X-Git-Url: https://git.immae.eu/?a=blobdiff_plain;f=aventuriers.html;h=4c8b3c57e85358d5006c90610400d8a9eb2df6e8;hb=93f7098cc855af1d119341686a69bb0442a63fcd;hp=d4b97fa2cbb6d7f636af093ccdcd617fbc842a06;hpb=4f1a026a6885241abac93d6a94a389f2adebb634;p=perso%2FDenise%2Faventuriers.git diff --git a/aventuriers.html b/aventuriers.html index d4b97fa..4c8b3c5 100644 --- a/aventuriers.html +++ b/aventuriers.html @@ -7,7 +7,7 @@ - + @@ -494,8 +494,8 @@ class="newline" />— Bonsoir jeunes gens. Nous cherchons un endroit o nous et la damoiselle que nous escortons.
Ils firent un geste de la tête vers le carosse, dont les épais rideaux de velours masquaient l’intérieur.
— Vous pouvez vous rendre à la taverne du village, où vous trouverez de -quoi souper et dormir.
— Vous pouvez vous rendre à l’auberge du renard vif, au milieu du village, +où vous trouverez de quoi souper et dormir.
— Merci. L’un d’entre vous peut-il nous y conduire ?

Zach se porta volontaire, et guida le convoi jusque dans le bourg. En chemin, l’un des soldats l’interrogea :

À cet instant, la tenancière, qui apportait deux nouvelles bières, crut bon de s’insérer dans la conversation.
— Ragan, tu ne parlerais pas de Zach par hasard ?
— Si, précisément. Tu l’as vu récemment ?
— Si, justement. Tu l’as vu récemment ?
Elle posa les boissons sur la table.
— Vous ne le trouverez pas ici. Il est parti il y a quatre jours, accompagner +class="newline" />— Vous ne le trouverez pas ici. Il est parti il y a trois jours, accompagner quelqu’un qui allait dans la seigneurie d’Assem. Il est probablement quelque part en forêt en ce moment.
— Croyez-vous qu’on puisse le rattraper ? demanda Uhr.
Le guide sourit.
— C’est envisageable. Vous avez un véhicule, n’est-ce pas ?
— Une voiture à cheval. Et nous sommes trois. Vous pouvez nous -emmener ?
— Une voiture tirée par deux chevaux. Et nous sommes trois. Vous pouvez +nous emmener ?
— Cela dépend. Savez-vous vous défendre ?
Uhr désigna une grande épée à deux mains, dans un fourreau posé sur -le dossier de sa chaise. Il s’était présenté comme un soldat, mais -n’avait bien sûr rien dit sur les compétences au combat de ses deux -compagnons.
Uhr désigna une grande épée à deux mains, dans un fourreau posé sur le +dossier de sa chaise.
— Ça suffira ? Ou pensez-vous qu’on ait besoin d’autres renforts ?
Le guide haussa un sourcil en estimant la taille de l’épée, puis son regard se posa sur la stature imposante de son interlocuteur, et hocha la tête.
— Ça devrait aller. Trouvez-moi une monture et nous pouvons nous mettre -en route. Enfin, si votre femme et le petit gars qui sont avec vous n’ont pas -peur d’être un peu secoués. Je ne vous cache pas qu’on peut faire de -mauvaises rencontres...
— Si vous savez vous en servir correctement, ça devrait aller. Trouvez-moi +une monture et nous pouvons nous mettre en route. Enfin, si votre +femme et le petit gars qui sont avec vous n’ont pas peur d’être un +peu secoués. Je ne vous cache pas qu’on peut faire de mauvaises +rencontres...
Uhr sourit en regardant ses compagnons, qui s’étaient replongés dans leur assiette.
— Il leur en faut plus que ça pour les secouer, rassurez-vous. +class="newline" />— Il en faut plus que ça pour les secouer, rassurez-vous. +

Farl +

Le sentier était assez large pour y laisser passer la voiture, mais le sol en +terre battue était très inégal et de nombreux trous secouaient régulièrement +le véhicule. Après plusieurs jours, Farl trouvait qu’au final, il était plus + + +confortablement installé sur le siège du cocher qu’à l’intérieur. De +plus, les chevaux n’ayant pas besoin de beaucoup d’indications, il +pouvait sans soucis laisser les rênes sur ses genoux et s’exercer à +la jonglerie, sous les yeux surpris –au moins la première fois– de +Ragan. +

