plus éloignée.
Le visage de Zach s’était fermé, et était devenu indéchiffrable. Il +reprit, alors que Samantha ouvrait la bouche pour lui demander +pourquoi.
— Les autres guides ne vous emmèneraient pas parce qu’ils ne connaissent +pas cette région. Je ne vous y emmène pas parce justement je la connais. Et +je tiens à ma peau et je suppose que vous aussi.
Il se leva brusquement.
— Attendez. Et si nous y allions avec une meilleur escorte, peut-être +que...
— Si vous me trouvez une armée, peut-être, coupa-t-il.
Il se dirigea vers le comptoir et fit un geste au tenancier, sans dire un mot. +Uhr et Samantha se regardèrent, surpris. +

— Hé, Zach, tu ne vas pas nous quitter comme ça quand même !
C’était la voix d’un de ses compagnons de table, qui l’appelait d’un +air enjoué. Le jeune homme sembla hésiter, puis se retourna vers +lui.
— Le p’tit gars a encore des trucs à nous montrer, je suis sûr que ça va te +plaire !
Il pointa du doigt l’autre côté de la table, où Farl faisait tenir un large +couteau en équilibre sur son nez, sous le regard amusé des autres convives. +Zach sembla hésiter, regarda le jeune ménestrel quelques instants, puis + + +sourit en s’approchant de la table.
— Je peux essayer ? +

Samantha +

Ils restèrent silencieux quelques instants, regardant le jeune homme +quitter la table.
— Qu’est-ce qui lui a pris ? murmura Uhr.
— Je ne sais pas. Il s’est vraiment braqué d’un coup... Tu crois qu’il +faudrait le rappeler, essayer de lui parler ?
— On peut. Mais j’ai l’impression qu’on a peu de chances. Et sans lui, +impossible de mener à bien notre mission. Mmmh...
Il s’interrompit pour réfléchir. Pendant ce temps, Samantha tourna son +regard vers l’autre table. Le jeune guide avait rejoint ses compagnons, parmi +lesquels se trouvait Farl... +

Zach s’était pris au jeu. Il avait récupéré le long couteau et lui aussi le +faisait tenir en équilibre sur son nez. Il se débrouillait plutôt bien, et à en +voir la réaction de la petite foule, ce n’était pas la première fois +qu’il jouait à ce genre de jeu. Et ce soir-là, il avait un concurrent +sérieux... +

Farl lui jeta un œil interrogateur. Elle haussa les épaules en faisant +la moue. Une fraction de seconde plus tard il s’était de nouveau +tourné vers son nouveau compagnon pour lui proposer un nouveau +défi. +

— La zone dans laquelle il refuse d’aller se recoupe en partie avec celle +qu’on devait explorer. On peut commencer par aller voir le reste, et +peut-être que d’ici là... commença Uhr
Samantha l’interrompit en souriant et en posant sa main sur la sienne. — +Pour le moment, je serais d’avis de laisser faire Farl, il a l’air mieux parti +que nous pour lui parler...
Tous deux tournèrent la tête vers la grande table, où les discussions et les +rires allaient bon train. Il sourit à son tour.
— Tu as peut-être raison. Attendons demain. +

Zach + + +

Il secoua la tête tout en foulant l’herbe humide de rosée, comme si cela +lui permettait de chasser ces pensées qui se bousculaient. Il n’aurait +peut-être pas dû... Il y avait un certain nombre de choses qu’il n’aurait pas +dû faire hier soir. +

Boire, pour commencer. Ou tout du moins pas autant. Mais lorsqu’il y +pensait, ce n’était pas la première fois qu’il se faisait cette réflexion, et il +avait beau tenter de se persuader du contraire, une petite voix lui disait que +ça ne serait pas la dernière. Au moins cette pensée-là était habituelle, elle +en était presque rassurante au fond. +

Il n’aurait pas dû refuser tout net ce que proposait Uhr. Surtout qu’il +semblait être le genre de gars à être prêt à payer cher sans poser trop de +questions pour aller là où il voulait. Et après tout, s’il avait refusé, c’était +justement pour éviter les questions... Elles auraient mené trop loin, si on ne +le prenait pas pour un fou. Sélène, Irdann, les deux elfes, les araknes, leur +morsure, Sélène... +

Pourtant la soirée s’était passé plutôt bien ensuite. Il avait fait +connaissance avec ce jeune homme, un ménestrel apparemment, qui avait +voyagé avec Uhr et sa femme. Un jongleur, qui avait épaté la galerie avec +divers tours d’adresse avec tous les objets qui lui étaient passés sous la +main. Il s’était joint au public. Il n’aurait pas dû. Il savait bien qu’il aurait +à un moment donné envie d’essayer, lui-même étant amateur de ce genre de +jeu. Il n’était d’ailleurs pas mauvais, mais face à un vrai jongleur, il savait +bien qu’il n’avait aucune chance. Qui avait suggéré l’idée de le défier sur un +terrain qui était plus le sien ? Était-ce Dacus ? Il n’était plus sûr. Ça +aurait bien pu être le ménestrel. Ou bien lui-même, pour ce qu’il se +souvenait de la fin de la soirée. S’il avait été sobre et s’il n’y avait +pas eu ses compagnons autour de lui, il n’aurait jamais accepté, +évidemment. +