— Je n’aime pas trop ça, pour être franc.
Farl posa ses balles dans sa main gauche, et tourna la tête vers leur guide, +qui chevauchait devant.
— Qu’est-ce qu’il y a ?
— Je vous ai dit qu’on pouvait potentiellement rattraper Zach... Or on ne +va pas tarder à atteindre l’orée de la forêt, et je n’ai vu aucune trace de +lui.
— C’est si inquiétant que cela ?
Il haussa les épaules.
— Soit il a emprunté d’autres chemins que les habituels, ce qu’il fait plutôt +quand il est seul, soit il lui est arrivé quelque chose.
Il marqua un temps d’arrêt, puis continua.
— Il y a plus de brigands qu’avant. Il paraît que les dernières récoles ont +été mauvaises dans la seigneurie d’Assem. Cela plus cette histoire de +tournoi je-ne-sais-plus-où, qui amène plein de nobliaux et bourgeois à +voyager...
— C’est vrai que nous avons été attaqués hier... Mais ils n’ont pas +insisté.
Ragan sourit.
— Nous avons eu de la chance là-dessus. Ils n’étaient que trois, en même +temps. Je ne sais pas ce qui les a le plus impressionnés, Uhr et son épée +presque aussi grande que lui, ou toi en train de jongler tranquillement avec +des couteaux sur le toit de la voiture ? Ils ne doivent pas voir ça tous les +jours...
Farl sourit à son tour sans répondre. Il prit une de ses balles et se mit à +jouer avec.
— Dites-moi, honnêtement, ces fameux couteaux... tu ne sais que jongler +avec ?
— Bah, s’il fallait me défendre, je saurais me débrouiller... +

Le guide laissa passer un silence pendant lequel il regarda le jeune + + +ménestrel, l’imaginant vraisemblablement en train de se « débrouiller » +avec plus de couteaux que ses mains pouvaient tenir face à des adversaires. +Il hocha la tête.
— Avec le bon entraînement, tu serais un vrai tueur...
Farl haussa les épaules en souriant, sans cesser de jouer avec sa balle. Il +n’avait pas tout à fait envie de s’étaler sur le sujet.
— Comment peut-on retrouver le fameux Zach, sinon ?
— Oh, si tout va bien, il sera probablement en train de prendre un verre à +la taverne du village. Ou chez ses parents, comme ça lui arrive de loger +quand il est dans le coin.
— Vous le connaissez bien ?
— Oui, il y a peu de guides qui connaissent la forêt de Sossirant. On se +connaît tous, il nous arrive régulièrement de voyager ensemble. +

Farl n’osa pas demander « Et si tout ne va pas bien ? ». Après tout, +était-ce la peine de s’inquiéter ? Il fallait juste espérer que cet homme soit +à la hauteur de sa réputation et puisse les guider. Et qu’ils trouvent quelque +chose là-bas... +

Zach +

Il y avait comme toujours cinq tables rectangulaires en bois massif, +entourées de bancs et de quelques tabourets, et la porte qui menait à la +cuisine avait encore la trace de brûlure qu’il avait toujours connu. La +lumière –à cette heure, essentiellement fournie par la grande cheminée sur le +côté et les plusieurs lampes suspendues sur les murs– et les odeurs n’avaient +pas changé non plus. Comme si rien ne s’était passé, et rien ne se passait +jamais à l’auberge du renard vif. +

Depuis qu’il avait laissé partir Sélène, le paladin et les deux elfes, il +avait erré dans le village sans trop savoir quoi faire. Le contraste entre +l’extraordinaire qu’il avait vécu dans les derniers jours et la routine paisible +qui régnait ici était tel qu’il se demandait presque s’il n’avait pas rêvé toute +cette aventure. +