Il marchait depuis presque une heure, et au fur et à mesure que l’air frais +lui éclaircissait l’esprit, il hésitait. Était-ce une bonne idée, d’aller quand +même à ce rendez-vous ? Après tout, il ne connaissait même pas ce jeune +homme. Et puis il avait mieux à faire que d’aller relever des défis +idiots. +

Il soupira. En fait il n’avait pas vraiment mieux à faire, puisqu’il avait + + +refusé le « boulot » d’Uhr. Et puis, il aimait relever des défis, même idiots. +Mais quand même... +

— Héé Zach !
Il tourna la tête. C’était Ragan qui le rattrapait au pas de course. Un grand +sourire barrait son visage.
— Ha, je savais bien que tu n’allais pas te débiner au dernier moment.
L’enthousiasme de son compagnon chassa vite ses interrogations, et il lui +sourit en retour.
— Et l’autre, tu crois qu’il va se dégonfler ?
— Farl ? Ça m’étonnerait.
— Ah, c’est vrai que tu as fait le trajet avec lui, j’avais oublié. Tu le connais +plutôt bien alors...
— Oui. C’est un p’tit gars un peu étrange parfois, mais au fond, il n’est pas +bien méchant.
Il hocha la tête et reporta son regard au loin. Ils étaient tout proches de +leur destination. +

Le lac du Croissant était un endroit magnifique. Il était passé à +plusieurs reprises à côté de ce point d’eau qui devait son nom à la large +falaise qui le bordait sur la moitié de sa circonférence. Si on pouvait voir +quelques grands arbres aux alentours, seuls quelques buissons secs +poussaient au sommet de la barre rocheuse, la faisant apparaître d’autant +plus pâle. Bien qu’à une petite heure de marche du prochain village, +l’endroit était pourtant peu fréquenté. Divers mythes parlaient d’une +malédiction, mais Zach, pragmatique, croyait plus volontiers que l’endroit +présentait en réalité peu d’intérêt : le lieu n’était pas vraiment sur des +routes fréquentées, la terre était pauvre, il y avait peu d’animaux à y +chasser et les alentours regorgeaient de nombreux autres points d’eau plus +fournis en poissons. Son seul intérêt était probablement sa beauté, mais +bien peu de gens pouvaient –ou souhaitaient– prendre le temps de +l’apprécier. +

Farl +

Lorsqu’il aperçut la silhouette de Zach au loin, il laissa un léger sourire +se marquer sur ses lèvres.
— Tu pensais qu’il ne viendrait pas ?
Il tourna la tête vers Dacus, un autre ami de Zach, qui était arrivé en +même temps que lui. Il haussa les épaules.
— Je dois t’avouer que j’ai eu quelques doutes...
— Bah, Zach rate rarement un défi. Quoique, quand il pense vraiment qu’il +va rater... Mais il est là en tous cas. +

Il était là. Un peu nerveux, visiblement, mais lui-même l’était aussi +finalement. Il était venu sans son épée –un fourreau vide à sa ceinture +l’attestait–, mais il lui semblait deviner le manche d’un couteau qui +dépassait de sa botte droite. En dehors de cela, il était venu les mains vides. +C’était plutôt bon signe. +

— Nous y voilà. Alors, qu’est-ce que tu attends de moi ?
— Qu’est-ce que tu veux, j’ai beaucoup entendu parler de toi. Oh je ne +comptais pas te défier sur tes compétences de guide ou de pisteur, elles +sont suffisamment reconnues et ce n’est de toutes façons pas mon +domaine. J’ai déjà eu l’occasion de jouer à des jeux d’adresse avec toi +hier.
Le jeune guide haussa les épaules. Maintenant que Farl y prêtait attention, +Zach semblait nettement plus jeune que ses amis. Il devait avoir son âge, ou +peut-être moins, difficile à dire.
— Évidemment, je ne comptais pas te défier sur la jonglerie.
Son interlocuteur laissa échapper un sourire mais ne répondit pas.
— En fait, tes collègues m’ont dit que tu étais un excellent grimpeur. Et +puis j’ai vu cet endroit...
Il se tourna et désigna la barre rocheuse derrière lui. Zach suivit son geste, +et ses yeux se mirent à briller alors que son sourire s’agrandissait. +
— Je dois reconnaître que cette falaise m’a déjà tenté. Mais je n’ai jamais +vraiment pris le temps...
Farl sourit à son tour et s’approcha de la roche.
— On part en traversée, au ras de l’eau. L’idée est de finir là haut, de +l’autre côté, au niveau de ce petit arbre.
Zach ne répondit pas, et continuait à fixer la falaise, observant et +étudiant le trajet à effectuer. Ragan lui donna une tape sur l’épaule en +souriant.
— Ha, je savais que ça te plairait. J’aurais bien tenté, mais je n’ai pas ton +agilité ! +

Zach se tourna vers lui en souriant.
— Le dernier arrivé paye un pot ce soir ?
— Le dernier arrivé ou le premier à l’eau.
Les deux autres guides approuvèrent en riant. +

Zach +

Le soleil montait petit à petit à l’horizon, et la pierre était très claire. Il +aurait vite chaud. Il se défit de sa ceinture et de son armure de cuir, et +après quelques hésitations, de sa tunique. Après tout, autant être léger, et +puis ses amis pouvaient garder ses affaires. Puis il rejoignit Farl, qui avait +posé son petit sac en cuir noir et s’était approché de la paroi. S’il avait +proposé ce défi, c’est qu’il était plutôt bon grimpeur lui aussi. Mais à quel +point ? +

Alors qu’il passait sa main sur la roche, Dacus lui tendit une flasque +ouverte.
— Tu veux un coup avant d’y aller ?
— Euh, merci mais je crois que j’ai un peu trop bu hier...
Il sourit.
— Oh, il n’y a presque pas d’alcool. Et puis,
Il se rapprocha alors qu’il lui mettait la flasque dans les doigts, et lui fit un +clin d’œil.
— J’ai parié un pichet de vin avec Ragan sur toi, me déçois pas, +hein ! +

Zach sourit et prit finalement une petite gorgée –Dacus n’avait pas la +même notion de « presque pas d’alcool » que lui.
— Je vais faire de mon mieux.
Il tendit ensuite la flasque au jeune ménestrel, qui prit une gorgée à son +tour.
— Bonne chance, Zach.
— Bonne chance à toi aussi. +

Farl + + +

Il se demandait vaguement à quel point ses amis avaient exagéré +les compétences de Zach, mais il fut vite convaincu. Il n’allait pas +particulièrement vite, mais il évoluait avec fluidité et assurance. Il était +aussi plus grand que lui et ses doigts étaient plus fins que les siens, deux +atouts importants. +

Farl décida de couper par un chemin un peu plus court mais plus +technique. Les prises y étaient beaucoup plus petites et rares, et la +progression était plus complexe. Mais il en fallait plus pour arrêter +quelqu’un qui avait passé des années à escalader les murs de la capitale. +Lorsqu’on est habitué à tenir les réglettes fines et humides formées par les +interstices entre les pierres, les petits gratons de roche qu’il trouvait ici +étaient presque confortables. +

Pourtant, il commençait à avoir chaud et regrettait d’avoir gardé sa +tunique à manches longues. Sauf que s’il avait dû se mettre torse nu comme +Zach, il aurait dû, d’une façon ou d’une autre, montrer le fourreau +d’avant-bras qu’il portait dessous. Et on faisait mieux pour inspirer +confiance qu’une arme d’assassin. Maintenant qu’il y pensait, il aurait dû +simplement la laisser à l’auberge, ce n’est pas comme si il craignait +grand-chose... +

En parlant de confiance, est-ce qu’il devait plutôt le laisser gagner ou +pas ? Il tourna la tête rapidement pour voir son avancement. Il était +maintenant juste derrière lui. Leurs regards se croisèrent et ils esquissèrent +tous deux un sourire au milieu de l’effort. Il s’en sortait très très bien. Hors +de question de le laisser gagner. +

Zach +

L’escalade était plus longue que prévue, et il commençait à sentir la +fatigue dans ses avant-bras. Mais Farl, qui avait choisi un autre chemin, ne +semblait pas la sentir. Il ne savait pas précisément ce qu’on apprenait aux +apprentis ménestrels, mais il doutait que l’escalade en fasse partie... +Peut-être venait-il de régions montagneuses où on apprenait à grimper +avant d’apprendre à marcher ? +

Il profita d’une bonne prise pour s’essuyer le front et prendre une grande +inspiration avant l’ascension finale. Il lui restait moins d’une dizaine de + + +mètres à grimper, et il pouvait encore peut-être rattraper son concurrent. +Et vu de près, il lui semblait bien qu’il commençait à fatiguer lui +aussi... +

Mais pas suffisamment. Quelques mètres à peine au dessus delui, Farl se +hissa sur le replat qu’ils avaient convenu comme lieu d’arrivée. Il se redressa, +puis se tourna vers lui et lui tendit son bras en souriant. +

Farl +

Zach sembla avoir un instant d’hésitation et une moue. Puis il saisit son +avant-bras tendu et le rejoignit. Il lui sourit.
— Bon, d’accord, tu as gagné, lui dit-il en reprenant son souffle.
— Merci. Tu grimpes très bien aussi. +

Ils restèrent quelques instants silencieux masser leurs avant-bras +endoloris, tout en regardant le paysage, qui était effectivement superbe. Le +lac, la forêt, le village, les champs alentours... Au loin, se dessinait la +silhouette du château du seigneur et la ville qui l’entourait. +