Il adressa un geste au propriétaire, qui lui répondit par un sourire. +Le brave homme le connaissait depuis qu’il était un petit garçon, +et à part quelques rides et cheveux plus gris de plus, il n’avait pas + + +changé.
— Zach ! Ça fait un moment ! Viens te joindre à nous !
Il reconnut aussitôt Dacus, un autre guide et ami, installé à l’une des tables. +Il le rejoignit, et salua également deux hommes assis avec lui, habillés en +soldats. Ils lui expliquèrent qu’ils formaient la garde rapprochée d’un riche +seigneur, et qu’ils avaient engagé un guide pour faire lui faire traverser la +forêt avec sa suite.
— Encore quelqu’un qui se rend au tournoi du duc De Vane ? demanda +Zach.
— Oui, notre maître est un excellent archer. Mais comme beaucoup, il +vient au tournoi surtout pour se faire et entretenir des relations, +expliqua l’un des soldats. Après, il ne dédaignerait pas un trophée je +pense...
— Bah, c’est leur jeu, de toutes façons. Et puis, ça nous donne une occasion +de voir du pays, n’est-ce pas ? répondit son collègue.
— Si tant est qu’on n’y reste pas...
Le soldat montra alors son bras en écharpe.
— Oh. Vous avez été attaqués ?
Le guide et les deux soldats hochèrent la tête. Ils racontèrent alors un +affrontement particulièrement violent avec des bandits au milieu de la +forêt.
— J’ai bien cru que j’allais y rester, ajouta le soldat. Je me suis retrouvé à +un moment donné face à trois de ces hommes, et...
— Laisse tomber, c’est pas crédible, ton histoire, tu nous l’a déjà racontée, +interrompit son ami.
Le soldat blessé haussa les épaules et reprit tout de même, en abaissant la +voix légèrement.
— Personne ne me croit, évidemment. Mais j’ai vu certains de mes ennemis +tomber au sol, morts.
— C’était peut-être juste tes compagnons qui sont venus t’aider, que tu n’as +pas vus ? suggéra Zach.
— Aucun d’entre nous n’avait d’arc.
Il sortit de sa poche une flèche brisée qu’il posa sur la table.
— Et je suis sûr que notre maître n’a pas des flèches taillées comme +ça.
Zach fronça les sourcils et observa la pointe. Elle était fine et acérée... il +n’était pas spécialiste en archerie mais il lui semblait bien que les pointes de +flèche standard étaient moins travaillées. Du moins les flèches standard +humaines... Cela pouvait-il être une flèche d’elfe sylvain ? C’était +possible. Il regretta de ne pas avoir observé de plus près les armes +d’Aldariel. +

— Et toi, Zach, qu’est-ce que tu as fait pendant ce temps ?
Il releva la tête brusquement, sortant de sa rêverie. Les soldats avaient +rangé la mystérieuse flèche et s’était reportés sur leur assiette et leur +verre.
— Ah, moi ?
Il réfléchit quelques instants. Il ne pouvait pas tout à fait parler de Sélène... +Enfin si, rien de l’en empêchait, mais il y avait toute une partie qu’il ne +pouvait pas raconter... Et puis la rencontre avec les elfes. Quand bien même +on le croirait, on risquait de se méfier de lui, et de chercher peut-être des +ennuis aux deux jeunes femmes. Et tout ce qui s’était passé ensuite... Il +haussa les épaules.
— Une traversée sans histoire. +

Personne n’insista. Après tout, chacun était libre de raconter ce qu’il +voulait. Il suivit distraitement la suite de la conversation. Il y avait les +interrogations sur le fameux tournoi, et qui y viendrait. Il y avait des +nouvelles de la dernière née de Dacus, qui allait avoir deux ans la semaine +prochaine. Il y avait l’incendie qui s’était déclaré il y a un mois dans la +grange d’un des paysans, et que personne n’expliquait. Il y avait +la cuisine de la taverne, qui était décidément très bonne ce soir, +ou alors c’était parce que la nouvelle serveuse était jolie. Aidé par +le bon repas et le vin, il se laissa bercer par ces histoires, comme +si elles le ramenaient sur terre après une excursion dans une vie +différente. +

Puis, la porte sur l’extérieur s’ouvrit, et parmi les deux silhouettes qui +entrèrent, Zach reconnut immédiatement la première.
— Ragan, quelle bonne surprise ! s’exclama son voisin de droite. +