— Je peux te poser une question ?
Farl sortit de sa rêverie brusquement.
— Euh oui.
— Je me demandais si tu avais quelque chose au bras droit. Une blessure, ou +une protection spécifique ?
Il hésita quelques instants, puis se décida à soulever sa manche. Il s’était +déjà dit qu’il aurait dû laisser ça à l’auberge, mais maintenant... +

Zach observa en silence le fourreau de cuir qui entourait son avant-bras, +puis Farl actionna le mécanisme pour libérer la dague, et d’un mouvement +sec la fit glisser dans la main. Il continua de fixer la lame acérée, peinte en +noir pour éviter les reflets. +

— J’avais entendu parler des assassins de la capitale. Mais j’ai toujours +pensé qu’il s’agissait d’une légende ou d’un groupe disparu.
Il essayait de dire cela d’un ton factuel, mais la nervosité pointait dans sa +voix –et il y avait de quoi.
— Les rares personnes à avoir vu cette arme et à être encore en vie sont des +amis.
Ce n’était pas la meilleure des tirades, il devait l’admettre, mais les traits de +son interlocuteur se détendirent un peu. Le jeune guide tourna ensuite la +tête vers la rive où les attendaient leurs amis. Il leur fit un geste, puis se +leva.
— On devrait rentrer, dit-il. Par là, ajouta-t-il en pointant du doigt les +buissons rabougris qui poussaient sur la falaise, il y a un sentier qui mène au +pied du rocher. +

Farl remit sa manche et se mit en route à sa suite. Il hésitait à +questionner Zach, mais ce fut lui qui prit la parole au bout de quelques +minutes.
— Tu travailles pour Uhr ?
— Pas vraiment... Uhr et moi sommes amis de longue date et nous +entraidons régulièrement.
— Vous êtes donc tous les trois à la recherche de cette... ruine ? Enfin ça ne +me regarde peut-être pas...
— C’est une histoire compliquée, je ne sais pas si j’ai le droit de te +dire... +

Zach +

Il devait admettre que l’histoire de Farl l’intriguait, mais il avait depuis +longtemps pris la résolution de ne pas questionner trop ses clients +–même potentiels. En général, c’était ce qu’on attendait de lui. +Il avait la certitude que certains des voyageurs qu’il avait escortés +n’avaient pas forcément des activités strictement légales. Surtout +ceux qui demandaient à traverser hors des sentiers, de préférence +discrètement, et qui payaient très bien pour ça, y compris pour son +silence. +

Jusque là, il le savait pour avoir écouté les rumeurs de village, il ne +s’agissait que de petite contrebande ou de petits malfrats qui fuyaient la +région. Il saurait refuser ce genre de marché si on lui proposait quelque +chose de vraiment louche. Il ne savait pas trop où il mettrait cette limite, et +il devait reconnaître qu’il était plus confortable de ne pas poser trop de +questions. +

La voix de Farl interrompit ses pensées.
— Tiens, à propos de choses qu’on ne dit pas... Peux-tu me dire pourquoi tu +n’as pas voulu dire précisément quels dangers nous attendent dans la +forêt ?
Il haussa les épaules. Après tout...
— Essentiellement, parce que personne ne m’aurait cru.
Le ménestrel sourit.
— Bah, dis toujours, j’aime bien les histoires extraordinaires. Au pire ça +fera un joli conte à raconter.
Il eut un sourire un peu amer.
— Ça fera une histoire pour faire peur aux enfants pas sages alors...
Il prit une inspiration.
— Lors de ma dernière traversée, nous avons rencontré des créatures +cauchemardesques et mortelles, des sortes d’araignées géantes, appelées +araknes... +

Il s’interrompit, remarquant que Farl était resté quelques pas en arrière. +Son visage s’était figé sur une expression de surprise.
— Je sais, c’est complètement incroyable, hein...
Farl était tout pâle.
— Plus que tu ne crois. Enfin, moins même.
— Quoi ?
Il le rejoignit, et posa sa main sur son épaule en hochant la tête.
— Zach... Tu veux bien m’accompagner jusqu’à l’auberge du Renard Vif, où +nous avons nos chambres ?
— Euh oui...
— Tu voudras bien expliquer tout ça à Uhr et Sam aussi ? Nous n’allons +pas le crier sur les toits, rassure-toi.
— Euh... d’accord, mais pourquoi ?
Le jeune ménestrel marqua une pause, semblant chercher ses mots.
— Tu vois cette histoire plus ou moins crédible de ruine antique que +recherche Uhr ?
Il hocha la tête.
— Ce qu’il cherche est bien chose d’« antique », qui est censé avoir disparu +depuis des siècles... mais ce n’est pas un tas de cailloux. +