Samantha + + +

Ils étaient assis, elle et Uhr, sur le petit lit dans leur minuscule chambre. +Le gérant de la taverne leur avait dit qu’il n’avait plus d’autre chambre de +libre, avec tous ces étrangers de passage dans la région. Des tas de papiers +s’étalaient autour d’eux.
— Qu’as-tu tiré d’intéressant sur les... créatures qu’on cherche ? lui +demanda-t-elle.
— Au final peu de choses très précises. Les documents qu’on m’a donnés +sont très vieux, ce sont des récits de voyageurs, ou des traductions +imparfaites de natifs de la région, et il est difficile de faire la part entre +ce qui a été réellement observé et ce qui tient de la légende ou de +l’imagination... Rien sur leur taille, par exemple. Ou plutôt tout et son +contraire ! Heureusement qu’il y a les croquis et notes de Mortag, même si +ce n’est pas complet.
— D’où venaient-elles ?
— Des contrées du sud, où elles vivaient tapies dans des grottes à l’abri de +la lumière vive et de l’humidité. C’est un des points sur lequel les différents +témoignages semblent se recouper, et qui est bon à savoir. On ne sait pas +trop quand et comment elles ont disparu. Ici ils parlent d’une aide divine, +invoquée par des humains locaux, pour s’en débarrasser. Là d’une traque +intensive et sans fin pour les éliminer toutes. Dans celui-ci, les elfes noirs les +auraient domestiqués pour chasser les humains de la région, alors que dans +celui-là, ils les combattaient. Je ne suis pas sûr qu’on puisse se fier à +grand-chose... — Je ne savais pas que les elfes noirs vivaient ici aussi à +l’époque.
— Moi non plus. À vrai dire, il faut reconnaître que nous ne savons pas +grand chose d’eux. Cela ne fait qu’à peine un siècle qu’elfes et humains se +parlent, et encore. D’accord, nous avons croisé un ou deux elfes noirs à la +capitale, mais ce n’était peut-être pas bienvenu de l’aborder et lui +demander les archives détaillées de sa nation... Même Silwë, rappelle-toi. +Elle nous parlait de temps en temps de petits détails personnels de +la vie des elfes, mais n’a jamais dit grand chose de l’histoire des +sylvains. +

Samantha hocha la tête. Uhr reprit.
— Si on en revient à nos bestioles, il semble assez unanime qu’elles ont une +morsure extrêmement venimeuse. Le venin tue lentement –du moins dans le + + +cas d’un gros animal ou d’un humain–, aussi il semble qu’elles ne +s’acharnent pas sur une proie après l’avoir mordue, mais attendent +patiemment pour la ramener dans leur « antre ».
— Charmant programme.
— D’un point de vue très pragmatique, cela veut dire qu’il suffit d’avoir le +bon antidote. Farl a sélectionné plusieurs antipoisons quasi universels, et si +j’en crois certains de ces textes, ils devraient fonctionner.
— Si tout va bien. +

Uhr ne répondit pas. Il se contenta de désigner la pile de feuilles qu’il y +avait sur les genoux de Sam.
— Et toi, qu’as-tu trouvé d’intéressant dans ces dossiers ?
Pas mécontente de changer de sujet, elle sortit un petit carnet sur lequel elle +avait résumé ses notes.
— Comme tu le sais, c’est un dossier avec des informations sur tout un +nombre de mages de la capitale, ayant potentiellement un lien avec Mortag +ou Septim. Et ça en fait des noms...
— C’est le capitaine Mazrok qui t’a donné ça ? Il a obtenu ça d’après ses +dossiers de la garde ?
— J’ai des doutes. Je pense qu’il est allé demandé au recteur de l’université +de magie. Il s’agit essentiellement de données administratives : nom, +adresse, origine, domaine de compétence, ... Mais il y a sur certaines fiches +quelques informations rajoutées à la hâte, d’une autre écriture : il a +peut-être cru bon de rajouter certains points intéressants. Pour nous aider, +peut-être ?
— Pourquoi cet excès de zèle ?
— Peut-être qu’il se méfie de certains mages. Peut-être qu’il veut se faire +bien voir du capitaine Mazrok. Peut-être qu’il a une autre raison, je n’en +sais rien. On ne va pas se plaindre.
— Et qu’as-tu tiré de tout cela ? +

Elle soupira et regarda son carnet.
— Septim est originaire de la région. Du comté de ToDo, qui n’est pas +très loin d’ailleurs. Fils de tailleur, il est parti à l’adolescence à la +capitale pour finir son apprentissage... Et a découvert une autre +voie.
— Original, un mage puissant venu d’un pays où on craint la magie...
— Il n’est pas le seul. J’en ai noté quatre autres comme ça. Il y a +la fameuse Zanakielle, notamment. Ainsi que trois autres mages : +Plimel, Tenedrinn et Sélène. La dernière de la liste est intéressante +aussi.
— Qu’est-ce qu’elle a de particulier ?
— Déjà, son domaine de magie –le soin– est proche de celui de Septim. +D’après une note ajoutée à la hâte, il était même un de ses professeurs. Et +il y a un détail cocasse, que j’ai noté au cas où : Sélène est la fille aînée du +seigneur Assem.
Uhr ouvrit grand les yeux de surprise.
— C’est bien la seigneurie sur lequel on se trouve ?
— Oui... Mais ce n’est pas ça qui me rend méfiante à son sujet. C’est +qu’apparemment, elle aurait quitté la capitale quelques jours avant +l’« incident ».
— Pour où ?
— On ne sait pas évidemment. Ou plutôt, je ne saurais pas si je +n’avais pas eu l’idée de bavarder avec la femme du propriétaire de +l’auberge.
— Comment pourrait-elle savoir ? demada Uhr, de plus en plus +incrédule.
Samantha sourit.
— Parce qu’on l’a vue, pas plus tard que ce matin. Accompagnée d’un jeune +et mystérieux chevalier qui serait aller la secourir alors qu’elle était +prisonnière de brigands dans la forêt.
Il haussa les sourcils.
— Sérieusement ?
— Tu n’as qu’à poser la question, tout le village en parle visiblement. Je +pense qu’on peut être sûr que cette jeune magicienne est dans le +coin. +