Zach se tut quelques instants, le temps de comprendre.
— Oh. + + +

Samantha +

Uhr déplia la carte sur le lit de la chambre de l’auberge, qui était +décidement trop petite pour quatre personnes.
— Si je résume bien, toi et ta cliente avez fait ce trajet, passant par là, et +là, dit-il en dessinant une trajectoire au crayon sur le papier. Et vous avez +croisé des araknes où déjà ?
— Ici, précisa Zach, en pointant la carte. Nous avons ensuite traversé la +rivière là, ce qui nous a mis à l’abri de ces créatures.
Uhr hocha la tête et se tourna vers elle.
— On est d’accord qu’elles ne peuvent pas traverser de rivière ?
Elle secoua la tête en relisant les quelques notes qu’ils avaient.
— En principe non. Sauf s’il y a un pont dans le coin, peut-être.
— C’est trop reculé pour que des hommes soient venus construire des ponts, +à ma connaissance. Il y a quelques gués, au mieux.
— La zone clé est donc située entre cette rivière et son affluent, ce n’est pas +si grand comme région. C’est une très bonne nouvelle. ajouta Uhr en +souriant.
— Tu trouves ? lui demanda-t-elle.
— On nous a demandé d’enquêter sur la présence possible de ces bestioles +dans la forêt, pas forcément d’y aller et de leur serrer la pince. Le +témoignage de Zach est déjà très riche ! +

À condition qu’il dise bien la vérité, pensa-t-elle. Elle voulait en parler +discrètement à Uhr et Farl, mais elle était sûre qu’il mentait. C’était +absurde, pourtant, qu’il invente une histoire pareille. Et pourtant, la façon +dont il en parlait, ses gestes parasites, tout son corps exprimait qu’il +mentait. Ou alors il ne disait pas tout, peut-être ? Cette hypothèse était un +peu plus crédible. Il faudrait trouver le moyen de le questionner, mais +peut-être un peu plus subtilement que directement... +

— Il est évident que je vais essayer d’envoyer un rapport écrit. Mais +réfléchissez, si nous rentrons maintenant avec ces informations, reprit Uhr, +c’est sûr que... celui qui nous envoie sera plutôt satisfait...
Il jeta un œil à Zach. Évidemment, il ne pouvait pas tout dire devant +lui.
— ... Et que va-t-il faire à votre avis ? Envoyer quelques hommes pour + + +enquêter... Et comme il souhaite –a priori– que ce soit dans la discrétion, il +va éviter de mettre trop de monde au courant. Je vous laisse donc deviner +qui va devoir y aller.
— Oui, mais nous pourrions avoir des renforts, ou de l’équipement +adapté, ajouta Farl, plongé jusque-là dans l’inspection de son sac à +dos.
— Quel meilleur équipement pourrions-nous avoir qu’on ne pourrait pas +trouver ici ? répondit Samantha. Et en plus, les informations de Zach sont +plus utiles que la plupart des livres qu’on pourrait trouver à la capitale... Et +nous serions quatre.
Elle tourna la tête vers Zach.
— Enfin, si tu acceptes de nous emmener là-bas. +

Tous tournèrent la tête vers le jeune guide, qui ne semblait pas très +emballé par l’idée.
— Cela reste dangereux... Même si avec des équipiers avertis ce n’est +peut-être pas complètement suicidaire...
— Bien sûr, nous serons prudents, ajouta Uhr. Nous n’allons pas nous jeter +dans le nid de ces bestioles, nous voulons juste des informations +plus précises sur leur apparition, ou plutôt leur réapparition dans +nos contrées. De plus, Farl est expert en poisons, et a prévu des +antidotes.
— Certes...
— Par contre, tu ne seras pas surpris si, quelle que soit ta décision, je +te décourage très fortement de parler de cette histoire autour de +toi.
— Tu m’as suffisamment payé pour cela, je crois.
— Ça pourrait t’attirer des ennuis.
Zach fronça les sourcils.
— Je dois le prendre comme une menace ?
— Non. Enfin si, mais pas de ma part. Je ne peux pas tout te dire +mais...
Uhr lui jeta un regard, ainsi qu’à Farl.
— ... Disons qu’on a de bonnes raisons de croire qu’un type s’est fait +assassiner pour l’avoir su. +

Zach resta quelques instants silencieux. Puis il prit la parole.
— Si vous en avez les moyens, nous pouvons louer des montures pour +chacun d’entre nous pour aller un peu plus vite. Mais la voiture ne fera +que nous encombrer puisque le trajet se fera hors des sentiers. Par +contre...
Il tourna la tête vers Samantha en fronçant les sourcils. Elle lui jeta un +regard noir. S’il me dit que c’est trop dangereux pour moi, je lui en colle +une, pensa-t-elle.
— Le père Hersur, qui loue des chevaux, ne fait habituellement pas dans le +transport délicat. Il n’a pas de selle amazone. Cela te pose un problème de +monter comme un homme ?
Elle ravala mentalement sa baffe.
— Ah oui, pas de problèmes.
— Parfait. +

Ce type mentait peut-être, mais au moins, il ne la prenait pas pour une +stupide vendeuse de fleurs incapable. +