Uhr se leva.
— Intéressant. Je ne sais pas si cela peut avoir un rapport avec notre +histoire, mais... J’entends du bruit en bas, la salle à manger doit être +pleine. D’après Ragan, nous avons de bonnes chances de croiser le +fameux Zach ici. Farl est peut-être même déjà en bas. Et puis j’ai +faim. + + +

Uhr +

Lorsqu’ils entrèrent dans la pièce, ils constatèrent qu’il y avait pas mal +d’animation dans la petite salle. À une grande table près de la cheminée +étaient attablés une petite dizaine d’hommes, à la conversation animée et +joyeuse.
— Allez, Farl, montre-nous.
C’était la voix de Ragan, au milieu des rires. Le jeune homme se leva de sa +chaise, en souriant, prit trois couverts en bois et se mit à jongler avec, sous +les applaudissements de son public improvisé. Ce Farl, il ne manquait pas +une occasion de se donner en spectacle, même –et surtout– improvisé. Ce +soir, il avait un certain succès, y compris auprès de la jeune serveuse qui +venait de lui apporter une assiette supplémentaire avec un grand +sourire. +

Il jeta un œil à Samantha, qui semblait avoir suivi son regard.
— Bah, laissons-le s’amuser. Qu’est-ce qu’il pourrait lui arriver de grave +après tout ?
Ils s’assirent à une petite table de libre et commandèrent à manger. Alors +qu’ils se demandaient comment ils allaient bien aborder le fameux guide, un +homme s’approcha de la table. +

— Je suis Zach. J’ai cru comprendre que vous me cherchiez ? +

L’homme était vêtu de façon semblable à ses compagnons. Pantalon de +toile et bottes de cuir solide, tunique de lin grise, usée et délavée de façon +non-uniforme, comme s’il portait régulièrement un autre vêtement sur son +torse. Il remarqua aussi l’usure caractéristique sur le côté gauche de sa +ceinture, celle que forme, avec le temps, un fourreau d’épée qui y pend +régulièrement. Pourtant, sa carrure état moins imposante que celle +Ragan et il paraissait nettement plus jeune. Sa réputation était-elle +surfaite ? +

— Effectivement. Asseyez-vous en face. Mon nom est Uhr, voici ma femme +Samantha. Nous cherchons quelqu’un pour nous emmener dans certaines +régions peu connues de la forêt de Sossirant. Il semble que vous soyiez le +seul à pouvoir le faire ?
Zach s’assit en souriant.
— Sans vouloir me vanter, il me semble que si je ne peux pas vous y + + +conduire, alors aucun humain ne le peut. Par quel moyen ? À pied ? +

Au fur et à mesure que la conversation s’engageait sur des détails +pratiques –prix, moyen de transoprt, matériel–, Uhr commençait à +avoir confiance. Il savait de quoi il parlait. Et après tout, ce ne sont +ni l’âge ni les gros bras qui font un bon guide. Il sembla un peu +hésitant quand à la venue potentielle de Samantha, mais un regard +foudroyant de celle-ci le convaincut rapidement. Lui même avait +vaguement essayé de la dissuader de venir jusque dans la forêt –elle +pourrait rester dans la ville et apprendre des choses–, mais vaguement +seulement. Il savait bien que lorsqu’elle avait décidé de faire quelque +chose, la déesse elle-même ne l’arrêterait pas. Alors quelqu’un comme +Zach... +

Il craignait un peu qu’il ne leur pose un peu trop de questions sur le but +de leur voyage –s’il prévoyait de lui en parler une fois la ville quittée, il ne +voulait pas détailler tout de suite–, mais s’il fronça légèrement les sourcils à +leur explication vague de recherche de ruines d’anciennes civilisations, il s’en +contenta. +