Uhr +

Ils étaient partis le lendemain matin. Tout était allé très vite. Samantha +avait organisé avec Zach leurs provisions –pour eux et leurs montures– pour +le trajet, Farl avait trouvé une petite tente et des couvertures pour +être un peu plus à l’aise qu’à la belle étoile, tandis que lui-même +s’occupait des chevaux. Il avait toujours été très à l’aise avec ces +animaux. Il n’y avait pas de chevaux dans sa tribu natale, mais petit, il +était fasciné d’observer ces animaux à l’état sauvage, ou montés par +des barbares de tribus rivales un peu plus avancées. Plus tard, à la +capitale, un de ses premiers petits boulots –et un de ses préférés– +avait été celui de garçon d’écurie, et il s’y connaissait plutôt bien +maintenant. +

Il avait choisi deux chevaux de taille moyenne, qui ne payaient pas de +mine mais dociles et endurants. Ils n’avaient pas besoin de pur-sangs +nerveux et rapides pour aller dans la forêt. À ceux-là s’ajoutaient leurs +chevaux d’attelage, deux grands percherons qu’ils avaient achetés à la +capitale. Lui et Samantha montaient l’un de ses chevaux, qui en plus étaient +chargés de la majorités du matériel. Farl et Zach ouvraient la route, tout en + + +discutant. +

— Je me demande, commença-t-il à l’intention du guide, pourquoi nous +sommes passés devant les restes d’un grand feu, sur le sentier.
Zach tourna la tête vers eux, mais Samantha répondit avant lui.
— Ah, ça, je sais. Tu sais, tout le village en parle, je n’ai aucun mérite. La +nuit précédente, une horde de brigands aurait attaqué une noble dame et +un chevalier serait venu à son secours... On raconte qu’il a combattu cent +hommes, durant toute la nuit, et qu’il a pu en venir à bout, gravement +blessé. Au matin, il aurait traversé le village sur sa monture, avec sa dame, +pour la ramener en son château et s’effondrer d’épuisement sur le +pont-levis. +

Zach haussa un sourcil, retenant un sourire.
— Hé bien, commença Uhr. Et les cendres ?
— Les villageois sont venus nettoyer l’endroit et ont brûlé les corps.
— Et quelle est la part de vrai là-dedans, s’il y en a une ?
Samantha sourit.
— Quoi, un brave chevalier contre cent brigands, ce n’est pas crédible ? Je +plaisante. J’ai recoupé quelques informations çà et là... tout n’est pas très +clair. Mais il y avait vraisemblablement une dizaine d’hommes. Et, comme +je te l’ai dit hier Uhr, la noble dame en question n’est autre que Sélène de +Quayle. +

Le demi-sourire de Zach se figea, en même temps que Farl se retournait +pour suivre la conversation.
— ... mais peut-être que notre guide, qui est du coin, est plus au courant +que nous ? reprit-elle.
Le guide en question poussa un soupir et se retourna vers la route.
— J’étais avec les habitants du village quand il a fallu... nettoyer la route. +Ce n’était pas un travail agréable croyez-moi... Je confirme la dizaine, +ajouta-t-il. Et la dame en question est bien la fille du seigneur Assem, +Sélène. Pourquoi ? Vous la connaissez ? +

Uhr hésita. Que pouvait-il lui dire ? Il jeta un regard à Samantha, qui +fit une moue. Apparemment, pour elle, non. Le regard de Farl passa de Zach +à lui, et dans l’autre sens. Puis il haussa les épaules. Il lui laissait la +décision. Après tout, lui donner quelques éléments et observer sa réaction + + +pouvait être intéressante...
— Nous avons quelques éléments qui nous font penser qu’elle pourrait être +liée à cette histoire d’araknes.
Zach lui tournait le dos, semblant observer attentivement la route. Mais il +avait quand même sursauté, et son cheval aussi.
— Euh, je ne sais pas ce qui vous fait penser ça, commença-t-il après un +petit moment de silence. Mais je suis persuadé qu’elle n’a rien à voir +là-dedans.
— Qu’est-ce qui te fait dire ça ? Tu la connais ?
Le guide ne répondit pas tout de suite. Il arrêta sa monture, mit pied à +terre, et désigna un fourré. De là partait un étroit sentier, probablement +taillé par des animaux.
— C’est par là. J’ouvre la marche, suivez-moi.
Puis il se retourna vers lui, hésita, mais ajouta tout de même :
— Quand je suis tombé sur ces créatures, elle était avec moi. Nous avons +fait face tous les deux. +

Il se remit en selle et s’engagea dans les sous-bois. Farl le suivit, puis +Samantha, non sans lui avoir jeté un regard surpris. Il se retrouva à fermer +la marche. Le sentier, qui n’en était pas vraiment un, était bien trop étroit +pour qu’ils puissent marcher à deux de front. Ils avaient convenu de cette +configuration, qui était probablement la meilleure, mais pas pour discuter. +Et Zach était tout devant... +

Samantha se retourna sur sa selle pour lui parler à mi-voix.
— Comment se fait-il qu’il ait été avec elle ? Que vient faire le chevalier +là-dedans ? Je ne comprends plus, ou alors il nous raconte n’importe +quoi !
— Cela expliquerait qu’on ait perdu trace de Sélène aux abords de la +forêt... Si elle a décidé d’engager un guide pour traverser la forêt +discrètement...
— Tu crois qu’on peut faire confiance à ce guide ? Ce n’est pas parce qu’il +est réputé pour ses compétences de pisteur qu’il n’est pas impliqué dans +une histoire compliquée.
— Je n’en suis pas tout à fait sûr, évidemment. Mais dans ce cas, pourquoi +aurait-il accepté de nous emmener là où sont les araknes, maintenant qu’il +sait ce qu’on cherche ?
— Il pourrait nous emmener dans un piège... +

Il resta quelques instants silencieux, se concentrant sur sa monture qui +avait du mal à passer un fossé avec son chargement. Oui, ils étaient +peut-être en train de courir droit dans un piège. Il se rassura en +se disant qu’il avait envoyé un messager avec un rapport précis, +et chiffré, au capitaine Mazrok. Mais il mettrait plusieurs jours à +arriver.
— Sam ?
Elle se retourna à nouveau.
— Oui ?
— Penses-tu que tu pourrais envoyer un message par enchantement au +capitaine ? Ce soir ?
Elle haussa les épaules.
— C’est épuisant, mais s’il le faut... Tu veux que je dise quoi ?
— Lui expliquer brièvement la situation, et où nous allons ? Qu’il s’alarme +de ne pas avoir de nouvelles de nous d’ici une semaine ?
— Il ne retiendra pas tous les détails, dans un rêve, mais je suppose qu’il +saisira l’idée. J’imagine que tu aimerais que j’y mette le visage de +Zach...
— Pourquoi pas.
— Par contre, il va falloir que je m’isole pendant un bon moment... Ce ne +sera pas très discret. On lui dit quoi ?
— On lui dit tout.
— Quoi ? Tu es fou ?
— Il est pour le moment seul avec nous trois. Il saura que nous avons +envoyé ces messages. Que peut-il faire ?
Samantha marqua un temps d’arrêt avant de répondre.
— Tu marques un point. Je ne suis pas sûre que ce soit une très bonne idée +mais... fais comme tu le sens. +

Zach +

Le soir était tombé. Ses compagnons l’avaient aidé à installer le +camp avec une certaine efficacité, ils n’en étaient pas à leur première +expédition dans la forêt, semblait-il. Ils s’étaient installés autour d’un +petit feu de camp pour partager leur repas, et l’ambiance était assez + + +détendue. +

— Penses-tu que nous aurons besoin de monter la garde cette nuit ? +demanda Uhr.
— En cette saison et dans le coin, je m’en passe habituellement. Mais vu les +circonstances...
— Tu fais référence à ce qui s’est passé il y a quelques nuits au abords du +villa
Il soupira. Il aurait voulu éviter de parler de cet incident, mais...
— Oui. +

Uhr semblait avoir senti sa réticence. Il marqua une pause, puis +reprit.
— Écoute, j’ai l’impression que tu ne veux pas raconter ce qui s’est vraiment +passé lors de ta dernière trarsée, avec Sélène.
— Euh...
— Je n’en connais pas la raison, même si j’ai une petite idée là-dessus. Or +il se trouve que savoir ce qui s’est réellement passé nous aiderait +beaucoup dans notre mission... Alors je vais tout te révéler de la +nôtre. Si, après ça, tu estimes toujours nécessaire de garder ton +secret...
Uhr échangea un regard avec Samantha et Farl, qui hochèrent la tête. Puis +il commença son récit. +

Le feu avait sérieusement diminué. Il rajouta machinalement +quelques branches. Quelque chose lui disait qu’ils n’étaient pas encore +couchés.
— Voilà, tu sais à peu près tout ce que nous savons de cette affaire. Quand +à Sélène... Elle fait partie de ces gens qui connaissaient Septim, et qui a +quitté la ville peu de temps avant cet... accident.
— Vous allez m’apprendre que Sélène est une magicienne ?
— Oui, répondit Uhr en soupirant. Tu as deviné, n’est-ce pas ?
— Non. Je le savais déjà, et c’est la raison pour laquelle j’évitais de vous +parler d’elle à la base. +

La surprise se dessina sur le visage de ses trois interlocuteurs. Il étendit +sa jambe droite, et désigna un accroc réparé sur son pantalon.
— Une de ces créatures m’a mordue. Sans ses soins magiques, je serais + + +mort.
Il marqua une pause, puis soupira. Au poins où il en était.
— Et puisque j’y suis, je vais vous raconter le reste. +

Farl +

Le feu s’était presque éteint. Il commençait à être tard.
— Je comprends mieux ton hésitation, commença-t-il. Des créatures +cauchemardesques, une cliente qui s’avère être une sorcière, des elfes +trouvées sur le chemin, et un paladin qui débarque d’on ne sait-où, je pense +qu’il y a de quoi te demander d’aller décuver.
Zach eut un sourire amer.
— Dans le meilleur des cas, oui... Honnêtement, reprit-il, si je ne vous avais +pas rencontrés, je crois qu’au bout d’un moment j’aurai cru avoir rêvé tout +cet épisode.
Samantha hocha la tête.
— J’imagine. Rassure-toi, pour nous cela ne pose pas de problèmes. Nous +croisons régulièrement à la capitale des mages et des elfes, et nous +n’avons rien contre eux. Surtout Farl, ajouta-t-elle en lui adressant un +sourire.
Il haussa les épaules. De toutes façons, ils n’avait pas de nouvelles d’elle +depuis un moment alors... Et puis il n’avait pas envie de parler de tout cela +maintenant, alors qu’ils avaient plus important à s’occuper. De toutes +façons, Zach n’avait heureusement pas relevé cette remarque. +