Lorsqu’Uhr pointa, sur la vieille carte du guide, les zones qu’il comptait +explorer, celui-ci commença par hocher la tête, puis se figea l’espace d’un +instant.
— Par contre, je n’emmène personne ici.
Uhr et Samantha le regardèrent, surpris, puis leur regard se porta à +nouveau sur la carte, sur la zone qu’Uhr pointait. Elle n’était pourtant pas +si éloignée que cela de la ville, même si elle semblait très peu fréquentée au +vu de l’absence de chemin qui la parcourait.
— Ailleurs si vous voulez, même là, ajouta-t-il en pointant une zone bien +plus éloignée.
Le visage de Zach s’était fermé, et était devenu indéchiffrable. Il +reprit, alors que Samantha ouvrait la bouche pour lui demander +pourquoi.
— Les autres guides ne vous emmèneraient pas parce qu’ils ne connaissent +pas cette région. Je ne vous y emmène pas parce justement je la connais. Et +je tiens à ma peau et je suppose que vous aussi.
Il se leva brusquement.
— Attendez. Et si nous y allions avec une meilleur escorte, peut-être +que...
— Si vous me trouvez une armée, peut-être, coupa-t-il.
Il se dirigea vers le comptoir et fit un geste au tenancier, sans dire un mot. +Uhr et Samantha se regardèrent, surpris. +

— Hé, Zach, tu ne vas pas nous quitter comme ça quand même !
C’était la voix d’un de ses compagnons de table, qui l’appelait d’un +air enjoué. Le jeune homme sembla hésiter, puis se retourna vers +lui.
— Le p’tit gars a encore des trucs à nous montrer, je suis sûr que ça va te +plaire !
Il pointa du doigt l’autre côté de la table, où Farl faisait tenir un large +couteau en équilibre sur son nez, sous le regard amusé des autres convives. +Zach sembla hésiter, regarda le jeune ménestrel quelques instants, puis +sourit en s’approchant de la table.
— Je peux essayer ? +

Samantha +

Ils restèrent silencieux quelques instants, regardant le jeune homme +quitter la table. — Qu’est-ce qui lui a pris ? murmura Uhr.
— Je ne sais pas. Il s’est vraiment braqué d’un coup... Tu crois qu’il +faudrait le rappeler, essayer de lui parler ?
— On peut. Mais j’ai l’impression qu’on a peu de chances. Et sans lui, +impossible de mener à bien notre mission. Mmmh...
Il s’interrompit pour réfléchir. Pendant ce temps, Samantha tourna son +regard vers l’autre table. Le jeune guide avait rejoint ses compagnons, parmi +lesquels se trouvait Farl... +

Zach s’était pris au jeu. Il avait récupéré le long couteau et lui aussi le +faisait tenir en équilibre sur son nez. Il se débrouillait plutôt bien, et à en +voir la réaction de la petite foule, ce n’était pas la première fois +qu’il jouait à ce genre de jeu. Et ce soir-là, il avait un concurrent +sérieux... +

Farl lui jeta un œil interrogateur. Elle haussa les épaules en faisant +la moue. Une fraction de seconde plus tard il s’était de nouveau + + +tourné vers son nouveau compagnon pour lui proposer un nouveau +défi. +

— La zone dans laquelle il refuse d’aller se recoupe en partie avec celle +qu’on devait explorer. On peut commencer par aller voir le reste, et +peut-être que d’ici là... commença Uhr
Samantha l’interrompit en souriant et en posant sa main sur la sienne. — +Pour le moment, je serais d’avis de laisser faire Farl, il a l’air mieux parti +que nous pour lui parler...
Tous deux tournèrent la tête vers la grande table, où les discussions et les +rires allaient bon train. Il sourit à son tour.
— Tu as peut-être raison. Attendons demain. +

Zach +

Il secoua la tête tout en foulant l’herbe humide de rosée, comme si cela +lui permettait de chasser ces pensées qui se bousculaient. Il n’aurait +peut-être pas dû... Il y avait un certain nombre de choses qu’il n’aurait pas +dû faire hier soir. +

Boire, pour commencer. Ou tout du moins pas autant. Mais lorsqu’il y +pensait, ce n’était pas la première fois qu’il se faisait cette réflexion, et il +avait beau tenter de se persuader du contraire, une petite voix lui disait que +ça ne serait pas la dernière. Au moins cette pensée-là était habituelle, elle +en était presque rassurante au fond.