Zach +

— Avec tout ça, j’ai du mal à imaginer Sélène avoir un rapport avec votre +affaire... Pourquoi aurait-elle voulu traverser la forêt seule avec moi, sachant +qu’elle risquait de rencontrer les araknes ?
— C’est vrai, admit Uhr. Mais d’après ton récit elle n’avait pas l’habitude +d’aller en forêt. Tu aurais eu des doutes si elle t’avait demandé de changer +de route au milieu, non ?
Il se remémora les premiers jours avec la jeune femme. Si en réalité elle +connaissait la forêt, elle était excellente comédienne.
— Elle m’a tout de même sauvé de la morsure de ces créatures, en prenant +le risque de révéler le fait qu’elle est magicienne...
— Elle devait savoir que, sans toi, elle n’avait aucune chance de sortir de la +forêt ? proposa Samantha. +

Il devait admettre que l’argument était plutôt logique. Elle avait eu +l’air aussi horrifiée et effrayée que lui de rencontrer ces créatures. +Mais avait-il vraiment observé ? Il avait vraiment du mal à imaginer +Sélène en complice de meurtre et en comploteuse. Mais si c’était +vrai ?
— Cependant je reconnais, reprit Uhr, interrompant ses pensées, que si elle +savait à propos de ces créatures, il aurait été plus malin d’attendre le convoi +officiel une semaine plus tard. Sauf si elle avait une raison de quitter la +province au plus vite...
— Vous pensez encore sérieusement qu’elle a quelque chose à voir +là-dedans ? insista-t-il.
Uhr haussa les épaules.
— Disons que je reste pour le moment réservé sur ce sujet. +

— En dehors de cela, ajouta Samantha, on peut tout de même noter un +point important : deux autres personnes sont au courant pour les araknes, +les deux elfes dont tu m’as parlé.
— Oui. Et elles se rendent, au château du duc De Vane, pour ce fameux +tournoi de tir à l’arc. Je leur ai conseillé de ne pas passer par les grandes +villes. Pourquoi ? Vous voulez leur parler aussi ?
— Oh, je suis peut-être un peu paranoïaque. Je ne pense pas qu’« on » +cherche à les faire disparaître, mais... penses-tu qu’elles arriveront saines et +sauves à leur destination ?
Zach marqua une seconde de pause, le temps de se remémorer les flèches +acérées de l’une et l’épée tranchante de l’autre.
— Ça devrait aller.
— Cela dit, interrompit Uhr, l’idée d’aller leur parler n’est pas si absurde. +Ne serait-ce que pour les prévenir. Mais nous n’en avons pas le temps, nous +avons une autre mission en vue.
Samantha se leva.
— Oui. En ce qui me concerne, je vais... aller envoyer un message.
Elle jeta un regard à son compagnon, qui sembla comprendre.
— Pardon ? Comment ça ? demanda Zach.
— C’est un peu compliqué à expliquer pour le moment. Par contre, c’est + + +trop épuisant pour qu’en plus de cela, je monte la garde ce soir. Ça ira à +vous trois ?
— Euh oui.
— Je commence, proposa Uhr. +

Il y avait eu un peu trop d’informations ce soir pour qu’il se préoccupe +de ce détail. Il vérifia rapidement l’état du feu et s’enroula dans sa +couverture. Il vit Farl faire de même. Il remarqua alors que le jeune +ménestrel était resté silencieux durant la fin de la conversation, +probablement épuisé lui aussi. +

Farl +

La journée s’était déroulée sans encombres, et ni Zach, ni ses deux +compagnons n’avaient abordé leur affaire compliquée. L’ambiance était +plutôt détendue, et ils avançaient plutôt efficacement, même si les chevaux +n’allaient pas aussi vite que sur un vrai sentier. +

On était en fin d’après-midi. Il commençait à faire chaud, et la petite +rivière qu’ils venaient d’atteindre avait un côté rafraîchissant rien qu’à la +regarder.
— Est-ce la rivière dont tu nous as parlé ? demanda-t-il.
— Oui, répondit Zach. C’est l’un des nombreux cours d’eaux qui se jettent +dans l’Indécise, la fameuse rivière qui serpente dans toute la région. Celui-là +n’a même pas de nom, à ce que je sache. Nous avions traversé par un gué, +qui doit être un peu en amont, suivez-moi. +

À mesure qu’ils avançaient, il avait l’impression que Zach n’était +pas très à l’aise. Lorsqu’ils mirent pied à terre devant le fameux +gué, +

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